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samedi 26 septembre 2020

L’éolien flottant : un sacré défi qui n’en vaut pas la peine ?

 La France est-elle en retard pour le développement de l’éolien off shore :?

Sur le sujet plus général de l’éolien offshore, cf. Les plans délirants d’une l’Union Européenne sous influence pour l’éolien off shore

https://vivrelarecherche.blogspot.com/2020/08/les-plans-delirants-dune-lunion.html

Remarque ; on nous dit que la France est extraordinairement en retard pour le développement de l’éoline off-shore. En retard par rapport à qui ? Cela s’explique parfaitement en ce qui concerne l’éolien posé, car la France dispose  de peu de rivages aussi favorables que les fonds sablanneux, peu profonds et étendus de la mer du Nord ; en France, le fonds marins plongent rapidement et ne sont guère favorables à l’éolien posé.

Cela a d’ailleurs été reconnue par la Commission Européenne qui a validé les tarifs extrêmement gééreux accordés aux parcs Française d’éolien posé : La Commission européenne a accepté des tarifs d’achats entre 131 et 155 euros par mégawattheure (MWh) les justifiant aisni :

« Ce soutien élevé par rapport à ceux pratiqués en mer du Nord ou en Baltique se justifient par deux particularités des côtes françaises, explique la Commission : des vents plus faibles et une nature de sol plus complexe (sols rocheux carbonatés au lieu de sols sableux ou argileux) ».

Alors l’éolien off shore peut-il constituer une solution ?

L’exemple Equinor, Hywind,Tampen : ça coûte très très cher et les investisseurs se précipitent pas

 En 2016, il n’existait que quelques démonstrateurs de l’éolien flottant dans le monde et déjà, les prometteurs éoliens, qui commencent à être un peu bloqués sur terre et sur mer proche des côtes, annoncent un nouvel eldorado. Pour eux, aucun doute !

Le seul retour d’expérience signi­ficatif dont nous disposons actuellement sur l’éolien flottant est celui de la ferme pilote Hywind, qui fonctionne depuis octobre 2017 à 25 kilo­mètres au large de la côte nord-est de l’Écosse. Cette première ferme éolienne flottante de taille commerciale, a été développée par la branche New Energy Solutions du groupe pétrolier norvégien Statoil- maintenant Equinor. Ses cinq éoliennes ont des rotors de 154 mètres et des mâts de 253 mètres (dont 175 sous le niveau de l'eau-flotteur vertical). Ils ont été convoyés lors de l'été 2017 depuis la Norvège jusqu'au site de Buchan Deep, à 25 kilomètres au large des côtes nord-est de l'Écosse, où la vitesse moyenne du vent est de 10 mètres par seconde, soit 36 km/h.

La production a démarré le 18 octobre 2017. Une batterie au lithium de grande capacité (1 MWh) produite par Masdar stockera l’énergie produite. Durant son premier hiver, le facteur de charge du parc s'est élevé à 65% soit 10 points de plus qu'un parc offshore classique.

Ce premier parc éolien flottant de taille commerciale, en cours d'installation par Statoil en Écosse, a obtenu une subvention publique de près de 160 livres (177 €) par MWh produit pendant 20 ans, qui s'ajoutera aux prix de marché britannique.

Hywind a survécu à une période orageuse de trois mois de novembre 2018 à janvier 2019, alors qu'un ouragan de l'Atlantique Nord a envoyé des houles atteignant 27 pieds…

Commentaire  ; ça marche bien, dans un environnement particulièrement favorable, mais ça coûte cher. 65% de facteur de charge, c’est impressionnant, mais ça laisse tout de même 35% à suppléer par des énergies pilotables. Il faudrait savoir comment ces 65% sont réparties : de longues périodes de calmes plats, ou des variations erratiques et brutales ?

Un an de fonctionnement so far, so good. Il reste à voir la tenue dans le temps des éoliennes d’Equinor

Rebondissant sur son succès pour l’instant de Hywind, Equinor se lance dans Hywind Tampen,  un projet d'énergie éolienne flottante de 88 MW destiné à fournir de l'électricité aux opérations sur le terrain offshore de Snorre et Gullfaks en mer du Nord norvégienne. Ce sera le premier parc éolien flottant au monde à alimenter des plates-formes pétrolières et gazières offshore. Hywind Tampen sera également un banc d'essai pour le développement ultérieur de l'éolien flottant, explorant l'utilisation de turbines nouvelles et plus grandes, des méthodes d'installation, des amarres simplifiées, des sous-structures en béton et l'intégration entre les systèmes de production d'énergie à gaz et éolienne.

Le problème est que Equinor n’a pas réussi à convaincre des partenaires financiers, et a du coup, dû faire appel à l’Etat norvégien ; lequel détient et contrôle toujours 67% des actions d'Equinor. En qu'en plus d'obtenir la subvention de 2,9 milliards de NOK,( la pmus élevée accordée par l’Etat norvégie dans le domaine énergétique),  Equinor et ses partenaires peuvent également annuler 90% du reste des coûts du projet sur six ans, ce qui signifie que l'État norvégien et les contribuables assument la responsabilité et les risques financiers. Equinor avait clairement indiqué dès le départ qu'elle ne souhaitait pas risquer ses propres profits et capitaux sur le projet, et qu'elle ne pouvait aller de l'avant que si l'État investissait de l'argent.

Commentaire : Cette  décision du gouvernement norvégien de financer la totalité d'un énorme projet éolien offshore pour la compagnie pétrolière publique Equinor a suscité des critiques et des interrogations. Le moins qu’on puisse dire est que la démonstration de la rentabilité financière n’est pas acquise…

Un seul autre parc d’éoliennes flottantes vient d’être mis en service : WindFloat Atlantic (Portugal à  20 km des côtes de Viana do Castelo). trois structures flottantes de 30 mètres dont les colonnes sont distantes de 50 mètres les unes des autres seront installées pour former le premier parc éolien flottant d'Europe continentale : puissance unitaire : 8.3MW. Le parc a été raccordé en jullet 2020. Le projet Windfloat a été hautement subventionné par un apport de 29.9 millions d’euros du programme européen NER300 , 6 M € du Portugal, 60M€ de la BEI

Et c’est tout pour le moment !

Les difficultés spécifiques de l’éolien flottant

Si l’éolien offshore a mis du temps à se développer, c’est que les analyses de rentabilité avaient jusqu'à présent dissuadé la plupart des entreprises. «Le temps nécessaire pour atteindre la rentabilité est long et les sommes d'argent nécessaires sont importantes, compte tenu de l'incertitude sur le marché éventuel» (Agence internationale pour les énergies renouvelables)

Selon l’Ademe, le coût de production de l’électricité éolienne en mer est estimé entre 123 € et 227 € le MWh pour des machines posées et entre 165 € et 364 € le MWh pour l’éolien flottant(2016). Il est attendu que les couts baisseront, mais ce sont des projections !

Le coût élevé de l’éolien flottant s’explique par plusieurs facteurs.

- Pour les banques et investisseurs, ces projets apparaissent comme nouveaux et ils demandent de fortes primes de risque

- Cette technologie ne bénéficie pas encore de la fabrication en série qui diminue le coût de l’éolien posé.

-Plus grave, la technologie de référence n’est pas fixée et il existe plusieurs modèles sur lesquels on manque de recul

Hywind le plus avancé, utilise un  flotteur vertical, mais bien d'autres solutions sont encore à l'étude (voir ci après pour les parcs français)

-Les dispositifs de suivi sur sites restent expérimentaux (camera, jauges de contraintes) A ce stade, il est impossible de mutualiser les moyens de surveillance et de diminuer le coût

Pour illustrer l’absence de maturité de la technologie, sur 4 projets prévus en France, ce seront 4 technologies différentes qui seront employées !

Eoliennes Flottantes du Golfe du Lion (EFGL) prévoit la construction et l’exploitation, début 2022, de 3 éoliennes flottantes à plus de 16 kilomètres au large des communes de Leucate et du Barcarès, pour une puissance totale de 30 MW. Les  3 flotteurs conçus par la société Principle Power et construits par Eiffage sont les mêmes que pour le le projet portugais Windfloat. Le flotteur est constitué de 3 colonnes

Situé en mer Méditerranée au large de Gruissan (Aude), le projet EolMed consiste en l’implantation de quatre éoliennes d’une puissance unitaire de 6,2 MW, installées sur des fondations flottantes en béton d’environ 15000T à plus de 18 km des côtes. Les éoliennes seront sur la bathymétrie des 60m de fond et raccordées à des ancres charrues au travers de 8 lignes d’ancrage maximum.


Provence Grand Large : piloté par EDF Renouvelables, à 17 km au large de la plage Napoléon située sur la commune de Port-Saint-Louis-du-Rhône. 3 éoliennes de 8.4 MW,  SBM Offshore pour la conception, la fabrication et l’installation des flotteurs. L’électricité produite sera ensuite transportée grâce à un ensemble innovant de câbles dynamiques capable de suivre le mouvement des éoliennes, lui-même connecté à un câble d’export sous-marin puis souterrain, jusqu’au Poste de raccordement électrique

Eoliennes flottantes de Groix : 3 éoliennes de 9,5 MW, porté par l’opérateur français EOLFI associé au groupe chinois CGN. Le flotteur sur lequel repose l’éolienne a été développé par Naval Energies, il est constitué de 4 colonnes cylindriques en acier assurant la flottabilité et d’une embase ballastée assurant la stabilité. Ce flotteur semi-submersible est ancré au fond de la mer par 5 lignes de mouillage pour maintenir l’éolienne sur sa position et éviter qu’elle ne dérive.


Or le choix technologique est loin d’être indifférent ! Flotteur en bèton ( moins cher) ou en acier, vertical, horizontal, plusieurs colonnes,  semi immergé ou non, les choix techniques ne sont pas indifférents : le coût du flotteur compte pour près de 60%.

Pas plus qu’ailleurs, les projets éoliens offshore ne sont viables économiquement. Les quatre projets en cours en France recevront une aide à l’investissement s’élevant au total à 330 million € et le courant produit sera acheté au tarif de 240€MWh pendant 20 ans ! Le soutien financier au fonctionnement devrait même se situer dans une fourchette 260-280 €/MWh, de sorte que, toutes aides cumulées, les Français devront payer le MWh produit par les éoliennes flottantes entre 323 et 343 € soit au total sur 20 ans de 660 à 700 millions.

Le parc de Groix & Belle-Île bénéficiera d’un ­tarif d’achat de 240 €/MWh de la totalité de sa production (même quand on n’en aura pas besoin) sur vingt ans. En comparaison, le prix de marché se situe aux alentours de 50 €/MWh, et EDF est contrainte de vendre 25 % de sa production nucléaire et hydraulique 42 €/MWh à ses concurrents. Le surcoût sera payé par les familles.

Pour plus de données, on pourra se référer à

https://www.books.fr/cout-exorbitant-eoliennes-flottantes/#:~:text=Selon%20la%20Commission%20de%20Bruxelles,la%20plus%20on%C3%A9reuse%20d%C3%A9ploy%C3%A9e%20actuellement%20%C2%BB

Selon la Commission de Bruxelles, qui s’appuie sur les chiffres avancés par l’Ademe, les coûts d’investissement de l’éolien flottant représentent « de 5 à 6 fois les coûts de l’investissement terrestre et près de 2 fois les coûts de l’offshore posé", qui est la ­filière la plus onéreuse déployée actuellement

Quelques remarques et questions concernant plus spécifiqument le projet de Groix :

https://www.sauvonsleclimat.org/images/articles/pdf_files/JEANDRON/Analyse_du_projet_EolMed_v1.pdf

- Pour une puissance installée de 24,8 MW les promoteurs annoncent une production électrique annuelle se situant entre 95 et 100 GWh correspondant à un facteur de charge de 46%. Il serait du même niveau que les meilleurs sites de la Mer du Nord, ce qui est très improbable et demandera à être vérifié.

- Il nous est indiqué que les 100 GWh produits correspondront à l’énergie consommée par 50 000 habitants, affirmation fantaisiste : rapporté à une consommation nationale de 474 000 GWh (en 2018) ce type de calcul supposerait une population de 237 millions de français !

- Le chiffre avancé, de plus de 30.000 tonnes de CO2 évitées annuellement, suppose que chaque KWh d’électricité éolienne remplacera la production d’une centrale au fuel. Or les centrales au fuel ne représentent que 0,5% de notre production en 2018 et servent surtout à gérer les à-coups de consommation, et éventuellement de production, de l’électricité intermittente en particulier. Un chiffre plus réaliste serait de 7 fois inférieur au mieux . De plus le site EolMed annonce la fabrication de barges de 15 000 tonnes de béton armé. De cette fabrication résultera une émission de 159 kgCO2e/ tonne de béton armé, soit 2 400 tonnes de CO2e pour la seule barge.

- Enfin une éolienne flottante, au-delà de la phase d’implantation,  impose des restrictions de pêche supérieures à celles d’une éolienne sur fondations, en raison des très grands cables et chaines d’ancrages susceptibles d’être déplacés par des chaluts. Un e zone de sécurité d’environ 1 km de diamètre s’applique, interdisant aussi le mouillage et les activités sous-marines. Seul le transit des petits navires reste autorisé, jusqu’à 200 m des flotteurs.

-  La société de projet dénommée «Ferme Éolienne Flottante de Groix et Belle Île SAS (EFGBI) est contrôlée à 51% par EOLFI, elle-même détenue à 90% par CGNEE, filiale de l’énergéticien chinois CGN. Ce dossier spécifie que « La société de projet est la structure qui sera la bénéficiaire des aides d’état ». On peut raisonnablement se demander pourquoi des groupes internationaux aussi puissants ont besoin d’être aussi fortement aidés par le citoyen français pour le développement d’une technologie pour laquelle la France vise 6 GW en 2030.

Ca fait cher, et, en plus, on subventionne grassement des puissants groupes étrangers !

Commentaire : rappelons la phrase de Jean-Marc Jancovici devant le Commission Aubert :

« L’éolien offshore aujourd’hui, c’est 25 milliards d’euros qui vont partir dans ce dispositif qui a encore moins d’intérêt que l’éolien terrestre. S’il y a un truc qu’il faut arrêter tout de suite, c’est bien ça ! Avec ces 25 milliards d’euros vous avez de quoi payer 6000 euros de prime de conversion du fuel en pompe à chaleur aux quatre millions de ménages français qui sont chauffés au fuel, »

Et cette remarque de l’excellente association Sauvons Le Climat :

« Il convient enfin de rappeler que la France n’émet que 1% des gaz à effet de serre de la planète et que l’électricité y est déjà décarbonée à 97%.

Il serait beaucoup plus efficace de développer les énergies renouvelables thermiques, de développer le transport électrique, de substituer des énergies non carbonées aux chauffages fioul et gaz, mais tout ceci suppose par ailleurs, la mise à disposition d’une énergie électrique de qualité, en quantité et à un prix supportable par nos concitoyens »

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