Au nom de qui et quoi sacrifions- nous notre héritage et nos avantages
compétitifs ?
Extrait de La France dans le Noir,
Hervé Machenaud, les Belles Lettres : « A l’époque des grands
politiques visionnaires, la France a construit le parc de production
d’électricité le plus économique et le plus efficace d’Europe, insensible aux
variations des prix des matières premières, et n’émettant aucun gaz à effet de
serre. Ella a dans un gigantesque effort pour cette époque créé un outil industriel
pour en assurer le succès et la pérennité. Au nom de quoi et de qui les gouvernements
actuels accompagnent-ils sa destruction ? »
« Les services publics,
l’industrie, les services, qui représentent près des deux tiers de la consommation
de l’électricité en France, réclament une énergie régulière, à un prix stable
et garanti à long terme. L’impact du coût de l’énergie est considérable sur
l’économie, l’emploi et le niveau de vie. »
Fin 2011 , les prix de l’électricité des autres pays européens, étaient
en moyenne 50% plus élevés qu’en France (+70 euros/MWh), ceux de
l’Allemagne deux fois plus élevés (+110 eur/MWh). Cela représente pour un ménage
français une économie d’environ trois cents à
trois cent cinquante euros par ans par rapport à un ménage européen
équivalent et cinq cents à cinq cent cinquante euros par rapport à un ménage allemand. Dans le Pacte
pour la Compétitivité de l’industrie française remis au
Premier Linsitre le 5 novembre 2012, Louis Gallois écrit : « Le prix
de l’énergie électrique pour l’industrie est relativement bas en France, et
représente un avantage qu’il est primordial de préserver. … Le faible coût de
l’énergie comparé aux autres pays européens, est un atout pour l’industrie
française, Il fait partie des éléments qui
qui soutiennent la marge des entreprises et donc leur capacité à
investir. .. Dans la transition énergétique qui s’engage, il est essentiel que
cet atout, lié au développement de la filière électrique, ne soit pas perdu. Ce
sont des centaines de milliers d’emploi que cet avantage contribue à pérenniser. »
« Le nucléaire assure, à la
fois, l’indépendance nationale et la stabilité des coûts de production sur le
très long terme. Entre 1973 et 2010le taux d’indépendance énergétique de la
France est passé de 24% (dont 14% dus aux énergies fossiles locales qui ont
disparu depuis), à 51% grâce au nucléaire. Ce taux d’indépendance énergétique
est de 20% pour l’Espagne, et l’Italie, et s’il est de 40% pour l’Allemagne,
c’est grâce à ses abondantes ressources nationales de charbon lignite à partir desquelles
près de la moitié de l’électricité allemande est produite (source OCDE 2016) »
Et rappelons que le nucléaire constitue
un avantage imbattable pour la France en matière de lutte contre le réchauffement
climatique : Emissions de CO2 par type d’énergie en kg équivalent par TEP
(tonne équivalent pétrole) :Charbon : 1125 , Diesel Fuel :
860 ; Pétrole Essence : 830,
Charbon propre supercritique 670 ; Gaz naturel 650 ;
Photovoltaïque 310 ; Eolien : 32 , nucléaire 19…
Et il n’y a pas que l’électricité,
dont il est même étrange qu‘elle mobilise à ce point à elle seule, pour son
malheur, les ardeurs de la secte libérale et des écologistes irresponsables. Olivier
Appert 5ème forum européen de l’énergie , 10 mai 2016 : « Alors que l’électricité ne représente que
20% de notre consommation totale d’énergie, elle a occupé 95% des interventions.
Serait-ce parce qu’on ne sait pas
résoudre les problèmes posés par les 80% restants ? Où et quand
parlerons- nous des 95.5% de l’énergie primaire consommée : chauffage,
transport et industrie ? »
Conclusion de l’auteur de la France dans le Noir : « Le temps de
l’industrie n’est ni celui de la politique, ni celui de des jeux videos. Encore
moins celui des idéologies ; Ce sont les industriels qui porteront la
responsabilité de ne pas avoir alerté les politiques, d’avoir mis en œuvre
leurs politiques, sans les avoir mis en garde contre leurs conséquences. La
dépendance politique descend toute la chaine du pouvoir jusque dans les
organismes de recherche et développement. Ainsi se forme le grand consensus de
l’air du temps »
Passons donc à deux nouvelles
récentes concernant le gaz et le pétrole
Gaz : Le gouvernement met en péril la sécurité d’approvisionnement
de la France
Communiqué de la CFE_CGC à propos
de la société Gazocéan : ENGIE
vient de confirmer la cession de ses activités amont du GNL incluant la filiale
Gazocéan chargée du transport du gaz naturel par méthanier. En cédant ces
activités, ENGIE rompt une partie de ses engagements de service public, qui le lient
pourtant à l’Etat par un contrat de service public signé le 6 novembre 2015.
ENGIE s’assoit donc également sur le code de l’énergie. Or, cette décision ne
peut être prise sans l’accord de l’Etat qui démontre une nouvelle fois son
absence de vision stratégique au lieu de ne se préoccuper que des dividendes
perçus. En effet, dans le cadre de ses obligations de service public, les
engagements d’ENGIE sont clairs. ENGIE doit notamment « … conserver un portefeuille
d’approvisionnement diversifié en gaz naturel, notamment sous forme liquéfiée,
fondé sur : …une capacité de production [de gaz] propre… » « …[faire]
en sorte de maintenir la diversification géographique de ses approvisionnements
destinés au marché français et de conforter sa couverture contre les aléas
relatif à la fourniture… [l’] obligation de détenir des capacités
d’acheminement jusqu’à la frontière française et d’avoir accès à plus de trois
points d’accès au réseau français. » Ainsi, en mettant en vente ses capacités d’approvisionnement de GNL, ENGIE,
avec le consentement de l’Etat, met très clairement en risque la sécurité
d’approvisionnement énergétique de la France.
Pétrole : après Schlumberger, Technip, la CGC (Compagnie générale
de géophysique)
Une « pépite » technologique
française vieille de 86 ans joue sa survie. Les actionnaires du groupe
parapétrolier CGG devaient se prononcer, mardi 31 octobre en assemblée
générale, sur le plan de sauvetage présenté par la direction. Faute d’accord ou
même de quorum, le groupe pourrait être placé en redressement judiciaire. Près de 6 000 emplois, dont 1 600 en
France, et un patrimoine en géosciences accumulé au fil des décennies sont en
jeu.
Depuis plus de trois ans, la
société d’équipements et d’acquisition de données sismiques se bat pour
surmonter des difficultés largement dues à la baisse des prix du brut, qui a
entraîné une forte réduction des investissements de compagnies pétrolières. La
cession d’une grande partie de sa flotte, les coupes claires dans ses effectifs
(50 %) et une augmentation de capital de 350 millions, début 2016, n’ont fait
qu’assurer une fragile survie sur un marché atone.
Au terme de l’assemblée générale,
ce sont des hedge funds, des fonds spéculatifs, anglo-saxons qui seront bel et
bien maîtres à bord de CGG. L’Etat n’a pu que sauver les meubles en obtenant
des engagements pour la sauvegarde des emplois en France jusqu’à fin 2019 et
des centres de décision dans l’Hexagone jusqu’à fin 2022.
Il n’y a qu’à croire, l’avenir de
CGG est écrit e il est bien sombre . A noter que dans ce type de cas, la CFDT joue les idiots utiles : « c’est « un moindre mal » et il n’y avait
guère d’autre choix que cette dilution de l’actionnaire public pour sauver la
société », tandis que les oppositions les plus fortes viennent généralement de
la CGT et, fait plus nouveau, de la CFE -CGC, convergence inattendue mais qui
signe un vrai intérêt et une vraie inquiétude commune pour l’industrie
française
Reste que en moins de deux ans ,
une grande partie du patrimoine parapétrolier français est passé sous pavillon
étranger à la faveur d’un tsunami de consolidation dont la France sort toujours
perdante. Ainsi Schlumberger, fleuron de
la prospection pétrolière passé sous le contrôle de Cameron – tiens, ça
sonne comme une défaite ! Technip ; autre fleuron, passé sous le contrôle de
l’américain FMC technologie, au mépris de certains engagements,- ainsi la direction
générale est maintenant installée au Texas. Comme le note Le Monde du31 octobre 2017, M. Macron, alors ministre de
l’économie, n’avait rien trouvé à redire à ce passage de Technip sous pavillon
américain et plus grave encore, fin 2024, il n’avait pas du tout soutenu un
rachat de CGG par Technip.
La secte libérale au pouvoir brade l’industrie française
Tout cela est bien inquiétant et
montre qu’au plus haut niveau de l’Etat, il n’ y aucune politique économique,
mais seulement financière, aucun intérêt pour ‘industrie , mais seulement pour
la finance, aucun souci de l’indépendance nationale, en trahison complète de la
politique et de l’héritage gaullo mitterandien. Mais sans doute les beni oui
oui de la libéralisation heureuse, les membres de la secte libérale croient-ils
que la nationalité d’une entreprise, celle de ces centres principaux de
décision et de recherche n’a aucune importqnce ? Cette innocence, pour rester dans l’euphémisme, est extrêmement
inquiétante et dangereuse, surtout lorsqu’il s’agit d’énergie, la matière
première de toute industrie et en fait, de toute prospérité.