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vendredi 10 août 2018

Barrage effondré au Laos : l’hydraulique, il faut le faire sérieusement !


Une catastrophe attendue

La rupture dramatique d’un barrage au Laos à Atteupeu le 21 juillet 2018 a causé la mort de 130 personnes au moins, annonce un régime dont la principale vertu n’est pas la transparence, mais c’est en réalité un millier de villageois dont on est sans nouvelles. Cinq milliards de mètres cubes d’eau – l’équivalent de plus de deux millions de piscines olympiques – ont été brutalement libérés par la rupture d’une retenue de 770 mètres de long et 16 mètres de haut. Encore les laotiens ont-ils relativement eu de la chance. Le projet de 410 mégawatts, qui devait entrer en service en 2019, consiste en deux barrages principaux et cinq retenues auxiliaires qui devaient permettre de détourner trois branches de rivières. C’est une digue secondaire qui a cédé, et non un des ouvrages principaux du complexe hydroélectrique. Par ailleurs, la province d’Atteupeu est très faiblement peuplée, avec moins de 10 habitants au km2, ce qui explique que seuls quelques milliers de personnes sont affectées !

C’est une société coréenne, SK Engineering & Construction, qui était responsable du chantier. Ingénieurs  et autorités locales ont mis en cause les pluies extraordinairement abondantes de la mousson. Mais, selon le spécialiste Olivier Ducourtieux (Libé, 24 juillet 2018), « la question n’était pas si un accident allait arriver, mais quand. Depuis une quinzaine d’années, il y a un rush vers les investissements hydroélectriques au Laos. Des dizaines de barrages ont été construits ou sont en projet. Or l’Etat n’a ni les capacités techniques et humaines ni la volonté politique de réguler sérieusement ces opérations. A la fin des années 90, un des premiers projets, celui de Nam Theun 2, porté par le français EDF, avait donné l’opportunité aux ONG et aux militants de faire des études sociales et environnementales. Refroidi par la complexité du dossier, le pouvoir laotien a ensuite donné la priorité à des partenaires asiatiques locaux qui ne parlent qu’un seul langage, celui du dollar. Ces projets construits dans des zones reculées à un rythme extravagant, déconnectés les uns des autres, passent sous le radar médiatique. Une telle défaillance était dans l’ordre des choses ».  De fait, la branche ingénierie et construction de SK a annoncé que la partie haute du barrage auxiliaire avait été emportée» dans la soirée de dimanche, alors que le barrage était loin d’être plein, avant qu’il ne cède, un jour plus tard. Les fortes pluies ont bon dos, c’est bien plutôt un vice de construction qui est en cause. Par ailleurs,  il semble que SK Engineering ait tardé à prévenir les habitants du danger.

Le Laos tire de l’exportation de l’énergie hydroélectrique une source de revenus importante, exportant la majeure partie de l’électricité vers les pays voisins comme la Thaïlande, et des dizaines de barrages sont en construction, par des sociétés chinoises et coréennes essentiellement. Comme expliqué plus haut, après le barrage de Nam Theun 2, l’enjeu que représentent ces barrages pour un pays resté extrêmement pauvre, aux mains d’une des dernières dictatures communistes, dont la transparence et le respect de la vie humaine ne sont pas les qualités principales, a conduit à un relâchement de la sécurité.

Une énergie propre, mais dangereuse- le scandale de la privatisation des barrages électriques

L’énergie hydroélectrique est par excellence une énergie propre et pilotable – c’est la première source d’énergie renouvelable dans le monde qui représente 20% de l’électricité produite (11% en France, 95% en Norvège, qui n’aura pas de peine à atteindre ses objectifs climatiques), elle n’est pas sans inconvénients, notamment par une centaine de milliers de personnes déplacées pour Yaryceta en Argentine et Les Trois Gorges en Chine.
 Mais surtout, l’énergie hydroélectrique est dangereuse : entre 1969 et 2000, 11 accidents de barrages ont causé plus de 30,000 morts – en France, Malpasset en 1959 421 morts.( pour mémoire, Fukushima, 0 morts)
Alors, il faudrait  que, en France, en Europe et partout dans le monde, les barrages hydroélectriques soient aussi bien surveillés et contrôlés que les centrales nucléaires par leurs autorités de contrôle ; et se dire que certains des barrages français, qui datent de plus de cinquante ans, doivent faire l’objet de restaurations urgentes.

Et, bien sûr, c’est la première chose que feront les concessionnaires privés qui reprendront les barrages d’EDF en France !

C’est dire que la privatisation des barrages hydroélectriques, plus ou moins imposée par la Commission de Bruxelles, mais que la France de Macron, contrairement aux autres pays européens applique avec zèle , est non seulement une erreur économique, non seulement une aberration en ce qui concerne un service public de l’eau usines, pêcheurs…)qui organise la vie de vallées entières et des usagers de l’eau ( agriculteurs, agglomérations, mais en plus une menace majeure pour la sécurité.


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