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samedi 15 septembre 2012

La Banque publique d’investissement doit-elle être dirigée par un banquier ?

La Banque publique d’investissement doit-elle être dirigée par un banquier ?

Entre Montebourg et Moscovici, entre finance et innovation

Inquiétante passe d’arme entre Montebourg et Moscovici, entre finances et développement industriel… L’importance du sujet mérite que l’on aille plus loin, et il serait dommage, scandaleux à vrai dire, que ce projet utile s’enlise dans des querelles de domaine ministériel.  Pour Bercy, c’est simple : on rassemble les instruments existants (Oseo, Le Fonds Stratégique d’Investissement, la  CDC (Caisse des dépôts –Entreprise, l’ex-bras financier de l’Etat) et, par une sorte d’habitude étrange de l’Amicale des Inspecteurs des Finances, on prend un conseil privé, en l’occurrence la Banque Lazard (experte en résurrection , peut-être – car il, s’agit quelque part de ressusciter l’ex Crédit National ?-) mais pas en financement de l’innovation, semble-t-il. Eh bien, si on fait cela, tout sera manqué car on aura oublié le principal, l’urgente nécessité de l’innovation et de son financement.
 Pas mal de choses ont été faites pour l’innovation et la recherche. Le Crédit d’impôt recherche, les lois Allègre, le Capital risque, les subventions Oséo, les structures de transferts de technologie des grands organismes de recherche et des universités, les régions (plus de huit cent structures semblent-il – huit cent !!) tout cela est utile et fonctionne à peu près bien pour le premier stade, celui des start-up, des jeunes pousses. A peu près bien, car il reste à améliorer et de beaucoup, et cela ne nécessite aucun moyen supplémentaire : simplifier les démarches, raccourcir les délais, assurer une stabilité fiscale et législative- ne pas changer les règles en cours de route, apporter des réponses fiables.
Continuons comme cela, continuons à saupoudrer des crédits, c’est très rassurant pour un banquier, car cela limite les risques individuels. On aura alors beaucoup dépensé d’argent pour rien. On aura fait éclore de jeunes pousses qui, soit échouerons parce qu’ayant sous-estimé leurs besoins et coûts – la « vallée de la mort des spécialistes de l’innovation- soit réussiront… et disparaîtront en se faisant racheter, souvent par une firme étrangère. Parce qu’elles ne pourront pas se développer.
Le dispositif de la banque public d’investissement tel qu’il se dessine laisse de côté le grand problème français en matière d’innovation et de développement : l’absence  d’ETI, entreprises  de tailles  intermédiaires, celles qui ont fait la fortune de l’Allemagne, de la Hollande… Ce n’est pas un hasard : Crédit d’Impôt Recherche mis à part – mais celui-ci concerne le fonctionnement et non les besoins d’investissement -, tous les vrais mécanismes d’aide à l’innovation s’arrêtent au stade de la start-up.

Le problème des ETI : Retrouver l’esprit de l’Agence pour l’Innovation Industrielle
                 
Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce problème des ETI n’est pas nouveau, et qu’il faisait déjà l’objet du rapport Beffa (2004 !) qui a mené en  2005 à la création de l’Agence pour l’Innovation industrielle. ).  L’AII (Agence pour l’Innovation Industrielle) devait financer, avec des moyens importants (2 milliards d’euros) et suivre dans la durée des « programmes mobilisateurs pour l’innovation industrielle », conduisant à des innovations de rupture préparant les produits, les procédés, les industries de demain. L’AII devait favoriser l’émergence de   structures collaboratives, (une au plusieurs PME ou start-up, un grand groupe, des équipes publiques). L’AII a été créée en  2005, dissoute en 2007, pour cause de vindicte politique- cette création chiraquienne n’eût pas l’heur de plaire à l’administration sarkozyste. Ses débuts furent pourtant encourageants : Entre 2005 et 2007, en  deux ans, l’AII a initié 18 programmes pour 1.5 milliards d’euros d’aide publique complétés par un engagement de deux milliards des partenaires privés. Parmi ces programmes, ADNA (Biomérieux, Généthon, Transgène, 103 ME), pour le développement de la médecine personnalisée ; Biohub (chimie végétale comme substitut à la pétrochimie, piloté par Roquette, 98 ME), Iseult (RMN à très haut champ pour l’imagerie, Guerbet, CEA 54 ME), Nanosmart (SOITEC, développement de nouveaux composants électroniques associant plusieurs métaux, 80 ME), Neoval (Siemens France, transport modulaire automatique sur pneu,62 ME)…
L’AII a été dissoute et partiellement intégrée dans OSEO, avec une diminution importante des moyens et des ambitions ce qui correspondait  à une trahison de sa mission première, la culture OSEO/Anvar correspondant à un saupoudrage assez peu efficace de subventions pour des innovations d’ampleur limitée,  ce à quoi l’AII était justement censée remédier. Si demain Oseo et ce qui reste de l’AII sont noyés dans un conglomérat, la BPI, dirigée par des banquiers et relevant du Ministère des Finances, alors c’en sera fini de toute ambition d’innovation, de réindustrialisation.
Pour résoudre le principal problème français en matière de recherche et d’industrie, l’absence d’entreprises innovantes de tailles intermédiaires, il faut retrouver l’ambition, les moyens, la stratégie de l’Agence pour l’Innovation Industrielle. Pour cela, la Banque Publique d’Investissement ne peut pas dépendre exclusivement du Ministère des Finances, ni être dirigées exclusivement par des banquiers.
Et il faudra régler un autre problème, car une sorcière, une méchante marâtre a commencé à se pencher sur la Banque Publique d’Investissement : la Commission de Bruxelles à travers sa Direction de la Concurrence, qui prétend interdire toute politique industrielle conséquente aux Etats. Rappelons qu’elle est largement responsable de la disparition d’une grande filière française, d’un grand succès scientifique d’abord, puis industriel et commercial : l’industrie de l’aluminium, en empêchant la fusion Pechiney Alcan.






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