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mercredi 2 septembre 2015

La biologie marine, un atout pour la diplomatie scientifique de la France


Bel article dans Le Monde (5 août 2015) de cet été sur la Station Biologique de Roscoff, un fleuron du patrimoine historique français – un patrimoine quelque peu inconnu et négligé, pourtant prestigieux. Elle a été fondée en 1872 par le Pr. Lacaze Duthier, dans une belle bâtisse du XVIIIème siècle, la maison Corbière  – à l’époque les scientifiques étaient choyés - et  s’occupait de zoologie marine. Elle est un exemple d’un programme ambitieux d’étude marine lancé par plusieurs savants, dans toute l’Europe, entre 1859 et 1900 ; la France, en raison de la variété des mers qui bordent ses côtes et avec la volonté de jouer un rôle scientifique important en ce domaine, a eu une politique particulièrement ambitieuse avec la construction d’environ une douzaine de stations : Concarneau, Arcachon, Endoume, Banyuls, Wimereux, Sète, Tatihou (dans le Cotentin), le Portel, La Seyne sur Mer, Monaco, Monaco. Et déjà, autour de cette biologie marine, une ambition scientifique internationale : la station de Villefranche sur mer, fondée en 1882, est confiée en 1884 au biologiste russe Alexis de Korotneff et devient la première station russe de biologie marine, dépendant de l’Université de Kiev.

Un des points fort de la station biologique marine de Roscoff  est la recherche sur les algues, un sujet naguère considéré comme vieillot et peu excitant, maintenant en pleine explosion grâce à la génomique, et les espoirs d’utiliser les algues pour produire des carburants : « Dominées par des études très naturalistes, les algues sont maintenant abordées comme un matériel vivant qui apporte des connaissances nouvelles » (Philippe Potin, Directeur de recherche). Et ce que la génomique permet de faire de ces très vieux végétaux est vertigineux : « Nous avons accès à des lignées évolutives que les milieux terrestres n’ont pas, nous pouvons remonter dans l’évolution jusqu’à 1500 millions d’années. Et les environs de Roscoff sont particulièrement adaptés : on y trouve 700 espèces d’algues : laminaires, fucus, porphyra ou nori, ulva, maërl…). En jouant simplement de cette variété biologique, des conditions de culture, des aliments, et, de façon plus sophistiquée du génie génétique, il est possible de transformer certaines algues en véritables réacteurs chimiques capables de fournir des molécules variée, originales, élaborées.

La station de Roscoff est en train de retrouver la notoriété internationale qui fut celle des stations biologiques marines françaises. Elle compte trois cent permanents, avec deux unités de recherche mixtes CNRS université, et une équipe franco-chilienne, autre très grand pays maritime, avec 600 km de façade maritime, s’étendant d’un climat tropical à l’Antarctique. La SBR collabore aussi avec l’Inde, où elle est partie prenante dans la création du premier institut indien de biologie marine de standard international, et également avec la Chine, pour une entreprise industrielle de culture de l’algue brune saccharina japonica. Une ambition retrouvée, un atout pour la diplomatie scientifique de la France, un moment chère à Laurent Fabius ( mais aujourd’hui négligée au profit du tourisme ?).

L’article du Monde oublie d’ailleurs de mentionner cet autre grand succès de la SBR, la roscovitine, dont le nom indique assez la provenance, molécule marine naturelle découverte par des chimistes de Roscoff et actuellement développée, ainsi que certain derives, dans le traitement de cancers résistants (cancer du poumon à cellules non petites) et d’autres pathologies ( elle appartient à la classe en plein développement des inhibiteurs de kinase et est développée par Manros Therapeutics
 
 

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