Classes Préparatoires et Grandes Ecoles : l’ingénieur « à la française » intéresse l’Asie
L’Asie s’attaque maintenant aux industries de pointe et à l’innovation, et la formation des ingénieurs à la française, appuyée sur la filière des grandes écoles et des classes préparatoires y fait un tabac – foin des business schools ! Ainsi l’Ecole Centrale de Paris (ECP) a-t-elle créé une structure sœur, l’Ecole Centrale de Pekin (aussi ECP…) dans la plus grande université de la capitale chinoise. Le cursus s y déroule en cinq ans, une année de formation linguistique, deux années de préparatoire, trois années de formation. La remise de diplôme de la première promotion a eu lieu le 7 janvier 2012, dans le cadre prestigieux du Palais du Peuple de la place TiananMen et, en présence du ministre chinois de l’industrie. Autre exemple prestigieux, l’Ecole Polytechnique qui, lors de sa formation a inspiré West Point et des écoles de génie civil en Espagne, en Russie, en Amérique Latine, accueille chaque année 20 % d’étudiants étrangers, qui passe le concours dans 13 centres d’examens répartis dans le monde : Maroc, Vietnam, Brésil, Tunisie, Chine, Roumanie, Russie, Chili, Espagne... C’est une bonne nouvelle pour la France , un atout pour son industrie, sa recherche, son rayonnement… à condition qu’en France même, on redonne aux carrières scientifiques la rémunération et la considération qu’elles méritent et sans lesquelles la volonté proclamée de réindustrialisation ne sera au mieux qu’un vœu pieux, au pire une hypocrisie.
Les classes préparatoires comme modèle
Les classes préparatoires, support essentiel des Grandes Ecoles s’internationalisent aussi. Le proviseur du lycée Louis Le Grand, Joel Vallat, est persuadé que notre modèle a des atouts, et peut, et doit, être exporté : « Vous ne pouvez pas imaginer à quel point l'image de l'ingénieur français reste prestigieuse. C'est Airbus, Areva, le TGV... L'ingénieur français a, en outre, une particularité : une formation généraliste là où les autres sont spécialisés. Nous devons cesser de nous autoflageller. Notre modèle a des atouts, il faut l'exporter, et surtout être convaincu que la présence d'élèves étrangers dans nos lycées contribue au dynamisme de notre pays » (Challenge, 17 jan 2008). Depuis plusieurs années, il agit maintenant en véritable ambassadeur de la formation scientifique française. Ainsi, Louis Le Grand, en association avec les Mines a créé une filière scientifique à Pondichéry dans laquelle le lycée parisien apporte son expertise en matière de création filière scientifique d'excellence, collabore à la définition des programmes de mathématiques et physique, à l'élaboration des tests de sélection et à la sélection des élèves. Un projet analogue est en cours des Emirats Arabe Unis, un autre fonctionne déjà au Vietnam
Autre effort remarquable, depuis environ dix ans, certains lycées à classes préparatoires ont organisé un test commun de mathématiques qui permet d’évaluer le niveau des candidats étrangers sans tenir compte de la langue. Chaque année, par exemple, environ quatre cent étudiants chinois passent ce test, une cinquantaine sont retenus. Acceptés en classe préparatoire en France, ils sont répartis dans les lycées les plus prestigieux et suivent la scolarité normale après une formation accélérée en Français ; M. Vallat aime à rappeler qu’une étudiante de Shangaï s’est retrouvée première lors du premier devoir de maths dans sa nouvelle classe. Louis Le Grand, l’un des plus avancé dans cette voie accueille un pourcentage significatif (>10%) d’élèves étrangers, venant de Chine, du Maghreb, d’ Amérique du Sud, d’Europe de l'Est, essentiellement dans les filières scientifiques pour des raisons de maîtrise de la langue.
L’ouverture sociale
Cet effort d’internationalisation de la filière française de formation scientifique est un atout immense, il n’est pas en contradiction, mais, au contraire, vient en complément des efforts d’ouverture sociale. La proportion de boursiers dans les classes préparatoires, après avoir baissé dans les années 90 (14% en 1998) est en train de remonter (26% en moyenne, 35% à Louis Le Grand). C’est le résultat d’une politique volontariste, qui ne permet certes pas de compenser totalement l’injustice sociale de l’enseignement primaire et secondaire, mais qui permet aux classes préparatoires et Grandes Ecoles de continuer à être les meilleurs instruments de l’ « élitisme républicain ». Ainsi Louis Le Grand a-t-il créé au niveau lycée une classe technique (STI2D : sciences et techniques de l’industrie et du développement durable) – et il faut encore rappeler que les Universités, avec les Instituts Universitaires de Technologie, parfois remis en cause, ont su créer une vraie filière d’excellence pour les techniciens. Le lycée Henri IV, dans le domaine des prépas littéraires, où la culture générale joue un rôle plus important, a vraiment innové en instituant une classe de propédeutique, qui permet aux meilleurs élèves venant de quartiers défavorisés de bénéficier d’une année supplémentaire pour acquérir la culture générale que d’autres plus privilégiés ont reçu par leur milieu. C’est là une solution bien plus juste, intelligente et respectueuse que la décision du directeur de Sciences Po Paris de supprimer l’épreuve de culture générale, idée finalement assez méprisante envers les classes sociales défavorisées.
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