Le nucléaire en Europe : essentiel pour réussir le défi
climatique, maintenir notre économie !
Le nucléaire fournit
actuellement plus de 47 % de la production d’électricité à faible émission de
carbone (mais 12% de la consommation finale d’énergie) dans l’UE grâce à plus
de 100 réacteurs nucléaires actuellement en service.
Sans nucléaire, il y aura un demi-milliard de tonnes
d’émissions de CO2 supplémentaires chaque année en Europe, soit plus que les
émissions du Royaume-Uni ou de la France.
Les émissions du cycle de vie produites par le nucléaire se comparent
favorablement à celles des technologies renouvelables.
Selon les chiffres du Groupe d’experts
intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), avec 12 g CO2/KWh, les
émissions du cycle de vie nucléaire sont égales à celles de l’énergie éolienne
et sont quatre fois inférieures à celles de l’énergie solaire (cette analyse
comprenant l’ensemble du cycle de vie, y
compris l’extraction de l’uranium, l’enrichissement et la fabrication de
combustible, la construction d’usines, l’utilisation, le déclassement et la
gestion à long terme des déchets). En France, même l’Ademe a reconnu une valeur
plus basse (6g CO2/KWh), en raison des performances des particulièrement bonnes
de l’enrichissement)
A de multiples reprises, le GIEC a rappelé que le
nucléaire constituait une part indispensable de la solution au défi climatique.
En outre de son très fort intérêt climatique et
économique, le nucléaire présente la qualité essentielle d’être pilotable et de
fournir une alimentation stable et fiable. La production d’énergie nucléaire ne
dépend pas des conditions météorologiques et fournit quand elles en ont besoin une énergie fiable à l’industrie, aux
transports, aux hôpitaux, aux foyers et aux entreprises 24 heures sur 24, 365
jours par an. L’électricité nucléaire est cruciale pour la stabilité des
systèmes énergétiques.
Cette qualité essentielle, nous l’oublions trop, et
elle a failli se rappeler à nous : Le 23 avril 2020, en plein crise COVID,
la France a échappé de justesse à un
black out avec une fréquence descendue à
49, 8801 Hz à 10 heures et 10 secondes ! En cause, exactement ce qui
était annoncé, la priorité sur le réseau des ENR et leur brusque variation.
Enfin, l’industrie nucléaire européenne représente
actuellement un total de 1,1 million d’emplois, généralement hautement
qualifiés, bien payés et non délocalisables. Avec 2500 entreprises et 220 000
salariés, la filière nucléaire est la troisième filière industrielle français.
Plus, elle assure de plus une certaine autonomie énergétique aux Etat-Membres,
notamment vis-àvis des fournisseurs gaziers
Et
pourtant, l’option nucléaire que maintiennent et même veulent développer plus
d’une dizaine d’États-membres, dont la France, fait l’objet de l’hostilité
rampante des institutions européennes. Sous la pression des antinucléaires, des
ONG écologistes et activistes, de Khmers
verts fondamentalistes et sourds à toute rationalité scientifique et technique,
et d’Etats comme l’Allemagne et l’Autriche, les institutions européennes ont
adopté des règlements qui dissuadent les
investissements de long terme et discriminent le nucléaire.
1) Attaques
sur le financement : la taxonomie
Parmi les évolutions inquiétantes des cadres
institutionnels européen, mentionnons en ce qui concerne la Commission, l’exclusion
à ce stade du nucléaire de la taxonomie verte,
Cette taxonomie, une fois mise en œuvre, devrait
fournir aux investisseurs des informations fiables sur les activités et les
technologies qui contribuent aux objectifs de durabilité. Or, si le groupe
d’expert a bien reconnu le caractère décarboné de la production nucléaire, il
lui a refusé l’accès à des financements verts au titre d’un critère DNSH (Do Not Significantly Harm, nuisible)
concernant la gestion des déchets nucléaires.
Ceci ignore tout simplement le consensus
international (USA, Japon, Canada, Russie, Chine, Finlande, Suède, France) sur
la solution d’élimination géologique et les projets déjà avancés qui, après des
décennies de recherches scientifiques, ont fait la preuve de leur sécurité
(Cigéo en France, Onkalo en Finlande, Forsmark en Suède)
Cette exclusion de la taxonomie aurait des effets
graves : elle impacterait non seulement fortement les industries nucléaires mais aussi toutes les industries utilisatrices qui
se verraient refuser l’accès à des financements
privilégiés pour optimiser leurs process dans le sens de la transition
énergétique –
Elle fragiliserait considérablement tout nouveau
projet nucléaire, et ceci est d’autant plus critique que le coût du financement
représente une part importante du coût final des projets nucléaires, jusqu’à
75%. Et qu’il peut être considérablement réduit simplement par une visibilité
politique sur les projets !
C’est une décision grave qui ne respecte
pas le critère important de neutralité technologique, censé s’appliquer à
toutes les initiatives de transition énergétique !
Il existe
cependant une porte laissée ouverte par le Comité d’Experts- rappelons-le,
essentiellement composés de financiers et de représentants des ONG, dont les
habituels fanatiques anti-nucléaires. Celui-ci reconnaissant tout de même son
peu de compétence sur le sujet des déchets nucléaires a ouvert la possibilité d’une expertise ad hoc pour
évaluer la gestion des déchets nucléaires selon les critères DSNH et de
durabilité.
Un certain nombre de pays et d’organisations se sont
mobilisées ( bravo à la Tchéquie, très allant sur le sujet) pour obtenir la
mise en place de cette expertise.
Par contre,
il est quand même hallucinant que cet appel à l’expertise scientifique soit
remis en cause par un certain nombre de députés européens. Ainsi, Bas Eickhout co-rapporteur taxonomy regulation,
Greens/EFA, Sirpa Pietikainen co-rapporteur taxonomy regulation, EPP, Paul Tang, shadow rapporteur taxonomy
regulation, S&D
« En créant une structure distincte en dehors de la
Plate-forme sur les finances durables ou de l’expertise interne de la
Commission, il y a un risque élevé que les avis sur cette question délicate
soient pris en compte par d’autres intérêts que l’intérêt général.
En outre, nous sommes préoccupés par le fait que la
création de nouvelles procédures spécifiques sur la question de l’énergie
nucléaire risque de retarder le processus d’adoption rapide de la loi déléguée.
La crise climatique et les initiatives de relance de Covid-19 ont besoin
d’urgence des deux premiers objectifs environnementaux de la taxonomie pour
être opérationnels.
Nous vous demandons donc instamment de veiller à ce
que l’évaluation sur la question particulière de l’énergie nucléaire soit
effectuée par la Plate-forme de financement durable et la Commission elle-même,
sans la création d’un groupe d’experts ad hoc et sans sous-traiter les avis sur
cette question à une troisième partie. »
Autrement dit, le groupe d’expert TEG,
essentiellement financier plus qqs ONG antinucléaires
a reconnu son manque d’expertise sur la question des déchets nucléaires et
laissé la porte ouverte à une expertise scientifique dédiée..et la réaction des
rapporteurs sur la taxonomie est de dire : non, on ne veut pas d’expertise
scientifique. Scandaleux !
Décidément, le lobby éolien est très fort !
Rappelons quand même que le volume des déchets de
forte activité, après retraitement, représente en France 3 % des déchets
radioactifs, soit l’équivalent d’une
piscine olympique pour l’ensemble du parc français depuis sa création. Pour
ces déchets ultimes, l’enfouissement profond dans des dépôts géologiques (de
stabilité supérieure à 150 millions d’années contre une radioactivité
détectable de 15.000 ans pour les déchets retraités) constitue une solution
validée par les autorités de sûreté de nombreux pays (France, Finlande, Suisse
pour l’Europe, mais aussi USA, Japon, Canada, Russie, Chine).
Ca va donc être chaud, et tout va se jouer dans la constitution
du ou des groupes d’experts. Le fonctionnement de l’Europe est tout de même
assez déprimant : un sujet aussi important que l’investissement dans le
nucléaire pour répondre au défi climatique y est traité de manière opaque et non
rationnelle
Cf. sur ce blog : https://vivrelarecherche.blogspot.com/2019/09/urgence-nucleaire-et-climatique-alerte.html
https://vivrelarecherche.blogspot.com/2020/04/taxonomie-verte-consultation-europeenne.html
2) Le jour
où le Parlement européen a failli imposer à toute l’Europe de sortir du
nucléaire !
Le Parlement Européen, lors du vote d’une Résolution
sur la COP 25, le 28 novembre 2019, a dû se prononcer sur un amendement proposé par le SPD allemand et adopté par
la Commission ENVI (« amendement 56 ») estimant « que l’énergie nucléaire n’est ni sûre ni
durable sur le plan environnemental ou économique » et proposant « par conséquent, de mettre
au point une stratégie de transition juste visant à supprimer progressivement
la production d’énergie nucléaire dans l’Union, en proposant de nouveaux
emplois aux personnes qui travaillent dans le secteur du nucléaire ».
Il s’en est fallu de peu que passe ce nucléaire « phase out » : 322 contre 298 ! A 322 voix contre 298, le Parlement
européen a décidé que, non, les Institutions européennes ne devaient pas forcer
les Etats à sortir complètement du nucléaire ! 322 contre 298 ! Et
encore à cette période, les députés britanniques, généralement favorables au
nucléaires, travaillistes comme conservateurs, participaient encore au vote)
A noter que Pascal Canfin, président de la Commission
Envi s’est opposé en vain en commission à l’amendement anti-nucléaire du SPD. A noter
qu’il est tout de même président de cette commission et qu’il a été mis en
minorité ! Et que au moment du vote plénier, il n’a pas voté en faveur du maintien
du nucléaire. C’est assez inquiétant pour le futur et la composition de la
commission Envi laisse présager une prise en main par la démagogie et les
écolos bigots.
Le vote pour contrer l’amendement de bannissement du
nucléaire a été le suivant :
ECR : 51 (une grande partie de Polonais), GUE : 3 (Irlande, Tchèquie, Espagne),ID : 60,NI : 10, PPE : 109 ( la plupart des français, 40% des Allemands…tiens, tiens, ça commencerait à bouger dans la droite Allemande, vivement que Merkel s’en aille), Renaissance : 47, SD : 31
Cf. sur ce blog : https://vivrelarecherche.blogspot.com/2019/12/le-parlement-europeen-et-la-politique.html
L’action de
sape de certains Etats
L’Autriche et le Luxembourg ont porté plainte en
2015 devant le Tribunal de l’Union Européenne contre les subventions accordées
par Londres pour la construction de deux réacteurs EPR à Hinkley Point.
Ils ont été déboutés une première fois en 2016, le Tribunal considérant qu'un Etat
membre a le droit de "définir son bouquet énergétique", et de
"définir le développement de l'énergie nucléaire comme l'objectif
d'intérêt public poursuivi par les mesures d'aide", mais ont fait appel
devant la Cour Européenne de Justice.
Celle-ci , le 7 mai 2020, a rendu un premier avis
consultatif concluant que la production d’énergie nucléaire relève des intérêts
économiques de l’UE.
Peu dissuadée, l’Autriche a ensuite déposé plainte
auprès de la Commission européenne au sujet de l’approbation des subventions de
l’État hongrois pour la construction de deux réacteurs à la centrale nucléaire
de Paks…
Ces actions
juridiques, même si finalement elles n’aboutissent pas, créent un climat
d’insécurité peu propice aux investissements et à des projets industriels
inscrits dans la durée. Elles participent d’un véritable agenda multiforme
d’étranglement du nucléaire, agissant au niveau financier, politique et
juridique, mené par des groupes militants très organisés qui ont une stratégie
très efficace d’influence à différents niveaux des Institutions Européennes. Les critères de
rationalité scientifique et technique sont bafoués, des décisions critiques
sont indéfiniment retardées, le secteur nucléaire et ses clients et
fournisseurs s’en trouvent déstabilisés, nos salariés découragés et finalement,
notre industrie est en danger.
L’Europe se
déchire sur le nucléaire
En Europe, la Grande Bretagne a un plan ambitieux de
développement du nucléaire avec deux EPR
en construction, deux autres prévus et en tout Un plan de 16000 MW de nouvelles
centrales nucléaires (soit l’équivalent de 10 EPR). La Pologne a également un
plan ambitieux : 6 à 9 GW de nucléaire (on part de 0) d'ici 2040, avec un
premier réacteur souhaité en service pour 2033. La Finlande a investi dans un
EPR et projette deux nouveaux réacteurs
nucléaires (type de réacteur non encore choisi), dont un sur le site de
Loviisa). Le gouvernement tchèque a décidé en juillet 2019 la construction d’un
nouveau réacteur nucléaire dans la centrale de Dukovany, dans le sud du pays. Avec
déjà 57% de part de nucléaire dans son mix électrique, la Slovaquie souhaite
capitaliser sur ce point fort pour sortir de sa dépendance aux hydrocarbures et
réduire ses importations ; elle compte mettre en service deux nouveaux
réacteurs dans sa centrale nucléaire de Mochovce. La Hongrie prévoit deux
nouvelles tranches dans la centrale
nucléaire de Paks. La Rpumanie prévoit deux réacteurs de plus sur le site de Cernovoda
et étudie des projets pour 4 réacteurs supplémentaires. La Suède, l’autre grand
pays du nucléaire ( certaines années, elle dépasse la France en pourcentage d’électricité
nucléaire) prévoit de remplacer ses centrales historiques par de plus modernes
lorsqu’elles seront arrêtées. En mai 2019, la Bulgarie a lancé un appel à
projets pour relancer la construction d’une deuxième centrale nucléaire à
Béléné, devant accueillir deux réacteurs russes La France aussi a un programme
de nécessaire de remplacement de certaines centrales par 6 EPR.
Rappelons
que conformément au traité de Lisbonne,
c’est la seule prérogative des États Membres de décider de leur mix énergétique. Ceux-ci ont à faire
face à des contextes géographiques et économiques très différents et doivent
pouvoir choisir leur palette d’outils bas carbone et faire leurs propres choix
technologiques pour réussir leur transition énergétique. Le respect du principe
de neutralité technologique est essentiel et a d’ailleurs été entérine lors des
Conseils Européens des 12 et 13 décembre 2019, qui reconnaissait aux Etats
Membres la légitimité de recourir au nucléaire pour remplir leurs objectifs
climatiques :
« Le Conseil Européen est conscient de la nécessité
d’assurer la sécurité énergétique et de respecter le droit des Etats Membres de
décider de leur bouquet et de choisir les technologies les plus appropriées.
Certains Etats Membres ont indiqué qu’ils recourent à l’énergie nucléaire dans
le cadre de leur bouquet énergétique national »
Si, malgré cette décision du Conseil, des
Etats se voyaient interdire l’accès à des financements verts pour des projets
importants et structurants selon des critères technologiquement injustifiés
(par exemple dans le cas des projets nucléaires en Finlande, Tchéquie,
Slovaquie, Roumanie, Bulgarie, Hongrie), cela créerait des tensions politiques
fortes en Europe à un moment où celle-ci va devoir faire face à une crise
économique sans précédent.
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