La démission de Nicolas
Hulot aura eu au moins un effet heureux (en fait même) plusieurs, dont celui de
libérer un certain nombre de paroles sur la politique énergétique (cf. aussi
mon blog précédent à propos du grand débat sur la loi de programmation de la
politique énergétique, finalement assez
instructif). Deux exemples récents du Monde :
Julien Aubert (30 août
2018) : « Le départ de Nicolas
Hulot est une chance pour revenir à un développement raisonnable »
Extraits :
Caution
libérale et zig-zag permanents
« Plutôt que de
protéger la planète, la politique engagée par Nicolas Hulot servait de paravent
pour faire oublier la politique néolibérale d’Emmanuel Macron… Emmanuel Macron,
en maître funambule, avait choisi l’écologie pour faire contrepoids à ses
penchants néolibéraux. L’opération était doublement bénéfique : premièrement,
elle permettait de rallier à son panache Nicolas Hulot, un homme engagé et
respecté pour son parcours loin des sirènes politiciennes ; deuxièmement,
Emmanuel Macron endossait le rôle de leader de la communauté internationale sur
le sujet du réchauffement, imitant le style de Barack Obama. »
Sur le fond, en prônant
des taxes sur les émissions de CO2, Macron ne faisait pas violence à ses
convictions profondes. Il ne faisait que défendre une politique écologique
fondée sur un raisonnement néolibéral d’incitation à la modification des
comportements individuels pour sauver la planète. Les mêmes recettes vantées
depuis vingt ans par le G7 et qui n’ont, au passage, strictement rien enrayé
dans la progression des émissions. Une fois sur la route, l’attelage
Macron-Hulot a cependant abouti à des zigzags permanents. »
Des
choix technologiques absurdes et la filière
nucléaire dénigrée :
Loin de se voir offrir
une visibilité industrielle, la filière nucléaire a été dénigrée avec la
complicité de certains membres du gouvernement, en laissant entendre que la
réduction du nombre de centrales se poursuivrait, comme cela avait été voté
sous le mandat Hollande, ou en publiant au Parlement des rapports alarmistes
sur la sûreté et la sécurité nucléaires. Le gouvernement a tordu le bras d’EDF
pour que l’entreprise annonce des investissements massifs dans l’énergie
solaire alors qu’elle peine à faire face à ses projets nucléaires actuels et aux
défis futurs. Si nous voulons sécuriser
notre avenir énergétique, lors nous devons amorcer le remplacement du parc
nucléaire par la troisième génération et donner de la visibilité aux sites pour
éviter une catastrophe sociale ».
« Dans le même
temps, Emmanuel Macron a fait tout son possible pour faciliter les projets éoliens terrestres, levant texte
après texte tous les obstacles juridiques, les recours et abaissant les coûts
de raccordement. Pour l’éolien posé en mer, il a validé des concessions qui
coûteront aux contribuables des dizaines de milliards d’euros, sur vingt ans avec
le rachat de l’électricité produite. Là encore, personne n’a pris le temps de
regarder la catastrophe allemande qui, en faisant le pari de l’éolien, a fait
exploser nos gaz à effet de serre. »
« Si l’on veut
vraiment réduire les émissions de CO2, alors redéployons les financements
actuels des énergies renouvelables vers le nucléaire et l’hydroélectrique. Si
l’on veut vraiment protéger les paysages, interdisons l’éolien terrestre,
maritime posé et luttons contre l’artificialisation des terres victimes du
bétonnage marchand. (NB : un socle d’éolienne terrestre est fabriqué en
coulant dans le sol 1 500 !!! tonnes de béton sur une armature
composée d’un treillis de ferraille mise dans une cavité creusée par des
bulldozers et des pelleteuses)
Conclusion :
« le départ de Nicolas Hulot est salutaire, car l’écologie est une
idéologie »
Autre tribune : Marc Fontecave, Professeur au
Collège de France, Le Monde (4 septembre
2018) N’attendons pas de révolution
écologique, avançons à petits pas. Extraits :
Ecologie
: « Il n’y a aucune chance de voir une révolution se réaliser »
« Nicolas Hulot a
quitté son poste en déplorant la faiblesse des moyens engagés pour l’écologie,
mais la sauvegarde de l’environnement
exige des avancées technologiques et politiques qui ne se décrètent pas »
« La preuve est faite à nouveau. Un militant
« vert » ne peut pas être ministre de l’écologie. Tout simplement parce que
l’idéologie environnementale sur laquelle est construit son engagement
s’accommode difficilement des contraintes non seulement économiques, politiques
et sociales, mais également scientifiques et technologiques dans lesquelles le
monde réel peut effectivement évoluer. Cette idéologie semble en effet partir
de trois principes fondamentaux, à la fois profondément faux et inopérants.
Le premier, c’est que la
catastrophe, dont l’homme par essence poison pour la nature serait le seul
responsable, est imminente et qu’il faut agir dans une urgence extrême pour à
la fois transformer en profondeur le système économique mondial, redonner sa
chance à la biodiversité et changer les modes de vie des 7 milliards
d’habitants de la planète.
Le second, c’est que
chacun de ces habitants serait déjà convaincu de la nécessité de ce changement,
convaincu que la seule question digne d’intérêt serait celle de l’écologie, ce
qui est malheureusement inexact.
Le troisième, c’est que
toutes les solutions technologiques appropriées, notamment pour décarboner
l’énergie (remplacement des énergies fossiles et du nucléaire par les énergies
renouvelables ; stockage des énergies intermittentes ; mobilité électrique ;
etc..), condition supposée unique pour limiter le réchauffement climatique,
seraient déjà disponibles et qu’il n’y aurait plus qu’à les exploiter. »
« De sorte que, si
après un an ou deux en responsabilité, ce ministre « vert » ne constate que des
« petits pas », comme l’a déploré Nicolas Hulot en annonçant sa démission, il
ne peut en effet que désespérer, accuser son adversaire préféré, les lobbys, sans qu’on sache vraiment ce qui est
lobby et ce qui ne l’est pas, et finalement démissionner »
(NB : et en effet,
consciemment ou bien manipulé, Nicolas Hulot a bien servi le lobby des
margoulins de l’éolien ! »)
« La réalité,
disons-la clairement, car il vaut mieux que le citoyen la connaisse au lieu de
croire à la possibilité d’un grand soir écologique. En matière de système
énergétique et de comportement humain, les changements possibles ne sont pas de
nature révolutionnaire. La tâche est colossale et les transformations
souhaitées occuperont plusieurs générations. L’éveil des consciences à ces
enjeux énergétiques, climatiques et environnementaux, compliqué par la très
grande diversité des situations
économiques, sociales et culturelles de chacun , demande une pédagogie ouverte et un très grand optimisme dans l’homme,
pour essentiel absent des discours des représentants de cette idéologie
environnementale. Le temps du progrès scientifique et technologique, celui
des transitions énergétiques est un temps long… Aucune révolution technologique
dans l’histoire de l’humanité ne fur le produit d’une décision politique ou
d’un décret. »
« Enfin, l’impact
de la France sur le dérèglement climatique est si faible, si on le compare à
celui des Etats- Unis, de la Chine ou de l’Inde qu’on ne cesse d’être étonné
par l’importance données aux mesures que pourraient prendre nos gouvernements
seuls. La France ne compte environ que pour 1 % du CO2 produit par l’ensemble
des activités humaines de la planète ( cette situation particulièrement
vertueuse s’explique par notre choix historique et qu’une politique de lutte contre le gaz à effet de serre ne peut pas, comme
c’est le cas aujourd’hui, être une politique antinucléaire, l’exemple de
l’Allemagne illustre cette contradiction ».
Il n’y a en réalité
qu’une seule politique, c’est celle, réaliste, pragmatique et optimiste des
« petits pas » Cette somme de petits pas pendant des dizaines
d’années constituera « un bond de géant pour l’humanité » pour
reprendre ce message merveilleux de Neil Armstrong sur la Lune »
Commentaire :
Le changement climatique
et la transition énergétique, également rendue obligatoire par la raréfaction des
ressources non renouvelables, doivent être pris très au sérieux, et pour cela
reposer sur des bases scientifiques et technologiques solides – et cela est
tout simplement incompatible avec l’idéologie verte et la présence des
représentants de cette idéologie en responsabilité à l’environnement et à l’énergie, incompatible
avec des politiques antinucléaires.
Reconnaissance de l’urgence
oui, mobilisation nécessaire, oui, besoins de recherche et d’innovation
technologiques majeures, oui. Mais pas la panique, dont savent très bien profiter de très
louches intérêts idéologiques et financiers.
Si l’on prend au sérieux
le changement climatique, dont la réalité a été établie par les scientifiques
du GIEC, il serait peut-être temps de confier aussi la responsabilité de sa
conduite aux scientifiques et non aux idéologues, ou, en tous cas, de les
écouter davantage.
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