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mardi 27 septembre 2022

Nouvelles difficultés pour l’éolien : Baisse tendancielle de la vitesse du vent ?

Sur un sujet connexe, les conséquences sur le climat local de l’éolien off shore,  https://www.energiesdelamer.eu/2022/08/22/le-rapport-de-copernicus-avait-constate-un-reel-affaiblissement-en-2021/

Sur le sujet de la durabilité de l’éolien , notamment en raison de sa consommation de matériaux, cf https://vivrelarecherche.blogspot.com/2020/01/petits-problemes-avec-leolien-4.html ; https://vivrelarecherche.blogspot.com/2022/08/leolien-off-shore-1-une-equation.html

Affaiblissement des vents sur l’Europe : des moyennes de vitesse parmi les plus faibles depuis que l’enregistrement existe (43 ans)

Copernicus est le programme d’observation de la Terre de l’Union européenne. Il s’intéresse à notre planète et à son environnement pour le bénéfice de tous les citoyens européens. Il offre des services d’information basés sur l’observation de la Terre par satellite et les données in situ (non spatiales).

Copernicus a publié mi-2021 un rapport intitulé : « Vents faibles » dont voici les principaux extraits :

« En 2021, certaines parties du nord-ouest et du centre de l’Europe ont connu certaines des vitesses de vent moyennes annuelles les plus faibles depuis au moins 1979 »

 « L’importance des anomalies de vent de 2021 peut être appréciée en classant 2021 par rapport aux autres années depuis que les enregistrements existent, soit 1979. Cela révèle que certaines régions d’Irlande, du Royaume-Uni, du Danemark, d’Allemagne et de Tchéquie ont connu les vitesses de vent annuelles moyennes les plus faibles ou les deuxièmes plus faibles dans la base de données ERA5 depuis 43 ans. Les grandes anomalies négatives en Irlande et au Royaume-Uni au troisième trimestre ont également été les plus faibles ou les deuxièmes plus faibles pour cette période de l’année. »

« Les séries chronologiques d’anomalies annuelles de la vitesse du vent pour les cinq pays présentant les plus grandes anomalies annuelles négatives de la vitesse du vent aident à replacer 2021 dans le contexte des 43 dernières années. Pour l’Irlande et le Royaume-Uni, les anomalies négatives pour 2021 se démarquent clairement et se classent au deuxième rang derrière 2010. Pour la Tchéquie, l’anomalie de 2021 a été la plus négative en 43 ans et a suivi une période de plus d’une décennie (depuis 2009) de vitesses de vent inférieures à la moyenne ou proches de la moyenne. Pour le Danemark et l’Allemagne, les anomalies de 2021 ont également été les plus négatives, mais restent relativement proches des valeurs de plusieurs autres années dans l’enregistrement des données.

Effet sur les capacités éoliennes

« La baisse de la vitesse du vent a entraîné une réduction du potentiel de production d’énergie éolienne dans les pays touchés » Rappelons qu’une  une réduction de 10% de la vitesse du vent entraîne une baisse de 27% de la puissance d'une éolienne - qui, par ailleurs, a besoin d'une vitesse minimale pour produire de l'électricité.

« Les résultats montrent que pour les facteurs de capacité terrestre, la Tchéquie, l’Irlande, l’Allemagne, le Royaume-Uni et le Luxembourg présentent les cinq plus grandes anomalies négatives, avec des valeurs allant de -12,7% pour le Luxembourg à -15,7% pour la Tchéquie (graphique 3). Les anomalies CF sont plus importantes que les anomalies de vitesse du vent discutées ci-dessus en raison de la relation de puissance cubique entre la vitesse du vent et l’énergie éolienne. 

Pour les FC offshore, l’Irlande, le Royaume-Uni, l’Allemagne, le Danemark et les Pays-Bas présentent les cinq plus grandes anomalies négatives, avec des valeurs allant de -8,8% pour les Pays-Bas à -12,8% pour l’Irlande. La réduction estimée des facteurs de charge  pour ces pays en 2021 est conforme aux rapports du secteur de l’énergie éolienne sur la production réelle. »

Commentaire : De fait, entre juillet et septembre 2021, la Grande-Bretagne, l’Allemagne et le Danemark n’ont utilisé que 14% de leur capacité éolienne installée contre 20 à 26% les années précédentes. Un rapport publié par Forbes indique qu’au cours du premier semestre 2021, la production d’électricité éolienne en Allemagne a chuté de 25% (46,8 TWh) comparée à la même période en 2020 (59,4 TWh), imposant un recours accru aux combustibles fossiles et augmentant de 25% les émissions de carbone liées à la production électrique dans le pays »

Conclusion : « Enfin, alors que la part de la production d’énergie éolienne ne cesse d’augmenter dans le bouquet énergétique européen, les conditions de vent en 2021 soulignent l’importance de surveiller et de comprendre la variabilité du vent et la façon dont elle peut changer avec le climat…. Avec la montée en puissance de l'énergie éolienne, comme en France, l'évolution des niveaux de vitesses du vent va devenir un indicateur particulièrement suivi. »



Commentaire : bon, ben décidément, la géniale energiewende allemande, le mixte gaz éolein, quand ça veut pas, ça veut pas !

 Origine du phénomène : conjoncturelle ou évolution climatique ?

Blocage nord Atlantique : Copernicus explique que « certaines études ont montré que les régimes de haute pression (ou « blocage ») au-dessus de l’Atlantique Nord-Est et du Groenland sont généralement associés à des vitesses de vent inférieures à la moyenne sur le nord et le nord-ouest de l’Europe] Comme le montre la section « Circulation atmosphérique » du présent rapport, ces conditions météorologiques se sont produites en 2021. »

Alors origine climatique ou pas ? Observons d’abord que ce phénomène dure peu ou prou depuis 3 ans et s’accentue.

Par ailleurs, le VIème rapport d’évaluation  du Giec suggère qu’il y a 8 chances sur 10 que la vitesse des vents diminue dans la zone Europe Méditerranée et environ 5 chances sur 10 en Europe du Nord si la température moyenne  mondiale augmente de 2°C après 2050.

« Les tendances de la vitesse du vent près de la surface à travers le monde ont révélé que les vents se sont généralement affaiblis au-dessus des terres au cours des dernières décennies », note Paul Williams, professeur et chercheur en sciences atmosphériques à l’Université de Reading (Angleterre)…Cela suggère que le phénomène fait partie d’une véritable tendance à long terme, plutôt que d’une variabilité cyclique ».

De fait, il semble existes un consensus général. En 2010, une équipe de chercheurs franco-britanniques a par exemple analysé les enregistrements de vents de plus de 800 stations situées dans l'hémisphère Nord entre 1979 et 2008. Ce serait une des premières études d'envergure du genre.

Leur conclusion: les vents auraient diminué de 5 à 15 % selon les endroits, pendant ces trois décennies. Cette conclusion rejoint celle du Consortium québécois sur la climatologie régionale et l'adaptation aux changements climatiques (Ouranos). En 2015, ce consortium rapportait que "la majorité des stations québécoises présentent une tendance à la diminution de la vitesse moyenne des vents tout au long de l'année, entre 1953 et 2006, même si quelques stations nordiques dérogeaient de ce constat général.

Une étude américaine reconnait au contraire un phénomène général de décrue des vents «(stilling ») dans  les années 1980 à 2010 mais une remontée récente de 17% entre 2010 et 2017

« L’énergie éolienne, une source d’énergie alternative en croissance rapide, a été menacée par la réduction de la vitesse moyenne mondiale du vent de surface, qui se produit sur terre depuis les années 1980, un phénomène connu sous le nom d’apaisement (encalminage,  « stilling »)  terrestre mondial.

Les données du vent provenant de stations in situ du monde entier montrent que l’encalminage s’est inversée vers 2010 et que la vitesse mondiale du vent sur terre s’est rétablie.  Le renforcement a augmenté le potentiel de l’énergie éolienne de 17 ± de 2% entre 2010 et 2017, augmentant le facteur de capacité éolienne américaine d’environ 2,5% et expliquant la moitié de l’augmentation du facteur de capacité éolienne américaine depuis 2010.

https://www.nature.com/articles/s41558-019-0622-6

N'étant pas climatologue, je vais m'arrêter là. Mais la conclusion s'impose :  on connaissait et s'inquiétait  des tempêtes, il faudra s'habituer aux sécheresses éoliennes, ces longues périodes de vents faibles.  et les surveiller,

Et ce n’est pas une bonne nouvelle pour l’éolien. Le mix énergétique que nous choisirons doit en tenir compte ! 

samedi 24 septembre 2022

Projet de Loi "Accélération des Energies Renouvelables" : - les Gardiens du Large écrivent aux députés et sénateurs

Inquiétés par les projets de loi éolien en Bretagne Sud, qui transforment les plus beaux paysages bretons en zones industrielles pour une bénéficle climatique illusoire, les Gardiens du Large ont écrit aux députés et sénateurs pour protester contre le projet de loi accélération des énergies renouvelables

voir aussi https://www.gardiensdularge.org/


Madame la Députée, Monsieur le Député,

Vous allez avoir à examiner un projet de loi portant sur des mesures d’urgences pour accélérer les projets d’énergie renouvelable.

Notre association, les Gardiens du Large, particulièrement implantée sur Quiberon, Belle-Île, Groix et la côte du Morbihan souhaite vous informer et vous alerter spécifiquement sur les dangers de ce texte en matière d‘éolien off-shore.

Ces mesures « temporaires », qui dureraient quatre ans, instaurent un véritable état d’exception au profit des promoteurs éoliens. Elles permettraient notamment, en soutenant que ces projets ENR répondent à un « intérêt public majeur », de déroger aux mesures de protection d’espèces protégées. Elles supprimeraient tout débat sur la disposition de chaque usine éolienne en instaurant un seul et unique débat public pour toute une façade maritime, le public ne pouvant alors s’exprimer que sur de grandes zones à vocation “éolien en mer” ! Elles limiteraient considérablement les possibilités pour les citoyens concernés et les associations de contester l’utilité d’un projet ou simplement de tenter d’en limiter les effets, et notamment les recours devant les tribunaux.

En bref, il ne resterait pas grand-chose de nos plus beaux rivages transformés en zones industrielles éoliennes, et plus rien de cinquante ans d’efforts de la protection des paysages et de la biodiversité du littoral. (Cf. lien avec un tract que nous avons massivement diffusé)

Pour mieux saisir les enjeux en termes de paysages, de biodiversité, d’activités économiques, notamment la pêche, et tout simplement de la vie de tous ceux qui aiment la mer, il faut entrer davantage dans les ordres de grandeurs et les pratiques.

Dans un exceptionnel avis conjoint de février 2022 (Quelle place pour les éoliennes dans le mix énergétique français ?), les trois Académies des sciences, des beaux-arts et des sciences morales et politiques ont dressé le constat suivant :

« Pour obtenir le permis de construire, les entreprises responsables de l'implantation des éoliennes terrestres et littorales sur une commune sont pourtant tenues de présenter une étude paysagère. Cette dernière n'est qu'un simulacre d'intégration plastique. Par conséquent, il n'est pas étonnant que se développe, chez les populations concernées, le sentiment de vivre dans un territoire sacrifié par une politique autoritaire dont le ressort leur apparaît avant tout idéologique.

Qui plus est, en parfaite contradiction avec la loi de protection de la Nature de 1976 et celle de la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages de 2016, les études d’impact des éoliennes sur la biodiversité ont, dans le passé, démarré le plus souvent une fois l’implantation des projets décidée, négligeant la phase « évitement » de la séquence « éviter-réduire-compenser » telle que décrite dans la loi

Simulacre de concertation et tromperie sur les paysages

Un « parc » éolien est en vérité une gigantesque zone industrielle. En face des côtes du Morbihan, le parc dit de Saint-Nazaire (mais en fait plus proche de la péninsule de Guérande) comprendra 80 éoliennes hautes de 180 m, entre 12 et 20 km des côtes du Morbihan - les deux tiers sont déjà en place.

Le parc de Bretagne-Sud comprendra d’abord 20 éoliennes sur 50 km² à 15 km de Belle-Île, 20 km de Groix, puis 40 sur 100 km2 plus au large. Soit 60 éoliennes de 260 m de haut (Tour Montparnasse 210 m).

Chacun de ces parcs occupera une superficie au moins équivalente à celle de Belle-Île (dont le point culminant s’élève à 70m !).

Enfin, en co-visibilité avec Saint-Nazaire, une troisième zone industrielle de 62 éoliennes de 210 mètres de haut est en cours d’aménagement à 11.7 km des côtes de l’Île d’Yeu et 17 km de celles de Noirmoutier !

Il est difficile de nier le gigantisme de ces installations industrielles et l’effet massif qu’elles auront sur nos paysages maritimes. Or c’est pourtant ce qui a été fait en présentant des photomontages minorant systématiquement l’impact des éoliennes par divers procédés dont la vision panoramique et des éclairages soigneusement choisis sont les plus courants.

Alors, quand malgré les simulations concoctées à leur intention, les habitants voient très nettement surgir dans leur horizon les éoliennes qu'ils n'étaient pas censés apercevoir, il y a de la sidération et beaucoup de colère. Et du désarroi de la part des maires trompés, qui ont à rendre compte- et qui au surplus toucheront une taxe éolienne bien plus faible qu’espérée. C’est ce qui se passe en ce moment pour le parc de Saint-Nazaire.

Michelle Quellard, Maire du Croisic : « Notre côte n’a plus rien de sauvage...La vue que l’on en a, a bien changé… L’horizon face mer est "obstrué" par un site de 78 km2, alors que Le Croisic ne représente un territoire que de 4,5 km2.».

Cf. la lettre que nous avons adressée à ce sujet aux élus locaux.

Il faut encore sur ce sujet signaler une spécificité française dénoncée par le CNPN (Conseil National de Protection de la Nature): « Par facilité technique et financière, tous les parcs français actuellement décidés l’ont été dans la zone des 12 miles, entre 10 à 20 km des côtes, alors que la moyenne en Europe est de 41 km ». (Auto-saisine du CNPN sur le développement de l'énergie off-shore, juillet 2021)

Et ceci alors qu’on ne cesse de vanter la filière de l’éolien flottant, qui permet techniquement de s’éloigner des côtes !

Le projet de loi qui vous est présenté ne permettra tout simplement plus aux populations concernées de se faire entendre.

Simulacre de concertation et tromperie sur la biodiversité

Les études sur la biodiversité ont lieu après le choix des premières zones, et, pour certaines, leur résultat est attendu après la construction de la zone éolienne ! Or, comme le constate le CNPN, « les impacts potentiels sur la biodiversité́ représentés par le développement de l’éolien off-shore en France peuvent être très importants sur la biodiversité́ marine, en premier lieu sur l’avifaune reproductrice, migratrice et hivernante provenant de l’Europe entière… L’impact du bruit sous-marin continu généré par les turbines en fonctionnement est un exemple de domaine (...) dont nous ne pouvons pas encore rendre compte. Les effets à long terme sur les populations de poissons et la manière dont les changements de comportement observés affectent la condition, le succès de la reproduction et la survie des animaux, ne sont pas encore connus.» Il y a en effet beaucoup de questions qui se posent, en particulier sur la migration et l’orientation des grands dauphins et autres cétacés, très présents dans ces zones. Certains phénomènes inhabituels commencent à se répéter un peu trop souvent (cétacés remontant les fleuves ou s’échouant).

Nous n’avons aucune expérience de l’effet en milieu marin d’éoliennes géantes de 14 GW et de 250 mètres de haut, et encore moins de parcs géants d’éoliennes géantes. Des études préliminaires montrent des effets importants sur la stratification de la colonne d’eau, la turbidité, les courants et le régime local des vents.

Et là encore, une spécificité française également dénoncée par le CNPN : « La transgression de ce principe de non-installation de parcs éoliens en zones Natura 2000 (à notre connaissance il n’y a qu’un seul parc éolien dans une ZPS en Europe, en Allemagne) … Trois projets de parcs sont en infraction à ce principe, Dunkerque, Port-Saint Louis du Rhône et le projet d’Oléron ».

Le projet de loi qui vous est présenté ne permettra tout simplement plus de prendre en compte la protection de la biodiversité.

Simulacre de concertation et tromperie sur la pêche

Sur aucun des parcs projetés, il n’a été possible d’obtenir un compromis jugé acceptable par les pêcheurs. A Saint-Brieuc, Erquy (pourtant exemples de pêche gérée durablement), Le Tréport, Noirmoutier, les pêcheurs n’ont pas été entendus et se mobilisent. Leur inquiétude est réelle, ils savent leur survie en cause, car leurs collègues étrangers de la Mer du Nord les ont prévenus :

Job Shott, président d’EMK (syndicat des pêcheurs néerlandais) : « Avec ce qui est construit ou décidé en Mer du Nord, 25% des zones traditionnelles de pêches sont déjà occupées…Il faut comprendre que nous sommes chassés de la mer. Il ne nous reste presque rien au sud de la mer du Nord. Ce sont des espaces où nous avons toujours pêché de génération en génération. Pendant combien de temps encore pourrons-nous déguster du poisson frais dans notre assiette ? »

Là encore, il y a simulacre de concertation et mensonge lorsque les plus hautes autorités de l’Etat laissent croire que la pêche sera possible dans les parcs. Et quant au fameux « effet récif », le CNPN a fait valoir qu’il n’avait été nullement démontré sur des fonds rocheux, et qu’au surplus, il favorisait surtout le développement d’espèces invasives indésirables.

La Commission pêche du Parlement Européen a souligné que les parcs éoliens ne devraient être construit qu’en l’absence d’incidences négatives sur la pêche, qu’il y avait un véritable risque sur « l’approvisionnement responsable et durable en denrées alimentaires et la sécurité alimentaire », et appelé l’Union à légiférer davantage « si les États membres n’intègrent pas équitablement les pêcheries dans leur planification de l’espace maritime ».

Le projet de loi qui vous est présenté va exactement à l’inverse de ces préconisations et ne garantit nullement la compatibilité de la pêche et de l’éolien off-shore.

Madame, Monsieur le Député,

Dans ce courrier déjà long, nous n’avons pu aborder que quelques aspects d’un programme éolien off-shore massif qui représente « une menace imminente d’une ampleur telle qu’elle hypothèque l’avenir de la vie marine côtière » (Sea Shepherd) dans tous ses aspects.

Nous tenons aussi à rappeler que ce programme éolien massif est inutile à court terme car ne permettant pas de suppléer à un manque d’électricité pilotable ou de contribuer au problème des pointes électriques de consommations ; et que de façon générale, miser sur l’éolien pour décarboner l’électricité et sortir des fossiles est un peu l’équivalent de se jeter à l’eau pour éviter d’être mouillé, tant il est reconnu que dans la situation française la réponse à l’intermittence de l’éolien ne peut se trouver qu’en recourant massivement à des sources de production pilotables carbonées. Devant la Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables (Commission Aubert) formée par l’Assemblée précédente, l’un de nos meilleurs experts en matière de transition énergétique, M. Jean-Marc Jancovici déclarait à propos de l’éolien off-shore, de piètre efficacité dans la lutte contre le dérèglement climatique : « S’il y a un truc qu’il faut arrêter tout de suite, c’est bien ça ! ».

De par sa nature d’énergie très peu dense, l’éolien off-shore occupe de vastes étendues marines qui se trouvent ainsi privatisées au profit de quelques groupes très puissants et souvent étrangers. C’est ignorer que pour reprendre l’expression d’un Commissaire de la Commission Nationale du Débat Public, « la mer n’est pas vide et contrairement à l’apparence, elle n’est pas libre ».

Pour l’ensemble de ces raisons, et pour que nous puissions préserver un patrimoine naturel dont nous avons hérité et que nous devons transmettre, nous vous appelons, Madame la Députée, Monsieur le Député, à rejeter purement et simplement ce texte.

En vous remerciant de l’attention portée à ce courrier, nous vous prions d’accepter l’expression de notre considération ; et peut-être aurons-nous le plaisir de vous voir dans une Bretagne aux libres horizons !

Voir https://www.gardiensdularge.org/




jeudi 8 septembre 2022

Avis du CNTE (Conseil National de la Transition Ecologique) sur le projet de loi Borne d’ accélération des renouvelables)- version provisoire

 CNTE (Conseil National de la Transition Ecologique) : Projet de délibération 2022-04 : Projet d’avis portant sur le projet de loi relatif à l’accélération des énergies renouvelables

Un conseil très divisé et cela se voit 

En propos liminaire, Le CNTE regrette les délais beaucoup trop courts de transmission du projet de loi, de l’étude d’impact et de l’exposé des motifs lors de la phase de consultation.  Il reconnaît l’urgence à accélérer le déploiement des énergies renouvelables, pour répondre aux crises énergétiques, au dérèglement climatique et à la souveraineté énergétique, déplore  l’absence  de mesures d’économies d’énergie et de sobriété,

mais dans le même temps souligne :

« l’insuffisance de l’exposé des motifs, ne permettant pas de rendre un avis fondé sur un diagnostic et des connaissances partagés, ni d’appréhender l’objectif de déploiement des énergies renouvelables dans sa globalité »

Commentaire : Ce qui est un peu contradictoire avec la pétition de principe précédente !

Concilier le développement des ENR avec les risques de porter atteint à l’environnement et à la biodiversité !

Le CNTE :

- Attire l’attention sur l’importance de prendre en compte, pour la suite du débat sur le projet de loi, les positions exprimées par le Comité national de la biodiversité et le Conseil national de la protection de la nature,

Commentaire : Bon alors là c’est simple «  L’adéquation des objectifs éoliens offshore avec l’objectif de zéro perte nette de biodiversité inscrit aux articles L. 110- 1 et L. 163-1 du code de l’environnement paraît difficile voire impossible à atteindre au regard de la connaissance actuelle des incidences et surtout des moyens techniques d’expertise et de pilotage permettant d’y remédier efficacement, ainsi que l’objectif de préservation du paysage marin.

https://vivrelarecherche.blogspot.com/search?q=CNPN :

- Souhaite la consultation du Conseil national de la mer et des littoraux, du Conseil national de l’eau et de la Commission nationale du débat public ;

- Souligne l’insuffisance de l’étude d’impact du projet de loi, notamment sur les impacts environnementaux et sur l’impact des précédentes mesures de simplification déjà prises

- Insiste sur l’enjeu impératif de concilier le développement de nouveaux projets d’énergies renouvelables avec les enjeux de la crise climatique, de préservation de l’environnement, notamment ceux de la biodiversité, de l’eau, du littoral, de la mer, de la montagne et de leurs écosystèmes, au regard des risques de leur porter atteinte et d’augmenter l’artificialisation, créant de surcroît de potentiels conflits d’usage des espaces, dans un souci de souveraineté ;

Commentaire : En ce qui concerne l’éolien off shore et la pêche, pour ne pas parler du nautisme et du tourisme, les conflists existent déjà. Aucun projet n’a reçu l’accord des pêcheurs, Et ils ont raison de se méfier

Ainsi Job Shott, président d’EMK (syndicat des pêcheurs néerlandais) : « Avec ce qui est construit ou décidé en Mer du Nord, 25% des zones traditionnelles de pêches sont déjà occupées…Il faut comprendre que nous sommes chassés de la mer.

La Commission pêche du Parlement Européen a souligné que les parcs éoliens ne devraient être construit qu’en l’absence d’incidences négatives sur la pêche, qu’il y avait un véritable risque sur « l’approvisionnement responsable et durable en denrées alimentaires et la sécurité alimentaire », et appelé l’Union à légiférer davantage « si les États membres n’intègrent pas équitablement les pêcheries dans leur planification de l’espace maritime ».


Et pour les surfaces occupées, la physique (densité d’énergie) est impitoyable !



-Insiste, de la même manière, sur le fait que le développement de ces projets doit intégrer les enjeux sociaux sous-jacents notamment ceux de l’emploi ;

- Rappelle la responsabilité de la France et ses engagements internationaux dans le domaine de la biodiversité

- Insiste sur la nécessaire articulation des mesures du projet de loi avec la Programmation pluriannuelle de l’énergie et le débat à venir dans le cadre de la stratégie française sur l’énergie et le climat, ainsi qu’avec les travaux européens relatifs au plan REPowerEU de la Commission européenne

Commentaire : En effet, avant de se lancer dans la construction de 50 parcs géants éoliens off shore, il serait bon de savoir quelle sera la future PPE. Supposons qu’elle vise la prolongation des centrales nucléaires à 70 voire 80 ans comme pour des centrales homologues aux USA. et acte la construction de 12 à 24 EPR2… ce n’est plus pareil.

- Certains membres dénoncent le fait que l’article 3 risque d’aboutir à une régression du droit de l’environnement, et demandent sa suppression ;

Commentaire : l’article 3 dit joliment « : Relever tous les seuils de soumission à évaluation environnementale ou pour réaliser un examen au cas par cas pour les porter à un niveau découlant du parangonnage européen.

Traduction : comme les évaluations environnementales prennent du temps, on essaiera de s’en passer dans la plupart des cas. Sauf que c’est contradictoire avec la jurisprudence du Conseil d’Etat :

«  Il résulte des termes de la directive, tels qu’interprétés par la Cour de justice de l’Union européenne, que l’instauration, par les dispositions nationales, d’un seuil en-deçà duquel une catégorie de projets est exemptée d’évaluation environnementale n’est compatible avec les objectifs de cette directive que si les projets en cause, compte tenu, d’une part, de leurs caractéristiques, en particulier leur nature et leurs dimensions, d’autre part, de leur localisation, notamment la sensibilité environnementale des zones géographiques qu’ils sont susceptibles d’affecter, et, enfin, de leurs impacts potentiels ne sont pas susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine. » (CE, 15/04/2021, 425424)

Difficile par exemple de prétendre que les gigantesques parcs éoliens off shore prévus  ne sont pas susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement

- Rappelle que la participation du public aux débats légitime une transition énergétique choisie, et les projets en découlant, et constitue un facteur essentiel d’acceptabilité des projets ;

- Soutient que l’accélération et la parallélisation de procédures de consultation sans gardes fous pourraient affaiblir l’avis de l’Autorité environnementale portant sur les impacts environnementaux, et limiter ainsi le porté à connaissance du public, et s'interroge en ce sens sur la possibilité de lancer l’enquête publique en l’absence de l’avis de l’Autorité environnementale

Remarque : Très clairement le CNTE est donc contre l’une des dispositions phares du projet qui supprimerait l’obligation d’un débat publics pour chaque projet de parc pour le remplacer par un seul et unique grand débat public pour toute une façade maritime, le public s’exprimant sur de grandes zones «à vocation “éolien en mer”!

- Estime que l’égalité d’accès des citoyens requiert le maintien d’une présence physique lors de la participation du public, pour éviter la dématérialisation totale

Remarque : le CNTE aurait pu faire remarquer que l’ensemble de ces dispositions parait contraire à la Convention d'Aarhus. La Convention d'Aarhus, signée le 25 juin 1998 par trente-neuf États dont la France porte  sur  l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement.

Elle recommande notamment d’améliorer l'information environnementale fournie par les autorités publiques, de favoriser la participation du public à la prise de décisions ayant des incidences sur l’environnement; et d’étendre les conditions d’accès à la justice en matière de législation environnementale et d’accès à l’information.

Bref, tout ce qu’envoie balader la loi Borne d’accélération des ENR

Sur la RIIPM : Raisons impératives d'intérêt public majeur : la protection de la biodiversité est au même niveau une raison impérative d’intérêt public

- Certains membres s’opposent au mécanisme de reconnaissance automatique de la RIIPM (au I de l’article 6 de projet de loi) et la limitation du contrôle par le juge (au II de l’article 6 de projet de loi) ;

Commentaire : c’est clair, et ce serait encore une des, voire la disposition majeure qui sauterait !

- Attache une importance essentielle au strict respect de la séquence ERC (avec la priorité donnée à l’évitement) et des conditions encadrant la dérogation relative aux espèces protégées et sera vigilant à la mise en oeuvre des mesures de compensations, sans remettre en cause le potentiel de production alimentaire ;

Commentaire : En général déjà, les études sur la biodiversité ont lieu après le choix des premières zones, et, pour certaines, leur résultat est attendu après la construction de la zone éolienne ! Or, comme le constate le CNPN,dans ces conditions, l’Eviter de la séquence éviter, réduire compenser devient absolument impossible !

- Attire l’attention sur la nécessité d’encadrer les conditions dans lesquelles la déclaration d’utilité publique peut reconnaître, pour l’opération concernée, le caractère d’opération répondant à une raison impérative d’intérêt public majeur ; rappelle que la protection de la biodiversité est au même niveau une raison impérative d’intérêt public et que l’une ne saurait l’emporter sur l’autre ;

Concernant plus spécifiquement l’éolien off shore, le CNTE

- soutient que la mutualisation des débats publics à travers le document stratégique de façade ne doit pas nuire à la concertation projet par projet ;

- attache une importance essentielle à intégrer l’ensemble des enjeux sectoriels dans la planification spatiale maritime, et non pas les seules énergies marines renouvelables, aucune activité ne devant être écartée. Cette planification doit prendre en compte les impacts cumulés. A cet égard, le CNTE rappelle les directives européennes respectives à l’évaluation Plan programme et à l’évaluation Projet;

-  Appelle à préserver l’exercice des différentes pratiques de production halieutique et de pêche durables qui concourent, notamment, à la souveraineté alimentaire ainsi qu’à éviter et réduire les impacts directs générés sur les ressources et l’environnement marin ;

-Attire l’attention sur la nécessaire préservation des zones littorales lors des installations de production d’énergie et de leurs postes de raccordement ;

Concernant le titre IV relatif aux mesures de financement des énergies renouvelables et de partage de la valeur, le CNTE

- Appelle à ce que le service public concourt à garantir la sécurité de l’approvisionnement et l’accès de tous à l’énergie ;

Commentaire : ça me semble mettre en cause l’une des dispositions phares prévoit d’octroyer un tarif réduit de l'électricité aux voisins de centrales solaires ou de parcs éoliens. Dommage que le mot « péréquation tarifaire » ne soit pas prononcé !

En résumé, le CNTE insiste « sur l’enjeu impératif de concilier le développement de nouveaux projets avec les enjeux […] de préservation de l’environnement, notamment ceux de la biodiversité ». « Certains membres » du CNTE s’opposent au mécanisme de reconnaissance automatique de raison impérative d’intérêt public majeur, qui permet de déroger à la protection d’espèces ou d’habitats pour autoriser un projet renouvelable. Et « dénoncent » le risque que le projet aboutisse « à une régression du droit de l’environnement ».

Disons-le clairement, malgré la pétition de principe en faveur des ENR qui ouvre l’avis, il ne resterait plus grand chose du projet de loi d’accélération des ENR !

Et c’est très bien !