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mardi 10 septembre 2019

Transition énergétique et grandes manips : le lobby gazier à la manoeuvre


M. Dupont, passez au gaz !

Il y a écologistes et écologistes, et certains, parmi les plus historiques et les plus sincères, tels Antoine Waechter et Brice Lalonde sont loin d’être hostiles au nucléaire. Brice Lalonde anime une association (équilibre des énergies- magnifique acronyme : EDEN) et un site où il donne une série de précision assez techniques ( et qui le mettent assez en colère) sur les manœuvres assez louches des marchands de Gaz ( disons Engie, quoi)

Eléments de contexte : le chauffage est, avec les transports routiers, l’une des principales  sources d’émission de carbone ; d’où grande bataille autour de la rénovation thermique de l’habitat.

On commence simplement  par une exemple assez pédagogique et assez gratiné .. ; Citations du site internet de M. Lalonde :

M. Dupont possède une maison chauffée à l’électricité. Elle est correctement isolée, combles étanches et doubles vitrages. Il a choisi des radiateurs connectés de nouvelle génération. Il a souscrit des contrats de fourniture d’électricité verte, d’origine renouvelable ! Soucieux de contribuer à la transition énergétique, il a fait réaliser un diagnostic de performance énergétique (DPE). Surprise, sa maison est classée F, c’est-à-dire que sa performance est jugée médiocre. Comment l’améliorer ?
C’est simple lui répond-on : « Passez au gaz ».
Car la même maison, chauffée au gaz, pourra sauter deux grades et être classée D !

Cette opération du Saint Esprit ne doit rien à la logique, mais tout au lobby du gaz dans sa guerre contre l’électricité !
Le résultat c’est que les émissions de CO2 du bâtiment ont dérapé de 11 % par rapport à la trajectoire prévue dans la stratégie bas-carbone. Bien joué le gaz !
Le résultat, c’est que 75 % des logements collectifs neufs installent un chauffage au gaz. Bien joué le gaz !
Tandis que… le Royaume Uni et les Pays Bas prévoient d’interdire le gaz pour le chauffage des bâtiments neufs à partir de 2025. »

Bon, il s’énerve un peu, Brice Lalonde, mais avouons qu’il y a de quoi !
Et maintenant, on rentre dans le truc un peu technique…

La faute au facteur de conversion, à l’énergie primaire et à la RT 2012

L’Union européenne recommande de mesurer la consommation d’électricité en la corrigeant d’un coefficient appelé « facteur de conversion de l’électricité en énergie primaire ». Cette énergie dite « primaire » est censée estimer celle qu’il faut dépenser pour produire l’électricité et l’amener au lieu de son utilisation, où elle est alors consommée sous l’appellation d’énergie « finale »….Il convient de noter ici deux particularités : le facteur de conversion n’apparaît pas dans la réglementation des véhicules électriques, mais uniquement dans celle des bâtiments, où les énergies fossiles, elles, sont exonérées de tout correctif comme s’il ne fallait pas dépenser d’énergie pour produire et livrer à destination le gaz, le fioul ou le charbon ! Seule l’électricité est pénalisée.
Le calcul du facteur de conversion donne lieu à des débats interminables très appréciés des experts. En fin de compte, il est laissé à l’appréciation des Etats qui le déterminent en fonction de leur politique énergétique à un niveau qu’ils doivent s’efforcer de justifier à Bruxelles. Pour prendre l’exemple de la Suède, le facteur retenu est de 1,6, signifiant qu’il faut multiplier la consommation d’électricité d’un bâtiment par 1,6 pour obtenir son équivalence en énergie primaire.
En France ? En France il est de 2,58 !!!. Retenons ici le point important : le facteur de conversion est éminemment politique »

Là c’est Brice qui s’exprime, mais comme je commence à comprendre son truc, je complète   : Bien joué le Gaz en France !). Car en effet ce facteur de conversion est purement politique, entendre purement influencé par les lobby, et pas du tout technique.  Surtout en France, où l’énergie électrique est, grâce au nucléaire, bien décarbonée, il n’y a aucune raison de pénaliser l’électricité en lui appliquant un facteur de conversion de l’électricité en énergie primaire !

Tiens, une autre remarque intéressante de Brice Lalonde : « Si l’électricité est ainsi pénalisée en France, ce n’est pas seulement parce que les amis du gaz ont remarquablement fait valoir leur énergie, c’est aussi parce que les adversaires de l’énergie nucléaire sont aussi les adversaires de l’électricité d’origine nucléaire et, par voie de conséquence, les adversaires de l’électricité. « 

Ainsi, la réglementation thermique des bâtiments (RT2012) a été contreproductive du point de vue des émissions de carbone puisqu’elle a entraîné une baisse des parts de marché de l’électricité dans la construction neuve au profit du gaz…  En 2016, le CO2 émis par les bâtiments a compté pour 19 % des émissions totales soit un « dérapage » de près de 11 % par rapport à la trajectoire prévue. La cause ? Les ménages ont eu plus recours aux énergies carbonées pour chauffer leurs logements et les baisses de consommation liées aux rénovations énergétiques n’ont pas été suffisantes.

Conclusion : compter en énergie primaire, c’est défavoriser indûment le gaz par rapport à l’électricité, c’est augmenter les émissions de gaz à effet de serre, c’est au surplus importer davantage et diminuer notre indépendance énergétique !
La réglementation thermique des bâtiments (RT 2012) devrait donc être basée sur l’énergie finale consommée, non sur l’énergie primaire, et sur les émissions de CO2.

Grande bataille en cours !

Il se trouve que le gouvernement qui commence  se rendre compte de sa fausse route,  propose de revoir le handicap de l’électricité  à la baisse et d’édicter une nouvelle réglementation des bâtiments qui tienne compte des émissions de CO2. Ah ben oui, au fait ! La RT (règlementation thermique 2012), ne tenait pas compte du CO2 dans la réglementation des bâtiments ! Je croyais qu’on luttait contre le dérèglement climatique.
Le lobby du gaz se déchaîne donc. Pas un jour sans la dénonciation de l’électricité et la demande d’un sursis. Alors on va peut-être surseoir. La bataille est en cours en ce moment. Parmi les refrains préférés du lobby du gaz, réglons tout de suite le cas des radiateurs électriques :   ils n’ont plus rien à voir avec les anciens convecteurs surnommés grille-pain, mais sont des radiateurs modernes, connectés et pilotables…

Merci donc M. Brice Lalonde, pour votre intérêt constant et ancien  pour les problèmes écologiques, y compris dans leurs problématiques les plus techniques et ardues, merci pour vos explications. Chacun maintenant, citoyen, scientifique,  et surtout législateur est conscient de ce qui se joue dans le débat en cours sur la réglementation thermique ; la soumission au lobby qui saura le mieux se faire entendre, le succès ou l’insuccès de la politique climatique se joue sur le coefficient de conversion de la RT !

Compte-tenu des précédents, on peut craindre le pire. Je parle là de l’affaire de la flopée d’amendements Total, affaire révélée » par le Canard Enchaîné du Mercredi 19,juin visant à imposer à EDF de vendre à ses concurrent dont Suez, plus d’électricité nucléaire à prix coûtant…Document rédigé par un certain Antoine Alibert, chargé des affaires institutionnelles de Direct Energie.. Et où travaillait-il avant ? Auprès de la députée Europe Ecologie Les Verts Eva Sas dont il était le collaborateur parlementaire !

Chacun pourra voir et juger !


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