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mercredi 16 novembre 2022

Projet de loi accélération des ENR à l'Assemblée Nationale

un certain nombre de faits récents et d’argumentssemblent pertinents et efficaces

1) Biodiversité A Saint-Brieuc , dérogation de perturbation intentionnelle et de destruction de 59 espèces protégées (54 oiseaux marins, 4 dauphins et un phoque) acceptée, y compris pour des espèces en danger critique d’extinction ( Puffin des Baléares). C’est déjà « passé comme crème », avec la Raison Impérative d’Intérêt Public majeur et un seul débat par façade maritime et non par parc, ce sera encore pire. Par sa situation spéciale et la présence de grands corridors de migration des   faunes marines et aériennes particulièrement  le long des côtes atlantiques,   la France a une responsabilité particulière de présevation de la biodiversité marine

Au prétexte de lutter contre le changement climatique, les promoteurs de l’industrie éolienne en mer se voient accorder des passe-droits qui seraient refusés à n’importe quelle autre industrie

Lorsque des écologistes habituellement pas très aimés des pêcheurs et des pêcheurs se retrouvent pour lutter ensemble, c’est peut-être qu’il y a des raisons sérieuses. Or c’est le cas de Sea Shepherd  qui rejoint, à Saint-Brieuc et sur Bretagne SUD  les pêcheurs  en lutte contre les parcs éoliens : « L’éolien off shore : «  une menace imminente d’une ampleur telle qu’elle hypothèque l’avenir de la vie marine côtière …Nous ne sommes pas à la hauteur des responsabilités qui nous incombent »

2) Beau numéro de confusion et d’enfumage du ministère  (‘ Agnès Panier Runacher) appelant à rejeter  l’amendement   du Sénat sur la distance minimale de 40 km aux côtes

a) «  La France est en retard sur le développement de l’éolien marin », Ben  non, les côtes françaises ( fonds rocheux, fortes déclivités contrairement à la  Mer du Nord)  ne se prêtent pas du tout  à l’éolien posé. Et quant à l’éolien flottant, il existe en Europe un parc expérimental de 3 éoliennes au Portugal, un autre parc en Ecosse  en fonctionnement de 3 éoliennes (Hywind Scotland)  et est en cours de raccordement un parc de 7 éoliennes en Norvége ( Hywind Tampen). Et c‘est tout. Alors, le retard est quand même relatif

b) «  La technologie flottante, bien que prometteuse, n’est pas encore mature » Ben oui , et d’ailleurs il y a au mpins cinq technologies différentes possibles pour les flotteurs mais alors pourquoi  se lance-t-on directement dans des parcs de 60 éoliennes au lieu de commencer par des projets pilotes comme prévu

c) « L a ministre prétend que l’éolien flottant ne permet pas de s’éloigner de plus de 40 km des côtes « . Ben non,  Technip et d(autres sociétés sde services pour les gaziers et pétroliers off shore ont afformé le contraire lors du Débat EOS ( Eoliennes flottantes en Méditerrannée. Et manque de bol, un des 3 pacs en Europe, Hywind Tampen est à 140 km des côtes et par 200 mètres de fond. En réalité, ça ouvre de beaux espaces plus loin des côtes sur le plateu continental atlentique

3) A quoi sert l’éolien off shore !

Des projets en définitive nuisibles pour le climat (en raison d’un back-up fossile indispensable), économiquement aberrants, dangereux pour la sécurité d’approvisionnement et ravageurs pour nos paysages, la biodiversité et l’économie locale, en particulier la pêche.

a) le nucléaire fournit en base et il ya du vent . Priorité d’injection, l’éolien se substitue au nucléaire qui de toute façon tourne : idiot climatiquement, aberration économique, mauvais écologiquement ( occupation de l(‘espace, influnece sut la biodiv)

b) le nucléaire ne suffit pas à passer une pointe de consommation et pas de vent ( typique des situation les plus tendues, anticyclone hivernal et pas de vent) : ca sert à rien

c) le nucléaire ne suffit pas à passer une pointe de consommation et il ya du vent sur toute l’Europe du Nord. Les productions allemandes, danoises, Pays-Bas, UK sont plus que suffisantes

d) le nucléaire ne suffit pas à passer une pointe de consommation et il y n’ a du vent  que sur les côtes françaises… Ca arrive quand ? On a besoin de 50 parcs off shore pour ça ?

4) Problèmes de sécurité nationale et de sécurité pour la navigation

a) Qui sera le premier ministre à « déplorer » ( tout en chérissant les causes)  une marée noire parce que l’espace  maritime devient trop  et mal encombré ?

b) Par ailleurs, comme pour l’éolien terrestre,  on assiste à une valse des  investisseurs et des capitaux incontrôlable ( en tous cas incontrôlée)  et de revente des projets avant même leur réalisation. Par exemple, la société Eolien Maritime France (EMF) a été désignée attributaire en 2012 par le Ministère de l'écologie des trois premiers parcs éoliens en mer français de Fécamp , Courseulles-sur-Mer et Saint-Nazaire. Simple société de projet dépourvue d'effectif, de moyen et d'expertise propre, la société Eolien Maritime France était alors elle-même composée de la société française EDF Energies Nouvelles France (renommée depuis EDF Renouvelables France) à hauteur de 60 % d'une part, et de la société danoise Dong Energy à hauteur de 40 % d'autre part. Aujourd'hui, Eolien Maritime France réunit EDF Renouvelables France (50%) et EIH SARL (50%), holding financière luxembourgeoise, elle-même détenue par l'industriel canadien Enbridge (51%) et le fonds de pension canadien CPPIB (49%).

Nous aurons une ceinture de 50 parcs éoliens  le long de nos côtes, ce qui représente une privatisation sans équivalent de l’espace maritime proche, avec ses implications stratégiques, marchandes, économiques, militaires …sans aucun contrôle sur les possesseurs de ces parcs ?

c) Sous-traitance en cascade, recours massif aux travailleurs détachés et aux pavillons de complaisance,

Saint-Brieuc Vendredi 16 septembre 2022, vers 8 h 30, le naufrage du « St John », un navire battant pavillon de complaisance du Vanuatu, a été évité in extremis. L’équipage du bateau, victime d’une voie d’eau au niveau du compartiment machines, avait lancé un appel de détresse, préparé ses radeaux de survie et s’apprêtait à évacuer car le bâtiment dérivait dangereusement vers la pointe de la Varde (Saint-Malo, Ille-et-Vilaine).

À son bord, cinq hommes, de trois nationalités. L’équipage du « St John »,  affrété par la multinationale du câble Nexans auprès de son armateur néerlandais Van Laar Maritime, travaillait sur le chantier des éoliennes offshore de la baie de Saint-Brieuc. Le navire ne se trouvait plus qu’à 50 mètres des rochers lorsque l’équipage français du remorqueur « TSM Kermor » lui a porté secours.

Selon Pierre Maupoint de Vandeul, le président du syndicat des officiers de la marine marchande CFE-CGC marine, ce sauvetage « met en lumière le dumping social existant sur les parcs éoliens ». Avec, d’un côté, un navire battant pavillon de complaisance et sur lequel travaillent des marins « avec des conditions de travail et des salaires bien inférieurs à ceux pratiqués sur la flotte française ».

Exiger l‘application du droit de la mer français.

5) Les éoliennes écologiques Balsa et SF6

Balsa  : face à l’explosion de la demande de balsa pour les éoliennes, l’exploitation sauvage et la déforesstation s’étendent en Amazonie. Par exemple, les trois pales de 81 mètres de long des éoliennes offshore de Siemens Gamesa contiennent au total près de 6 tonnes de balsa (approx. 40 m³). soit pour l’éolienne entière environ 40 arbres . ( Bon, c’est pas des grands arbres !)

SF6 (hexafluorure de sodium) est un excellent isolant électrique…mais aussi un des plus puissants gaz à effet de serre :   Potentiel de Réchauffement Global (PRG) à 100 ans 23 500 fois le CO2, durée de vie  : 3000 ans

Limitation de l’usage prévue par le protocole de Kyoto (1997)…mais les producteurs éoliens résistent  !

6) Un secteur en forme où il faut investir ?

Près de Saint-Nazaire. Menaces sur l’usine d’éoliennes General electric, Ouest France, 16/6 2022

À Montoir-de-Bretagne et Nantes, les deux sites qui ont livré les éoliennes du premier parc éolien marin français, à Saint-Nazaire, semblent en sursis. Des acheteurs seraient venus visiter. la nomination, fin 2021, d’un financier, Scott Strazik, dans le management du groupe, ajoute à l’inquiétude. « Il est venu en Loire-Atlantique sans prévenir les salariés. On sent qu’ils préparent la mariée avant une vente. Aux USA, ça les titille que les nacelles viennent de France. »

" Eolien : Siemens Gamesa va licencier près de 11 % de ses effectifs : Sur les neuf premiers mois de l'année, Siemens Gamesa a accumulé 1,2 milliard d'euros de pertes, pour un chiffre d'affaires de 6,4 milliards, qui viennent s'ajouter à 1,5 milliard d'euros de perte nette ces deux dernières années.

https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/eolien-siemens-gamesa-va-licencier-pres-de-11-de-ses-effectifs-1852785, 29 sept 2022

Naval Group : début février 2021, Naval Group met fin à sa diversification (Naval Energies) dans le secteur des énergies marines renouvelables qu’il estime immature  : «Malgré les efforts de toutes et de tous, ces projets, engagés depuis près de 12 ans... ne présentent pas aujourd'hui suffisamment d'assurance de succès économique à court, moyen ou long terme. L'éolien flottant représente des investissements considérables pour une rentabilité incertaine, voire inatteignable »

7) Actuellement, les ENR et particulièrement l’éolien rapportent de l’argent à l’Etat ( argument martelé par la filière éolienne)

Tout ce que ça prouve, c’est que l’éolien ne  devient rentable que  lorsque le cout de l’électricité atteint un niveau insoutenable économiquement et socialement . Avec le même raisonnement, l’EPR de Flamanville, malgré les vicissitudes de son chantier est rentabilisé en trois ans !

L’Estonie se prépare à entrer dans le club nucléaire 3) Les USA à la manœuvre géopolitique

Suite de https://vivrelarecherche.blogspot.com/2022/11/lestonie-se-prepare-entrer-dans-le-club_14.html et de https://vivrelarecherche.blogspot.com/2022/11/lestonie-se-prepare-entrer-dans-le-club.html

Soit le rapport d’un think tank géostratégique estonien International Centre for Defence and Security très favorable aux USA

Rapport : Developing Nuclear Energy in Estonia september 2022 An Amplifier of Strategic Partnership with the United States?,

Un choix géostratégique…qui devrait favoriser les USA

« L’énergie nucléaire est de plus en plus considérée comme l’un des ingrédients essentiels d’une transition réussie vers un système énergétique neutre pour le climat et comme un élément viable du futur bouquet énergétique décarboné. Par conséquent, l’Estonie envisage officiellement la possibilité d’adopter l’énergie nucléaire produite par de nouveaux petits réacteurs modulaires (PRM).

Ce choix n’est cependant pas purement environnemental, économique ou technique, mais a également des implications géopolitiques. Il créerait de nouvelles interdépendances à long terme avec des partenaires étrangers, ce qui pourrait représenter de nouvelles possibilités de coopération plus étroite dans le domaine de la sécurité et de la politique étrangère, mais pourrait également créer de nouveaux risques politiques, de réputation et de sécurité nationale. Cette dimension géopolitique revêt une importance particulière pour des pays comme l’Estonie qui cherchent à impliquer davantage des alliés clés tels que les États-Unis, le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne dans la région nordique-baltique pour contrer la pression géopolitique de la Russie et, de plus en plus, de la Chine..

Le rapport suppose que l’Estonie pourrait éventuellement opter pour l’énergie nucléaire et choisirait les États-Unis comme fournisseur de technologie SMR. »

Facteurs favorables et défavorables

- le consensus politique bipartite aux États-Unis sur l’énergie nucléaire dans la politique climatique et énergétique et la pression américaine pour le développement de la technologie des SMR axée sur l’exportation qui sous-tend ses efforts pour regagner l’avantage concurrentiel érodé de la technologie de l’énergie nucléaire civile sur la Chine et la Russie.  Cette décision donnerait corps et orientation à la coopération en matière de sécurité énergétique qui irait au-delà de l’accent actuel (temporaire) mis sur l’approvisionnement en GNL et s’alignerait sur les objectifs géopolitiques et géo-économiques de l’Initiative des Trois Mers (3SI)

Le rapport examine  comment certains problèmes structurels des politiques énergétiques nationales et les perspectives géopolitiques divergentes de l’Allemagne, de la France et de la Pologne – ainsi que certaines caractéristiques persistantes des relations intra-européennes qui se manifestent par les politiques communes de l’UE – peuvent nuire ou faciliter les aspirations nucléaires estoniennes.

Bien que le rapport constate que la position pro-nucléaire de la France, les aspirations nucléaires de la Pologne et le pragmatisme émergent de la Commission européenne sur l’énergie nucléaire sont des facteurs favorables, il identifie également plusieurs risques parmi lesquels:

- l a position antinucléaire de l’Allemagne fondée sur l’idéologie « uniquement renouvelable » et les intérêts géo-économiques connexes fondés sur les principes de l’Energiewende (c’est-à-dire maximiser les exportations de technologies renouvelables), ainsi qu’un instinct persistant de contrebalancer le rôle de sécurité des États-Unis en Europe par des politiques énergétiques et économiques ;

- le point de vue des Français en termes de perspective géopolitique , qui reste sceptique quant au rôle des États-Unis en Europe, et la pression qui en découle pour une plus grande souveraineté technologique et énergétique européenne,  avec les efforts de coopération européenne en matière de SMR  menés par les Français et le modèle français de SMR

- la possibilité que la Pologne capte de façon ultra dominante  les intérêts et l’attention politique des États-Unis en matière d’énergie nucléaire en raison de l’ampleur de son programme national et du rôle central de la Pologne dans l’Initiative des Trois Mers .

- L’ambivalence persistante de l’UE concernant le rôle de l’énergie nucléaire dans le futur bouquet énergétique neutre en carbone et la vulnérabilité de son consensus intergouvernemental et interinstitutionnel au lobbying idéologiquement motivé par des considérations idéologiques antinucléaires / « renouvelables uniquement ».

Les recommandations

-Exploiter pleinement les possibilités offertes par le traité de collaboration États-Unis-Euratom pour développer un partenariat bilatéral dans le domaine de l’énergie nucléaire ainsi que le programme FIRST pour créer et mettre en place des capacités crédibles en matière de gouvernance compétente de l’énergie nucléaire.

NB : FIRST Foundational Infrastructure for the Responsible Use of Small Modular Reactor (SMR) Technology (cf note fin de document)

- Travailler à l’institutionnalisation et au développement de la coopération multilatérale en matière d’énergie nucléaire dans le cadre de l’Initiative des Trois Mers (3SI)

- Engager un dialogue continu avec l’Allemagne (et d’autres pays nucléaro-sceptiques ) sur le rôle de l’énergie nucléaire dans le futur bouquet énergétique dominé par les énergies renouvelables, tout en restant vigilant et en étant prêt à contrer le lobbying antinucléaire au sein des structures de l’UE qui pourrait progressivement éroder le consensus sur l’inclusion de l’énergie nucléaire dans la « taxonomie de la finance verte ».

La décision d‘inclure le nucléaire dans  la « taxonomie verte » signifie que les États membres qui ont choisi d’étendre ou d’utiliser la technologie nucléaire se verront épargnés d’avoir à s’engager dans des confrontations vives et potentiellement dommageables avec et à Bruxelles sur cette question...Cependant, les restrictions obtenues par les lobbies des énergies renouvelables et des entreprises vertes sont une indication des intentions d’empiler progressivement des contraintes paralysantes sur l’énergie nucléaire au fil du temps.

- Développer une stratégie claire pour aborder à la fois les fondements géopolitiques et commerciaux de l’agenda Français, si Paris soulève des objections à l’implication expansive des États-Unis dans le programme d’énergie nucléaire estonien

Pourquoi un programme national estonien et lequel ?

Théoriquement, l’Estonie pourrait, au lieu de développer sa propre énergie nucléaire, participer en tant qu’investisseur et participant à un projet plus vaste (par exemple en Pologne). Cependant, les délais d’exécution de ces projets sont souvent trop longs et  comportent divers risques, comme l’illustre le projet Hanhikivi-1 récemment annulé en Finlande. L’Estonie a également une expérience très négative de la débâcle de la centrale nucléaire lituanienne de Visaginas qui a conduit la Lituanie à ne pas lancer un projet régional de centrale nucléaire convenu avec les autres États baltes et Hitachi du Japon en 2011-12..

Les développeurs estoniens penchent vers une solution nationale, tout en restant ouverts et même en courtisant activement les participants des pays voisins en tant qu’investisseurs, ce qui en fait un projet régional. La Lettonie fait partie des priorités et montre un intérêt évident, comme en témoignent les discussions entre Fermi Energia et la société publique d’énergie Latvenergo (dans ce cas, si Latvenergo rejoignait le projet, l’Estonie déploierait quatre unités SMR au lieu de deux)

Le SMR de NuScale qui est considéré par la Pologne et la Roumanie est livré en 6 packs modulaires par unité de réacteur qui générerait 500 MW de puissance; les exigences des GRT estoniens sont qu’une seule unité ne dépasse pas 400 MW.

Les développeurs de projets estoniens considèrent fortement BWRX-300 de GE Hitachi, une coentreprise américano-japonaise, comme premier choix et ont même signé un accord de coopération à cet effet.  Jusqu’à présent, il semble que le BWRX-300 sera le seul type de réacteur qui pourrait être entièrement autorisé – par le Canada – et pourrait obtenir une licence en Estonie d’ici 2030.

Cependant, les développeurs de projets estoniens restent non engagés ou « technologiquement neutres », et le choix final serait fait en 2023. Ils continuent d’explorer d’autres possibilités – en particulier un SMR conçu par Rolls-Royce (RR) au Royaume-Uni – au cas où le processus d’octroi de licences du SMR GE Hitachi au Canada, où le premier déploiement est prévu, connaîtrait des retards importants ou d’autres difficultés.

Le fait que l’Estonie soit actuellement « nucléaire  naïve» ne semble pas décourager les investisseurs potentiels ; Cependant, c’est le sentiment politique et les considérations géostratégiques aux États-Unis et dans l’UE – tant dans les institutions de l’UE que parmi les principaux États membres – qui seront d’une importance primordiale si l’Estonie va de l’avant avec l’énergie nucléaire et choisit une solution de PRM d’origine américaine.

Traitement des déchets : implication de la France souhaitée

Les membres d’Euratom ont le consentement préalable des États-Unis pour retraiter les matières nucléaires traitées dans des équipements d’origine américaine si les matières sont envoyées à une installation relevant de la juridiction d’Euratom, à savoir les installations d’Orano à La Hague et de Marcoule en France. Les membres d’Euratom peuvent également retransférer du matériel à la plupart des principaux partenaires commerciaux des États-Unis et de l’UE. Cela signifie que le cadre juridique bilatéral permettant à l’Estonie d’expédier du combustible usé vers la France pour le retraitement afin de réduire les déchets est déjà en place. En outre, la participation des Français au retraitement du combustible usé d’un réacteur construit aux États-Unis en Estonie pourrait apaiser la pression exercée par la France pour que l’Estonie poursuive l’une de ses conceptions en tant que partenaire de l’UE.

Financement : les firmes étatiques gènent les Américains …

Les fournisseurs nucléaires américains sont des entreprises privées dont les coûts d’investissement pour la construction de réacteurs sont généralement financés par des capitaux privés dans un mélange de dette et de capitaux propres. En revanche, la plupart des autres fournisseurs de réacteurs nucléaires appartiennent à des semi-publics, y compris Électricité de France (EdF) (85%) et KEPCO en Corée du Sud (51%), ou entièrement publics, y compris Rosatom en Russie et China General Nuclear Power Group (CGN). Avec le soutien de leurs gouvernements, ces fournisseurs nucléaires peuvent offrir des conditions de financement plus généreuses que leurs concurrents américains. Rosatom, en particulier, a poursuivi un modèle « Build-Own-Operate » (BOO) pour ses exportations nucléaires dans lequel Rosatom assume toutes les participations dans le projet et exploite la centrale une fois qu’elle est construite, recevant des paiements pour la fourniture d’énergie aux consommateurs du pays hôte..

Pour des raisons géopolitiques évidentes, la concurrence de Rosatom n’est pas à considérer dans le contexte estonien. Alors que la capacité du gouvernement américain à soutenir le financement de la construction de réacteurs nucléaires est limitée, les États-Unis maintiennent une série de programmes de renforcement des capacités pour fournir aux États une formation et des ressources liées à la gouvernance de l’énergie nucléaire.

Commentaire sur la situation allemande

Il est raisonnable de s’attendre à ce que la posture de Berlin soit plus modérée dans l’avenir immédiat à l’égard d’une telle politique qu’elle ne l’aurait été avant le 24 février 2022, lorsque la Russie a envahi l’Ukraine... La coalition actuelle au pouvoir a fait une rupture significative avec les positions obstinément russes des années Merkel. Il n’y a plus d’illusion sur la possibilité que la Russie soit un « fournisseur fiable »... Le Parti vert allemand a défendu et diffusé à l’échelle internationale la vision du « vert » comme étant uniquement renouvelable qui exclut l’énergie nucléaire.

Commentaire sur la situation française : peu de probablilité d’abandon d’un très intégré dans les réalités économiques et politiques françaises

La France a développé son secteur nucléaire extrêmement rapidement, dans un scénario qui fait écho à la situation actuelle en Europe. L’impulsion immédiate a été l’embargo pétrolier arabo-OPEP de 1973, à un moment où le pays produisait la majeure partie de son électricité à partir du pétrole. .

Le fait est aujourd’hui que, pour la France, l’énergie nucléaire est synonyme de sécurité énergétique, et qu’elle ne s’accompagne d’aucun coût de réseau, de stockage ou de synchronisation majeur ni de maux de tête, ou d’une dépendance excessive vis-à-vis de régimes instables ou antagonistes à l’étranger. Par conséquent, il est hautement improbable que la France abandonne un jour sa dépendance fondamentale à l’énergie nucléaire. Elle a flirté avec une sortie progressive du nucléaire au cours de la dernière décennie, mais le président centriste Emmanuel Macron et son adversaire d’extrême droite battue à l’élection présidentielle de 2022, Marine Le Pen, ont fait de la modernisation et de l’expansion nucléaires des promesses de campagne clés. En France, les énergies renouvelables auront un rôle important, mais approprié et modéré.

Il y a deux aspects de la politique nucléaire française qui montrent sa profonde intégration dans les réalités économiques et politiques/géopolitiques de la France que tout autre État membre intéressé par l’expansion ou le lancement de l’énergie nucléaire devrait comprendre. Premièrement, c’est le rôle commercial du secteur; deuxièmement, il s’agit de  la politique européenne de la Fran et de considérations géopolitiques plus larges.

L’énergie nucléaire a longtemps rendu l’électricité bon marché en France et suffisamment abondante pour l’exportation, renforçant ainsi l’importance régionale française. En fait, la France est normalement le premier exportateur mondial d’électricité, gagnant environ 3 milliards d’euros par an...

Pour la France, l’énergie nucléaire est synonyme de sécurité énergétique, et elle ne s’accompagne d’aucuns coûts de réseau, de stockage ou de synchronisation majeurs, ni d’une dépendance excessive vis-à-vis de régimes instables ou ennemis à l’étranger…En réponse au défi climatique et à l’agression russe, la France souhaite à nouveau développer ses activités internationales, en utilisant les derniers réacteurs dotés de conceptions de sécurité passive améliorées. Elle commence également à développer de nouveaux SRM polyvalents, basés sur les conceptions utilisées dans ses sous-marins à propulsion nucléaire..

Une influence importante pour la France dans le redémarrage de l’industrie nucléaire

Son expertise et sa position établie dans les secteurs de l’énergie nucléaire de l’UE et du monde sont des facteurs importants pour tout nouveau programme d’énergie nucléaire... Dans le même temps, il est également devenu évident qu’ EDF n’a pas investi adéquatement dans l’entretien de ses anciennes usines nationales, de sorte qu’en avril 2022, y compris les usines fermées pour entretien programmé, la moitié des réacteurs ont  été mis à l’arrêt, dont un certain nombre en raison de la corrosion de composants non nucléaires

C’est un point crucial :  la France reste la principale force poussant l’UE à poursuivre le développement de l’énergie nucléaire. Elle  jouera un rôle clé pour contrebalancer le camp populiste antinucléaire et «tout renouvelable » dirigé par l’Allemagne, avec  d’autres partisans importants. Cela revêt un intérêt crucial pour toute décision relative au programme nucléaire en Estonie et dans les États dotés d’une capacité nucléaire tout au long du Trimarium.

Le réengagement français en faveur de l’énergie nucléaire signifie que l’énergie et la technologie nucléaires ne seront pas seulement une question d’Europe centrale et orientale et qu’il sera donc plus difficile d’isoler, de caractériser ou de stigmatiser par les forces antinucléaires à Bruxelles et ailleurs..

“En conséquence, l’Estonie et les Etats des Trois mers devront courtiser politiquement la France et veiller à l’inclure dans leur stratégie commerciale et industrielle »

Ce que prévoit l’Estonie pour la France en cas de choix américain

Les efforts Français pour rallier les autres États membres de l’UE à la poursuite de la prétendue « autonomie stratégique européenne « – bien qu’ils soient parfois considérés comme une protection potentiellement utile contre les conséquences du regain d’isolationnisme américain et de l’abandon de l’Europe – suscitent souvent le soupçon dans les États baltes que Paris cherche simplement un moyen de réduire l’implication américaine en Europe. En outre, la France a, de longue date, « courtisé » la Russie – un partenaire supposé indispensable, selon Paris, du dialogue et de la coopération dans l’architecture de sécurité européenne au sens large – ce qui a suscité de nombreuses critiques de la part de diverses capitales du Trimarium, conscientes de la  grave menace posée par le régime du Kremlin, et a sapé leur confiance dans le jugement des gouvernants français en matière de  géopolitique.

En ce qui concerne la France, l’Estonie, en cas de choix de la technologie américaine pour sa production nucléaire, devra naviguer entre la position politique pro-nucléaire de la France, son opposition instinctive à l’influence américaine en Europe, les visions de souveraineté de l’UE émanant de Paris et une tendance russophile profondément enracinée dans son establishment diplomatique et militaire. Bien que la France défende l’énergie nucléaire à Bruxelles, le choix d’un petit Etat membre de l’UE de se porter sur une technologie américaine serait certainement source de frictions..

Pour les éviter et  garder de bonnes relations avec  Paris, l’Estonie pourrait théoriquement choisir, si elle poursuit son programme d’énergie nucléaire, de s’associer à la France plutôt qu’aux États-Unis ou au Royaume-Uni pour un déploiement des SMR , agissant ainsi dans l’esprit de la solidarité et de la souveraineté de l’UE.

Mais il semble  que l’implication de l’industrie nucléaire française dans le cycle du combustible nucléaire pour un SMR basé sur la technologie américaine pourrait constituer exactement une solution « macronesque » géopolitiquement équilibrée qu’un centriste Français pourrait apprécier..

L’Estonie devrait s’attendre à ce que la France plaide constamment en faveur d’une coopération sur le SMR européen et souligne que le cadre de l’UE prévoit déjà une gamme suffisante d’instruments de coopération en matière de sécurité pour faire face aux risques associés à l’adoption de l’énergie nucléaire. Une partie de l’opposition politique potentielle de la France peut être désamorcée en intégrant sa base industrielle nucléaire dans les chaînes d’approvisionnement du programme d’énergie nucléaire estonien, même après le choix d’un SMR américain, mais cela ne sera guère suffisant pour éviter l’accusation que l’Estonie ne soutient pas le renforcement des aspirations de souveraineté de l’UE dans la pratique. L’Estonie devra être prête à faire valoir auprès de Paris que sa dépendance vis-à-vis des États-Unis – que ce soit dans le domaine de la technologie énergétique ou de la technologie militaire n’est pas contraire aux intérêts de l’Europe, mais plutôt renforceraient la cohésion et la force collective de l’Occident.

Note ) Sur le programme FIRST : Foundational Infrastructure for the Responsible Use of Small Modular Reactor (SMR) Technology

Le texte de la déclaration ci-après a été publié par les Gouvernements des États-Unis d’Amérique et de l’Estonie, du Ghana, du Japon, du Kazakhstan, de la Lettonie, des Philippines, de la République de Corée, de la Roumanie, de l’Ukraine et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord à l’occasion de la Conférence d’examen du TNP de 2022.

1. Nos pays partagent un engagement ferme à réaliser les avantages de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, conformément au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Nous réaffirmons le droit inaliénable des États parties au TNP d’utiliser l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, sans discrimination et conformément aux articles Ier, II, III et IV du TNP. ..

Nos pays participent à de nouveaux projets de renforcement des capacités dans le cadre du programme FIRST (Foundation Infrastructure for the Responsible Use of Small Modular Reactor (SMR). Les partenaires de ce projet travaillent en collaboration pour faciliter l’utilisation sûre et sécuritaire des réacteurs nucléaires civils, en particulier des PRM. Le programme FIRST fournit aux pays partenaires la base pour tirer parti des technologies nucléaires avancées et des innovations à venir dans la conception des réacteurs afin d’atteindre leurs objectifs en matière de sécurité énergétique et de climat, et de le faire conformément aux normes internationales les plus élevées et aux orientations en matière de sécurité.

 

lundi 14 novembre 2022

L’Estonie se prépare à entrer dans le club nucléaire : 2) rapport intermédiaire Possibilités d'utilisation de l'énergie nucléaire en Estonie » (sept 2022) : Des SMR, mais quel choix ?

 Suite de la partie 1 :https://vivrelarecherche.blogspot.com/2022/11/lestonie-se-prepare-entrer-dans-le-club.html

Conclusion de la partie 1  : «  Dans le plan national estonien en matière d’énergie et de climat pour 2030 (REKK 2030)10, les réacteurs nucléaires modulaires ont été considérés comme l’une des options alternatives pour produire de l’électricité en Estonie. Dans le même temps, il est également noté qu’ils nécessitent des travaux préliminaires approfondis – études, travaux préparatoires et construction (estimés à 10 ans) – et que des réacteurs modulaires plus petits qui ne sont pas encore en service dans le monde pourraient convenir aux conditions estoniennes. »

Donc des SMR, mais lesquels ?NB : point sur la très grande variété des SMR dans ce blog :https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/08/reponse-thierry-breton-non-le-nucleaire_10.html

Les  SMR considérés par les Estoniens

1) NUWARD, EDF, France, (FOAK)

Durée estimée d’achèvement du premier prototype: 2030
Type : réacteur à eau pressurisée (REP)
Puissance : 340 MWe
Combustible : UO2 Taux d’enrichissement ≤ 5 %
Durée de vie prévue : 60 ans
Fréquence de changement de combustible : une fois tous les 2 ans,

NUWARDMC sera développée en tant que centrale nucléaire VMR de génération III+ et sa capacité de production d’énergie prévue à partir de deux modules de réacteurs indépendants sera de 340 MW(e). La conception prévoit d’assurer la sécurité grâce à des solutions passives, et la présence d’une alimentation électrique externe n’est pas requise. L’échangeur de chaleur (mur d’eau) agit sans intervention pendant au moins trois jours en cas d’interruption. En raison de ses caractéristiques de capacité, la centrale est facile à intégrer dans le réseau électrique de presque tous les pays et convient, par exemple, pour remplacer les centrales à combustibles fossiles ou pour soutenir les énergies renouvelables.

Pour tenir compte des fluctuations saisonnières, deux réacteurs fonctionnant séparément offrent à l’exploitant plusieurs solutions pour ajuster le calendrier de maintenance en fonction des besoins de livraison du réseau. Pendant la vidange de combustible et l’entretien des réacteurs, la centrale n’a pas besoin d’être arrêtée et un réacteur peut continuer à produire de l’électricité pendant la maintenance d’un autre. La durée de vie de 60 ans de la centrale est prévue avec le calcul que les réacteurs fonctionneront à 90% de puissance. Les interruptions majeures prévues de changement de carburant durent 15 jours tous les 24 mois

2)  UK SMR, Rolls-Royce and Partners, Royaume-Uni , FOAK

Délai d’achèvement estimé de la FOAK : 2030
Type : Réacteur à eau pressurisée (REP)
Puissance: 470 MWe
Combustible: UO2 Taux d’enrichissement 4,95%
Durée de vie prévue: 60 ans
Fréquence de changement de combustible: une fois tous les 1,5-2 ans

La conception du VMR au Royaume-Uni est basée sur des technologies éprouvées (III+) qui ont été améliorées et comporte des risques réglementaires minimes. Le REP en trois parties utilise l’UO2 standard avec un enrichissement allant jusqu’à 4,95 % sous forme d’assemblages combustibles 17 x 17 et a une capacité de production d’électricité de 470 MW(e). Dans un réacteur, il y a 121 assemblages combustibles. La station est principalement conçue pour fournir une charge de base d’électricité à la fois sur la côte et à l’intérieur des terres. La conception peut être configurée de manière à ce que cette station produise non seulement de l’électricité, mais aussi de la chaleur ou de l’hydrogène. La capacité thermique de la centrale est de 1276 MW(t).

 La conception comprend plusieurs systèmes d’assurance de la sécurité active et passive. Les systèmes de sécurité passive assurent la sécurité de la station sans avoir besoin d’un flux externe et d’une intervention humaine pendant trois jours. Sur la base de l’évaluation de la sûreté calculée, la probabilité de dommages nucléaires causés par des défaillances de la centrale lorsqu’elle fonctionne à pleine puissance est de < 10-7 par an. La conception tient compte des risques internes et externes, y compris la chute de l’avion sur le dessus du réacteur et le tsunami.

Le cycle de changement de combustible du réacteur est de 18 à 24 mois. La durée de la panne due au changement de carburant est actuellement estimée à 18 jours, mais, selon les représentants de l’entreprise, l’objectif est de 9 jours. Le combustible usé est stocké dans une piscine externe de combustible usé avant d’être transféré dans une installation de stockage à sec à long terme. Il est prévu d’utiliser les pratiques traditionnelles de gestion du combustible nucléaire dans la gestion des déchets.



4) NuScale, NuScale Power Inc., États-Unis FOAK

Délai d’achèvement estimé : 2027
Type : Réacteur à eau pressurisée (REP)
Puissance : 924 MWe (12x77); 308 MWe (4x77); 462 Mwe (6x77)
Combustible: UO2 Enrichissement standard jusqu’à 4,95 %
Durée de vie prévue : 60 ans
Fréquence de changement de combustible: Une fois tous les 2 ans

NuScale Power Module est un petit réacteur PWR basé sur une technologie largement utilisée (III+). La centrale est évolutive et peut être construite pour accueillir un nombre différent de réacteurs afin de répondre aux besoins du client. La capacité d’un réacteur est de 77 MW(e) et la puissance de la centrale de 12 modules est de 924 MW(e).

La configuration de douze modules est également utilisée comme base pour les activités de conception et d’octroi de licences. Chaque réacteur est un module autonome qui fonctionne indépendamment des autres dans une configuration multi-modules. Tous les modules sont gérés à partir d’une seule salle de contrôle. Il est également possible d’utiliser la station pour la production de chaleur.

 La conception de la station NuScale utilise des systèmes de sécurité passifs qui permettent une manipulation illimitée sans alimentation,. Pour recharger le module, il est déconnecté de l’espace de travail et transféré dans la piscine du réacteur, divisée en zones de rechargement. Après avoir vérifié les sections du module et rempli le noyau de carburant, le module est remonté, amené dans la salle de travail et reconnecté à la conduite de vapeur et d’eau d’alimentation. Les autres modules de la station continueront de fonctionner jusqu’à ce que le carburant soit changé dans un module. L’échange de combustible se produit dans un cycle de 24 mois et, au cours de ce processus, un tiers des assemblages de combustible sont retirés et le combustible usé est placé dans une piscine. Les installations de stockage du combustible usé disposent d’un espace de stockage suffisant pour environ 18 ans, y compris cinq ensembles de combustible défectueux et des composants nucléaires non à base de combustible, tels qu’un ensemble de barres de commande. L’installation de stockage à sec attachée à la centrale devrait avoir de la place pour le combustible usé produit pendant toute la durée de vie de 60 ans de la centrale. 


5)  BWRX-300, GE-Hitachi, États-Unis-Japon FOAKTemps estimé d’achèvement: 2028


Type: Réacteur à eau bouillante (REB)
Puissance: 270-290 MWe)
Combustible: UO2 Degré d’enrichissement: 3.40-4.95%
Durée de vie prévue: 60 ans
Fréquence de changement de combustible: une fois tous les 1-2 ans

BWRX-300 est un réacteur à eau bouillante de 300 MW(e) à circulation naturelle (REB). Il s’agit de la 10ème génération (III+) de la conception de réacteur nucléaire la plus simple développée par General Electric depuis 1955 et est une évolution du réacteur ESBWR de 1520 MW (e).

Les applications ciblées du BWRX-300 comprennent la production d’électricité et le chauffage urbain. Le réacteur BWRX-300 utilise du combustible UO2 traditionnel avec un enrichissement allant jusqu’à 4,95% dans des assemblages 10 x 10. Un réacteur a 240 assemblages de combustible.

La philosophie de base de la conception de la sécurité repose sur l’utilisation de mesures naturelles (par exemple, des volumes structurels plus importants et des réserves d’eau) qui permettent d’atténuer les accidents sans courant électrique. Les systèmes de sécurité passive sont conçus de manière double. La probabilité d’occurrence de dommages au noyau du réacteur par an est de 10-7, et la probabilité d’émissions de matières radioactives plus élevées est de 10-8 par an.

Les besoins en personnel devraient être de 75 personnes par quart de travail. Le cycle de changement

dure de 10 à 20 jours tous les 1 à 2 ans. À chaque fois, 15 à 25% du carburant est remplacé. La majeure partie du réacteur est située sous le niveau du sol. Lorsqu’il est retiré du cœur du réacteur, le combustible usé est stocké dans la piscine de combustible à l’intérieur du bâtiment du réacteur pendant six à huit ans, puis placé dans des réservoirs et sorti du bâtiment du réacteur.

En décembre 2021, Ontario Power Generation (OPG) a annoncé qu’elle s’associait à GE Hitachi Nuclear Energy pour construire jusqu’à quatre réacteurs BWRX-300 à Darlington, au Canada. Le premier réacteur devrait entrer en service à la fin de 2028. La procédure d’autorisation devrait durer deux ans, tandis que la construction de la station prendra trois ans


5) SC-HTGR, Framatome Inc., États-Unis FOAK


Délai d’achèvement estimé : 2033
Type : réacteur refroidi au gaz (hélium)
Puissance : 272 MWe
Combustible : TRISO (UCO),
Taux d’enrichissement : 14,5–18,5 %
Durée de vie prévue : 80ans
Fréquence de changement de combustible : Une fois tous les 1,5 à 2 ans

Framatome SC-HTGR (High Temperature Gas-Cooled Reactor) est un réacteur à haute température refroidi à l’hélium avec retardateur de graphite. Il a une capacité thermique de 625 MW(t) et une capacité électrique de 272 MW(e). Le réacteur produit de la vapeur à haute température (750ºC), adaptée à de nombreuses applications telles que la production d’électricité, de chaleur et d’hydrogène.

Le profil de sûreté du SC-HTGR lui permet d’être construit dans des installations industrielles utilisant de la vapeur à haute température et pourrait ouvrir une nouvelle voie importante pour l’utilisation de l’énergie nucléaire. Le concept SC-HTGR est basé sur l’expérience antérieure de Framatome dans les projets HTGR, ainsi que sur les avancées dans le développement et la conception de HTGR modulaires au cours des dernières années. La configuration globale tire pleinement parti du travail effectué sur les concepts HTGR précédents. L’élimination passive de la chaleur résiduelle, ainsi que les propriétés des particules de combustible revêtues de TRISO, sont au cœur de la sécurité. Les particules de combustible revêtues de TRISO sont constituées d’un noyau de combustible en oxycarbure d’uranium (UCO) entouré d’un certain nombre de revêtements céramiques qui garantissent que les produits de fission primaires sont stockés dans des conditions d’accident. L’approvisionnement total en combustible contient environ 10 milliards de particules de ce type par cœur. Les particules sont divisées en assemblages cylindriques graphite.

Le cycle de changement de carburant varie de 420 à 540 jours à pleine puissance (jusqu’à 18 mois). Le changement de carburant est effectué à l’aide de systèmes robotisés. L’objectif de sûreté de la conception du SCHTGR est de limiter la dose provenant des émissions potentielles de sorte que, selon les garanties de l’EPA américaine, la taille de la zone d’exclusion ne soit que de quelques centaines de mètres du réacteur.. Pour atteindre cet objectif de sécurité, la conception utilise des particules de combustible revêtues de TRISO, des retardateurs de graphite et de l’hélium comme refroidissement.

La capacité thermique élevée et la faible densité de puissance du cœur créent des transitions de température très lentes et prévisibles, même sans refroidissement actif. L’hélium, le caloporteur du réacteur et le milieu caloporteur, est chimiquement inerte. SC-HTGR est conçu pour éliminer passivement la chaleur du cœur, que le liquide de refroidissement primaire soit présent ou non. Les murs de béton entourant la cuve du réacteur sont recouverts de panneaux du système de refroidissement de la cavité du réacteur, qui assurent un refroidissement naturel de la circulation à la fois en fonctionnement normal et en cas d’accident. Les réacteurs sont situés sous le niveau du sol. Même si tous les systèmes de sécurité tombaient en panne au moment d’un accident, les conséquences d’un accident seraient également assez légères. Le refroidissement du réacteur est garanti pendant sept jours en cas d’accident sans intervention extérieure

 En raison de l’efficacité thermique plus élevée, la quantité de déchets radioactifs (à l’exclusion du combustible usé) générés à la centrale HTGR est inférieure d’environ 50 % à celle des réacteurs refroidis à l’eau

NB : Note sur le TRISO

Le TRISO (TRi-structural ISOtropic particle fuel ), étudié depuis les années 60,  est constitué d’un noyau de combustible d’uranium, de carbone et d’oxygène. Le noyau est encapsulé par trois couches de matériaux à base de carbone et de céramique qui empêchent la libération de produits de fission radioactifs. Les « particules » sont de la taille d’une graine de pavot et peuvent être fabriqués en granulés cylindriques ou sphériques.  Les combustibles TRISO sont structurellement plus résistants à l’irradiation neutronique, à la corrosion, à l’oxydation et aux températures élevées (des facteurs qui influent le plus sur le rendement du combustible) que les combustibles des réacteurs traditionnels



6) Integral MSR, Terrestrial Energy Inc., Canada , FOAK


Date d’achèvement : 2030 (?)
Type : réacteur à sels fondus
Puissance : 195 MWe
Combustible : UF4 (dissous dans le sel sous forme liquide)
Taux d’enrichissement: ≤ 5%
Durée de vie prévue: 60 ans
Fréquence de changement de combustible: une fois tous les 7 ans

Integral IMSR® est un petit réacteur à combustible de sel fondu de 440 MW de génération IV avec une cuve de réacteur entièrement fermée avec pompes, échangeurs de chaleur et barres d’arrêt. Le cœur du réacteur fermé est complètement remplacé à la fin de sa durée de vie utile (nominalement sept ans). Cela permet un contrôle de la qualité et une économie au niveau de la production de la centrale et évite la nécessité d’ouvrir et de maintenir la cuve du réacteur sur le site de la centrale.

La sécurité est assurée par un processus fonctionnant de manière indépendante qui ne nécessite pas l’intervention de l’opérateur, les composants actionnés mécaniquement, l’ajout de systèmes de refroidissement ou de support nécessitent une alimentation électrique.

Les cœurs de réacteurs sont produits sous forme finie à l’usine, les composants de la centrale sont de petite taille et  d’entre eux peuvent être transportés le long des autoroutes. La conception est basée sur des réactrices expérimentales MSRE développées dans les années 1950-1970 par Oak Ridge National Laboratories aux États-Unis et des composants développés.

Le tetrafluorure d’uranium (UF4), le sel combustible du fluorure fondu, est utilisé comme combustible, et agit également comme réfrigérant primaire et circule entre le noyau retardateur de graphite et les échangeurs de chaleur primaires. Par rapport au réacteur expérimental MSRE, l’innovation clé est l’intégration de toutes les pompes primaires et échangeurs de chaleur dans une cuve de réacteur fermée et entièrement remplaçable. Le circuit de refroidissement secondaire utilise également du sel fluoré, mais sans combustible ajouté, et transfère la chaleur du sel du cœur du réacteur via des échangeurs de chaleur primaires au troisième circuit de sel qui alimente les générateurs de vapeur. Le circuit vapeur alimente une turbine à vapeur industrielle classique conçue pour l’énergie et/ou l’industriel...

Alternativement, une partie ou la totalité du sel chaud peut être évacuée directement dans l’application de chaleur. Le combustible à sels fondus ne se décompose pas sous l’action de la chaleur ou du rayonnement. Les barres d’arrêt sont intégrées dans l’unité centrale et éteignent le réacteur lorsque la circulation forcée est perdue et que le courant interne est perdu. Un mécanisme d’arrêt de secours supplémentaire implique des cuves remplies de matériaux absorbant les neutrons qui arrêtent définitivement le réacteur en cas de surchauffe très improbable.

 Le combustible frais est amené dans la zone de la centrale sous forme solide, où il est fondu et ajouté au cœur du réacteur. Cela permet au réacteur de fonctionner avec le rechargement en réseau. En outre, contrairement aux réacteurs à combustible solide, il n’est pas nécessaire de retirer le combustible dans le cœur lors d’un rechargement supplémentaire. Tout le carburant reste dans le système fermé pendant toute la durée de vie de sept ans du cœur. Après cela, le bloc de cœur est fermé et, après la période de refroidissement, le combustible usé est pompé dans les réservoirs situés dans la cuve du réacteur.

Le bâtiment du réacteur dispose de deux silos pour les réacteurs sous le niveau du sol. Avant que le bloc de cœur ne soit arrêté à la fin de sa durée de vie, un nouveau noyau est installé dans le silo adjacent pour préparer le passage du circuit de sel du liquide de refroidissement secondaire du bloc de cœur en fin de vie au nouveau cœur. Après la commutation, l’unité centrale usagée reste dans son silo de travail jusqu’à ce qu’elle soit vidée de son combustible dans les réservoirs de combustible usé. Ensuite, le bloc de cœur, libéré du combustible, est transféré dans le bâtiment auxiliaire du réacteur avec une grue à pont pour le stockage à long terme.

Le combustible liquide usé est plus facile à recycler que les éléments de combustible solide. L’idée de Terrestrial Energy est de créer un centre central de récupération de combustible qui desservirait de nombreuses centrales IMSR.


7) Critères de sélection du SMR  le plus appropriée pour l’Estonie :

Étant donné que l’Estonie n’a aucune expérience préalable dans l’exploitation d’installations nucléaires et qu’il est nécessaire d’établir des compétences de base et d’assurer la formation de spécialistes, les experts de l’AIEA ont recommandé que le choix de la technologie soit fondé sur les principes suivants :

- Exclure les FOAK (First of a KInd)  :  L’Estonie ne devrait pas autoriser le développeur de réacteurs à construire la première centrale de ce type dans le pays, car leur exploitation peut s’avérer difficile pour un État nucléaire peu expérimenté, et le processus comprend  beaucoup d’incertitude.

Lors du choix d’un type de recteur approprié, il est recommandé de regarder les réacteurs qui ont déjà été mis en service commercial, pour lesquels il existe suffisamment d’informations et de solutions sur le processus de construction, le coût, le combustible et la chaîne d’approvisionnement en pièces de rechange.

- Ne pas choisir une technologie avec laquelle il y a très peu d’expérience – si l’on choisit un type de réacteur très exclusif qui n’a pas été suffisamment testé dans l’histoire de la production d’énergie nucléaire, il peut être difficile et long de réparer les défaillances techniques,

- Choisir un  type de réacteur qui peut être  alimenté par plusieurs fabricants – dans le cas d’un réacteur utilisant un combustible très unique, il est difficile de trouver d’autres fabricants et il est fort probable qu’il ne dépendra que d’un seul fournisseur, ce qui peut menacer la sécurité de l’approvisionnement. L’expérience des nouvelles puissances nucléaires montre qu’assurer l’approvisionnement en combustible est essentiel pour l’introduction de la technologie. Habituellement, seule l’expédition initiale de carburant et quelques expéditions supplémentaires sont incluses dans le contrat de construction. L’approvisionnement en carburant à long terme est assuré par un ou plusieurs contrats supplémentaires. À l’heure actuelle, aucun nouvel État doté d’armes nucléaires n’a intégré le développement de l’enrichissement de l’uranium ou la production de composants de combustible nucléaire dans le cadre de son programme d’énergie nucléaire. (

- Choisir une technologie pour laquelle il existe un savoir-faire technique dans les pays voisinssi le personnel de l’exploitant et l’autorité compétente dans le domaine de la sûreté nucléaire peuvent être formés dans les pays voisins et ont de l’expérience dans l’utilisation d’une technologie de réacteur particulière, cela permettra de réaliser des économies significatives et d’assurer une assistance technique plus rapide en cas de défaillances possibles... Si une décision a déjà été prise dans des pays proches en faveur d’une technologie particulière, il sera plus facile d’introduire le même type de réacteur dans votre propre pays, car il sera possible de s’appuyer sur l’expérience et la pratique d’un autre pays, de procéder à des achats conjoints, à des formations, etc.

Les recommandations ci-dessus n’excluent pas l’introduction de la technologie de génération IV en Estonie, mais cela est prévu qu’au moment de la mise en service du réacteur souhaité, il existe des chaînes d’approvisionnement de production de combustible ainsi que les composants nécessaires et un savoir-faire suffisant. Dans le cas des technologies pour lesquelles il y a moins de fournisseurs sur le marché, des coûts d’exploitation plus élevés et des investissements plus élevés devront être pris en compte au cours des premières années.

Les dates d’achèvement de FOAK sont plus proches pour les réacteurs refroidis à l’eau basés sur la technologie III+, car la plupart des infrastructures sont déjà en place pour la production de ces composants aujourd’hui. Les premiers réacteurs seront achevés en 2028. Leur octroi de licences est également plus facile et plus rapide, car les organismes de réglementation peuvent largement s’appuyer sur les normes et les documents d’orientation existants pour cette technologie.

Les normes et directives sur la sûreté nucléaire sont également largement applicables à la technologie de génération IV, mais certaines mesures de préparation aux situations d’urgence et de gestion des déchets radioactifs doivent être revues. De nouvelles mesures juridiques sont également nécessaires, par exemple dans les cas où le chargement de combustible dans un réacteur aurait déjà lieu dans la centrale. Les premiers réacteurs de  GEN IV devraient entrer en utilisation commerciale au début des années 2030, quelques années plus tard que les petits réacteurs de la technologie III+, et il serait sage de coopérer avec les pays voisins dans leur introduction.

Conclusion : Fermi Energia AS voit le plus grand potentiel dans les réacteurs GE-Hitachi, Rolls-Royce et NuScale, dont les développeurs devraient également recevoir les premières demandes d’appel d’offres cet automne. Sur cette base, un premier choix de technologie sera fait début 2023.

Dans le cas où des délais importants (plus de 33%) et des dépassements budgétaires se produisent lors de l’achèvement du premier prototype du type de réacteur sélectionné, la possibilité de modifier la sélection sera laissée jusqu’en 2026.