Contexte et importance des enquêtes publiques
L’enquête publique sur les modifications réalisées par Tricastin à l'occasion du quatrième réexamen de sûreté de la tranche 1 a débuté jeudi 13 janvier et se poursuivra jusqu’au lundi 14 janvier. Le grand public pourra donner son avis sur l’ensemble des dispositions d’amélioration mises en œuvre pour la prolongation de la durée de fonctionnement du réacteur N°1. Tous les citoyens, y compris les salariés, sont invités à y participer.
Cette première enquête publique concerne la perspective d’une poursuite de fonctionnement des réacteurs 900 MW pour les 10 ans qui suivent leur 4ème réexamen périodique. Tricastin ouvre la voie, il y aura une enquête pour chaque réacteur 900 MW.
Après dépouillement et analyse, la commission d’enquête remettra ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet et cela constituera un des éléments pris en compte par l’Autorité de Sûreté Nucléaire pour élaborer sa Décision (attendue au 2ème semestre 2022) de poursuite d’exploitation de Tricastin 1. Ce serait une erreur de penser qu’il s’agit d’une « formalité » ou que cette enquête publique qui est « consultative » ne pèsera pas dans la décision de l’ASN. Les opposants au nucléaire, eux, se sont organisés pour peser.
L’enquête publique porte sur « les dispositions proposées par EDF lors du 4ème réexamen périodique de Tricastin 1 ». Ce n’est pas une prise de position « pour » ou « contre » le nucléaire mais un avis sur l’ensemble des dispositions d’amélioration mises en œuvre pour la prolongation de la durée de fonctionnement du réacteur N°1.
Les contributions personnelles… doivent être personnelles. A chacun de les rédiger selon ses connaissances et sensibilités. Les envois de messages tous similaires en masse ne seront pas pris en compte.
Il est néanmoins possible de présenter quelques arguments assez standard. Tout le monde peut contribuer sur la plate-forme ci-dessous
https://www.registre-dematerialise.fr/2797
Principales remarques et conclusion :
1) La prolongation des réacteurs existants, lorsqu’elle est compatible avec la sécurité et validée par les Autorités de Sureté compétentes est reconnue par l’AIE et l’OCDE (NEA) comme la source la plus rentable d’électricité à faible teneur en carbone.
Rappelons qu’il n’y a pas de durée de vie fixée des centrales nucléaires, ni en France, ni dans les autres pays possédant une industrie nucléaire (sauf le Japon). En France, l’autorisation de créer une installation nucléaire est délivrée par le gouvernement, sur avis de l’ASN. Ce « feu vert » est délivré sans limitation de durée mais il est remis en question tous les 10 ans dans le cadre d’un réexamen approfondi de l’installation (réexamen périodique)
Aux USA, pays le plus avancé dans la prolongation des centrales nucléaires, les centrales nucléaires renouvellent leur autorisation de fonctionner tous les 20 ans. La plupart des centrales, qui sont assez similaires aux nôtres, sont déjà autorisées à fonctionner 60 ans. La poursuite de fonctionnement jusque 80 ans est en cours de réflexion.
2) Lorsqu'on fait le bilan de 40 ans de fonctionnement du parc nucléaire, on doit constater qu'il a assuré la production d'énergie électrique de la nation avec une grande fiabilité et sans incident ou accident notable. C’est le résultat de bonnes interactions entre l’exploitant EDF, et l’Agence de Sureté Nucléaire, dont l’indépendance et la qualités sont reconnues internationalement.
L’accident survenu au Japon en 2011 (Fukushima) a été pleinement pris en compte comme pour faire évoluer la sécurité des réacteurs 900MW face à des risques spécifiques (séisme, perte de source électrique, perte de source de refroidissement). Les demandes de l'ASN dans le cadre du 4ème réexamen périodique des centrales concernent une meilleure gestion des accidents potentiels avec ou sans fusion du coeur du réacteur, du combustible dans la piscine de désactivation et des agressions internes ou externes au site (séisme, tornade, inondation,...).Le but final est de protéger la population de tout accident nucléaire mais également de ne pas contaminer l'environnement en toute situation.
Cet objectif a été pleinement adopté par EDF dans le cadre des VD4. Bien qu’âgé de 40 ans, le réacteur N°1 de Tricastin avec l’ensemble des dispositions prises par EDF sera plus sûr qu’à sa mise en service et qu’à la sortie des précédents réexamens de sûreté et le niveau de sécurité sera très proche de celui des réacteurs de GENIII type EPR. Cette exigence est en fait assez unique dans les comparaisons internationales.
3) Etat de la cuve et fissures : l’existence de microfissures (ou plus exactement de microbulles entre l'acier noir de la cuve et son revêtement en inox) est un problème connu depuis l’origine et suivi donc depuis 40 ans. Le problème concerne huit cuves construites avant 1979, Tricastin 1 étant le plus affecté avec 20 défauts détectés sur les viroles pour 37 sur l’ensemble du parc. Ces microfissures résultent d’un procédé de soudage du revêtement, qui a été modifié depuis. L‘ASN a rappelé que ces défauts isolés ne dépassent pas une dizaine de millimètres de hauteur dans une paroi épaisse de plus de 200 mm et ne sont, ni par leur dimension, ni par leur nombre comparables à ceux trouvés sur les cuves de Doel en Belgique.
Depuis quarante ans qu’elles sont suivies, ces fissures surveillées par l’IRSN et l’exploitant n’ont pas évoluées. En conséquence, l’ASN a fait savoir au directeur de la production nucléaire d'EDF (3 janvier 2022) que «considérant les éléments communiqués […], l'ASN retient que la tenue en service de la zone de cœur des réacteurs numéro 1 du Tricastin et numéro 2 du Bugey est démontrée pour la période de dix ans suivant leur quatrième visite décennale.»
Au surplus, un dispositif complémentaire de protection de la cuve a été évalué sur Tricastin 3 et devrait être généralisé : ainsi, dans le cadre du 4e réexamen périodique, l’introduction de grappes en hafnium dans des assemblages combustibles permettra de réduire encore les flux de neutrons sur la cuve et de préserver les marges mécaniques. C’est une voie possible vers une proogation à encore plus long terme des 900MW.
4) Les récupérateurs de corium : c’est un exemple de la façon dont le post Fukushima a été pris en compte, conduisant à une sécurité de niveau GEN III.
L’ASN a imposé dans les réacteurs de 900 MWe « des dispositions nouvelles permettant la stabilisation du corium (y compris en cas de percement de la cuve) et la possibilité d'évacuer la chaleur hors de l'enceinte de confinement sans utiliser le dispositif d'éventage-filtration ». En accord avec l’IRSN¸ les dispositions retenues par EDF consistent à réaliser un étalement sec du corium sur le radier dans le puits de cuve en l'étalant également dans un local voisin (local RIC). Elles permettent l'étalement sur une grande surface du corium afin de permettre le renoyage passif par l'injection d'eau. Cette solution ingénieuse permet d'assurer la stabilisation et le refroidissement du corium à l’intérieur de l’enceinte de confinement.
Certains jettent le doute sur cette solution en affirmant qu’elle n’a pas fait l’objet d’études expérimentales ; c’est une évidence, il est impossible et dangereux d'expérimenter avec un vrai corium ! et il n’existe heureusement que très peu de retours d’expériences d’accidents. Les physiciens recourent à des modélisations et simulations expérimentales, il est ainsi possible d’étudier les effets de métaux fondus à très haute température, ou ceux d'une très forte radioactivité sur les matériaux susceptibles d'être en contact avec un corium.
Les récupérateurs de corium ont fait l’objet d’expertises par l’IRSN et
l‘AS qui ont validé le bien-fondé de ce concept et de son design. L’IRSN a
ainsi proposé une couche de béton sacrificiel plus épaisse qu’initialement
prévu afin que le corium n'atteigne pas trop tôt les plaques d’acier
sous-jacentes. Par ailleurs, la quantité d’eau qui pourrait être présente dans
le puits de cuve et dans la chambre d'étalement au moment de la percée de la
cuve doit être limitée par conception afin d’éviter les risques d’explosion.
4b) un recombineur d'hydrogène, qui diminue conisdérablement tout risque d'explosion
5) Injection d’eau borée : dans la série des modifications post-Fukushima, l’ASN a demandé aux exploitants des réacteurs de 900 MWe de mettre en place un dispositif permettant d’injecter de l’eau borée dans le réacteur dans les situations de perte totale des alimentations électriques du site.
EDF a proposé l’installation sur
chaque paire de réacteurs d’une pompe
supplémentaire aspirant l’eau borée de la bâche d’eau de refroidissement des
piscines via le circuit d’aspersion de l’enceinte, et la refoulant dans le
circuit primaire par les lignes basse pression du circuit d’injection de
sécurité (RIS-BP). Cette modification
augmente la pression d'injection d'eau borée du circuit RIS et permet de
réduire considérablement le risque de découvrement du cœur en situation de
perte de réfrigérant primaire.
6) Diesels d’Ultimes Secours : Autre modification post-Fukushima,
l’Autorité de Sureté Nucléaire Diesel d'Ultime Secours (DUS) avait en 2012 imposé à EDF d’installer, sur
chacun de ses sites nucléaires, deux moteurs de secours autonomes. Ils sont l'ultime rempart contre la fusion du cœur du
réacteur en cas de perte de la source de refroidissement car ils permettent
l'alimentation électrique en 220V de divers appareils utiles en gestion de
crise (notamment: appareils de télécommunication, équipements de protection
individuelle ou collective).
La presse s’est fait l’écho
de problèmes (départs de feux au niveau du collecteur d’échappement) lors des
premières installations et tests sur 6 DUS (sur 56). L’Autorité de sûreté nucléaire a été informée de ces événements
et a communiqué : « L’ASN a veillé
à ce que les causes en soient déterminées et à ce que des mesures correctives
soient mises en œuvre, ce qui a été fait. ». Tous les matériels en exploitation (52 DUS)
ont passé des essais d’endurance et ont été qualifiés. Ils sont conformes et
sûrs.
7) Piscines de refroidissement des combustibles
usés : Un système d’appoint de refroidissement de l’eau des piscines
d’entreposage des combustibles usés a été mis en place, notamment pour parer à
la possibilité d’une chute d’un petit avion sur ces installations. La dalle de
béton d’enceintes de confinement doit être épaissie pour éviter la pollution
des nappes phréatiques en cas d’accident grave dans le cœur du réacteur. «
L’objectif est de se rapprocher le plus possible des exigences de sûreté des réacteurs
de troisième génération tels que l’EPR », a déclaré le Directeur de l’ASN. Une
intervention de la FARN (Force d'Action Rapide Nucléaire) est également prévue
en cas de problèmes.
Un des reproches récurrents de la part des opposants du nucléaire est que les piscines « ne sont pas bunkerisées ». Pour sa part, l’ASN a souligné le travail réalisé par EDF en termes d’études de sûreté, qui a conduit à « la définition de dispositions supplémentaires qui permettront d’améliorer notablement la sûreté de l’entreposage du combustible et de répondre aux objectifs retenus pour le quatrième réexamen périodique des réacteurs de 900 MWe »
9) Force d’Action Rapide du Nucléaire : autre mesure post Fukushima, la Force d’Action Rapide du Nucléaire compte 310 personnes qui s’entraînent toute l’année à l’intervention en situation de crise. Son but est d’ intervenir en moins de 24 heures en appui au site, si besoin, réinjecter de l’eau et de l’électricité dans l’installation, assurer les branchements « plug & play » et appuyer l’équipe de pilotage de la centrale. La Farn dispose de 40 équipements, dont un hélicoptère, des barges, des pick-up 4x4, des semi-remorques, des camions plateaux avec ou sans grue pour apporter et déplacer les groupes électrogènes, les tuyaux, les câbles, les pompes, le carburant… tout ce qui est nécessaire pour dégager une route, assurer une alimentation électrique et une "source froide" (eau permettant le refroidissement) pour le site nucléaire
La FARN s’entraine continument. Ainsi, un exercice a eu lieu du lundi 17 au jeudi 20 janvier 2022 au Tricastin et dans les communes alentours. Les moyens mobiles mis en œuvre par la Force d’Action Rapide du Nucléaire permettent de renforcer encore le niveau de sûreté avec une nouvelle ligne de défense pour faire face aux situations les plus critiques, permettant notamment d’assurer le refroidissement du combustible aussi bien celui présent dans la cuve du réacteur que celui qui peut être entreposé dans la piscine de refroidissement
10) Agressions externes au
site : Les travaux de renforcement de la digue pour
résister au Séisme Noyau Dur permettent d’élever le niveau de résistance à
l’agression d’un séisme.
À la suite du séisme du Teil survenu le 11 novembre
2019 à proximité des centrales nucléaires de Cruas et du Tricastin, l’ASN a
demandé à EDF de déterminer si cet
événement serait susceptible de conduire à une réévaluation du niveau des aléas
sismiques retenus pour la démonstration de sûreté. En réponse, EDF considère
que le séisme du Teil est sans impact
sur la définition du SMS du site du Tricastin. En effet, sur les sites des installations
nucléaires du Sud-Est (Cruas, Tricastin, Marcoule et Cadarache), le séisme du
Teil n’a engendré que des accélérations minimes, très inférieures à celles
prises en compte dans leur dimensionnement, et n’a pas eu de conséquences sur
les matériels. Du point de vue de la sûreté, le retour d’expérience porte en
premier lieu sur les procédures d’inspection en cas de séisme, qui doivent être
précisées et rendues plus directes et opérationnelles.
Lorsqu’en un lieu, la vitesse de propagation des ondes sismiques est
inférieure à la vitesse des ondes en profondeur, on observe une amplification
et un allongement du signal sismique. Le sol agit en quelque sorte comme un
amplificateur et les ondes peuvent être « piégées » dans les terrains à plus
faible vitesse de propagation. Tricastin, construit sur une zone sédimentaire
est soumis à cet effet de site bien connu. Après le séisme du Teil, l’IRSN a
comparé les signaux enregistrés par différents capteurs placés à proximité de
Tricastin, les uns au rocher, sur le bord du canyon, les autres sur les
sédiments. Ces signaux ont confirmé l’existence d’un effet de site :
amplification et allongement du signal. Cet
effet de site est pris en compte
dans la définition du spectre de référence.
La FARN constitue une nouvelle ligne de défense face aux situations les plus critiques d’inondation ou séisme ; de même pour les Diesel d’Ultimes Secours.
Pour l’inondation d’origine externe, dont l’étude a été réalisée à ce stade pour les sites du Tricastin, du Bugey, de Gravelines et de Saint-Laurent-des-Eaux, les valeurs obtenues sont, pour le risque de fusion du cœur, compris entre 10-6 et 10-5 par an et par réacteur et sont négligeables pour le risque de découvrement des assemblages de combustible dans la piscine d’entreposage.
L’ASN considère que « l’ensemble des dispositions mises en œuvre à la suite de l’inondation du site du Blayais en décembre 1999 et dans le cadre de la prise en compte du retour d’expérience de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi permet de conférer aux centrales nucléaires de 900 MWe un haut niveau de protection contre le risque d’inondation d’origine externe »… Pour le site du Tricastin, les éléments transmis par EDF relatifs aux méthodes d’évaluation des situations de référence pour le risque d’inondation (crue, pluie, rupture d’ouvrage hydraulique…) sont jugés globalement satisfaisants.
Concernant le risque de tornades, l’ASN a notamment considéré que la définition de la tornade de référence proposée alors par EDF (niveau de tornade EF340 sur l’échelle de Fujita) ainsi que les projectiles associés étaient globalement satisfaisants pour le quatrième réexamen périodique.
Concernant les vagues de chaleur, un référentiel « grands chauds » (température exceptionnelle supérieure ou égale à 45,7 °C et une température minimale supérieure ou égale à 27,3 °C pour le site du Tricastin) a fait l’objet d’une instruction dans le cadre du quatrième réexamen périodique des réacteurs de 900 MWe. L’ASN souligne l’ampleur des études réalisées et des modifications prévues par l’exploitant pour protéger ses installations. L’ASN considère que la déclinaison du référentiel « grands chauds » constitue une avancée majeure pour la démonstration de sûreté.
En résumé, les demandes de l'ASN dans le cadre du 4ème réexamen périodique des centrales REP 900 MW concernant une meilleure gestion des accidents avec ou sans fusion du cœur du réacteur, du combustible dans la piscine de désactivation et des agressions internes ou externes au site (séisme, tornade, inondation,...) ont été prises en compte. Elles permettent une meilleure gestion des accidents avec ou sans fusion du cœur du réacteur, du combustible dans la piscine de désactivation et des agressions internes ou externes au site (séisme, tornade, inondation,...), le but final étant de protéger la population de tout accident nucléaire mais également de ne pas contaminer l'environnement quelle que soit la situation. L’'accident survenu au japon (Fukushima) en 2011 a été pleinement pris en compte.
Le CNPE de Tricastin exploite et effectue la maintenance de ses réacteurs en toute transparence. Ce point a notamment été souligné par l'Autorité de Sûreté Nucléaire. A la suite du quatrième examen décennal, le réacteur N°1 de Tricastin est plus sûr qu’à sa mise en service et qu’à la sortie des précédents réexamens de sûreté.
Face à l’urgence climatique, à la crise énergétique et à ses conséquences économiques, à l’épuisement des ressources fossiles, l’avis sur la prolongation de l’exploitation de Tricastin ne peut être que très favorable.
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