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vendredi 20 avril 2018

SNCF, fin du service public, fin du statut : le statut est la garantie du service public


SNCF : La fin d’un service public au pas de marche !

Eh bim..après même pas deux semaines de « concertation », le projet de loi sur la fin du service public ferroviaire par la mise en concurrence est voté, la fin du statut des cheminots est décidée et datée (1er janvier 2020) sans qu’on sache encore par quelle convention (collective, d’entreprise ?) il sera remplacé, la décision de filialiser le frêt ferroviaire est lancée, rien n’est acté sur la reprise que la dette que l’Etat a gentiment transférée à la SNCF pour rentrer dans les clous du traité de Maastricht sur la monnaie unique, rien n’est décidé sur les petites lignes ni la façon dont avec l’introduction de la concurrence pourra être préservé ce qui fait l’essence du service public, le même prix pour un même type de transport que l’on soit à Paris ou Lyon, ou à Guéret, ou à Carhaix, ou à Argentan, ou à Douai, ou à Epinal, ou à Rodez.

La France dispose (disposait) du deuxième réseau européen, après l'Allemagne, avec près de 29.000 km de lignes exploitées, dont 2800 km de Ligne Grande Vitesse. Avec près de 3000 gares et haltes ferroviaires, 90% de la population réside à moins de 10 km d'une gare. Eh bien ce sera terminé ! Comme le dit ce syndicat très revendicatif qu’est la CFDT, il y aura «une rupture d'égalité des citoyens dans l'aménagement du territoire», «le train pour les régions riches», «la route et les risques routiers pour les plus pauvres».

Le Monde, journal pourtant pas la bible de l’antimacronisme : SNCF : l’exécutif accélère et écrase les syndicats

Il faut dire que tout cela a été bien préparé par un matraquage intense de mensonges violents sur la dette de la SNCF (en réalité une dette de l’Etat), sur le « statut privilégié » des cheminots. cf. la démagogie écoeurante de Macron au salon de l’agriculture : « Je ne peux pas avoir d'un côté des agriculteurs qui n'ont pas de retraite, et de l'autre avoir un statut cheminot et ne pas le change »

Le statut, c’est la garantie du service public

Le statut, eh bien reparlons-en !

A la SNCF comme à EDF, le statut est indissociable de la notion de service public. 
Une première caractéristique du service public, c’est la continuité du service. En cas de rupture d’électricité, en cas de rupture de trafic, le statut assure que le cheminot ou l’agent EDF, qu’il pleuve, vente ou neige, le jour ou la nuit, en montagne ou en plaine, qu’il y ait canicule ou froid intense, mettra tout en œuvre pour rétablir le service, quel qu’en soit le coût pour l’actionnaire- quelle compagnie privée le fera ? 
Une seconde caractéristique du service public, c’est la sécurité. Le statut du cheminot ou de l’agent EDF assure, devrait assurer, qu’à aucun moment il n’y aura  le moindre compromis entre les dividendes de l’actionnaire et la sécurité. 
Une troisième caractéristique du service public, c’est l’égalité de traitement sur le territoire. Tout français doit avoir un égal accès au service public, et le statut contraint cheminots ou agents EDF à la mobilité géographique, à s’installer là où il est nécessaire qu’il soit et non là où il aurait envie d’être. Le statut enfin impose certaines sujétions, comme un travail régulier de nuit- dormez, braves gens les trains roulent et les électrons circulent.

Alors, il y a quelques contreparties : la garantie de l‘emploi- oui, elle assure que l’agent peut et même doit résister aux pressions contraires à ses missions de service public, mais à condition de se plier aux contraintes du service public-EDF est impitoyable pour ceux qui coupent le courant. La retraite de la SNCF à 57, voire 55 ans ? Mensonge,  ce n’est plus vrai et la durée de cotisation a été portée  de 37.5 à 41.5 ans, ce qui fera une retraite à taux plein plutôt vers 62- 65 ans et encore !
 Les primes et les billets gratuits : OK ; mais en échange de salaires relativement bas : pour les conducteurs de trains partant travailler dans une compagnie privée, il faudra s’attendre à une augmentation de salaire de 50 voire 100% !

Un statut si mirobolant ( ?) selon ses  détracteurs aurait dû entrainer un afflux gigantesque de candidatures à la SNCF. Je ne sache pas que ce soit le cas. Alors que reste-t-il ? Des rigidités comme le fait que ce ne sont pas les mêmes conducteurs qui effectuent les trajets et qui rangent les trains ? Outre qu’il y a peut-être des raisons techniques, c’est vraiment  se moquer (et je suis poli) du monde que de prétendre qu’il faut supprimer le statut pour régler ce problème ! Le statut a déjà évolué et peut encore évoluer au gré des changements techniques.

Tiens une petite question à nos amis juristes. Le statut d’EDF interdit maintenant aux agents de couper le courant en cas de grève, c’est pour cette raison que malheureusement des grèves d’EDF, comme celle très suivie contre la privatisation de barrages hydroélectriques, passent maintenant inaperçues. Et EDF ne plaisante pas : une infraction vaut renvoi immédiat, avec perte des droits accumulés à la retraite (eh oui, c’est un régime très spécial). Cette règle exorbitante du droit social, cette restriction très forte du droit de grève, que vaudra-telle pour un exploitant privé ?
Vive la France dans le noir à chaque grève. On va s’ amuser !

Service public et politique environnementale

Le service public n’a pas que des logiques de rentabilité, et dans le cas du ferroviaire, se pose la question du vrai coût écologique du transport, en particulier de frêt par la route. Exemples : « Sur la ligne Nantes-Lyon, un train paye 15.000 euros péage. Un bus ne paye que 150 euros. Le transport routier en France est le transport le plus subventionné », Didier Le Reste (CGT) Autre exemple, en Auvergne Rhône-Alpe, le projet d’autoroute A 45 coûterait plus d’un milliard d’euros pour moins de 50 km. Dans le même temps, le plan de sauvetage des petites lignes de la région est de 264 millions d’euros pour 830 km ».

C’est donc en effet le transport routier qui est massivement subventionné, plus que le train, et ceci pour des conséquences environnementales désastreuse. Le service public peut et devrait être davantage tenir compte des externalités négatives, en particulier en terme de sécurité, de pollution et de lutte contre le changement climatique !

Tiens par exemple  : supposons que la France se décide à faire comme la Suisse et l’Autriche et impose à tout le trafic traversant par camion de s’effecteur par train – les camions sur les trains. Il serait légitime de prendre ce genre de décision pour un service public ferroviaire, il ne le serait pas de le faire pour des transporteurs ferroviaires privés.

Et à propos de Suisse, ce pays quasiment socialiste : réaction horrifiée d’un collègue suisse à qui je demandais si les trains suisses étaient privatisés : réponse _ les chemins de fer suisses ( dont ils sont légitimement assez fiers, de vraies œuvres d’art !) appartiennent au peuple suisse.
Mais eux, ils ne sont pas soumis aux directives de Bruxelles.

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