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vendredi 19 octobre 2018

Raisons de détester l’Eurokom-11 : les politiques de libéralisation- l’énergie


Europe et Eurokom

Dans un de mes précédents blogs, je m’enflammais sur les propos de Macron à Epinal sur « l’Europe qui nous a donné la Paix ». Face aux politiciens truqueurs qui sciemment mélangent l’Europe, réalité géographique, historique, culturelle et la Communauté européenne et ses institutions (notamment la Commission européenne), vouées uniquement à construire un grand marché selon le dogme d’une véritable secte libérale, je propose donc de différencier l’Europe réelle des peuples et des nations et l’Eurokom, les institutions de la Communauté Européenne.


Libéralisation de l’énergie : bravo et continuons !

Escroquerie à la TVA sur les quota de carbone : 5 à 10 milliards d’euros

La fraude à la TVA sur les quotas de carbone, parfois improprement appelée « fraude à la taxe carbone », c’est selon la Cour des Comptes, l’escroquerie du siècle. En 2005, l'Union européenne, pour lutter contre le réchauffement climatique, a une idée géniale et très libérale : quoi de mieux que de faire confiance aux marchés ! Créons pour cela  une bourse du carbone qui permet l’échange de droits (ou quotas) d’émission de CO2, le principal gaz à effet de serre. Chaque année, des quotas étaient attribués aux entreprises les plus polluantes, qui pouvaient les revendre si elles n’avaient pas atteint leur plafond ou racheter ceux des entreprises qui n’avaient pas dépensé les leurs. Pour être encore plus citoyen et surtout plus libéral, le marché s’ouvre à toutes les sociétés, pollueuses ou non. On institue une TVA (taxe sur la valeur ajoutée) sur ces quotas achetés hors taxe et revendus toutes taxes comprises (TTC) – l’Etat se chargeant d’avancer la TVA. Pour faire plus libéral encore, il n’y a aucun contrôle a priori sur la réalité des acheteurs et des vendeurs.

Ah oui, mais des escrocs spécialistes de l’arnaque à la TVA, il y en a ; et ils se sont précipités dans cette faille, parvenat à prélever systématiquement et efficacement les 20 % de TVA sur chaque transaction. Jusqu’à gagner, pour certains d’entre eux, plus de 500 000 euros par jour !
La recette est assez simple : il  s'agit d'acheter des quotas hors TVA dans une société fictive dans un pays étranger, avant de les revendre en France à une autre société fictive à un prix incluant la TVA, puis de disparaitre (dissoudre la société) avant de reverser la TVA à l’Etat.

Et les escrocs se sont montrés très actifs : le marché européen des échanges de quotas de CO2 a été victime d’échanges frauduleux depuis dix-huit mois. Dans certains pays, jusqu’à 90 % du marché du carbone était le fait d’activités frauduleuses.

Conclusion : Face à cette fraude qui a permis de détourner entre 1,6 et 1,8 milliard d'euros en France en 2008 et 2009 et entre 5 et 10 milliards d'euros pour l'ensemble des États membres de l’Union européenne selon Europol, la TVA sur les quotas a été supprimée !.

Commentaire du Procureur financier de la République : « L’espace de liberté que les Etats ont créé n’a qu’un seul antécédent, celui de la haute mer. Ce phénomène criminel, ce n’est pas la mafia, c’est la piraterie. »

Voilà une belle définition des politiques de libéralisation !

Manipulations boursières et gros profits sur le gaz

C'est une grande première et elle mérite qu'on s'y arrête. Une amende de 5 millions d'euros a été infligée au négociant Vitol pour de sérieuses irrégularités sur le marché de gros du gaz. La Commission de régulation de l'énergie (CRE) a annoncé en début de semaine des sanctions pour manipulation de marché sur le marché de gros de l'énergie. En l'occurrence, c'est le comité de règlement des différends et des sanctions (Cordis) qui est à la manœuvre. Le bras armé du régulateur en termes de surveillance des marchés a décidé, après une longue enquête de la CRE, d'infliger une amende de 5 millions d'euros au négociant Vitol, basé aux Pays-Bas. Les faits incriminés courent sur la période allant de juin 2013 à mars 2014. De quoi s'agit-il exactement? La CRE a repéré les étranges manœuvres de Vitol sur le marché de gros du gaz contraires à l'intégrité et à la transparence des marchés. À plusieurs reprises, tôt le matin , quand le marché était encore peu liquide - avec donc peu de transactions -, le négociant passait beaucoup d'ordres de vente qui avaient pour effet de faire baisser les prix. Plus tard dans la journée, quand le marché redevenait plus actif, non seulement Vitol pouvait acheter des volumes à un prix attractif à la suite de quoi il annulait les ordres de vente passés un peu plus tôt. Le procédé s'est répété suffisamment de fois pour pour que la CRE s'empare du dossier et saisisse le Cordis. Vitol n'est pas un petit acteur du paysage énergétique. Fondé à Rotterdam en 1966, le néerlandais s'appuie sur quelque 40 représentations dans le monde et commercialise quotidiennement plus de sept millions de barils de pétrole brut et de produits dérivés.
Le cas de Vitol ne serait pas isolé. Même si la CRE refuse d'en dire beaucoup plus, plusieurs enquêtes portant sur la surveillance des marchés de gros sont ouvertes actuellement. Ni les noms des sociétés concernées ni le calendrier des procédures n'est communiqué.

La libéralisation du marché du gaz, ou le retour aux immenses scandales boursiers du début du XXème siècle !

Une autre absurdité : la privatisation des barrages hydroélectriques.

Donc la Commission Européenne  a décidé d’imposer la concurrence sur l’énergie hydroélectrique. Pourtant, il s’agit d’un marché naturellement limité et concernant des ressources publiques – 1) on ne peut pas construire autant de barrages que l’on veut. 2) C’est une industrie où la sécurité est primordiale et le profit ne peut être le seul moteur – les barrages ont tué plus que le nucléaires. 3) C’est un secteur qui a été relativement négligé ces dernières années et qui nécessite de gros investissements, pour la sécurité et aussi pour augmenter la productivité, et les expériences étrangères montrent que les opérateurs privés ne les feront pas. 4) Enfin, l’énergie hydroélectrique constitue une énergie durable et écologique au plus haut point, et une énergie d’appoint mobilisable à volonté lorsqu’une pénurie menace, justement ce dont nous avons le plus grand besoin !

Mais aucune de  ces considérations n’est de nature à faire reculer la secte libérale au pouvoir à Bruxelles ! Et devant les réticences de la France, la très redoutable et rigide  Commissaire à la Concurrence, Margareth Vestager a expédié en novembre 2015 un véritable missile : « La Commission considère que les mesures par lesquelles les autorités françaises ont attribué à EDF et maintenu à son bénéfice l’essentiel des concessions hydroélectriques en France sont incompatibles avec l’article 106 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. ». Das ist Klaar ?

Les Allemands ont gentiment expliqué à la Commission que leurs monopoles régionaux équivalent à une concurrence au niveau national, et que donc, ils ne feraient rien ;  les Portugais se sont dépêchés de faire passer leurs concessions de service public sur l’hydroélectrique à cent ans ; l’Autriche a choisi 80 ans, ce qui laisse aussi le temps de voir venir les prochaines Commissions. La Norvège et la Suède ont carrément choisi de garder le contrôle public de leurs barrages – ce qui n’empêche pas les Suédois d’être candidats à la reprise de barrages en France.
Mais la France, elle, va obtempérer.

Le fait que les barrages hydrauliques, non seulement produisent, avec le nucléaire, la seule énergie électrique décarbonnée, pilotable ; que leur entretien et les conditions de leur exploitation doivent impérativement faire passer la sécurité avant les profits ( les catastrophes liées aux barrages ont fait beaucoup plus de mort que le nucléaire) ; qu’ils ne font pas que produire de l’électricité, mais gèrent aussi la ressource hydraulique de toute une vallée, pour les agriculteurs, pour les pêcheurs, pour des activités de loisir diverses ; qu’ils jouent un rôle important dans la sécurité des centrales nucléaires en assurant un débit suffisant à leur refroidissement, bref qu’ils sont impliqués dans des missions de service public et même de sécurité publique, tout cela impose une conclusion : les barrages électriques ne doivent pas être privatisés !

L’ensemble des organisations syndicales s’oppose à cette libéralisation de la production hydraulique. CFDT, CFE-CGC, CGT et FO sont allés manifester devant la Commission Européenne sur le mot d’ordre : « Stop à la casse du modèle hydroélectrique français et au bradage des concessions hydrauliques ! » Face à la volonté de la Commission européenne d’ouvrir à la concurrence l’exploitation des barrages, les syndicats de l’énergie veulent défendre « le patrimoine hydroélectrique français et ses missions de service public » et entendent « mettre en garde les eurodéputés contre les conséquences des choix de la Commission, notamment sur la gestion des ressources en eau de ces barrages » actuellement gérés en majorité par EDF. On trouvera d’autres éléments sur le site de la CGT, qui mène une campagne exemplaire (avec FO et la CFE-CGC) pour sauver le service public de l’électricité (voir https://www.mainbassesurlenergie.com), et notamment le fait qu’en cas de pénurie d’électricité, il sera très tentant pour les exploitants des centrales hydrauliques d’attendre le quasi-effondrement du réseau pour profiter du prix spot le plus élevé possible !

Les syndicats n’ont pas été entendus. La voix de la raison non plus. Les leçons de l’expérience de libéralisation californienne de l’électricité, qui a conduit à un effondrement toatl, puis à une renationalisation, non plus.

 C’est pourquoi il est urgent de quitter cette Europe-là !

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