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dimanche 8 décembre 2019

La sobriété énergétique est mal partie…1) La rénovation énergétique


RTE l’avoue : la PPE est un chiffon de papier

Au détour du Schéma décennal de développement du réseau Edition 2019, RTE nous annonce une drôle de chose, une surprise. RTE prévoit une très forte augmentation de la production électrique à 2035 (640 TWh) contre 548,6 TWh en 2018,  ce qui est tout à fait à l'opposé des prévisions de consommations  faites par RTE au moment de la PPE ... qui voyait une réduction dans 3 de ses 4 scenarios et un stabilité dans le 4ème (sans parler de l'ADEME et de son scénario 100% renouvelable issu des délires assez effarants de Negawatt)

Donc on rentre dans le sérieux, et soyons clair, RTE ne croit plus à une baisse forte de la consommation énergétique, et comme l’électricité, à condition qu’elle soit produite par du nucléaire et de l’hydraulique ( et un peu, pourquoi pas d’éolien et de solaire non pilotables) est extrêmement décarbonée, si l’on veut que la France remplisse ses engagements climatiques, la conséquence logique est une augmentation forte de la demande électrique…

Et ajouterais-je, un rôle important pour le nouveau nucléaire… Pour une discussion plus approfondie, cf. les excellent Sauvons le Climat .

Donc, pour RTE la PPE est ce qu’elle est un chiffon de papier idiot  et ses objectifs de sobriété énergétique…une triste farce.

La sobriété énergétique, on l’a déjà…mais contrainte ; c’est la précarité énergétique !

Très intéressant rapport de l’observatoire européen de la précarité énergétique (EPOV), Addressing Energy Poverty in the European Union: State of Play and Action.(2019)
Sur la base de 4 indicateurs distincts, ce rapport fait le constat que :
44,5 millions d’européens n’arrivent pas à chauffer convenablement leur logement,
41,5 millions ont des arriérés sur leur facture d’énergie,
16,3% des ménages européens ont un taux d’effort énergétique anormalement élevé, c’est-à-dire 2 fois supérieur à la médiane nationale (2010)
19,2% des ménages ont déclaré avoir eu trop chaud chez eux durant l’été 2012.
Le rapport évoque par ailleurs un indicateur qui n’est pas exploité en France : la précarité énergétique « cachée », c’est-à-dire les ménages dont les dépenses d’énergie, en valeur absolue, sont inférieures à la moitié de la médiane nationale (dépenses anormalement faibles)

Donc vous allez parler de sobriété énergétique à des gens qui ne peuvent consommer autant d’énergie que ce dont ils auraient besoin ?

En ce qui concerne la France, il ne faudrait pas déjà oublier l’épisode violent et inédit des Gilets Jaunes, provoqué par une taxe carbone visant à imposer une sobriété énergétique à des gens qui ne peuvent la supporter ? Et, non, MM de Negawatt et écolos bigots, ce n’est pas mauvaise volonté de beaufs accrochés à leurs 4/4. Les ménages modestes ont moins de capacités pour investir dans des équipements moins consommateurs, Les ménages modestes sont soumis à davantage de choix contraints : absence de réseaux de transport en commun, mode de chauffage pour les locataires, choix d’une localisation en milieu péri-urbain pour accroître sa surface faute d’une offre équivalente dans un centre-ville etc.

Les Gilets Jaunes ont été la première révolte de la sobriété énergétique… Bon courage pour la suite.

Ah oui, mais il y a la rénovation thermique des logements qui va tout régler. Ben justement, on peut en douter sérieusement…

La rénovation thermique, ça ne fonctionne pas ! 1) Des scenarios exagérément optimistes .

Il faut reconnaitre à negaWatt l’effort d’avoir tenté le chiffrage d’un scénario agressif de réduction énergétique. Dans ce scénario, l’essentiel viendrait de la sobriété énergétique qui consiste à privilégier les usages les plus utiles, à « restreindre les plus extravagants et supprimer les plus nuisibles » ; de beaux débats en perspective pour juger ce qui est utile ou nuisible… Il faudrait accéder à moins de biens et de services, c’est-à-dire vivre de manière moins riche.
La consommation résidentielle et tertiaire diminuerait de 49 % grâce à une stabilisation du nombre d’habitants par foyer (moins de célibataires ?), un développement de l’habitat en petit collectif (faudra-t-il interdire de construire des maisons individuelles ?), un ralentissement de la croissance des constructions (le nombre de logements construits chaque année serait divisé par 3, leur surface baisserait de 25%), l’optimisation des systèmes de chauffage et l’isolation des logements.

Moi qui pensait justement que la France manquait chroniquement de logements et qu’il existait une forte demande sociale pour en construire de nouveaux et faire baisser le prix de l’immobilier !

Mais penchons-nous sur l’isolation et la rénovation thermique des logements.

Il faudrait, selon négaWatt, rénover chaque année jusqu’à 780 000 logements pour les amener à une consommation moyenne de 40 kWh/m² par an pour les besoins du chauffage. En 2012, l’État français avait fixé l’objectif de rénover 500 000 logements chaque année, un objectif qualifié dans le journal Le Monde du 4 juin 2014 de « définitivement hors d’atteinte ».
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte adoptée en 2015 prévoyait également, sans préciser d’objectif de consommation, 500 000 rénovations par an, objectif non atteint puisqu’on en rénove moins de 300 000 chaque année.
Le plan Hulot annoncé au printemps 2018 en prévoit lui aussi 500 000, un objectif bien inférieur aux 780 000 de négaWatt.

Donc en chiffre, et malgré toutes les offres et les campagnes, on y est pas. Rénover thermiquement pour arriver à quelle consommation ? En fait, le but affiché par negWatt de 40 kWh/m² pour le chauffage est tout simplement inatteignable.

 La réglementation thermique 2012 en vigueur exige qu’un logement neuf (Bâtiment Basse Consommation) consomme moins de 50 kWh/m² par an, donc plus que 40, mais on sait que la consommation réelle est souvent supérieure ; les logements collectifs neufs ont d’ailleurs droit à des dérogations. La consommation moyenne des logements français est actuellement proche de 200 kWh par m², très loin de 40
Rénover un logement ne signifie pas que sa consommation atteigne un niveau suffisamment bas : on peut gagner beaucoup sur des logements mal isolés, passer par exemple de 300 à 150 kWh/m² par an, mais il est très difficile dans l’ancien de descendre en dessous de 50…

Conclusion de  Bertrand Cassoret, auteur du livre « Transition énergétique, ces vérités qui dérangent ! » dans un important article du Monde de l’Energie

« Ces considérations m’amènent à penser que l’objectif de négaWatt est extrêmement optimiste. Un point crucial, puisque le chauffage est la première cause de dépense d’énergie des bâtiments, et que ceux-ci représentent le premier secteur de dépense énergétique français, devant les transports et l’industrie. Je pense que la consommation d’énergie pour le chauffage atteindra une moyenne de 40 kWh/m² par an quand l’énergie manquera et que les habitants auront froid. »

Le problème, c’est que ce ne sont pas seulement les chiffres et le scenario de negaWatt, mais qu’l a été largement repris dans les scenario de la PPE…

Le vrai coût de la rénovation thermique et de l’isolation : « La rénovation thermique de votre logement réduira à peine votre facture »

Pour faire bonne mesure, ajoutons-y un travail universitaire de Gaël Blaise et Matthieu Glachant, chercheurs à MINES ParisTech – PSL paru dans la Revue de l’Energie
Pour un résumé, voir

Extraits :

« La rénovation thermique de votre logement réduira à peine votre facture… Une étude montre que la facture énergétique des ménages est bien moins sensible à la rénovation que prévu, ce qui interroge l'action publique en la matière. »

« La rénovation énergétique est l'un des piliers de l'action publique en faveur de la transition énergétique. Dernière illustration en date, le plan gouvernemental de rénovation énergétique des bâtiments, qui prévoit la rénovation de 500.000 logements par an pendant cinq ans. Ou le discours de politique générale de juin 2019 du Premier ministre qui annonçait une réforme des aides à la rénovation.

Cette priorité se manifeste par une multiplication d'instruments: éco-prêt à taux zéro, crédit d'impôt pour la transition énergétique, certificats d'économies d'énergie, diagnostic de performance énergétique, et les acronymes correspondants: éco-PTZ, CITE, CEE, DPE... Mais la rénovation énergétique des logements réduit-elle vraiment la consommation d'énergie comme elle le prétend ?..

Nous venons de publier une étude économétrique reposant sur l'observation des travaux réellement effectués par des ménages et leurs factures énergétiques avant et après travaux. Les données proviennent de l'enquête Maîtrise de l'énergie réalisée par TNS-SOFRES pour l'Ademe…

Le modèle économétrique…consiste pour l'essentiel à comparer la variation de la consommation d'énergie d'un ménage réalisant des travaux avec celle des ménages n'effectuant pas de travaux ou des travaux d'un montant différent. Pour identifier un effet «toutes choses égales par ailleurs», nous effectuons cette comparaison pour une même année et entre des ménages vivant dans la même région (et donc soumis aux mêmes conditions météorologiques, macroéconomiques et réglementaires), ayant un revenu similaire et une taille de foyer identique, contrôlant ainsi l'effet de facteurs susceptibles d'affecter la consommation énergétique.

Notre estimation aboutit au résultat suivant: 1.000 euros de travaux ne diminuerait en moyenne la facture énergétique que de 8,4 euros par an. Pour un investissement moyen de l'enquête, cela correspond à une diminution de 2,7% de la facture. La rénovation énergétique est alors loin d'être rentable si l'on s'en tient aux seules économies d'énergie puisque le temps de retour correspondant, c'est-à-dire le nombre d'années nécessaires pour récupérer le coût de l'investissement initial, est de 120 ans.

Ce résultat apparaît en décalage avec le consensus actuel des expert·es. Notre estimation est par exemple beaucoup plus faible que celles incluses dans les fiches des opérations standardisées utilisées pour calculer les économies d'énergie générant les Certificats d'économie d'énergie (CEE).
À titre d'illustration, la fiche CEE décrivant la pose d'une fenêtre ou d'une porte-fenêtre avec vitrage isolant –une opération notoirement moins efficace que d'autres– prédit un impact deux fois plus élevé que notre estimation de l'impact de l'investissement moyen.
Notre travail est une analyse a posteriori sur des données décrivant des comportements réels. Au contraire, le consensus d'expert·es a été construit en France à partir de modèles de simulation fondés sur des hypothèses de comportements. De ce point de vue, notre approche est plus proche d'une étude américaine réalisée en 2018 qui identifie elle aussi des impacts très faibles –des économies d'énergie environ 2,5 fois inférieures à celles prédites par le modèle utilisé par les autorités publiques américaines pour piloter de nombreux programmes de soutien à la rénovation énergétique.

Comment alors expliquer la modestie de ces impacts? Une première explication tient au fait que la première motivation exprimée par les ménages réalisant des travaux de rénovation énergétique n'est pas l'économie d'énergie, mais le confort. Or améliorer son confort équivaut en pratique à augmenter la température intérieure du logement. Après rénovation, rien ne dit que cette augmentation ne vienne annuler l'impact énergétique des travaux. Plus de confort, moins de déperdition d'énergie mais au total plus de consommation d'énergie. C'est «l'effet rebond».

Par ailleurs, la qualité n'est pas toujours au rendez-vous dans un marché de la rénovation où prévaut une asymétrie d'information entre des ménages peu au fait des subtilités techniques de l'opération, et des professionnel·les qui savent que la qualité de leur prestation ne sera observée par les client·es qu'une fois les travaux terminés et la facture réglée.

En tout état de cause, la rénovation énergétique ne constitue pas un gisement d'opérations peu coûteuses de réduction de la consommation d'énergie, et par conséquent des émissions de gaz à effet de serre

Notre étude invite donc à cibler le soutien public sur les travaux les plus efficaces (en particulier, l'isolation des combles, des murs, des planchers).
Enfin et surtout, ce résultat invite à déplacer la focale de l'action publique des consommateurs d'énergie vers les fournisseurs de solutions de rénovation énergétique avec un double objectif: réduire les prix et améliorer la qualité de la rénovation. D'autant que la multiplication des aides allouées à leur clientèle n'a pu que dégrader leur performance sur ces deux dimensions. Des dispositifs comme l'opération en cours «isolation des combles à 1 euro» rendent ainsi presque accessoires le prix et la qualité des travaux réalisés. »

Commentaires :

1) Sous la pression d’un certain nombre de militants de l’écologie fondamentale très médiatiques qui ne rêvent que décroissance, on a fait croire que la rénovation thermique permettrait une sobriété heureuse à peu de frais et des économies pour les citoyens.
Or une rénovation thermique sérieuse ne consiste pas seulement en un changement des fenêtres et une vague isolation des combles. Son coût et sa rentabilité ont été largement sous-estimés ; en fait, 8.3 euros d’économies par ans pour 1000 euros d’investissement et 120 ans pour rentabiliser..

2) Le seuil de de 40 kWh/m² par an est largement utopique et rien n’indique qu’il puisse être atteint, surtout pas dans le vieux ( moyenne actuelle 200 kWh par m²) et même pas dans le neuf. A cette valeur, ça va peler !

Quant à l’objectif de décarbonation, il ne sera pas atteint. Et surtout pas si l’on continue à favoriser le chauffage au gaz par rapport au chauffage électrique par le biais du très technique mais puissant facteur de conversion de l’électricité en énergie primaire (cf. Brice Lalonde, (https://www.equilibredesenergies.org/14-06-2019-ubu-et-les-gaziers-tribune-de-brice-lalonde) et https://vivrelarecherche.blogspot.com/2019/09/transition-energetique-et-grandes.html).

3) Lorsqu’on améliore l’efficacité énergétique d’un ménage en état de précarité énergétique, eh ben, il veut d’abord enfin avoir chaud ! Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas le faire, cela signifie que les économies d’énergies à en attendre sont plus faibles que celles anticipées.

4) Nos concitoyens et surtout les plus faibles (précarité énergétique, personnes âgées, etc.) sont la proie de très nombreux aigrefins de la rénovation, qui leur font miroiter des économies sr le chauffage qui n’arriveront jamais, au surplus avec des travaux de qualité médiocre, et le devoir civique de diminuer les dégagements de CO2 et gaz à effets de serre, ce qui ne se produit pas non plus.
Et ceci avec l’appui du gouvernement et par injection massive de fonds publics.



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