RTE et la magie du foisonnement : Cela permet d’avoir un approvisionnement constant et lisse d’électricité renouvelable...
Dans une série de vidéos de vulgarisation ( « les Gros
Mots de l’électricité) et plusieurs textes, RTE explique que les ENR ne posent
pas de problèmes particuliers quant à la continuité et à la sécurité
d’approvisionnement grâce au foisonnement.
Extraits : « l’éolien,
au même titre que le photovoltaïque, est une énergie variable dont la
production dépend des conditions météorologiques et peut donc évoluer avec le
temps. La gestion de la variabilité est fondamentale dans la gestion d’un
système électrique qui doit assurer l’équilibre entre production et
consommation. Cependant, à l’échelle nationale ou régionale, les sites de
production sont suffisamment éloignés les uns des autres pour que les
conditions météorologiques soient différentes à un instant donné… Cette mutualisation est appelée
foisonnement. Ce terme décrit la capacité de la production d’une zone
climatique à compenser un excès ou un déficit de production dans une autre zone
climatique. Cette approche peut également s’appliquer au territoire européen
dans son ensemble en développant les interconnexions de réseaux entre des pays
soumis à des régimes de vent différents. »
Les données publiques de
production fournies par RTE montrent que, si la variabilité de production à
l’échelle d’une éolienne est forte, cette variabilité est lissée à l’échelle
régionale et, d’autant plus, à l’échelle nationale, du fait des trois régimes
de vent indépendants présents sur le territoire français : océanique (Bretagne
Centre-Val de Loire et Pays de la Loire), continentale (Alsace
Champagne-Ardenne Lorraine) et méditerranéen
(Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées).
Et, cerise sur le gâteau, il y
a même « complémentarité avec le
photovoltaïque : « Le lissage de production électrique renouvelable
sur le territoire peut également se faire au travers de la complémentarité
entre plusieurs énergies, comme c’est le cas entre l’éolien et le
photovoltaïque…. En effet, l’énergie photovoltaïque produit davantage au
printemps et en été tandis que les pics de production d’électricité éolienne
ont lieu en automne et en hiver. Cela permet d’avoir un approvisionnement
constant et lisse d’électricité renouvelable, tout au long de l’année. »
Les contes de fée de RTE ont suscité des réactions qui
les ont quelques peu mis à mal .
1) François-Marie
Bréon : les ENR, fâcheux manque de corrélation avec la demande !
https://twitter.com/fmbreon/status/1287620968098209793?s=19
C’est bellement simple et
simplement beau. Dans une série de
graphiques tirés des propres données de RTE
(pour l’année 2019. consommation, production et import/export sont
données au pas semi-horaire, puis ramenées au pas journalier), FM Bréon
montre :
1) La production nucléaire est
corrélée à la demande et fait face à la plus grabde partie de la consommation (
qui a varié entre un peu moins de 1 TWh (en Aout) et presque 2 TWh (en hiver)
Et c’est encore mieux si on
considère le nucléaire et l’hydraulique (Cependant, pour les + fortes
consommations, leur somme est inférieure à la demande, et il a fallu faire
appel aux imports et fossiles)
Et l’éolien ? Ben, deux
remarques : absolu manque de corrélation avec la demande et une très
grande variabilité avec une production qui a varié entre 11 et 283 GWh (facteur 25). Commentaire de
FM Bréon : « Vous le voyez le “foisonnement” “qui permet de lisser
la production à l’échelle de la France, avec ses 3 régimes de vent” ? Moi pas. »
On peut quand même se demander
si, par hasard, l’éolien ne permet pas de
faire face aux cas critiques, lorsque nucléaire et hydro ne couvrent pas la
demande. Et Ben non, c’est pas mieux ! Les cas les plus critiques (le
besoin est le plus important) correspondent très, très rarement à des cas de
forte production éolienne.
Et pour le solaire photovoltaïque , qui, selon RTE, compléterait si bien l’éolien dans un espèce de foisonnement trans-technique.. La production varie entre 5,6 GWh et 62 GWh (facteur 11)….et est inversement corrélée à la demande : le solaire produit beaucoup lorsque la demande est faible, et ne produit presque rien lorsque la demande est forte.
Et c’est encore bien pire si
l’on regarde la demande non couverte par le nucléaire et l’hydraulique !
En fait, le solaire produit beaucoup en été, quand la demande est plus faible
et bien couverte, et peu en hiver, quand elle est forte.
Etude Cereme
(2020) : le foisonnement, une croyance « avérée » et…pourtant
fausse
https://cereme.fr/wp-content/uploads/2021/06/Cereme_fiche-pedagogique-3_eolien-et-foisonnement.pdf
« Le Réseau de Transport
de l’Electricité (RTE) dans sa volonté de communiquer sur les enjeux du réseau
électrique présente l’intermittence comme un problème réel mais résolu grâce au
foisonnement, c’est-à-dire la présence permanente de production solaire et
éolienne en France et en Europe auxquelles la solidarité du réseau français et
les importations nous donneraient accès dès que le besoin s’en ferait sentir.
Cette conclusion reprise également par le Ministère de la transition écologique
et ses agences a été tellement relayée médiatiquement que l’existence d’un
foisonnement en Europe est devenue une
croyance avérée, à laquelle il est désormais difficile d’échapper. Cette
croyance est pourtant fausse. Elle aura aussi des conséquences dramatiques si
RTE et le Ministère de la transition écologique assoient leurs scénarios et
décisions sur ce phénomène…Les Français et l’ensemble des services et
équipements sur lesquels ils s’appuient (transports publics, hôpitaux, circuits
d’eau et d’alimentation, canaux de communication) pourraient alors être privés
arbitrairement d’électricité, notamment lors de situations pénalisantes -
soirée froide et anticyclonique - relativement courantes en hiver »
Etude sur le territoire européen :
Le Cérémé a étudié la répartition des vents sur 8 endroits différents, en Allemagne, au
Danemark, en France et en Espagne, sur l’ensemble de l’année 2020, à partir des
données statistiques fournies par https://www.historique-meteo.net/europe/.
56% des jours de l’année 2020
ont connu partout un régime de vent « faible à modéré », particulièrement au
printemps, en été et en novembre, avec parfois une exception au Danemark ou en
Bretagne. Soit 207 jours pendant
lesquels l’énergie éolienne n’a pas été, ou quasi pas, disponible,
simultanément, à ces 8 points pourtant ventés (un peu moins pour
Chatillon-sur-Seine, plus continental) et pourtant éloignés les uns des autres.
Exemple concret : le 20 mai 2020 il y a eu peu de vent à Hanovre (6 km/h), mais
il n’y en a eu guère plus à Ejsberg (12 km/h), à Rostock (13 km/h), à St
Quentin (11 km/h), St Pol de Léon (11 km/h), Santander, ou dans le Parc naturel
régional du Haut Languedoc. Cette situation s’est reproduite le lendemain 21
mai. A l’autre extrême, 9% des jours de l’année 2020 ont connu partout un
régime de vent « assez fort à fort », avec parfois une exception en Espagne,
ainsi qu’en Languedoc où s’applique le régime d’exception du cévenol.
Conclusion : Les
2/3 du temps il n’existe aucun foisonnement en Europe. Il y a à peine 30 à 40
jours (10%) où trois, voire quatre, régions pourraient compenser
significativement les autres.
Etude sur le territoire français : 38% des jours de l’année
2020 ont connu partout un régime de vent « faible à modéré », soit 139 jours pendant lesquels l’énergie
éolienne n’a pas été ou quasi pas disponible, simultanément, aux quatre points étudiés. Ce taux plus
faible que dans l’approche européenne élargie résulte de deux poids relatifs
élevés, à fortes variations, dans la statistique : la pointe de Bretagne et le
régime cévenol. Il démontre cependant
lui aussi combien il n’est pas réaliste de compter sur un foisonnement de
l’éolien :
Conclusion : pour palier l’intermittence de l’éolien et du
solaire, s’opère en réalité une transition énergétique caractérisée par la
construction de nouvelles centrales à gaz, très émettrices de C02 (centrale de
Landivisau en Bretagne), et par l’importation d’électricité produite par les
centrales au charbon ou au gaz de l’Allemagne. Cette transition énergétique
nous emmène loin des objectifs de la transition écologique. …
Etude Sauvons le Climat (Hubert Flocard et Jean-Pierre Pervès)
https://participons.debatpublic.fr/uploads/decidim/attachment/file/425/Contribution2-MichelGay.pdf
Cette étude datant de 2018 a analysé la réalité d’une production éolienne
en France et en Europe de l’ouest (7 pays) pendant 7 mois (de septembre 2010 à
mars 2011).
1) La
variabilité de l’éolien crée des problèmes redoutables
Septembre
2010- Mars 2011 en France
Les
extrêmes suivants sont observés:
-
Puissance minimale : 180 MW soit 3,3 %
de la puissance installée (Pn) ; des puissances inférieures à 10 % de Pn sont
observées 7 fois.
-
Puissance garantie, (celle sur laquelle le gestionnaire du réseau peut compter
en permanence), inférieure à 5% de Pn.
-
Puissance maximale : 3875 MW, soit 71 %
de Pn, avec 7 épisodes dépassant 60% de Pn ou 112 MW.
- La
plus importante variation a été de 380
MW par heure, soit de 7% de la Pn en une heure. Il y a aussi eu des variations
de 2900 MW (soit 50% de Pn) en 24 h.
La période de novembre 2010, qui a vu une seconde quinzaine caractérisée par de grands froids,confirme une tendance de l’éolien : le manque de vent lors de grand épisodes anticycloniques (c’est le cas environ 4 fois sur 5).
Conclusion : c’est pas gérable !
Passons en 2030 en reprenant les conditions météos de 2011 mais avec une puissance éolienne presque 10 fois supérieure (53.000 MW au lieu de 5650 MW). La puissance éolienne installée, bien que considérable, est encore quasiment absente pendant les 15 jours de grands froids à partir de mi-novembre.
La puissance éolienne installée, bien que considérable, est encore quasiment absente pendant les 15 jours de grands froids à partir de mi-novembre. Sur la période de 15 jours entre le 15 et le 30 novembre 2030 (336ème à 720ème heure), la consommation d’énergie serait de 27.000 GWh par jour et l’éolien ne pourrait fournir que 3.000 GWh, soit 11% du besoin. Pourtant, la puissance installée des éoliennes serait du même niveau que la puissance nucléaire !
Conclusion : c’est encore moins gérable !
L’éolien, c’est pas très productif…Pour un même GW de puissance installée….
Non seulement la variabilité de l’éolien est brutale et ingérable, mais en moyenne la productivité est catastrophique. C’est ce que montre la courbe suivante :
Fig.
6 : Période du 23/01 au 19/02 2012. Toutes les courbes indiquent, pour un moyen
de production donné, la puissance qu’il a livrée au réseau (en MW) par GW de
puissance installée (1GW=1000MW) en France ou en Allemagne. La courbe bleue
correspond au Nucléaire France, la courbe verte à l’éolien France et la courbe
rouge au solaire PV Allemagne. Données françaises : eCO2mix/RTE. Données
allemandes : transparency.ee
Pour un même GW de puissance installée :
- Les centrales nucléaires fournissent une puissance de 0,95 GW, quelques réacteurs sur les 58 étant en arrêt pour rechargement ou visite décennale, et les autres fonctionnant à 100% de leur capacité.
- Les 3500 éoliennes fournissent en moyenne 0,2 GW par GW installé, sauf lors de trois épisodes courts de vents forts (1 à 2 jours) ou elles atteignent des pics de 0,55 à 0,61 GW.
Dans une hypothèse 2030 avec 50 GW de puissance éolienne
installée, le réseau aurait eu à supporter le 2 février, en moins de 24 heures,
une augmentation de puissance d’environ 20 GW, puis 2 jours après une baisse de
même amplitude…
- la productivité du solaire en Allemagne aux mêmes dates : elle n’est que de 4% en moyenne, soit 0,04 GW par GW installé, malgré parfois un temps plutôt ensoleillé…
Et le foisonnement ? Il va falloir que RTE arrête sa propagande !
Les productions éoliennes horaires de l’hiver 2010/2011 de 7 pays, qui représentent un bon échantillonnage de l’Europe de l’ouest, ont été enregistrées heure par heure.
Passons
à une simulation en 2030 avec pour une puissance éolienne totale triple de
l’actuelle (187500 MW au lieu de 65000).
Ben, c’est pas mieux : les puissances minimales et maximales correspondent respectivement à 4% et 60% de la puissance totale installée (Pn). La puissance moyenne s’élève à 21% de la puissance installée avec des minima et des maxima importants, un peu moins marqués que pour la seule courbe française
Mais, les auteurs notent : « Il est préoccupant de constater des épisodes globaux de pénurie de puissance éolienne (moins de 15% de Pn) apparaissant par grands froids durant une à deux semaines. L’ensemble de l’Europe de l’Ouest peut être affecté par un anticyclone pendant des durées de plusieurs semaines, conduisant à des productions faibles, de l’ordre de 15% de la puissance totale pendant une dizaine de jours, voire même inférieure à 10% pendant deux jours. Bien que particulièrement longs, ces épisodes se reproduisent tous les deux ou trois ans alors que des périodes sans vent de quelques jours s’observent plus fréquemment. »
Conclusion : si on a que l’éolien, ça va cailler !
Conclusion Globale :
La puissance « garantie » de l’éolien, qui est la puissance sur laquelle le gestionnaire de réseau peut compter, est limitée à environ 5% de la puissance nominale. Une puissance de secours très importante est donc requise, sans espoir qu’elle puisse provenir du solaire, particulièrement en hiver.
Le foisonnement reste limité pour la France malgré trois régimes de vent. C’est également le cas pour toute l’Europe de l’Ouest : les puissances maximales et minimales européennes (63 % et 4,1 % de Pn) sont à peine plus favorables que celles constatées en France (71 % et 3,3 % de Pn).
De plus, les périodes d’appel maximal de puissance, en hiver comme en été, sont généralement anticycloniques et l’éolien devient inefficace dans ces situations (4 fois sur 5 environ) sur de longues durées (une à deux semaines).
Alors, il faudrait que RTE arrête de diffuser des fake news digne des bisounours qur les EPR et de faire la propagande des ENR (dont on comprend qu’il les aime beaucoup, vu qu’elle nécessites beaucoup de nouvelles lignes)
Les besoins de stockage d’un système 100% ENR en Allemagne : 61 jours de consommation !
L’importance de la variabilité de l’éolien et le manque de foisonnement ont été confirmés par une étude allemande, qui en étudie les conséquences en matière de besoin de stockage, constate que ceux-ci ont été grandement sous-évalués et arrive…à une valeur qui devrait effrayer tous les partisans de l’Energiewende, cf.,
https://twitter.com/QvistStaffan/status/1427625800925388814?s=09
Extraits : Qu’est-ce qui détermine les besoins de stockage dans un
système 100% renouvelable (principalement
PV + éolien), et quelle quantité est vraiment nécessaire? J’ ai essayé de déterminer
cela dans une nouvelle étude en utilisant 35 ans de données météorologiques
horaires (ré-analyse) pour l’Allemagne
« Un système allemand à
100%-RE optimal en termes de coûts (92 GW PV, 94+98 GW on+off. éolien)
nécessite un stockage efficace de 36 TWh
(~ 24 jours de charge!). Pourquoi autant ? Les discussions dans les
médias et de nombreuses études sur les
« pots au noir »se concentrent généralement sur des événements allant
de quelques jours à 2 semaines de faible rendement continu d’ENR ( Ou EVI
énergie variables intermittentes). Notre analyse montre que la période
déterminant le stockage requis est
beaucoup plus longue - pour l’Allemagne, c’est
environ 61 jours (9 semaines)!
« Pourquoi une période aussi (étonnamment) longue ? En fait, il ne
faut pas considérer seulement les évènements pour lesquels la production ENR
est continuellement faible, mais des périodes plus longues qui peuvent contenir
de courts événement de production ENR élevée… et ces séquences, sur de longues
périodes, nécessitent un traitement spécifique des donnés. La valeur élevé de
stockage que nous obtenons s’explique parce que 1) Nous avons examiné 35 ans de données horaires plutôt que
seulement 1-2 ans, et avons identifié donc des périodes réellement problématiques.
2) Nous n’avons pas autorisé de back up avec des énergies fossiles (100%ENR,
c’est 100% ENR) 3. L’Allemagne a été traitée comme traitée comme un système isolé,
et nous n’avons pas considéré importations (et exportations) »
« Un commentaire sur ce dernier point : un lissage sur une zone
géographique plus importante réduirait sûrement l’ampleur du défi et les coûts
liés à la variabilité des ENR. Mais,
durant les évènements hivernaux les plus graves (comme l’hiver 96-97), les pays
avoisinant ont aussi souffert de déficits énergétiques importants, et aucune
capacité d’import n’était disponible. Même le
réservoir hydroélectrique SE plus NO d’énergie pilotable a connu en
cette période son pire déficit énergétique historique. »
En fait, durant cette période, toutes les ressources renouvelables de tous
les pays reliés à l’Allemagne étaient
bien en-dessous de leur productivité normale. L’existence d’un potentiel
d’importation de renouvelables donc très improbable…L’idée que lorsqu’une
contrée ou région soufre d’un déficit énergétique, une région proche se trouve
en surplus et peut exporter se trouve rarement vérifiée…
(NB et voilà pour le foisonnement !)
(NB et voilà pour la flexibilité, tarte à la crème de RTE et des écolos bigots !)
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