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samedi 19 février 2011

Pour l’élitisme républicain et l’égalité, défendre les concours !

Pour l’élitisme républicain et l’égalité, défendre les concours !

Le système des concours et grandes écoles a subi ces derniers mois de violentes attaques de la part de la droite sarkozyste, qui ont culminé avec la démagogie la plus basse lors de l’émission Face aux Français  ( 24 janvier 2010) et les propos d’un peu digne Président de la République moquant les « bêtes à concours » comme il s’était moqué de l’étude de la Princesse de Clèves.
Nous savions déjà dans quel mépris le Président tenait le travail et la réussite scolaire- il suffit de voir comment il se vante de son peu glorieux parcours scolaire et de celui de ses enfants, qui ne les empêche pas de prétendre aux plus hautes –ou aux plus rémunératrices fonctions. On a bien compris qu’il privilégie la réussite par la connivence à la réussite par le mérite, la cooptation des riches à la méritocratie, la promotion des copains à celle d’une élite républicaine. C’est une grande première, et très certainement une rupture.  Jamais on a méprisé, à la tête de l’Etat, l’enseignement, les enseignants et les élèves ; et la culture et les chercheurs aussi. Jamais nous n’avions eu en France un président qui méprise l’intelligence ; n’en doutons pas, elle se vengera, elle se venge déjà…
Les orchestres embauchent les premiers prix de conservatoire, on envoie aux jeux olympiques ceux qui se sont distingué dans de multiples compétitions (traduire concours). Mais pour ce qui est vraiment  important, pour les postes de pouvoir dans les secteurs public et privés, nul besoin de concours d’où pourraient sortir, sait-on jamais, des bêtes à concours issues d’on ne sait où ; seule la cooptation parmi les amis ou les parents assure la nécessaire fidélité et conformité aux intérêts des puissants.
Le concours, s’il n’est pas parfait, a toujours été identifié comme l’instrument privilégié de la promotion des talents contre les privilèges de la naissance. Ce fut l’une des grandes conquêtes de la Révolution Française, confortée par Napoléon avec l’instauration des premières grandes écoles et ce mot d’ordre : “Je veux que le fils d’un cultivateur puisse se dire : je serai un jour cardinal, Maréchal de l’Empire ou ministre”, puis étendue par les différentes républiques jusqu’à nos jours. Les Grandes Ecoles et leurs concours sont les héritiers de cette histoire et c’est cela que Sarkozy veut jeter à bas.
Prenons l’exemple de l’ENA, et donc d’élèves qui, lorsqu’on parle de pouvoir, savent de quoi il s’agit. La première attaque de l’administration sarkozyste contre les concours, passée à peu près inaperçue, a consisté en la suppression du concours de sortie de l’ENA. Et bien évidemment, ce sont les élèves d’origine les plus modestes de cette école qui ont protesté. Ils ont fait valoir que le concours leur permettait, s’ils étaient bien classés, de prétendre aux affectations et aux corps de l’Etat les plus prestigieux, alors que le système proposé pour le remplacer, la cooptation par les administrations, de logique très sarkozienne, privilégiera à leur détriment ceux qui ont les bonnes relations.
La proportion de boursiers parmi les élèves des Grandes Ecoles est en moyenne de 20% ; elle est la même que dans l’Université au stade maîtrise, à laquelle il faut la comparer. Veut-on pousser plus loin la comparaison ? Pour certains masters, Dauphine va instaurer des droits d’inscription de 4000 euros par an ; Sciences Po Paris, dont le directeur Richard Descoings mène avec une démagogie sarkocompatible consommée le combat contre les concours des Grandes Ecoles fait payer certains masters jusqu’à 12500 euros. Les Grandes Ecoles scientifiques, elles, sont généralement gratuites, voire rétribuent leurs élèves (ENS, Polytechnique)…
 Les Grandes Ecoles ne sont donc pas plus discriminantes socialement que les Universités. Peut-on se contenter de cela ? Non, car dans un passé encore récent, elles l’étaient moins – le pourcentage d’élèves d’origine populaire était plus proche de 30% dans les années 50.
Mais cela ne passe sûrement pas par la suppression ou le contournement des concours.  La cause principale de cette  régression, c’est l’abandon par l’Ecole Publique d’exigences qui permettaient aux bons élèves, quelle que soit leur origine sociale, l’acquisition d’un savoir solide. C’est donc cela qu’il faut rétablir, et permettre à tout élève doué et travailleur, dans tout collège et tout lycée, à la ville, à la campagne et en banlieue, d’acquérir les bases qui lui permettront de préparer utilement ces concours. C’est une politique juste et ambitieuse, et le contraire que celle que l’équipe Sarkozy met actuellement en place, politique de restriction d’enseignement comme il existe une politique de restriction des soins.

Ajoutons que ce Président et cette majorité sont passés maître dans une technique écoeurante, malhonnête et dangereuse, celle qui consiste à opposer les uns aux autres. On fait ainsi passer l’abandon de l’histoire en terminale scientifique en affirmant vouloir réévaluer les filières littéraires, on démantèle le CNRS en prétendant agir pour la recherche universitaire, on veut supprimer la filière des grandes écoles en opposant les « bêtes à concours » aux autres élèves.

Encore partout en France, des enseignants s’efforcent de développer au mieux les savoirs et capacités de leurs élèves, des élèves travaillent dur, parce qu’ils aiment apprendre,  et parce qu’ils savent que la culture, les savoirs, la capacité de travail et l’amour du travail bien fait seront leurs meilleurs atouts dans la vie. Il ne faut pas laisser ce Président et cette majorité les désespérer. Il est donc plus que temps que l’opposition, en liaison avec les enseignants, les parents d’élèves et les étudiants réfléchisse à une nouvelle ambition pour l’enseignement et la recherche, si méprisées par l’actuel président.



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