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dimanche 30 juin 2013

Art et sciences à la Fondation EDF


La Fondation EDF (rue Récamier) a déjà proposé quelques expositions croisant art et sciences, mais la dernière, En vie, aux frontières du design  est une des plus novatrices et des plus réussies, et sans équivalent en France.
« Imaginez un monde dans lequel la manufacture traditionnelle est remplacée par la fabrication biologique : les plantes font pousser des produits de consommation, et les bactéries sont génétiquement reprogrammées pour devenir des raffineries de biocarburant ou des fabriques de soie ; de véritables ‘usines’ du vivant. Ce nouveau monde existe déjà en laboratoire, et un nombre grandissant de designers et d’artistes commencent à s’en inspirer, soit en se rebellant contre ces techniques transgénique, soit en explorant le potentiel de l ‘ingénierie de la vie. Ainsi, un nouveau genre de design est en train de naître » Carole Collet, commissaire de l’Exposition
 Elle s’organise autour de quatre thématiques :
 1 – Les plagiaires: La nature en tant que modèle, ou le biomimétisme. L’une des œuvres les plus réussies, Radiant soil (Philip Beesley) propose une sorte de forêt composée de dizaines de milliers de composants légers, conçus numériquement et équipés de microprocesseurs, de matériaux polymériques élaborés, d’alliages à mémoire de forme ; des plumes bougent en réponse aux mouvements des visiteurs, entretenant la croissances de cellules biologiques ou chimiques
2 – Les nouveaux artisans : La nature en tant que collègue de travail
Ces designers et architectes collaborent avec la nature à l’état « naturel ». Ils travaillent avec des abeilles, des champignons, des bactéries, des algues ou des plantes afin de développer de nouvelles techniques pour fabriquer des produits de consommation, par exemple, entre autres surprises, des textiles interactifs fusionnant  une technologie artificielle intelligente (des matériaux à mémoire de forme) avec du bois et des fibres naturelles afin d’imiter le comportement d’une pomme de pin et réagissant en fonction des changements de température ou de l’humidité (Elaine Ng Yan Ling)
3-Les bio-hackers : La nature génétiquement reprogrammée, dite « synthétique »
E. chromi est peut-être le projet le plus fascinant de l’exposition . Durant l’été 2009, sept étudiants de l’Université de Cambridge (artistes et scientifiques) ont développé une bactérie qui sécrète des pigments colorés, visibles à l’œil nu. Ils ont conçu des séances d’ADN standardisées (BioBricks), et les ont introduites dans la bactérie E. coli. Chaque part de BioBricks contient des gènes issus d’organismes existants, permettant aux bactéries de produire une gamme de couleurs : rouge, jaune, vert, bleu, brun ou violet. En dehors de produire des composés et des compositions colorés inédits, les nouvelles  E. chromi  pourrait être programmées pour faire des choses utiles : indiquer si une eau est potable ou non (au contact de l’eau la bactérie deviendrait rouge, ce qui signifierait une présence toxique). Elles pourraient être aussi ingérées pour servie de diagnostic de maladies intestinales.  (Alexandra Daisy Ginsberg and James King)
4 – Les nouveaux alchimistes : La nature hybridée (fusion de la biologie, la chimie, la robotique et les nanotechnologies pour créer de nouveaux organismes hybrides) et 5 – Les agents provocateurs, dont le travail de prospective encourage un débat sur les questions éthiques liées à ces nouvelles relations possibles avec la nature et la notion d’écologie high-tech Ils combinent le vivant avec le non-vivant. Par exemple, lorsque des nanoparticules magnétiques sont absorbées par les racines, une plante devient contrôlable par un aimant externe et sa croissance peut être dirigée dans une certaine mesure ; ou, plus inquiétant peut-être, des cactus génétiquement manipulés pour exprimer des protéines de kératines ( protéine de structure des cheveux humains)
Une exposition audacieuse donc, et réellement innovante, et qui a eu l’immense mérite de faire travailler ensemble scientifiques et artistes. Et un regret : la quasi-absence d’artistes, de designer, de scientifiques français. Et une bonne raison ; ces interactions semblent se produire beaucoup plus facilement dans les Universités américaines, canadiennes, chinoises, que dans nos campus mal conçus et nos Ecoles trop compartimentées. Peut-on rêver que chacun de nos Grands Instituts de recherche, chaque Pôle Universitaire soit incité à accueillir dans ses laboratoires un certain nombre d’artistes ?

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