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samedi 4 avril 2020

Ravages dans nos campagnes : après les margoulins de l’éolien, les arnaqueurs des méthaniseurs (2)


Un second plus technique essentiellement tiré d’un article de l’excellent bastamag


Comment fonctionne la méthanisation ?

Un méthaniseur est une sorte de marmite : une grande cuve, elle-même recouverte d’un dôme. La recette : des déchets végétaux – de l’herbe, du maïs, des pailles de céréales, de colza... pour le carbone – et des déchets animaux (lisiers et fumiers pour l’azote). Le tout est chauffé entre 35 et 40 degrés pendant de longues heures. Certains exploitants ajoutent des déchets issus de l’agro-alimentaire (venus des abattoirs, des laiteries...), des boues de stations d’épuration, les matières de vidange, ou encore des ordures ménagères 

Dans cette marmite sans oxygène, des bactéries transforment les déchets et produisent notamment du méthane (CH4, le fameux « biogaz »). Celui-ci est récupéré par de grands tuyaux pour être transformé en électricité via un générateur, ou injecté directement dans le réseau de gaz de ville. Le biogaz peut aussi servir à produire de la chaleur, pour des habitations par exemple, ou être utilisé comme carburant. A la fin du processus, il reste des « déchets » solides et liquides, qu’on appelle « digestat ». Ces digestats, riches en azote, phosphate, potassium... sont épandus sur les terres agricoles comme engrais.

Combien d’unités de méthanisation en France et de quels types ? L’Ademe en veut plus de 40.000 ?

En mars 2018, la filière méthanisation représentait, selon le ministère de la Transition écologique et solidaire, environ 400 installations agricoles, territoriales et industrielles, dont 230 à la ferme. Depuis cette date, le nombre d’installations accélère. Selon la base de données régulièrement mise à jour par le Collectif scientifique national méthanisation raisonnée (CNSMR), il y aurait 812 unités en service et 362 en projets.

Ce nombre ne cesse d’augmenter pour atteindre les objectifs fixés par la Loi relative à la transition énergétique de 2015. L’objectif : parvenir à 10 % de gaz « renouvelables » dans les consommations de gaz naturel à l’horizon 2030, ce qui impliquerait la mise en service d’environ 5784 méthaniseurs, soit plus de dix fois plus !

Pour atteindre les 100% de biogaz à l’horizon 2050, comme le suggère une étude de l’Ademe, 42 800 unités de « gros calibre » seraient nécessaires.
(Bon, hein, c’est l’Ademe, une agence de propagande !)

La moyenne d’intrants, végétaux (et animaux est aujourd’hui de 31.400 tonnes par unité de méthanisation et par an, contre 6000 tonnes avant 2017. Les unités construites tendraient donc, de plus en plus, à être de grande taille….

La méthanisation permet-elle de réduire les émissions de gaz à effet de serre ?

Le ministère de la Transition écologique et solidaire considère le gaz issu de la méthanisation comme une énergie renouvelable. 12 millions de tonnes de CO2 par an seraient évitées (3% de nos émissions) prévoit le ministère, avec 10 % de biogaz en 2030. Avec un système gazier en 2050 basé à 100 % sur du gaz renouvelable, 63 millions de tonnes de CO2 par an seraient économisées, selon l’Ademe…
(Bon, hein, c’est l’Ademe !)

Les données sur les gaz à effet de serre ne font toutefois pas consensus. « L’estimation du bénéfice environnemental d’un projet est aujourd’hui impossible », estime le Collectif scientifique national méthanisation raisonnée. En cause : l’impossibilité de se procurer les méthodes de calcul et formules utilisées par le logiciel DIGES2 servant à réaliser le bilan des méthaniseurs en termes de gaz à effet de serre. Ce programme de calcul ne prend par ailleurs pas en compte les émissions dues aux épandages des digestats dans les champs. L’Ademe n’a pas donné suite à nos demandes de précisions sur le bilan carbone du cycle complet de la méthanisation.

(Ben oui, c’est toujours l’Ademe, si sourcilleuse sur le bilan cycle complet du nucléaire (6gCO2/kw.h)

Y a-t-il des fuites et peuvent-elles alimenter l’effet de serre ? Oui, et pas qu’un peu !

Les fuites de gaz peuvent être liées à un défaut d’étanchéité ou à des fissures dans les cuves, stockages et conduits de méthanisation. « On n’a aucun chiffre en France, mais en Allemagne les fuites ont été observées régulièrement », souligne le chercheur Daniel Chateigner, membre du collectif scientifique national méthanisation raisonnée (CSNMR). « C’est logique, tout procédé industriel comporte des fuites à plus ou moins long terme. Surtout en milieu anaérobie [sans oxygène, ndlr], comme la méthanisation au sein desquels du sulfure d’hydrogène, très corrosif même sur les structures inoxydables, est présent. Les gaz émis sont des gaz à effet de serre que l’Ademe ne prend pas en compte dans ses calculs environnementaux. »
(Bon, j’en ai un peu assez de me répéter, c’est l’ Ademe)

Du méthane peut notamment s’échapper, en particulier lorsque les cuves de stockage de digestat sont laissées à l’air libre. Or, le méthane est un gaz dont l’effet de serre est 25 fois supérieur à celui du gaz carbonique. « Seulement 4 % de fuite de méthane suffisent pour que la méthanisation ait un impact sur l’effet de serre plus fort que l’utilisation des carburants fossiles », souligne le CSNMR. « Les cuves de méthanisation doivent donc être parfaitement étanches car la moindre fuite de méthane grève lourdement le bilan gaz à effet de serre de l’opération », précise à ce sujet l’association Solagro, spécialisée dans les transitions écologiques.

Cette dernière alerte également sur le risque de volatilisation de l’azote lors de l’épandage, sous la forme de protoxyde d’azote. Le pouvoir de réchauffement global du protoxyde d’azote (N2O) est de 310 fois celui du gaz carbonique : c’est le second gaz à effet de serre émis par l’agriculture.

La méthanisation enrichit-elle ou appauvrit-elle les sols ?

Avec la méthanisation, le digestat solide épandu sur les champs nourrirait le sol, et le digestat liquide jouerait le rôle d’engrais pour les cultures. Mais selon le Collectif scientifique national méthanisation raisonnée (CSNMR), le digestat épandu entrainerait une perte de carbone progressive du sol. L’Ademe prévoit de mettre un couvert végétal intermédiaire entre deux cultures alimentaires – on parle de CIVE, Cultures intermédiaires à vocation énergétique –, que l’on garde pour le méthaniseur.
Avant, ces cultures intermédiaires retournaient au sol et l’alimentaient. « Avec la méthanisation à marche forcée, au lieu de laisser le sol se reposer, on le fait travailler en permanence sans qu’il ait le temps de se reconstituer entièrement, il s’appauvrit », estime Daniel Chateigner du CNSMR. Cette baisse de fertilité des sols pourrait nécessiter à terme l’utilisation de plus d’engrais.

Quel risque de spéculation et d’accaparement du foncier avec le biogaz ? 10 % de méthanisation de gaz impliquerait de consacrer plus de 18 000 km2 - soit la superficie de trois départements français !

En Allemagne, la politique de soutien à la méthanisation a engendré un développement fulgurant des surfaces de maïs pour nourrir les méthaniseurs, et une hausse du prix du foncier devenu inaccessible pour les petites fermes.

En France, certains agriculteurs s’inquiètent de dérives similaires. La Confédération paysanne de l’Orne a par exemple mené une action fin 2018 contre une unité de méthanisation dont les exploitants ont acquis 100 hectares de terres cultivées dans le but d’alimenter cette unité. Ils constatent également un prix des ressources fourragères bien au-dessus des prix pratiqués avant l’arrivée des méthaniseurs - 80 euros, contre 40 euros la tonne de paille à presser…

Les calculs réalisés par le Collectif scientifique national méthanisation raisonnée sont également inquiétants. Atteindre l’objectif de 10 % de méthanisation de gaz impliquerait de consacrer plus de 18 000 km2 - soit la superficie de trois départements français - à des cultures servant uniquement à alimenter les méthaniseurs . D’après ce collectif, des méthaniseurs se retrouvent déjà aujourd’hui en compétition pour l’approvisionnement en intrants.

(c’est là qu’on voit que l’Ademe délire !!!)

La méthanisation contribue t-elle à l’industrialisation des élevages ?

Un agriculteur qui se lance dans un tel projet doit posséder un troupeau « important », ou chercher des sous-produits dont il sera alors dépendant, auprès d’usines agroalimentaires notamment. En ce sens, les projets individuels de méthanisation auraient tendance à davantage relever de « gros » élevages. Notre enquête révèle d’ailleurs un afflux de demandes pour des méthaniseurs adossés à des élevages industriels.

La méthanisation peut être contradictoire avec l’agriculture paysanne soucieuse d’élevage en plein air. En effet, optimiser une unité de méthanisation implique de laisser les animaux en stabulation le plus longtemps possible, hors des prés, afin de récupérer leurs effluents pour nourrir quotidiennement le méthaniseur.

Y a-t-il des risques d’incident dans les unités de méthanisation ? Oh, que oui : intoxications, explosions, nuisances diverses

La réglementation stipule que les digesteurs doivent être implantés à plus de cinquante mètres des habitations occupées par des tiers afin de minimiser l’impact en cas d’accident. Les usines de méthanisation ne sont pas classées Seveso mais plusieurs « phénomènes dangereux » restent néanmoins associés au biogaz. Un document du ministère de l’Agriculture et de l’Ineris liste les nombreuses exigences de sécurité à adopter dans les installations de méthanisation agricole.

En 2019, le collectif scientifique national méthanisation raisonnée (CSNMR) a relevé 21 incidents sur des méthaniseurs, dont 18 sur des méthaniseurs d’agriculteurs. Les incidents sont de plusieurs ordres : pollutions olfactives, déchirement de bâches au-dessus des dômes des digesteurs contenant le gaz, incendie, explosion

Certains faits sont également troublants comme la mort de 23 veaux en contrebas d’une unité de méthanisation entre août 2017 et janvier 2018. Les résultats des analyses d’eau menées par l’agriculteur ont révélé des taux de coliformes, c’est-à-dire de bactéries liées à des matières fécales, anormalement élevés et la présence de métaux lourds dans l’eau.

Concernant le risque sanitaire, l’Ademe reconnait que des germes peuvent résister à la méthanisation et se retrouver dans le digestat.

Le CSNMR pointe également le risque d’émissions de gaz irritants et dangereux pour la santé comme l’ammoniac ou l’hydrogène sulfuré, en cas de fuite par exemple, et demandent des contrôles indépendants fréquents. « Le rythme de l’incidentologie croît plus vite que celui des installations, preuve d’un manque de considérations des dangerosités de ces usines », estime le collectif scientifique.

Remarque : l’hydrogène sulfuré, outre son odeur épouvantable,  c’est ce que dégagent les algues pourrissantes et qui a tué un troupeau de sanglier, et probablement au moins un joggeur et un employé municipal sur les plages bretonnes.

Comment les méthaniseurs sont ils controlés ?

En dessous de 30 tonnes de matières entrantes par jour, il n’y a pas d’étude d’impact et l’unité relève d’un simple régime de déclaration.
Entre 30 et 100 tonnes de matières entrantes par jour, l’unité relève d’un simple  régime d’enregistrement : elle est soumise à une contribution envoyée à l’inspection des installations classées, puis à l’avis du conseil municipal et à une consultation publique. Au-dessus de 100 tonnes de matières entrantes par jour, l’unité entre dans le régime d’autorisation qui implique une enquête publique et administrative, ainsi qu’une autorisation préfectorale.

Une fois le méthaniseur mis en service, il revient à celui qui l’exploite de réaliser des « auto-contrôles ». « C’est tout le problème des limites », note Jean-Marc Thomas, paysan en Bretagne. « Prenons un projet à 29 tonnes par jour. A 30 tonnes, il bascule du régime de déclaration au régime d’enregistrement. Comment avoir la garantie que demain n’entreront pas 31 tonnes par jour ? » La même réserve concerne le ratio de 15 % de cultures alimentaires dédiées…

Pour terminer, une note de Sauvons Le Climat : Le biogaz obtenu contient toutes sortes d’impureté et des quantités importantes de CO2. Le tout nécessite des opérations complexes de séparation du CO2 et de purification, coûteuses en énergie.

Pour rendre le méthane conforme aux normes de transport et d’utilisation. Il faut également comprimer le méthane à 80 bars pour le transport. Au total, le rendement global devrait être proche de 50 %.
 « Sauvons le Climat https://twitter.com/sauvonsleclimat/status/1132405331135475719)

Donc les méthaniseures, des installations dangereuses, peu contrôlées, polluantes, aux nuisances diverses (puanteur, trafic routier, perte de valeur immobilière) favorisant l’agriculture intensive, dégradant les sols , à  la rentabilité mal assurée et dont le bilan en terme de gaz à effet de serres est très très  incertain, voire négatif,  en raison d’un cycle mal évalué, et des émissions par fuite de méthane très fréquentes, des dégagements d’azote et pire, de protoxyde d’azote lors de l’épandage des digestats ; et encore, d’hydrogène sulfuré, toxique.

Le  gaz vert est tout simplement un programme complètement fou (10 % de méthanisation de gaz impliquerait de consacrer plus de 18 000 km2 - soit la superficie de trois départements français - à des cultures servant uniquement à alimenter les méthaniseurs ), non seulement inutile, mais néfaste pour le climat.
Et pourtant, après les margoulins de l’éolien, , les arnaqueurs des méthaniseurs s’apprêtent à déferler dans nos campagnes, avec la bénédiction de l’Ademe et d’Elisabeth Borne ! 

Mulhouse | Un méthaniseur pionnier à Sausheim

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