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samedi 25 mars 2023

Commission Schellenberger n°49: paroles de politiques : Elisabeth Borne, entêtement et art lourdingue de la défausse

 50% de plafond pour le nucléaire, mais pas de centrales à fermer

M. le président Raphaël Schellenberger. Vous aviez à l’époque, comme directrice de cabinet, produit une liste de 24 réacteurs à fermer dans la décennie suivant cette prise de décision. Pouvez-vous nous en détailler les modalités d’élaboration et les ambitions initiales ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre, ancienne ministre de la transition écologique et solidaire (2019-2020). J’ignore qui vous a dit que j’avais produit une liste de 24 réacteurs à fermer. L’accord entre le PS et les Verts de 2012 contenait effectivement une liste de 24 réacteurs à fermer. Cet accord politique n’a rien à voir avec mes fonctions de directrice de cabinet. Nous étions à l’époque dans le cadre du mandat de M. François Hollande, qui n’avait pas retenu cet objectif de fermeture, contenu dans l’accord Vert-PS de l’époque, Mme Martine Aubry étant Première secrétaire. Il avait en revanche gardé un objectif de 50 % du nucléaire dans la production d’électricité en 2025. Que des listes aient circulé à l’époque à la suite de l’accord Vert-PS de 2012 est tout à fait possible.

NB : mensonge et défausse : un objectif de 50% de nucléaire en 2025 impliquait bien de fermer 24 réacteurs

"Nous avons débattu dans le cadre de la loi de transition énergétique de la manière dont il était possible, y compris juridiquement, de prolonger les réacteurs au-delà de quarante ans. En effet, ces réacteurs ont été conçus sur la base d’une durée de vie de quarante ans et des débats juridiques portaient sur le fait que les enquêtes publiques menées lors de la réalisation des centrales nucléaires annonçaient cette durée d’exploitation. Certains, notamment les écologistes, qui faisaient partie de l’accord de gouvernement dans ce quinquennat, prônaient un arrêt administratif des centrales nucléaires au terme de ces quarante ans, ce à quoi je me suis opposée et qui n’a pas été retenu… Dans mon souvenir, nous avions retenu l’idée d’un débat public ou d’une consultation publique sur le principe de la prolongation et non d’exiger une nouvelle autorisation administrative.

Fessenheim : une décision politique…mais c’est la responsabilité d’EDF

 À cette époque, les modalités du plafonnement du nucléaire étaient aussi en débat, puisque le président François Hollande avait retenu l’objectif de 50 %, mais n’avait pas ciblé Fessenheim. La question de la centrale destinée à s’arrêter était donc débattue à l’époque.

M. le président Raphaël Schellenberger. Fessenheim n’était pas ciblée. Pour autant, vous comptiez dans vos équipes un délégué interministériel chargé de la fermeture de Fessenheim. Comment avez-vous construit, en 2014-2015, le choix de Fessenheim, qui est un choix politique et administratif, avec la création de ce poste de délégué interministériel ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre, ancienne ministre de la transition écologique et solidaire (2019-2020). Comme vous l’avez indiqué, ce choix a été politique. Pour mémoire, le sujet était celui du plafonnement, à une époque où l’on imaginait le démarrage de Flamanville beaucoup plus tôt. Pendant longtemps, l’idée a été que la puissance équivalente s’arrêterait lors du démarrage de Flamanville. Dans mon souvenir, EDF a été questionné pour savoir s’il existait un meilleur choix que celui de Fessenheim, mais EDF n’a jamais voulu proposer d’autre choix. Fessenheim a été la première centrale à avoir été construite et possède des caractéristiques très particulières qui ont rendu le processus d’arrêt irréversible, ne serait-ce qu’en raison des spécificités du combustible utilisé.

Le choix politique de l’époque était donc fondé sur des éléments qui ne relevaient pas de ma fonction de directrice de cabinet à l’époque, mais étaient sans doute en lien avec son statut de première centrale nucléaire construite, avec des sujets d’éventuel risque sismique et autres.

NB : n’importe quoi ; au moment où elle a été fermée, Fessenheim était la centrale avec les meilleurs performances

Les fermetures de pilotables mettant en danger la sécurité d’approvisionnement, c’est la faute à RTE…mais qui a nommé les responsables très politiques de RTE ?

M. le président Raphaël Schellenberger. Douze gigawatts de capacité de production électrique pilotable ont été fermés en France au cours des dix dernières années. Ces choix se fondent notamment sur des scénarios produits alors par RTE, qui prévoient des baisses substantielles du besoin électrique en France dans les années à venir. Comment recevez-vous ces scénarios au sein du ministère de l’environnement chargé de l’énergie ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre, ancienne ministre de la transition écologique et solidaire (2019-2020). En 2014, les informations à ma disposition étaient les bilans prévisionnels de RTE. Ils indiquaient que la problématique de la pointe était résorbée, vu de l’époque, et constataient que le solde exportateur de la France était important, avec plus de 40 térawattheures. Les bilans prévisionnels de RTE de l’époque, en lien sans doute avec les hypothèses de maîtrise de l’énergie et de réduction des consommations énergétiques, prévoyaient une évolution de la consommation d’électricité stable ou en baisse. Ces scénarios ont depuis été complètement réévalués, en lien notamment avec l’électrification des usages. À l’époque, aucune alerte ne pesait sur un quelconque risque sur la sécurité d’approvisionnement.

On peut regretter le manque de capacité prospective des administrations. Nous étions également peu avant l’Accord de Paris : nous ne nous donnions alors pas les mêmes ambitions de réduction de gaz à effet de serre. La loi de transition énergétique ne mentionne d’ailleurs pas la neutralité carbone : nous étions alors sur le facteur quatre. Donc je pense que l’on n’avait pas les mêmes objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et du coup pas les mêmes ambitions en matière d’électrification. La direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), dont c’est la responsabilité, n’a jamais contesté ni émis de doute sur les scénarios de RTE. Cela rend modeste sur les prévisions.

En 2020, Elisabeth Borne revendiquait encore la fermeture de Fessenheim  et l’objectif de baisse du nucléaire à 50% . Sans regrets.

M. le président Raphaël Schellenberger. J’en viens aux fonctions que vous avez exercées ensuite, notamment en 2020. Si comme directrice de cabinet de Mme Ségolène Royal, vous avez lancé le processus de fermeture de Fessenheim, vous en avez en quelque sorte assuré la boucle comme ministre de l’écologie en février et en juin 2020. Vous avez, à cette occasion, affirmé que l’on pouvait se réjouir de l’arrêt des deux réacteurs et qu’il marquait ainsi le premier pas vers l’objectif à atteindre de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans le mix électrique. Considérez-vous que cet objectif doive encore être poursuivi ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre, ancienne ministre de la transition écologique et solidaire (2019-2020). Nous ne raisonnons plus de la même façon, puisque nous avons désormais une vision beaucoup plus ambitieuse sur la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre et donc sur nos besoins de production en électricité. Il faut aujourd’hui déterminer le meilleur chemin pour répondre à nos besoins d’approvisionnement en électricité, ce qui a conduit le président de la République à annoncer le lancement des six nouveaux EPR. Cela nous conduit à demander à l’ASN d’étudier les modalités de prolongation au-delà de cinquante ans de nos réacteurs nucléaires et à proposer au Parlement le projet de loi voté sur l’accélération des énergies renouvelables et le projet de loi en cours de discussion sur l’accélération des projets de nouveaux réacteurs nucléaires.

Limite à 50% de nucléaire ; c’est encore la faute de RTE

Pour autant, même les scénarios étudiés par RTE qui envisagent la plus forte part de nucléaire visent un niveau proche de 50 %, notamment du fait de nos capacités à mettre en service des réacteurs dans les prochaines années 

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Une fois de plus, les prévisions de RTE sont votre outil principal. Vous dites qu’il est défaillant. Un exemple récent : vous dites aujourd’hui que le fait que RTE n’ait pas étudié un rapport où le poids du nucléaire est plus important est lié aux limites, affirmées sans preuve dans ce rapport, de la filière nucléaire. Votre ministre en charge, Mme Pannier-Runnacher, a indiqué hier dans Les Echos qu’elle demanderait à la filière si elle était capable de faire plus. Soit Mme Pannier-Runnacher se trompe, c’est-à-dire que la question a été posée et il lui a été répondu que la filière ne pouvait pas faire plus, soit la question ne lui a pas été posée et Mme Pannier-Runnacher va lui répondre. Le fait que RTE n’ait pas fait de scénario est-il lié, oui ou non, à une réalité de la filière, ou est-elle est liée à une posture politique ?

Pas de réponse :NB : RTE lui même a souligné que 50% n'était pas une limite gravée dans la marbre, le GIFEN a démentie cette limite, Framatome s'affirme bientôt capable de fabriquer au moins 2,5 cuves par ans

Le scenario 100% renouvelable, je sais p)lus qui l'a commandé...

M. Antoine Armand, rapporteur. Mme Ségolène Royal est venue devant notre commission avec une coupure de presse signalant que vous aviez demandé à EDF d’examiner un scénario 100 % renouvelables, semblant impliquer que vous auriez soutenu un tel scénario. Quelle est votre réaction à ce sujet ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre, ancienne ministre de la transition écologique et solidaire (2019-2020). Nous sommes dans des domaines où l’on peut se tromper, comme l’a montré le bilan prévisionnel de RTE. Il est donc responsable d’examiner tous les scénarios, pour faire les choix en toute connaissance de cause. En l’occurrence, l’étude menée par RTE a montré qu’un scénario 100 % renouvelable n’était pas soutenable, tant sur le plan économique que de sécurité d’approvisionnement. Cet élément est important et utile pour tous ceux qui pensent que le débat public doit se tenir sur la base de faits.





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