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samedi 13 octobre 2018

Raisons de détester l’Eurokom-10 : la politique européenne de la pêche


Europe et Eurokom

Dans un de mes précédents blogs, je m’enflammais sur les propos de Macron à Epinal sur « l’Europe qui nous a donné la Paix ». Face aux politiciens truqueurs qui sciemment mélangent l’Europe, réalité géographique, historique, culturelle et la Communauté européenne et ses institutions (notamment la Commission européenne), vouées uniquement à construire un grand marché selon le dogme d’une véritable secte libérale, je propose donc de différencier l’Europe réelle des peuples et des nations et l’Eurokom, les institutions de la Communauté Européenne.


Après 1) la campagne Européenne commence bien ! Macron à Epinal, 2) la politique étrangère, une certaine odeur d’affairisme, 3) grands problèmes avec l’euro, 4) petits arrangements avec la démocratie, 6) l’Eurokom, son immigration, sa démographie ; 7) A la fin, c’est toujours l’Allemagne qui gagne 8) Des dizaines de milliers de normes !  continuation de la série sur une compétence européenne : la politique de la pêche, ou quel bilan quand on donne le pouvoir à l’Eurokom.

Rapport au vitriol  de la Cour des Comptes.

Voyons donc comment l’Europe s’en tire quand on lui confie une compétence. Et bonheur des bonheur, pour une fois, il y a eu une évaluation de cette politique par la Cour des Comptes Européenne (Rapport spécial n° 08/2017). Ladite Cour commence bravement par rappeler que « la politique commune de la pêche (PCP) vise à garantir la viabilité à long terme du secteur de la pêche et des stocks halieutiques. Et la conclusion est claire : l’ « Union européenne ne disposait pas encore d'un système de contrôle des pêches suffisamment efficace pour contribuer à la réussite de la PCP ». En fait, aucun des pays controlés n’est en mesure de vérifier jusqu’à la capacité exacte de sa flotte de pêche (pour la jauge notamment). Même chose pour les informations sur les navires figurant dans son fichier de flotte. Le rapport souligne également un décalage important  (euphémisme eurocratique :  des incohérences !) entre les informations contenues dans le fichier de flotte et les pièces justificatives, entre les débarquements déclarés et les relevés effectués lors de la première vente, entre le total des captures enregistrées par les Etats membres et les données dont dispose la Commission. Incohérences à tous niveaux. Et encore : « La surveillance par satellite ne couvre quant à elle qu’un bateau sur 10. Finalement, 89% des navires de la flotte de l’Union européenne ne sont pas contrôlés, ce qui laisse la porte ouverte à de nombreuses infractions. Et quand contrôle il y a, les sanctions ne sont généralement pas dissuasives. ». .

La Cour conclue que tout ceci  « est de mauvais augure pour le respect effectif des quotas et pour la survie des espèces les plus menacées par la surpêche » Fermez le ban !

Pêche électrique, pêche profonde. Des aberrations trop longtemps tolérées, voir encouragées.

La pêche électrique a été interdite en Europe en 1998 mais la Commission européenne l’a autorisée, avec l’accord du Conseil, à partir de 2006 dans le cadre d’un régime dérogatoire exceptionnel. Cette décision inique, qui allait à l’encontre de l’avis scientifique explicite fourni à la Commission, n’en finit pas de semer le désordre dans le secteur de la pêche : toute une flotte chalutière aux Pays-Bas a été convertie à l’électricité, c’est-à-dire une méthode de pêche interdite et destructrice, sous couvert de licences expérimentales et scientifiques.

Bien pire : pour sauver la flotte de chalutiers à perche néerlandais au bord de la faillite, la pêche électrique, jusqu’alors considérée « destructrice » a été rebaptisée comme « innovante ». Ce tour de passe-passe a non seulement permis aux industriels de pratiquer cette méthode de pêche interdite, mais aussi d’obtenir des millions d’euros de subventions pour équiper les chalutiers en électrodes, la note étant payée par l’argent public des contribuables et des citoyens européens.
Réaction de l’Association Bloom : « ce qui nous indigne, c’est de voir que les politiques publiques sont sciemment complices de la destruction de l’emploi. Soutenir les méthodes de pêche les plus violentes pour l’environnement est déjà inacceptable, mais que les pouvoirs publics persistent à encourager, et même financer, les méthodes de pêche qui détruisent les métiers les plus vertueux, ça nous ulcère ». Il faut savoir que les chalutiers électriques rejettent entre 50 et 70% des poissons capturés, contre 6% pour  les filets maillants.

Le Parlement européen s’est prononcé en janvier 2018 pour l’interdiction totale et définitive de la pêche électrique en Europe. L’issue du vote est demeurée incertaine jusqu’au dernier moment, les pêcheurs industriels néerlandais se déchaînant auprès du Parlement qui a été inondé de « fake news » de la part des lobbies… Reste maintenant à mettre la mesure en application, et c’est pas encore fait….après autant d’encouragements donnés aux néerlandais.

De même, Bloom et Deep Sea Conservation Coalition après une pétition lancée en 2013 (900 000 signatures) ont fini par obtenir fin 2016 l’interdiction du chalutage profond à plus de 800 mètres dans les eaux européennes, technique extrêmement destructrice d’éspèces frgiles se renouvelant lentement. Encore Bloom a-t-il pointé « les nombreux reculs du texte par rapport à la version du Parlement européen que la rapporteure du texte aurait dû défendre mais qu’elle a bradée en raison de conflits d’intérêts et d’une prise de position ouvertement favorable aux industriels de la pêche. Les deux principales pertes sont la zone d’application du règlement qui ne concerne que les eaux européennes mais ne s’appliquera pas en eaux internationales de tout l’Atlantique Nord-Est, et l’ensemble des mesures contraignantes qui visaient à assurer une gestion durable des poissons d’eau profonde ».

Et pourtant, il y a urgence : Au fil des ans, l’épuisement du poisson le long des côtes de la mer du Nord a amené les pêcheurs traditionnels au bord du gouffre économique. A titre d’exemple, entre 2014 et 2018, les fileyeurs des Hauts-de-France ont perdu en moyenne 50% de leurs captures de soles. Les lobbies industriels, année après année, ont pris le contrôle des flottes, des organisations de producteurs (qui allouent les quotas de pêche), des organes de représentation politique et des structures de gestion portuaire. Lentement mais sûrement, les petits pêcheurs ont été réduits au silence. Ils savent que s’ils osent dénoncer les acteurs dominants, les représailles sont immédiates et féroces (quotas, droits de pêche, licences, etc.)

Des solutions qui marchent mais ne sont pas défendues par l’Europe : l’exemple vertueux de la coquille Saint Jacques.

Et pourtant aussi, les solutions sont connues : le contrôle de la pêche par des associations locales, par exemple  les groupes d’action locale pêche (Flags, en euranglais) qui permettent de mettre en place des stratégies et des mesures en faveur de la pêche durable. Elles permettent le renforcement de la compétitivité des zones de pêche, la  restructuration, le
redéploiement et la diversification des activités économiques, la valorisation des produits
de la pêche, la  protection de l’environnement ; restauration d’une production endommagée par une calamité…

Un très bon exemple est la gestion de la pêche de la coquille Saint-Jacques en Manche. À la fin des années 80, son équilibre fut en effet menacé par de mauvaises reproductions et le secteur entier a failli  disparaître. Les pêcheurs se sont alors d’eux même imposé un certain nombre de restrictions. Tout d’abord avec une limitation des jours de pêches, l’établissement d’un système de licence ou encore une réglementation accrue sur la taille des navires et la largeur des mailles des filets. Un quota est fixé chaque année par les pêcheurs eux même et évolue au fil de la campagne. Les captures sont comptabilisées au jour le jour pour suivre les évolutions du stock. C’est l’institut Français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) qui se charge de fournir les données scientifiques et c’est sur ses recommandations que le comité des pêcheurs fixe le quota annuel. Typiquement, la pêche se pratique d’octobre à avril, 2 jours par semaine, 45 minutes par jour. Les coquilles Saint-Jacques ne correspondant pas aux critères sont rejetées en mer.
« Chaque pêcheur est responsable de sa production et agit en conséquence » affirme Christophe Halary, chargé de mission du secteur pêche des Côtes d’Armor. Depuis la mise en place de ces mesures, les résultats sont concluants. Un vrais succès : le stock de coquilles Saint Jacques  s’est rapidement renouvelé et stabilisé, et les pêcheurs en v très bien.

Rappel : La coquille n’est pas une espèce régie par des quotas de l’Union européenne ! Ah ben voilà, c’est pour ça que la pêche durable pu s’imposer. A un petit problème près : les britanniques ne s’estiment pas tenus par les décisions des pêcheurs français et viennent piller les stocks que ceux si ont si heureusement reconstitués, et l’Europe ne fait rien pour les protéger. Alors en aout 2018, une trentaine de bateaux français et anglais se sont affrontés dans une véritable bataille navale, allant même jusqu’à l’abordage- tiens, un problème que le brexit devrait résoudre !

Bref, cette politique de la pêche confiée à l’Europe est du propre aveu des instances européennes, un échec qui n’a pas permis l’instauration d’une pêche durable ; elle n’a pas empêché la détérioration des stocks de poissons, elle a trop longtemps autorisé, et même encouragé, et même financé  des pratiques néfastes ( pêche électrique, pêche à grande profondeur), elle n’a pas permis à de nombreux pêcheurs de vivre de leur activité, bien au contraire, elle a favorisé une pêche ultra industrielle, ravageuse, dans des conditions totalement obscures, sans contrôle réel des quota ; il est quand même étrange que tant d’armements espagnols se soient imposés sur nos côtes bretonnes au détriment des pêcheurs locaux. Elle n’a même pas épargné les vexations inutiles aux littoraux, limitant leurs prises à 3 bars par jours au sud de Quimper et l’interdisant totalement au nord. !!! alors que pendant des années, nul n’a pu empêcher l’industrie de la pêche de piller les frayères en toutes saisons.

Et ceci alors que les solutions sont connues, la gestion par des communautés de pêche locales, avec le respect de zones et de périodes de reproduction…mais qu’elles vont à l’encontre de la doxa libérale de Bruxelles.

Oui, vraiment, il faut sortir de cette Europe-là




1 commentaire:

  1. aussi sur https://eurokomonaimepas.blogspot.com/2019/01/presentation-de-ce-blog-debattre-de.html

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Commentaires

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