Une révolution statistique : plus il
y a de patients, plus c’est louche !
Large
article du Monde du 22/08/2019, avec
mention en première page : « Levothyrox
: pourquoi Merck a fait du zèle dans l’évaluation de la nouvelle formule ».
Citation :
« Le choix de l’industriel allemand d’enrôler
un grand nombre de patients dans un essai conduisait mécaniquement à masquer un
défaut de bioéquivalence entre les deux versions du médicament.
Le
laboratoire Merck savait-il pertinemment que sa nouvelle version du Levothyrox
n’était pas substituable à l’ancienne ? C’est la question, troublante, posée
par une brève étude publiée mercredi 21 août par la revue Clinical Pharmacokinetics.
Ses
auteurs ont réanalysé l’essai conduit par le laboratoire à l’appui du
changement de formule du médicament : ils suggèrent que le seul moyen de
conclure à la bioéquivalence des deux versions a été pour Merck de conduire un
test de très grande taille – sur 204 individus – au lieu d’un test classique,
généralement mené sur une vingtaine à une trentaine de volontaires. Un tel test
aurait pourtant été beaucoup moins coûteux. Mais il aurait très probablement
échoué à montrer la bioéquivalence recherchée. Le choix d’un échantillon plus
large a en réalité conduit à masquer la variabilité de la réponse des patients
aux deux versions du médicament. »
Donc,
le méchant laboratoire pharmaceutique a cherché à masquer le fait que la nouvelle
formule du levothyrox ne serait pas bioéquivalente (n’assurerait pas la même concentration
sanguine pendant le même temps) à la première dans les marges d’erreurs
acceptées par la législation. Et pour être bien sûr d’y parvenir, il a enrôlé
plus de patients que nécessaires, dans une étude qui lui aurait coûté plus cher
que nécessaire…
C’est
une idée dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle révolutionne la
statistique ! Un petit échantillon serait préférable à une grand
échantillon pour une étude de bioéquivalence ! Plus on « dilue »,
plus le résultat est puissant, et plus on masque les variations- là on touche
au sublime. ! Evidemment non, plus on inclut de patients, plus la moyenne
et l’écart-type, ( la variation) sont connues avec précision !
Je
passerai avec charité sur les commentaires qui ont accueilli cette interprétation
totalement barrée de M. Stéphane Foucart… Et puis non ! Car je commence à
en avoir assez de voir la Fake Science envahir les journaux, et spécialement
les colonnes du Monde, car, en ce
domaine, M. Foucart est un fieffé récidiviste patenté. (A propos, à signer
absolument le manifeste No Fake Science,
issu de la tribune éponyme de l’Opinion
( https://nofake.science/tribune/ ). Donc florilège : « 350
statisticiens en France sont morts en lisant cet article » (pourquoi
seulement 350 ?) « Au Monde,
pour choisir un journaliste scientifique, ils font passer un test de maths et
ils prennent ceux qui échouent » ; «Le suffrage universel est un
piège : Il masque la variabilité des réponses des électeurs. Alors qu’un
échantillon d’une vingtaine de personnes suffit largement, et est beaucoup plus
fiable ! » ( Je le savais, élections, pièges à cons, comme les
articles de Stéphane Foucart !)
Lévothyrox :
pourquoi la nouvelle formule ?
Destiné
à traiter les malades de la thyroïde, le Levothyrox, utilisé par plus de 2,5
millions de personnes, principalement des femmes, est un médicament dit « à
marge thérapeutique étroite » : de très faibles variations de la quantité de
principe actif (la lévothyroxine) peuvent avoir des répercussions importantes
sur les patients. Or l’ancienne version avait un problème de stabilité au cours
du temps : selon la durée de stockage du produit, il devenait plus ou moins
facile à absorber et la dose effectivement absorbée variait (diminuait). Donc
les agences du médicament ont demandé à Merck (qui, lui, ne demandait rien à
personne) de résoudre ce problème, ce qui a été fait sans toucher au principe
actif, mais en modifiant les excipients, le lactose de l’ancienne formule étant
remplacé par le mannitol et l’acide citrique, deux excipients bien connus et
bien évalués.
Donc
après, étude de bioéquivalence : Les guidelines européennes exigent un
minimum de 12 patients, mais précisent autant que statistiquement nécessaire. Merck
a fait une étude sur 216 volontaires sains en Allemagne, qui a été considérée
comme suffisante (Pour les partisans du complot destiné à masquer les
problèmes, dans certaines contrées, au Mexique par exemple, Merck ne fait une
étude que sur 44 volontaires sains).
Malgré
les partisans de la révolution statistiques, ces résultats sont plus puissants
que sur un échantillon plus petit- après, reste la manière dont on les analyse
et ce qu’ils montrent : soit on regarde les résultats globaux, soit on regarde
la variabilité sur chacun des patients, et on moyenne ensuite. Savoir quel est
le plus adapté est vraiment là, pour le coup, affaire de spécialiste. Les données
sont publiques, et quelles que soient les façons dont elles sont analysées,
elles montrent une bonne bioéquivalence.
Maintenant
deux cas se présentent : soit les variations individuelles sont faibles,
et l’on peut substituer la nouvelle formule à l’ancienne sans trop se poser de
question ; soit les variations individuelles sont plus fortes, mais la
bioéquivalence globalement acceptable : pas grave, dans ce cas, il faut
faire un test de TSH pour adapter la dose, et le patient disposera d’un nouveau
traitement plus stable et plus fiable. Compte-tenu des défauts de stabilité et
de constance de la version ancienne et de la marge thérapeutique étroite, c’était sans doute de toute façon, par précaution, la
démarche à suivre par défaut.
De
toute façon, la question a été réglée a posteriori par une étude unique par son
ampleur de l’ANSM (agence du médicament) et de la CNAM, commencée fin 2018 et
dont les résultats sont paru en juin 2019 :
Levothryrox : ce
que révèlent les résultats finaux de l'étude de pharmaco-épidémiologie »
Les
résultats ne fournissent pas d’argument en faveur d’un risque augmenté de
problèmes de santé graves au cours des mois suivant l’initiation de la nouvelle
formule du Levothyrox. En effet, ils ne
mettent pas en évidence d’augmentation de survenue d’hospitalisations, de
décès, d’arrêts de travail d’au moins 7 jours, ni de consommation de
médicaments utilisés pour traiter des symptômes somatiques tels que ceux
déclarés en pharmacovigilance lors du passage à la nouvelle formule du
Levothyrox. Les analyses complémentaires prenant en compte les interruptions de
traitement par la nouvelle formule du Levothyrox confirment ces résultats.
En
revanche, l'étude montre "une nette augmentation" (+2 %) des
consultations médicales, principalement de généralistes et d'endocrinologues :
360 000 consultations supplémentaires pour l'ensemble de la population traitée
en France (près de 3 millions) ont été enregistrées, notamment sur la période
d'août à octobre 2017. (Remarque : comme expliqué précédemment, c’est très
bien ainsi !)
Par contre, elle s'accompagne d'une hausse relative de
l'utilisation de certains médicaments comme les benzodiazépines. (et là, merci
la fake science et le semeurs de paniques ; pour mémoire, les benzodiazépines,
c’est pas anodin du tout !)
Ah
oui, cette étude incluait 2 075 106 personnes et âgées de 18 à 85 ans !
Mais bien sûr, j’oubliais : c’est pour « diluer » les résultats.
Le grand complot continue !
Bonne
nouvelle : il faut le dire quand il y en a : la structure Epi-Phare
qui a mené cette étude est pérennisée sous forme d’un GIS (groupement d’intérêt
scientifique) regroupant les équipes d’épidémiologie des produits de santé des
deux établissements. Cest un regroupenet logique eu un nouveau moyen plus
performant pour la sureté du médicament en France
Petite
remarque en passant de https://twitter.com/MedicusFR/.
L’origine de l’article du Monde est une publication du CRPV de
Toulouse (Centre Régional de Pharmacovigilance) de Toulouse, qui s’est déjà
fait remarquer par une fausse alerte sur un médicament essentiel en
cancérologie , le docétaxel, et qui s’est fait ainsi aligné par les experts
européens : « Les pharmaco-épidémiologistes (européens) présents ne
comprennent pas la méthodologie utilisée et soulignent l’indigence du travail ».
Entre eux, Séralini et Belpomme, on a vraiment des flèches que le monde entier
ne nous envie pas.
Pour
le debunkage de cette affaire Levothyrox/Stephane Foucart, deux fils précieux: https://twitter.com/MedicusFR/
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