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dimanche 24 mars 2019

Jours de Colères Edouard Philippe_ Emmanuel Macron, les Gilets Jaunes, le Grand débat


Suite aux manifestations assez destructrices, notamment sur les Champs-Elysées de l’acte XVIII (quand même !) des gilets jaunes, une série de déclarations assez « martiales » (dixit Le Monde, 20 mars 2019) d’Edouard Philippe, visiblement sous pression de Macron.

Extraits, en commençant par le plus gratiné : les Lanceurs de Balles de Défense

« Les polémiques sur l’usage des LBD (lançeurs de balles de défense ont conduit à ce que des consignes inappropriées soient passés pour réduire leur usage », s’est plaint le chef du gouvernement, en référence aux cartouches moins puissantes qui auraient été confiées samedi aux policiers.

Rappelons quand même ceci : la répression policière (certes nécessaire), c’est une morte, plus de 140 blessés graves, plus de 2000 blessés, un bilan répressif inégalé depuis la guerre d’Algérie ! Selon même Laurent Nunez, Secrétaire d’Etat à l’Intérieur : «  Depuis le début du mouvement des Gilets jaunes, plus de 13 000 tirs ont été enregistrés (83 enquêtes sont en cours) et 2 200 manifestants ont été blessés ».

Les LBD, interdits dans la quasi-totalité des pays européens, c’est l’appel du Conseil de l’Europe et celui du comité de l’ONU pour les droits de l’homme à enquêter sur ces pratiques policières en France e, matière de maintien de l’ordre !

C’est l’appel des ophtalmologistes français à un moratoire sur leur utilisation : « Le grand nombre de balles tirées avec une force cinétique conservée à longue distance et l'imprécision inhérente à cette arme devaient nécessairement entraîner un grand nombre de mutilations… Notre démarche est uniquement celle de médecins, purement humaniste, avec pour seul but d'éviter d'autres mutilations. Un appel d’abord adressé à Macron, puis, faute de réponse, publié dans le JDD du 11 mars.
Et le Préfet de Police de Paris, Michel Delpuech « un fusible idéal » est immédiatement débarqué ; et dans la foulée, son directeur de cabinet et le patron de la Direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne (DSPAP). Et trois de chute. Pourquoi : il leur est reproché  de ne pas avoir été au courant d’une note de la DSPAP qui donnait comme instruction aux policiers de limiter leur usage du LBD. Les instructions demandaient aux forces de l'ordre de ne pas utiliser cette arme controversée "pour le maintien de l'ordre".

S’il n’y avait pas eu à Paris le préfet Grimaud, courageux et lucide qui sut et put résister aux jusqu’au boutistes du gouvernement, il y aurait eu des morts dans le Paris de mai 68. Alors, ce gouvernement ferait bien de garder ses nerfs !

Et déjà, dans la foulée, des dérapages bien inquiétants.

Sentinelle – les militaires responsables du maintien de l’ordre ?

Tiens, une nouveauté, l’appel aux militaires. Le gouvernement annonce martialement : « La mission antiterroriste militaire Sentinelle sera donc mobilisée de manière renforcée ce samedi pour une nouvelle journée potentiellement à hauts risques dans la crise des «gilets jaunes».

Panique, et le moins que l’on puisse dire c’est que les militaires n’apprécient pas –certains ou leurs proches vont jusqu’à envisager un refus d’obéissance. Car leur fonction n’est pas le maintien de l’ordre- que feront-ils si des manifestants viennent forcer leurs barrages ou s’en prendre à eux ? Tirer à balles réelles ou se laisser désarmer ? ils n’ont pas beaucoup d’autres options ! L(armée conre le peuple ?

Retropédalage du gouvernement : en fait, il n’y a rien de changé, les militaires, comme précédemment, auront  pour mission de protéger les bâtiments officiels et autres points fixes, ce qui permettra aux forces de l'ordre de se concentrer pleinement sur la manifestation…Bon, ben alors ?

Re Panique le vendredi  : « Le général Bruno Leray, gouverneur militaire de Paris, a affirmé ce vendredi 22 mars, que les soldats de l’opération Sentinelle, appelés en renfort lors de la 19e journée de mobilisation des Gilets jaunes, ont le droit de tirer avec leur arme, si leur vie ou celle des gens qu’ils protègent est menacée. »

Laurent Nunez, le Secrtéire d’Etat, devant l’Assemblée, le mardi 19 mars : « Le secrétaire d'État à l'Intérieur Laurent Nuñez a annoncé la décision des autorités de considérer toute personne participant aux manifestations des Gilets jaunes comme «émeutier», Pour l'avenir et dès samedi prochain, nous partons du principe que ces rassemblements sont des rassemblements d'émeutiers qui ne visent qu'à causer des troubles»,.

Mazette !

Certes, il parait que le gouvernement s’est pris une avoinée de Macron, contraint de rentrer prématurément de son séjour pyrénéen au ski, mais là ils perdent la tête ! 
En attendant, Parisiens, ou même provinciaux : si vous avez un gilet jaune dans votre sac, un simple gilet jaune, à un endroit où ça plait pas aux policiers, mais vous, vous le savez même pas), juste une promenade avec un gilet jaune dans le sac à dos, eh bien c’est 135 euros ! Premières amendes distribuées samedi 23 mars ! (mais ça, c’est parce les manifestants étaient paisibles ! Quand ils seront bien énervés, on verra !). Pour porter un pull avec un slogan « oui au RIC »( referendum d’initiative citoyenne : 135 euros !

Une insurrection rampante

Pour revenir sur les incidents du 16 mars sur les Champs, il est tout de même assez étrange que le gouvernement soit incapable d’agir contre le petit nombre d’éléments d’extrême gauche (black block) effectivement décidés à provoquer l’émeute. En est-il vraiment incapable ? Alors, il doit céder la place !
Ou bien laisse-t-il faire pour déconsidérer les vrais Gilets Jaunes ? Ce serait encore plus grave ! En attendant, ceux qui sont arrêtés et jugés immédiatement, ce ne sont pas eux, mais des manifestants beaucoup moins préparés- tous les juges le constatent.

Reste qu’effectivement, un certain nombre de Gilets Jaunes, qui se seraient (qui parfois se sont) opposés au début du mouvement à la violence semblent l’admettre plus facilement. On peut y voir le résultat d’une inquiétante mais assez logique acculturation à la violence, à force de LBD et de grenades de désencerclement, de tabassages, de brimades, comme ces CRS écrasant bien volontairement les lunettes d’un manifestant. Même se faire gazer lorsqu’on manifeste paisiblement n’a rien d’une expérience agréable et peut finir par énerver. De cette violence là, le gouvernement porte aussi sa part de responsabilité.

Tout comme il porte sa part de responsabilité de la violence initiale, ce gouvernement, cette présidence, qui n’a rien voulu voir, rien voulu entendre des manifestations contre les plus rétrogrades régressions des lois du travail depuis un siècle ; qui n’a rien voulu voir, rien voulu entendre d’une des plus longues grèves des services publics des transports, et qui a pris plaisir à humilier et déconsidérer les corps intermédiaires ( syndicats, mais aussi élus locaux), avec ce président , minable imitateur de Trump, signant avec ostentation et plaisir non dissimulé les ordonnances qui lui permettaient d’imposer sans concertation un programme ultra libéral pour lequel il n’avait pas été élu.

Il faudrait ressortir cette célèbre image de mai 68 : la chienlit, c’est lui ! avec Macron remplaçant De Gaulle (oui, je sais, ça fait bizarre). Car la chienlit, c’est lui et ses provocations incessantes, et sa volonté imbécile et maladive à appliquer un programme pour lequel il n’a pas été élu ! La répression, à un point inégalé jusqu’alors, c’est lui ! la justice tordue jusqu’ à infliger des interdictions préalables de manifester, c’est lui !  La volonté de contrôler l’information, en décidant ce qui est une fake news  c’est lui !, les attaques contre les corps intermédiaires, bases de la démocratie, et leur mise à l’écart systématique, c’est lui !

Les lanceurs de balles de défense, intérdits dans la quasi-totalité des pays européens, c’est lui,  c’est lui ! Les grenades de désencerclement, interdits partout ailleurs, c’est lui, une morte, plus de 140 blessés graves, plus de 400 blessés, un bilan répressif inégalé depuis longtemps c’est lui, l’appel du parlement européen contre les violences policières, l’appel du comité de l’ONU pour les droits de l’homme à une enquête sur ces violences c’est lui !

Les manifestations des Gilets Jaunes ? En réalité, le pays est en état d’insurrection rampante (cf. la grève du zèle très pénalisante mais peu médiatisée des douaniers) Et le gouvernement ferait bien de ne pas perdre ses nerfs et de rechercher une issue politique. Ou de partir !

La Farce du Grand Débat, opération de communication présidentielle

Et la solution ne viendra probablement pas du Grand Débat. Le gouvernement annonce fièrement un grand succès avec 1,9 million de contributions sur  le site dédié . Problème : Selon les chiffres du collège des "garants" du Grand Débat, mi-février, c’est en réalité 210.000 personnes qui ont contribué, quelques-uns étant visiblement des stakhanovistes de la contribution. C’est loin d’être le succès proclamé ! 10.452 réunions locales ? Avec combien de participants chacune? Et qui ? ça, on le sait  Surtout des retraités, très peu de jeunes, très peu d’actifs, et encore moins gilets jaunes…

D’où ce coup de gueule de l’un des garants, le plus averti des choses politiques, le politologue Pascal Perrineau, qui a regretté sur Europe 1 "la communication présidentielle et gouvernementale…On comprenait très bien qu’au début du processus, il y ait cette communication, puisque le 'grand débat' était quelque chose de nouveau. On aurait ensuite préféré que la communication présidentielle et gouvernementale baisse en intensité. Ça n’a pas été le cas » ,. Chargés de veiller à l'indépendance du débat, les "garants" avaient recommandé au départ du processus que l'exécutif se tienne en retrait."Un frein à une participation encore plus importante". "Il y a une grande méfiance dans le pays de tout ce qui vient d’en haut. Le 'grand débat' a été pris à l’initiative du président de la République. Le collège des garants considérait qu’en faisant cette recommandation de bien dissocier la communication gouvernementale et le 'grand débat', on protégeait le gouvernement et le président contre eux-mêmes", a poursuivi Pascal Perrineau. "Le gouvernement et le président, et c’est leur droit, n’ont pas choisi cette voie. Cela a peut-être été un frein à une participation encore plus importante »

Et cette critique de Chantal Jouanno : « Ce qu'Emmanuel Macron et le gouvernement ont organisé, ce n'est pas un débat public, mais une opération de communication politique». Parmi les réserves de Jouanno, rappelons que la CNDP ( Commission Nationale du Débat Public), soumise à des règles strictes en matière d'organisation d'une telle consultation, n'aurait jamais pu accepter que « l'Exécutif puisse relire et corriger le rapport final !

En fait de grands débat, on a vu Macron parler, et parler, et parler encore, passer et repasser des heures durant ce qui fut son seul succès étudiant, le grand oral de l’Ena. Fascinant, morbide, inquiétant.

Mais la CSA a justement décidé que ces interventions seraient décomptés sur le temps de parole audiovisuel du gouvernement…

Et Le Monde du 20 mars nous apprend que Macron était furieux que son grand débat soit ainsi confisqué par les émeutes des gilets jaunes. Folie de l’ego, immature, inquiétant !

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