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dimanche 24 septembre 2017

Ordonnances Macron et licenciements

Ce qui change :

La motivation du licenciement après la notification du licenciement : dorénavant, l’employeur pourra préciser ou compléter les motifs de licenciement après la notification du licenciement. Ces précisions pourront être apportées, soit à la propre initiative de l’employeur, soit à la demande du salarié.
Du fait de cette nouvelle règle, les limites du litige ne seraient plus fixées par la seule lettre de licenciement, mais par la lettre et les précisions ultérieures apportées par l’employeur.
Si le salarié ne demande pas à l’employeur de préciser ou compléter les motifs énoncés dans la lettre de licenciement, l’irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse. L’insuffisance de motivation ouvre droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire.

Cette ordonnance revient donc sur les règles actuelles qui considèrent comme sans cause réelle et sérieuse un licenciement insuffisamment justifié.

En cas d’irrégularités de formes :  L’ordonnance encadre également les réparations dans le cas d’irrégularités de formes au cours de la procédure de licenciement.
Ces irrégularités donneraient droit à une indemnité qui ne pourra être supérieure à 1 mois de salaire.
L’ordonnance liste "notamment" l’absence d’observation des obligations relatives à la convocation à l’entretien préalable et au déroulement de celui-ci, mais aussi l’absence d’observation de la "procédure conventionnelle de consultation préalable au licenciement".
 La sécurisation de la rupture envisagée est importante car la jurisprudence actuelle considère que ces irrégularités de procédure sont susceptibles de faire perdre au licenciement sa cause réelle et sérieuse.

Autrement dit, si votre patron vous licencie par un simple mel, sans vous entendre ou vous expliquer quoi que ce soit, cela ne lui coutera qu’un mois de salaire et ne remettra pas en cause « le caractère réel et sérieux » de la cause de licenciement.
Génial, ça c’est du progrès !

La nullite du licenciement en cas de pluralite de motifs : L’ordonnance prévoit que si un salarié est licencié pour plusieurs motifs dont l’un viole un droit ou une liberté fondamentale, le juge pourra examiner les autres motifs du licenciement pour atténuer l ’indemnisation accordée au salarié.
Cette disposition vient s’opposer à une jurisprudence établie selon laquelle le caractère illicite du licenciement prononcé, même en partie, en violation d’une liberté fondamentale, entraîne la nullité du licenciement, sans qu’il y ait "lieu d’examiner les autres griefs invoqués par l’employeur pour vérifier l’existence d’une cause réelle et sérieuse de licenciement" (Cass. soc., 3 février 2016).

Autrement dit, il devient tout à fait possible à un patron d’affirmer ouvertement qu’il vous licencie pour votre activité syndicale, du moment qu’il existe une autre cause réelle et sérieuse. Cette possibilité d’afficher ouvertement un motif qui viole une moi ou une liberté fondamentale est profondément choquante et exorbitante ; et l’on voit trop bien comment elle peut être détournée pour faire pression sur les syndicats.

Le délai de contestation du licenciement : L’ordonnance aligne sur la durée la plus courte (un an) le délai de contestation de la rupture du contrat de travail.

Le plafonnement des indemnités prud’homales : Le gouvernement entend imposer au juge prud’homal un référentiel obligatoire pour la fixation du montant de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il est toutefois prévu des exceptions à ce barème. Ce dernier n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est nul en application d’une disposition législative ou lorsqu’il est intervenu en violation d’une liberté fondamentale (harcèlement, discrimination. Dans ce cas, l’indemnité versée ne peut être inférieure à 6 mois de salaire.
Ce barème maximal est égal jusqu’à 10 ans de présence à 1 mois d’indemnité par année de présence et ensuite inférieur (par exemple, 15,5 mois pour 20 ans d’ancienneté…)
Et encore s’agit-il là des grandes entreprises ; pour les entreprises de moins de 11 salariés, le barème minimal est beaucoup plus défavorable au salarié : 0,5 mois jusqu’à deux ans, 1 mois jusqu’à 4 ans, 1.5 mois jusqu’à 6 ans, 2,5 mois jusqu’à 10 ans.
Encore une fois, il y a là quelque chose de profondément choquant et exorbitant : en cas de licenciement, rappelons-le,  sans cause réelle et sérieuse, donc illégal, l’employeur sait exactement ce que cela lui coûtera, et ce n‘est pas très cher payé, inférieur au risque encouru dans le système précédent lorsque l’employeur est de mauvaise foi.

Les nouvelles dispositions des ordonnances Macron concernant les licenciements constituent donc une fragilisation extraordinaire du contrat de travail et un recul social sans précédent.
M. Macron a-t-il vraiment été élu pour appliquer ce programme ? Est-il légitime pour le faire ? La rue, comme il le dit avec mépris, ne posséderait aucune légitimité pour s ‘opposer à ce recul légal sans précédent ?

En 1830, la monarchie légitimiste de Charles X prit des ordonnances limitant les libertés publiques qui furent vite qualifiées de scélérates. Ces ordonnances scélérates conduisirent aux « trois glorieuses » et  à la fin de la monarchie légitimiste. La rue, parfois, sait se faire entendre.


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