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dimanche 10 mars 2019

Europe et travailleurs détachés : L’enfumage macronien


Travailleurs détachés : la marée de l’exploitation sans frontières

Travailleurs détachés : on se souvient comment ça a commencé : 1995 : l’arrêt Bosman qui conteste les quotas limitant à 3 le nombre de joueurs étrangers ressortissants de l'Union européenne dans une équipe. Puis la dérive ultralibérale de la Commission Européenne, de l’Eurokom : la directive Bolkenstein, en 2006 facilitant  la mobilité des travailleurs (une vieille obsession de la secte libérale- un « marché du travail » le plus ouvert, le plus large et le plus dérégulé possible).  le principe était, est, toujours le suivant : « Pour ne pas entraver la libre prestation de services des entreprises, l’Union ne garantit aux travailleurs détachés qu’une protection « minimale », inférieure à celle de la main-d’œuvre locale au motif que le travailleur détaché n’a pas vocation à s’intégrer de façon permanente au marché du travail du pays d’accueil. Ce beau et magnifique principe libéral était, dans sa première formulation,  une conséquence assez extrême : le « Principe du pays d'origine », exception exorbitante à la règle internationalement reconnue du droit privé, la lex loci laboris,  selon laquelle le contrat de travail doit se conformer à la loi du pays de travail.

Et ce fut la marée des misérables venant se faire exploiter par un exploiteur un peu moins exploiteur que ceux de leur pays d’origine. En France, en  l’an 2000, on comptait  environ 7500 travailleurs détachés sur le sol français, en 2015 la Direction générale du travail comptabilisait 286.025 travailleurs détachés déclarés pour l’année 2015 – il semble qu’il faille rajouter 220.000 clandestins, soit 500.000 !). En 2014, en Europe,  le nombre de travailleurs détachés était de  1,9 millions, pour des détachements d’une durée moyenne de quatre mois.
 http://vivrelarecherche.blogspot.com/2018/11/raisons-de-detester-leurokom-15-le.html

Vous vous souvenez peut-être des promesses de Macron de corriger les conséquences les plus scandaleuses de la directive Bolkenstein, qui a déchainé les louanges des thuriféraires  (« Et si le volontarisme en politique finissait par payer ?- Le Monde en plein délire pro Macron») Ah oui, vraiment ? ». De tout ce remue-ménage, il sortit une mini-réforme : l’accord garantit aux salariés détachés une égalité de rémunération, primes comprises, dans le respect des conventions collectives, par rapport à leurs collègues du pays d’accueil (seul le salaire minimum appliqué dans ce dernier leur était jusqu’alors assuré !). Mais les cotisations sociales des travailleurs détachés restent payées dans le pays d’origine- ce qui revient au pillage des organismes sociaux (mais peut-être au fond en veut-on la disparition ?)

Et l’un des secteurs les plus touché, le secteur routier restait en dehors de tout accord.

Eh bien, même cette mini mini réforme s’avère complètement insuffisante. La marée a continué de monter, se transformant en tsunami :  selon un rapport de la Cour des Comptes, +46 % en un an en 2017 : le nombre de travailleurs détachés s'envole pour atteindre 516.000, hors transport routier.

Au point que la Cour des Comptes, pourtant peu connue pour sa sensibilité sociale s’en inquiète fortement dans son rapport de 1019 : extraits :

« Dans son rapport annuel, la Cour des comptes suggère plusieurs pistes afin d’endiguer le phénomène, synonyme de droits bafoués pour les salariés, de concurrence déloyale pour les entreprises et de recettes perdues pour la Sécurité sociale. En 2017, quelque 516 000 personnes ont été employées en France dans le cadre d’un détachement – procédure qui permet à une société européenne d’envoyer du personnel dans un autre Etat membre de l’Union, pour une mission temporaire. Les patrons concernés sont tenus de respecter le « noyau dur » du code du travail applicable dans le pays d’accueil – c’est-à-dire un corpus de règles fondamentales sur le smic, la durée maximale de travail, etc. En revanche, le travailleur détaché reste affilié au système de protection sociale du pays d’origine, avec des taux de cotisation qui sont souvent inférieurs à ceux pratiqués dans l’Hexagone. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles le détachement est régulièrement critiqué, au motif qu’il encouragerait l’importation de main-d’œuvre à moindre coût, au détriment d’entreprises tricolores qui ne peuvent pas lutter à armes égales.
En France, le recours à cette forme d’emploi, qui s’est beaucoup développée depuis l’élargissement de l’Union aux pays d’Europe centrale et orientale, se révèle « significatif » dans plusieurs secteurs : l’agriculture, en tout premier lieu, mais aussi le BTP et, dans une moindre mesure, l’industrie,. Ce sont les Portugais qui travaillent le plus fréquemment sous ce régime juridique, devant les Polonais, les Allemands et les Roumains (pour l’exercice 2017).

Fait très étonnant : les Français arrivent en cinquième position ; les sociétés qui les emploient de cette façon sont principalement implantées au Luxembourg, en Allemagne, en Belgique et… à Monaco ! En fait, pour diminuer leurs frais, de nombreuses sociétés d’intérim s’installent à l’étranger, au Luxembourg notamment, d’où elles fournissent de la main d’œuvre tricolore à des entreprises françaises, plombant au passage les comptes de la sécurité sociale. (Ce qui est évidemment totalement illégal)

« Ce n’est pas le statut en lui-même de travailleur détaché qui pose problème », considère la haute juridiction. Mais il se trouve que les règles encadrant le dispositif sont souvent foulées au pied : « omission de formalités obligatoires » (par exemple la « déclaration préalable »), « non-respect du “noyau dur” » du code du travail (avec des horaires à rallonge et des rémunérations dues qui ne sont pas versées), infractions plus complexes – des personnes sont détachées alors que leur activité en France est durable et ne peut donc pas relever du détachement… Précision importante : ces pratiques « font toutes intervenir un bénéficiaire final installé » dans l’Hexagone. Autrement dit, des employeurs tricolores s’associent à de telles combines et en tirent profit.

Donc, de manière totalement illégale, le statut de travailleurs détachés sert à détourner le droit social français, à priver les salariés de leurs droits et à les exploiter sans limites – français ou étrangers ! et à priver le système social français de ressources indispensables.

Une illégalité incontrôlable

Incontrolable, parce que la très libérale Commission de Bruxelles, la secte libérale au pouvoir dans l’Eurokom l’a voulu ainsi et a tout fait pour qu’il en soit ainsi en  multipliant les obstacles  bureaucratiques insurmontables.  Histoire éclairante, révélée début mars dans la presse :

« La déception monte parmi les inspecteurs du travail. Depuis le début de l’année, plusieurs procédures engagées contre des entreprises soupçonnées de fraude au détachement se sont soldées par des relaxes. Ces décisions judiciaires sont mal vécues par les services de contrôle : ils voient leurs investigations réduites à néant et ont, de surcroît, l’impression que les règles de l’Union européenne (UE), récemment consacrées par la Cour de cassation, les entravent dans leur lutte contre le travail illégal.

A l’origine de ce coup de blues, il y a en particulier trois affaires. Deux ont été tranchées, en janvier et en février, par le tribunal correctionnel de Versailles, et la troisième par celui d’Agen, le 19 février. Elles mettent en cause des sociétés étrangères qui ont détaché dans l’Hexagone des salariés travaillant pour des donneurs d’ordre établis en France. De tels mouvements de main-d’œuvre sont permis par le droit de l’UE s’il s’agit de prestations de services temporaires. Le travailleur envoyé en France continue alors de dépendre de la sécurité sociale du pays où son employeur est implanté. Les autorités de l’Etat « exportateur » lui remettent le certificat A1, document prouvant son affiliation au régime de protection sociale.

Dans les affaires jugées à Versailles et à Agen, les services de contrôle considéraient que le recours au détachement était injustifié et que les personnes envoyées sur notre territoire auraient dû être déclarées à la Sécurité sociale française (avec, à la clé, le paiement de cotisations à l’Urssaf). Les entreprises impliquées ont, du coup, été jugées pour travail dissimulé. Mais le tribunal a estimé que cette infraction ne pouvait pas être retenue, au motif que des démarches obligatoires avaient été escamotées. Le certificat A1 s’impose, en effet, à l’Etat d’accueil : si ce dernier veut le contester, il doit se tourner vers les autorités du pays d’envoi pour demander le retrait du document. Ces principes ont été énoncés par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), et la Cour de cassation française s’est « alignée » sur elle en 2018. Or, à Agen comme à Versailles, il s’est avéré que le retrait des certificats A1 n’avait pas été réclamé aux pays d’envoi (ou qu’il l’avait été, mais trop tardivement). D’où la relaxe des sociétés incriminées.

Incontrolable, parce que la secte libérale  de Bruxelles et ses complices zélés français Macron, donc) n’ont cessé d’affaiblir les organes de contrôle et particulièrement l’inspection du travail.

 L’inspection du travail peine à exercer ses missions de contrôle. L’an dernier, ses enquêteurs ont effectué un peu moins d’un millier de contrôles, contre 1330 en 2016. Et si les amendes en cas d’abus se multiplient, les montants restent dérisoires, et certainement pas de nature à faire changer les comportements : un peu moins de 6 millions d’euros ont été recouvrés l’an dernier.

C’est le résultat très prévisible d’une réforme de l’inspection du travail : les contrôleurs du travail ont perdu 20 % de leurs effectifs au cours des dix dernières années ». A ceci, Mme Penicaud rétorque que le nombre d’inspecteurs a augmenté dans les mêmes proportions. Oui mais, ils ne font pas le même travail et sont organisés autrement : les 790 sections d’inspection du travail (composées d’un inspecteur et deux contrôleurs) ont été remplacé par 230 unités de contrôle composées de huit à douze agents. L’objectif avoué de la réforme est d’avoir « une approche collective des situations » plutôt qu’un grand nombre de petites équipes proches du terrain. Ces changements récents au sein de l’inspection du travail ont généré des contestations parmi les salariés, craignant une diminution de leur – et ils avaient raison- efficacité. Malgré le gain de 700 agents de contrôle, le nombre d’interventions par agent est passé de 161 en 2007 à 92 en 2015. Le nombre total de procédures engagées a largement diminué depuis le début de la réforme.

La baisse d’efficacité  de l’Inspection du travail a été sciemment voulue, programmée, organisée.

Et les ordonnances Macron ont encore aggravé le problème. D’abord, la fusion des instances représentatives du personnel aboutit à une baisse du nombre de ces représentants dans l’entreprise ainsi qu’une diminution des heures de délégation consacrées à cette tâche d’intérêt général pour tous les salariés. C’est moins de problèmes qui remonteront à l’Inspection du Travail.

Ensuite l’inversion de la hiérarchie des normes, incroyable rétrogradation de plus d’un siècle dans les droits sociaux. Selon des représentants syndicaux des inspecteurs du travail,  cette réforme « entrave grandement notre action dans une entreprise. Auparavant, nous avions des textes de lois auxquels nous référer (accords de branche et code du travail), comme une feuille de route. Désormais, nous avons l’obligation d’étudier dans chaque entreprise, avant tout contrôle et constatation d’infractions, les accords qui ont été passés entre l’employeur et ses salariés, ce qui augmente encore un peu plus la difficulté de notre travail. » D’une certaine manière, cette dernière réforme a rendu presque caduque notre fonction car si chaque entreprise peut faire ses propres règles, alors à quoi sert une brigade visant à faire respecter la loi nationale ? C’est malheureux, mais on serait tenté de répondre qu’elle ne sert plus.»

« La remise en cause de ce socle protecteur couplée à la multiplication des accords dérogatoires dans une configuration de réduction des effectifs et de réorganisation centralisée des services (éloignés des salariés et de leurs réalités), tant en ce qui concerne le service renseignement que les services de contrôle, rend impossible pour nos services le maintien de la qualité du service rendu adapté à chaque situation particulière ».

Non seulement la question du détournement des lois du travail et des protections des salariés par les travailleurs détachés n’a été aucunement réglé par la pseudo action de Macron, mais encore, les ordonnances Macron ont sciemment et volontairement entravé l’action de l’inspection du travail.

Il faut sortir de cette Europe là et mettre fin à l’action de la secte ultralibérale au pouvoir dans l’Eurokom, les Institutions Européennes et notre pays.





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