Donc, la dernière clownerie de l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise
de l’énergie), c’est son évaluation de l’évolution du Mix électrique jusqu’en
2060 publiée en décembre 2018. Elle recommande en substance d’arrêter les
centrales existantes avant leur fin de vie, les remplacer massivement par des
installations solaires et éoliennes (multiplication par plus de dix des
puissances installées actuelles), et développer une économie de l’hydrogène
avec les surplus d’électricité des périodes favorablement ventées et
ensoleillées.
En gros, mettez des éoliennes et des panneaux photovoltaïques partout et
vous aurez un jus pas cher. Et surtout moins cher qu’avec du nucléaire. Et David
Marchal, Directeur adjoint « Productions et énergies durables » assène : «la place très prépondérante des ENR dans le
système électrique français est sans appel (…) et le nucléaire de nouvelle
génération (type EPR) n’apparaît pas compétitif». Tel que . Et largement
repris par la presse, on s’en doute.
Sauf que c’est du complet bullshit, une pure honte, une opération de
propagande digne de la Pravda ou de la Propaganda Staffel. Et que s’il y avait
une loi sur les fake news, il faudrait d ’urgence l’appliquer à la
direction de l’Ademe.
Commentaire
de l’Académie des technologies : « L’Académie des technologies, comme elle l’a déjà écrit,
s’inscrit pleinement dans la politique de développement des énergies
renouvelables. Elle considère que la réussite de cette politique suppose des
hypothèses réalistes. C’est pourquoi
elle estime que les conclusions de l’étude de l’ADEME doivent être prises avec
une très grande prudence. Elles ne devraient en aucun cas servir de base à des
décisions de politique publique »
En langage d’académicien, c’est assez saignant. Et les
explications ne le sont pas moins :
1. « L’approche de l’ADEME se concentre sur le
secteur Electrique. Cependant les hypothèses qu’elle prend impactent les autres
secteurs énergétiques et particulièrement le Gaz. Il existe des interactions
entre ces secteurs ; par exemple, l’ADEME propose le développement
d’importantes quantités de biogaz, notamment à partir d’hydrogène produit par
électrolyse. Cependant on peut douter que cette stratégie soit compatible avec
les contraintes propres au stockage et au transport de l’Hydrogène dans le
secteur Gaz ».
C’est gentiment dit. On pourrait dire autrement. L’électricité
pour produire l’hydrogène par électrolyse
de l’hydrogène, elle vient d’où ? du biogaz ? Et les shadocks
pompaient, pompaient…
2. L’ADEME envisage
une quasi-stagnation de la demande d’électricité jusqu’en 2060, malgré de nouveaux usages. Cette
hypothèse est plus basse que celle retenue par la Stratégie Nationale Bas
Carbone (SNBC) du Ministère de l’Environnement. Sur une aussi longue période,
la prise en compte d’une croissance, ne serait-ce que de 1% par an, modifierait
radicalement les résultats.
(Commentaire ; le rapport sur l’intelligence
artificielle de Villani envisage un doublement de la consommation électrique. Lancer
une recherche sur un moteur de recherche consomme autant qu'une ampoule basse
consommation de 12 watts, allumée pendant une heure ! L’envoi d’un mail consomme enre 4 et 50g de CO2, en
cas de pièce jointe importante !)
Faudra que l’Ademe m’explique, surtout si en plus on
remplace les diesel par des voitures électriques !
3. Malgré ces hypothèses basses sur la demande, les trajectoires de l’ADEME n’assurent pas
la neutralité Carbone en 2050 – ce qui est pourtant un objectif
gouvernemental - ni même en 2060. A cet
horizon, les trajectoires de l’ADEME requièrent des importations significatives
d’électricité, pour pallier les aléas du soleil et du vent. Mais les pays
limitrophes seront soumis à des conditions météorologiques analogues, et ils ne
seront pas en mesure de garantir les besoins français d’électricité… surtout
ceux qui auront renoncé au nucléaire.
4. Les coûts
induits sur le secteur Gaz par le Mix électrique envisagé ne sont pas présentés.
L’ADEME fonde à tort ses conclusions sur la seule économie de l’Electricité,
sans prendre en compte les nécessaires investissements et d’exploitation du
secteur Gaz.
(et ajoute-t-on ne prend pas en compte ce qu’induit le
fait de dépendre fortement de fournisseurs gaziers come la Russie ou l’Algérie,
en terme de souveraineté et de marge de manœuvre !)
5. De nombreuses hypothèses économiques retenues par
l’ADEME paraissent très discutables. Ainsi,
le facteur de charge de la production éolienne terrestre adopté par l’ADEME est
sensiblement supérieur au facteur de charge actuel ; cependant l’ADEME admet que les futurs sites seront moins bons que
les sites présents, ce qui est inévitable.
Les installations de production d’hydrogène auront des
facteurs de charge faibles, et les rendements
attendus des processus de conversion (électrolyse d’électricité
excédentaire, transport, stockage d’hydrogène, production d’électricité à
partir de l’hydrogène) se heurtent à des
limites physiques ; ils sont, in fine, très faibles.
Mais l’Ademe a visiblement décidé d’ignorer les bases de
la physique, ou de les révolutionner !
6. Certaines perspectives d’évolution des coûts
d’investissement des énergies renouvelables sont surestimées par l’ADEME ; par
exemple des baisses encore très significatives de l’éolien terrestre –
technologie mature – sont peu probables.
7. La valeur économique de
l’électricité. Il est bizarre que dans toutes les autres
simulations, sauf celle de l’Ademe, les ENR intermittentes ( solaire et éolien)
ne parviennent pas à évincer le nucléaire. Bien plus, partout, on observe une
corrélation négative avec le coût de l’électricité- plus il y a d’ENR variable
dans le mix électrique, plus l’électricité est chère. C’est quand même
bizarre !
Explication : l’Ademe néglige complètement la
valeur réelle économique de l’électricité. Lorsque les ENR variables tournent à
plein régime, et que le besoin d’électricité est faible, la valeur de
l’électricité produite est très faible…Il est arrivé même qu’elle soit
négative ; le 1er janvier 2018 ,en France ! EDF était obligé de
payer pour que des clients achètent le
courant que les éoliennes produisaient à plein tube – alors que toute le monde était sous la
couette et que personne n’en avait besoin !
A l’inverse un moyen de production pilotable (comme
le nucléaire…) qui permet de répondre à
la demande lorsqu’elle s’exprime … vous permet vendre votre électricité très chere, en présence d’une forte demande
et de l’absence de compétiteur renouvelable….
Bref, après avoir ignoré les lois élémentaires de
la physique, l’Ademe s’assoit sur celles de l’économie ! Des clowns, vous
dis-je !
9. Le communiqué de presse annonçant cette étude affirme dans son premier
paragraphe que « le développement de la
filière EPR ne serait pas compétitif ». Cependant cette affirmation est contredite par l’étude présentée,
comme cette note le démontre. Ni l’étude,
ni le communiqué de presse, ne relèvent une des importantes conclusions de l’étude
elle-même : seul un renouvellement
partiel du parc nucléaire permettrait la neutralité Carbone en 2050, qui
est un objectif gouvernemental nécessaire pour contenir l’augmentation de
température de l’atmosphère terrestre en-deçà de 1,5°C.
En ce qui concerne le nucléaire, historique, là, c’est
carrément drôle : l’ Ademe recommande de fermer les
réacteurs nucléaires actuels plus vite… car leur trop
bas coût de production d’électricité gène le déploiement des ENR non pilotables,
handicapées par ce concurrent trop efficace !!
Après s’être assis sur les lois de la physique,
puis sur celles de l’économie, l’Ademe se fiche visiblement du prix que les
consommateurs paient leur électricité. Ils aiment voir du monde dans les rond
points ?
10. L’ADEME ne semble pas prendre en compte de manière
réaliste deux difficultés d’un système électrique fondé sur une proportion
importante d’énergies intermittentes : la garantie du synchronisme – clef de la
stabilité du réseau - et l’ajustement aux variations rapides et fréquentes de
la charge.
En fait, l’Ademe s’appuie sur des
hypothèses qu’on peut qualifier d’ «héroïques» sur nombre d’éléments du système
électrique. Par exemple, presque toutes
les consommations sont supposées être asservies à la variabilité des
productions des éoliennes et des installations photovoltaïques développées à grande
échelle. Toutes les consommations d’eau chaude sanitaire, 75% du chauffage
électrique, 38 à 56% des produits blancs (électroménager…), 50% des usages
industriels (!), 80% des recharges des véhicules électriques sont « effaçables » selon ces hypothèses !
Cela
conduirait à une puissance effaçable de 60 GW ! Alors que
RTE et la société spécialisée E.Cube estiment le potentiel de demande pilotable
grâce aux smart grids à 9,3 GW, et celui pilotable dans l’industrie de 4,5 à
6,5 GW ! Ca,
c’est de l’héroïsme !
Cela veut dire en fait que particuliers et industriels seront priés
d’utiliser l’énergie quand elle est produite et non quand ils en ont
besoin ! Big Brother décidera quand on pourra consommer de
l’électricité. Tiens, et si c’était ça le vrai intérêt du compteur Linky, qui
permet au gestionnaire de vous effacer du réseau quand il veut ? Ca va pas
aider à l’acceptabilité sociale des Linky ni calmer les résistances qui se
manifestent déjà….
Ensuite, l’Ademe
fait l’hypothèse d’un triplement des interconnexions (de 12 à 36 GW) avec
des systèmes étrangers lesquels évoluent comme par magie pour servir les
besoins français tant en exportations qu’en importations. Nos
voisins se dotent de capacités de stockage énormes, et leurs productions sont
miraculeusement là en cas de besoin et pas là lorsque nous pouvons exporter. C’est
assez arbitraire ! Et le moins qu’on puisse dire, c’est que c’est plutôt
l’inverse qui semble se produire, au vu des plans de transition de nos
voisin ; ils comptent visiblement sur le nucléaire français pour les
fournir lors des pics de demande ou
d’effondrement des énergie renouvelables non pilotables…
Comment dire ? Cela pourrait être drôle s’il
ne s‘agissait pas d’énergie, c’est-à-dire la source de toute vie, et plus
encore civilisée ! Là, c’est tragique, et plus encore si gouvernement et
media (qui ont un grand rôle à jouer) accordent la moindre crédibilité à
l Ademe et à son directeur. En tout état de cause, une mesure immédiate
s’impose : l’équiper d’un gros nez rouge et de pantoufles de 55. Comme ça, on saura qui
parle !
Il y a au sein de l’Ademe un certain nombre de
scientifiques et d’ingénieurs, dont je n’ose pas imaginer l’état mental. Il
leur reviendra sans doute assez rapidement de choisir entre leur conscience et
leur honneur professionnel, et le rôle qu’on leur fait jouer.
Bibliographie : Trajectoires d’évolution du
mix électrique 2020-2060, Commentaires d’une étude ADEME publiée le 10 décembre
2018, Synthèse de l’avis de l’Académie des technologies ; Dominique Finon,
directeur de recherche émérite au Cnrs, économiste (avec l’aide de Sylvestre
Huet pour la rédaction). http://huet.blog.lemonde.fr/2019/01/31/le-plan-tout-renouvelable-de-lademe-conteste/
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