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samedi 1 avril 2017

Perplexité présidentielles (3)- le cas Macron et le dialogue social

Mais que pense donc M. Macron ?

A M. Macron, je reconnais une intelligence hors du commun, et une capacité à faire des erreurs une fois et une seule fois et à ne pas les reproduire. Alors il faudra qu’il tire une leçon de l’échange qui l’a opposé à Marine Le Pen lors du débat des cinq principaux candidats.   Interrogé sur les questions de politique internationale, M. Macron, au terme d'une longue intervention assez déconstruite, a été tacjé par Mme Le Pen: « Vous avez un talent fou, vous arrivez à parler sept minutes, je suis incapable de résumer votre pensée, vous n'avez rien dit, c'est le vide absolu, sidéral », 

Et, en effet, en écoutant ses discours, beaucoup de grandes envolées assez creuses et aussi beaucoup de contradictions : une colonisation qualifiée de crime contre l’humanité suivi d’un « je vous aime » lancé à des pieds noirs révoltés ; un « il n’y a pas de culture française, mais des cultures en France » suivi d’un article dans la Figaro pour expliquer sa conception de la culture française dont le fondement serait une  « ouverture sans pareil ». Un service militaire « parce que ce n'est pas le rôle de l'école que de tenir un discours fort sur les valeurs de la République » ; oui, mais un service militaire d’un mois (!) et la défense d’une école républicaine (on en est heureux !)

Mais s’il semble y avoir une constante dans le discours et la pratique de Macron, c’est une tonalité très jacobine, centralisatrice, autoritaire et hostile aux pouvoirs intermédiaires et contre-pouvoirs. C’est plutôt dangereux, surtout dans un domaine particulier, celui du dialogue social.

Dialogue social : la CFDT déboussolée par M. Macron : "Tout ne peut pas être géré d’en haut par la loi »

Le Monde rapporte ainsi comment ce syndicat très gentil vis-à-vis de la contre-réforme sociale de la loi travail Macron Valls qu’est la CFDT a été douchée à froid par l’audition du candidat Macron ( La CFDT craint pour le dialogue social, du 25/03/2017). A son secrétaire général Laurent Berger qui affirmait  que « le syndicalisme est porteur de l’intérêt général », « Que nenni, répond M. Macron. « L’intérêt général, a-t-il expliqué le 16 mars, c’est le législateur. Quand on demande aux syndicats de le porter, on les décale car ce n’est pas leur mission. On ne peut pas demander à un syndicat de définir les frontières de la réforme. » Et m’auteur de l’article du Monde, M. Noblecourt, poursuit : « La République contractuelle » de M. Macron est aux antipodes de la démocratie sociale. L’Etat décide, notamment sur la gestion des grands risques, ce qui l’amène à nationaliser le régime paritaire d’assurance-chômage. Les syndicats négocient dans les entreprises et dans les branches, mais la négociation interprofessionnelle disparait.
Alors la CFDT, dans son questionnaire adressé aux principaux candidats s’alarme des candidats qui « remettent en cause le dialogue social » et rappelle que «  la nécessaire construction d’un contrat social nécessite du temps et des lieux de débat et de concertation…Tout ne peut pas être géré d’en haut par la loi »
C’est en effet une attaque sans précédent contre les syndicats et leur rôle que semble préparer Emmanuel Macron. Jean-Claude Mailly, pour Force Ouvrière (FO) a dénoncé un « danger d’abandon de la république sociale », république sociale qui, rappelons-le figure dans la constitution de la République ; il semble que, comme certains autres, M. Macron se soit donné comme rôle de « détricoter le programme du Conseil National de la Résistance ».

F.O : « la gestion par les partenaires sociaux ça fonctionne »,  « le libéralisme économique conduit à l'autoritarisme social 

Dans une remarquable interview à la Tribune (La Tribune, 30/03/2017, Jean-Claude Mailly (FO) : "Macron est prêt à tout pour plaire à l'Allemagne) ; M. Mailly défend le protocole d’accord interprofessionnel conclut le 28 mars sur l’assurance chomage et s’inquiète des conceptions étatistes de  M. Macron  : « Comme toujours dans ce genre de négociation, il faut parvenir à un compromis. Je pense que nous sommes parvenus à un équilibre, ce qui explique notre signature. Prenons les points les plus délicats. Les seniors d'abord, je rappelle que le patronat voulait mettre la barre très haut, en montant de 50 à 59 ans l'âge nécessaire pour percevoir un maximum de 36 mois d'indemnités. C'était inacceptable. Au final, les seniors de 50 à 52 ans seront indemnisés 24 mois, mais six mois supplémentaires s'ils suivent une formation. Ceux de 53 à et 54 ans auront droit à 30 mois, plus six mois en cas de formation. Et à compter de 55 ans, les 36 mois sont maintenus. Sur les contrats courts, nous avons obtenu le maintien de la surcotisation de 0,5% sur les CDD d'usage durant dix-huit mois. Et avec l'augmentation de 0,05% de la cotisation patronale d'assurance chômage, 270 millions d'euros vont entrer dans les caisses de l'Unedic chaque année. Surtout, d'un point de vue plus politique, nous avons montré que la gestion par les partenaires sociaux ça fonctionne, alors que, certains veulent remettre en cause le paritarisme. »
Justement, que pensez-vous du projet d'Emmanuel Macron de faire directement gérer l'assurance chômage par l'Etat ?
Je suis en désaccord complet avec Macron sur ce point. Il veut passer au-dessus de la démocratie sociale. En vérité, Macron ne s'intéresse pas à l'assurance chômage, ce qui le préoccupe, c'est la dette du régime. Macron a un calendrier calé sur les élections allemandes. Il veut montrer à l'Allemagne que la France va mener des réformes structurelles et budgétaires. La dette de l'Unedic étant prise en compte dans le déficit public, tel qu'il a été défini par le traité de Maastricht, il va sabrer dans l'assurance chômage pour que la France repasse sous la barre des 3% de déficit. Il trouve donc que, actuellement, les partenaires sociaux ne font pas assez d'efforts. Mais j'attends de voir. En tout cas, l'attitude de Macron me conforte dans mon idée que le libéralisme économique conduit à l'autoritarisme social.
Et alors ? Vous leur avez indiqué quelles étaient, pour FO, les lignes jaunes à ne pas franchir ?
Exactement, tant sur la méthode et le calendrier que sur le fond des dossiers. Il est insupportable que certains, tel François Fillon, voire Emmanuel Macron, envisagent de recourir aux ordonnances pour passer en force et vite sur les questions sociales.

CFE-CGC : « le dialogue social ça marche,  les dirigeants politiques ne respectent pas le partenariat avec les partenaires sociaux « 

Ajoutons à cela les fortes critiques de la CFE-CGC…contre le programme de M. Fillon, mais qui visent aussi M Macron. M. Hommeril (CFE-CGC)  a souligné que 30.000 accords étaient signés chaque année en entreprise entre les directions et les syndicats. "M. Fillon, allez réviser vos chiffres! Le dialogue social ça marche en entreprise!". Dans son programme, M. Fillon propose de "modifier les règles du dialogue social", notamment en donnant "le dernier mot aux salariés grâce au référendum d'entreprise"; en instituant la liberté de candidature au premier tour des élections professionnelles; en relevant les seuils sociaux et, pour les représentants du personnel, limiter le temps consacré à l'exercice des mandats à 50% du temps de travail : « M. Hommeril rétorque : « Pour développer l'activité syndicale, on ne peut pas se permettre d'être un amateur. On doit avoir un souci de professionnalisme, sinon on est à côté de la plaque et on n'est pas très utile » et il se montre très véhément quand il parle des « dirigeants politiques qui ne respectent pas le partenariat avec les partenaires sociaux ».




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