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jeudi 24 novembre 2016

L’écrasement des classes moyennes engendre des monstres politiques (2)

Un impôt spoliateur , contre la  nécessaire politique du logement

Dans un précédent blog (Donald Trump et Piketty complices, ou l’écrasement des classes moyennes engendre des monstres politiques), j’évoquai à quel point les analyses de M. Piketty mais les solutions qu’il propose désastreuse. Revenons plus particulièrement sur cette idée baroque d’un impôt frappant les propriétaires immobiliers sur  les loyers fictifs qu’ils pourraient toucher de leur maison ou appartement ; mesure d’ailleurs également préconisée par le Conseil d’analyse économique (CAE), organisme rattaché à Matignon… Même si le gouvernement, en particulier le ministre des finances, M. Sapin ont rapidement et fermement évacué l’idée, le danger n’est pas mince, à force de les évoquer fréquemment, de voir ces projets se réaliser.

Remarquons que les propriétaires sont déjà imposés sur leurs biens par la taxe d’habitation (laquelle tant à augmenter beaucoup et arbitrairement) ; s’ils décident de vendre leur logement, ils seront imposés sur les plus-values. Pour partie, ce nouvel impôt serait bien une forme d’expropriation, car il fera baisser brutalement et significativement le prix des biens immobiliers ; il supprime toute incitation à la propriété, sanctionnant les Français qui font le choix d’investir dans ce qui constitue d’abord leur épargne de précaution favorite, les classes moyennes (62 % des Français se déclarent propriétaires, parmi lesquels 36 % n’ont plus de prêt à rembourser et 26 % sont en cours d’accession à la propriété). Elle est confiscatoire, car enfin la propriété est fille du travail, et a donc déjà fait l’objet d’un prélèvement ; fille de son propre travail ou du travail des aïeux. 
    
 Et où s'arrêter dans le raisonnement ? Par exemple, pourquoi ne pas taxer demain l'avantage lié à la possession d'une voiture, à la mesure de ce qu'il faut débourser pour en louer une ?
Et surtout, la France manque de logements, comme en témoigne le nombre ahurissant des mal logés ou des pas logés du tout ; comme en témoigne aussi le poids du logement en France dans les dépenses contraintes en France, dépense sans cesse croissante (passée de 14% à 26% en France de 1998 à 2005 et qui n’a cessé de s’accroître depuis) et dépense qui frappe encore plus les familles les moins aisées (48% de dépenses contraintes pour les 10% les moins riches contre 27% pour les 10% les plus riches). C’est dire que la priorité c’est de construite, construire, construire ou rénover… Et pour construire, il faut encourager la propriété immobilière. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’avec la loi Allur qui bloque et limite les loyers va en sens inverse de ce qu’il faudrait, et que l’impôt sur les loyers fictifs de M. Piketty  et d’autres aggraverait encore considérablement la situation.

Vive la propriété immobilière- la vision positiviste

On aperçoit dans une certaine gauche, qui semble perdre pied, une multiplication d’attaques récurrentes et de plus en plus radicales contre la propriété et l’héritage. On en connait le terme, soit le retour improbable des pires totalitarismes communistes, soit plus probablement ceci : l’écrasement des classes moyennes engendre des monstres politiques. Rappelons tout de même que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 considère la propriété comme un droit naturel  et inaliénable de l'Homme. Il n’ y a eu vraiment que les formes  communistes les plus extrémistes pour remettre ainsi radicalement en cause ces deux piliers (propriété et héritage) de la société ; et, pour mémoire, la plupart des socialistes et même les libertaires comme Proudhon ont fini par affirmer « la propriété c’est la liberté », la vraie protection du citoyen.

Si une gauche en déshérence recherche une inspiration intellectuelle, peut-être devrait-elle se tourner du côté du positivisme. Pour Auguste Comte, la propriété individuelle est un droit nécessaire, sans lequel il n’est pas de progrès possible, mais aussi un droit collectif car nécessairement garanti par la société. Le droit de propriété est donc certainement un droit d’user, mais pas d’abuser, contrairement aux conceptions libérales. Citations :

« Le positivisme voit dans la propriété une indispensable fonction sociale, destinée à former et à administrer les capitaux par lesquels chaque génération prépare les travaux de la suivante. Sagement conçue, cette appréciation normale ennoblit sa possession, sans restreindre sa juste liberté, et même en la faisant mieux respecter. (Système de Politique Positive, t.1, p. 156)

  « On peut même faire aux communistes un reproche plus grave, sur l’insuffisance directe de leur instinct social. Car, cette sociabilité dont ils sont si fiers, se borne à sentir seulement la solidarité actuelle, sans aller jusqu’à la continuité historique, qui constitue pourtant le principal caractère de l’humanité… Ils apprécieront alors l’importance de l’hérédité, comme mode naturel selon lequel chaque génération transmet à la suivante les travaux déjà accomplis et les moyens de les perfectionner ». (Système de Politique Positive, t.1, Société Positiviste, Paris, 1929, p. 160).

« Aucune propriété ne pouvant être créée, ni même transmise par son seul possesseur, sans une indispensable coopération publique, à la fois spéciale et générale, son exercice ne doit jamais être purement individuel. Toujours et partout, la communauté y est plus ou moins intervenue, pour le subordonner aux besoins sociaux. » (Système de Politique Positive, t.1, Société Positiviste, Paris, 1929, p. 155).

Ainsi entre communisme et libéralisme se définit un socialisme réformiste appuyé sur une doctrine certaine, précise, organisatrice, relative (qui renonce aux absolus théologiques ou métaphysiques)

Cf. Le socialisme d'Auguste Comte : aimer, penser, agir au XXIe siècle, Eric Sartori, L'harmattan


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