Europe
et Eurokom
Dans un de mes précédents
blogs, je m’enflammais sur les propos de Macron à Epinal sur « l’Europe qui
nous a donné la Paix ». Face aux politiciens truqueurs qui sciemment mélangent
l’Europe, réalité géographique, historique, culturelle et la Communauté
européenne et ses institutions (notamment la Commission européenne), vouées
uniquement à construire un grand marché selon le dogme d’une véritable secte
libérale, je propose donc de différencier l’Europe réelle des peuples et des
nations et l’Eurokom, les institutions de la Communauté Européenne
Ariane
: 300, 301…..
Le mardi 25 septembre à
19 h 38 en heure locale de Guyane, soit le mercredi 26 à 0 h 38 en Métropole, le vol VA243 a pris
le chemin de l'espace, avec deux satellites à bord, destinés à l'orbite
géostationnaire et représentant 10,8 tonnes. Le lanceur lourd a envoyé Horizon
3e sur son orbite de transfert 28 minutes plus tard et largué le second,
Azerspace-2/Intelsat 38, 42 minutes après le décollage.
Cette mission qui s’est
superbement déroulé présentait un caractère particulier : elle était la
centième mission pour Ariane 5 et, en même temps, la 300ème pour l’ensemble de
la famille Ariane, qui se compose du lanceur lourd Ariane 5, du lanceur moyen
Soyouz et du lanceur léger Vega.
Tiens, à propos pas un
commissaire européen, ni un sous-commissaire, ni un représentant du Parlement
Européen (ni d’ailleurs un président de la République, ni un ministre, pas même
un ministricule) envoyé à Kourou pour féliciter les équipes d’Ariane Space).
Soit, un anniversaire
raté : mais il était encore possible de se rattraper avec le 3O1 ème tir
d’Ariane, dans la nuit du 19 au 20 octobre 2018, premier acte réussi d’une
mission mixte européenne et japonaise prévue pour durer sept ans, l’exploration
de la planète Mercure par la sonde BepiColombo. Eh ben, non, toujours personne
!
Ah mais il y a peut-être
une explication ? C’est que ce succès du programme Ariane qui donne à l’Europe
un accès autonome à l’espace (alors que les Américains ne peuvent plus accéder
à la station spatiale internationale depuis l’arrêt des navettes !) ne doit pratiquement rien à l’Europe
Les
autres pays d’Europe n’ont pas de politique spatiale !
En même temps que ce
101ème tir, l’excellent périodique La Tribune publiait une interview de
l'ancien président du CNES Yannick d’Escatha, qui redressa le CNES en 2003,
après l’échec du premier vol de qualification d’Ariane 5. Extraits :
« Il y avait alors au
CNES une vraie crise morale profonde, qui était liée à la fois à l'échec du
premier vol de qualification d'Ariane 5 ECA en décembre 2002, à une
sur-programmation (le CNES avait lancé plus de programmes que ses finances ne
le lui permettaient), et au contexte interne (fronde contre Alain Bensoussan,
le précédent président »
« Quand j'ai pris la
présidence du CNES, il y avait beaucoup d'interrogations en France et en Europe
: est-ce qu'on peut continuer la filière lanceurs ? Est-ce qu'on en est capable
techniquement et industriellement ? Est-ce qu'on est capable de la financer ?
Les autres Etats européens seront-ils d'accord pour nous aider, sachant que la
France ne pouvait pas supporter toute seule la filière. Les Etats membres de
l'ESA (Agence Spatiale Européenne), tous autant qu'ils étaient, étaient
ébranlés et s'interrogeaient sur la continuité de cette filière ».
« J'étais là pour l'Etat français. C'est l'Etat qui m'avait demandé de
prendre en charge ce dossier dans toutes ses dimensions, stratégiques, de
souveraineté, économiques, industrielles, scientifiques et technologiques.
Je n'étais pas un spécialiste du spatial, je ne connaissais pas les lanceurs,
mais j'ai eu très vite une conviction : le seul pays d'Europe qui avait une
vraie politique spatiale complète, qui avait la volonté de maîtriser l'espace
de bout en bout, depuis l'accès à l'espace jusqu'aux nombreuses applications,
était la France, et, juste derrière, il y avait l'Italie. Et c'est à peu près
tout. Les autres pays d'Europe ont des politiques industrielles, des stratégies
d'utilisation et de business de l'espace qui sont très honorables et très
sérieuses - ce n'est pas un jugement de valeur - mais ça ne fait pas une politique spatiale »
Conclusion : ce
magnifique succès qu’est Ariane, sans laquelle l’Europe n’aurait pas d’accès
autonome à l’ Espace ne doit rien aux Institutions européennes, rien à
l’Eurokom. Il doit tout à un programme industriel gaullien, typiquement
français, plus quelques alliés tels l’Italie qui joua un rôle important.
Il
doit y avoir une politique spatiale européenne ! Ariane 6 doit continuer Ariane
5
En décembre 2014,
l'Europe spatiale a décidé à Luxembourg de se doter d'un nouveau lanceur
beaucoup moins coûteux que l'actuelle Ariane 5. L'objectif est de réduire les coûts
de 50%, alors que l'Europe spatiale est sous la pression de la concurrence
internationale dans le domaine des lanceurs, notamment celle du groupe
américain SpaceX. (Le lanceur réutilisable SpaceX d’Elon Musk a mis beaucoup
plus de temps à décoller que prévu, il vient seulement de faire son premier vol
avec un étage réutilisé, et iln’est pas du tout sûrt que cette stratégie du
lanceur réutilisable soit le meilleure – cf. l’échec final de la pourtant
superbe navette US !)
Ariane
Group a donc mis au point Ariane 6 et un programme conséquent est déjà prévu :
14 lanceurs ; premier tir en 2020, cinq
en 2021 et huit en 2022. Cette échéance de 2020, nécessaire au programme
commercial d’Ariane et à la continuité du programme, sera-t-elle tenue ?
Comme
d’habitude, avec l’Europe, c’est dans la crise permanente et l’incertitude, au
dernier moment, que se prennent les décisions. En juin 2018, les 22 Etats membres de l'Agence spatiale
européenne ont donné leur accord au financement du programme de transition qui permettra,
entre 2020 et 2022,de basculer progressivement d'Ariane 5 à Ariane 6 et se sont
engagés sur une nouvelle étape de financements de 300 millions d'euros pour
cette transition mais, aussi, pour le nouveau moteur à propergol solide P120C
commun aux premiers étages des fusées Vega et Ariane 6.
Il
est déjà difficile de réussir un programme avec une telle gestion, mais il y a
plus grave. Pour pouvoir commander la fusée Ariane 6 par lots, afin de baisser
le coût de fabrication, Ariane Group
doit pouvoir compter sur un engagement de commandes d’environ cinq tirs par an.
Or cela a été refusé et Il semble
qu'Arianespace devra prendre son bâton de pèlerin pour négocier les contrats un
à un, sans garantie des Etats..
La
fusée Ariane va donc devoir se débrouiller avec des aides bien inférieures à
celles dont bénéficie son concurrent américain SpaceX. Pour comparaison, un
récent rapport de la Nasa s'est ému des montants à SpaceX, qui avait bénéficié de 8,1 milliards de dollars de contrats publics. Les lancements
institutionnels, véritables mannes à subvention représentent 57% de tous les lancements aux Etats-Unis, 79% en Russie
et 89% en Chine, contre 27% seulement en Europe. Et les lancements
militaires, Elon Musk les facture au
prix fort (quatre fois celui des lancements commerciaux. Si c’est pas de la
subvention déguisée !
L’Europe
doit à Ariane, entre autre, le système d'observation de la Terre Copernicus et
le système mondial de communications mobiles (norme GSM) et le système de
radionavigation par satellite GALILEO,
Or
pourtant, ainsi que le montre le manque de tirs garantis pour Ariane 6, comme
le dénonçait M. D’ d’Escatha, l’Europe n’a pas de politique spatiale, contrairement
aux USA, à la Chine, à la Russie, au Japon, à l’Inde. Elle est possiblement en
train de faire échouer Ariane 6 et de disparaître complètement de l’Espace. Si
la France devait se retrouver trop seule, Bruno Le Maire a indiqué qu’il pourrait imposer la fin du programme.
L’Europe
n’a pas de politique spatiale, Pas plus d’ailleurs qu’elle n’a de politique de
recherche et de développement (cf. blog suivant).
aussi sur https://eurokomonaimepas.blogspot.com/2019/01/presentation-de-ce-blog-debattre-de.html
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