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vendredi 22 décembre 2017

La France de Macron a-t-elle une politique industrielle (1)? Orange et ADP

Il semble que le gouvernement assiste  sans trop s’émouvoir à la disparition ou au passage sous pavillon étrangers de fleurons français comme Alstom énergie (une industrie stratégique pour le nucléaire, entres autres), Galderma (dermatologie), Mérial (santé animale)- cf mes précédents blogs. S’agit-il d’une absence d’intérêt et de compréhension des enjeux industriels de la part de dirigeants qui ne connaissent que la finance ? D‘une manifestation de plus de la secte libérale, incapable de comprendre que la localisation des centres de décision et de recherche, oui ça a une importance pour tout le patrimoine industriel d’un pays ? Quelques exemples plutôt inquiétants, dans un premier temps, et dans un second blog, l’exemple d’Airbus, qui autorise peut-être quelque espoir.

Orange trop riche, pas assez stratégique ! et pourtant un acteur essentiel du service public du numérique (cf. Mariane, 1 décembre 2017)

A Orange, beaucoup spéculent sur une cession partielle des 20% détenus par la puissance publique, éventuellement par l'intermédiaire de la BPI. D(ailleurs, le PDG Stephane Richard ( le mis en examen de l’arbitrage Tapie, indice potentiel de son savoir-faire industriel) a prévenu ses salariés qu’Orange n’avait rien à craindre d’une privatisation et trouverait sans mal un opérateur qui défendrait ses intérêts)… Il ne s’agit là que de la mise en musique de propos inquiétants d’Emmanuel Macron en avril 2017 : «  Orange n’est ni une entreprise du secteur nucléaire ou de la défense, ni une entreprise assurant un service public en monopole »…

Les cadres et salariés d’Orange ont un avis différent et plus autorisé. En septembre, la CFE-CGC d'Orange et l'Association pour la défense de l'épargne et de l'actionnariat des salariés (Adeas) ont écrit au Premier Ministre pour lui faire part de leur préoccupation : « Orange est un acteur clé de la souveraineté numérique de la France. Orange est également présent dans la cybersécurité, avec Orange Cyberdéfense. Elle pose des câbles sous-marins, avec Orange Marine, et investit massivement en Afrique. » . (Il est à remarquer que l’attitude de plus en plus revendicatrice de la CGC en tous domaines traduit probablement une rupture de plus en plus profonde des cadres avec la gouvernance financière des entreprises, ce dont on ferait bien de s’inquiéter)   

Et surtout Orange réalise 80% du câblage du territoire français en fibres optiques ( et le mirobolant Free vient de renoncer à ses engagements en ce domaine, tant pis pour ceux qui y croyaient). Qui pour assurer à sa place ses missions dans un domaine essentiel pour la compétitivité et l’égalité des territoires en France, dans ce qui constitue véritablement un service public du numérique ? Là encore, la secte libérale nie les faits et compromet l’avantage que constitue une entreprise forte d’Etat pour assurer un service public garantissant l’accès aussi égal que possible de tous au numérique et l’existence de plus en plus insupportable et économiquement handicapante de zones dépourvues d’accès internet est déjà un résultat  du renoncement à maintenir un service public des telecoms et de l’introduction  d’une libre concurrence libérale dans un domaine où elle ne peut être effective. En effet, là encore, sauf à pratiquer le déni des faits caractéristique de la mentalité sectaire, le libre concurrence ne fonctionne pas lorsqu’il s’agit de faire bénéficier l’ensemble de la population, avec une exigence d’égalité, d’un service exigeant des investissements et une recherche technologique lourdes. Cela ne signifie évidemment pas que pour autant certains secteurs ne doivent pas être ouverts à la concurrence : personne ne propose de revenir à un opérateur téléphonique ou à un fournisseur d’accès internet unique…mais existence d’un opérateur historique, bien gérée, constitue un atout et non un handicap…

Privatisation des Aéroports : le précédent des autoroutes n’a pas suffi ?

Face à la possible privatisation des aéroports, en particulier, ceux de Paris, le PDG d’Air France Jean-Marc Janaillac, qui lui, est un industriel et non un financier, a réagi vivement en demandant à l’Etat de ne pas s'en tenir uniquement à "la logique budgétaire" dans sa décision de privatiser ou non des aéroports parisiens. Dans une tribune libre au Monde, qui constitue presque un acte inédit de résistance de la part d’un président d’une entreprise nationale, il pointe exactement les dangers des vues uniquement financières et à court termes des politiques de gouvernants actuels :

« Une privatisation éventuelle de Paris Aéroport ne saurait simplement se concevoir dans une logique budgétaire. Elle devrait avant tout poursuivre l'ambition de doter le transport aérien français, dont le groupe Air France-KLM constitue une composante majeure, d'un outil aéroportuaire efficace et de qualité", écrit M. Janaillac dans une tribune publiée dans Le Monde. Selon lui, "en matière d'organisation, il est essentiel de privilégier un schéma dans lequel l'Etat resterait propriétaire des aéroports et en confierait simplement la gestion en concession à une société privée"."Cela permettrait de prémunir les compagnies aériennes contre l'acquisition des terrains, aujourd'hui propriété de Paris Aéroport, par un acteur privé qui pourrait négliger l'essor de l'aéroport au bénéfice d'autres intérêts plus rémunérateurs", "une privatisation ne saurait ainsi se concevoir que dans le cadre de conditions précises, équilibrées et protectrices des intérêts des compagnies aériennes qui évoluent dans un environnement extrêmement concurrentiel".


Encore une fois, il faut être un membre singulièrement fanatique ( bouché, même) de la secte libérale pour ne pas comprendre comment la privatisation d’installations publiques, payées par la puissance publique, bénéficiant d’un monopole de fait (vous la voyez la libre concurrence dans l’ouverture d’aéroports …ou d’autoroutes ?), ayant un impact important sur les activités économiques et l’attractivité d’un territoire, devant réaliser des arbitrages importants entre parties prenantes dans l’intérêt public, bénéficiant d’une rente de situation (par exemple, les terrains) qui résultent d’une mission de service public… ne peut être laissé au libre jeu de la concurrence et des intérêts privés. Point . Et dans le cas des aéroports, cela signifie en effet, comme l’écrit M. Janaillac, que l'Etat reste propriétaire des aéroports.

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