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jeudi 25 avril 2019

Le méga-contrat chinois à 20 milliards d’Orano : il faut le faire !


Une pépite française unique

Orano, c’est l’ancien Areva, c’est l’ancien Cogema, c’est une ancienne spin-off (avant que le mot soit à la mode du CEA via CEA industrie). Oreno réalise en France 40,5 % de son chiffre d’affaires et y emploie 64,8 % de ses effectifs. Il possède 25 sites en France, 8 en Europe hors France, 8 en Amérique 1 en Asie, 3 en Afrique.
Le groupe intervient sur l’ensemble des activités du cycle du combustible nucléaire : dans l’amont avec la conversion et l’enrichissement de l’uranium, grâce aux usines Comurhex II (conversion d’uranium naturel) et Georges Besse II (enrichissement de l’uranium) sur le site du Tricastin ; dans la conception et la construction de réacteurs nucléaires ;  dans l’aval avec le recyclage des combustibles usés sur le site de la Hague, la fabrication de combustibles, dont des combustibles MOX (mélange oxydes d’uranium et de plutonium) mais également le démantèlement et la valorisation des sites.

Bref Orano, c’est le bras combustible nucléaire du programme nucléaire civil français de production d’électricité, qui nous donne à la fois un avantage économique grâce à une électricité parmi les moins chères, un avantage stratégique de relative indépendance par rapports aux puissances gazières et pétrolières, et, cerise sur le gâteau, une des électricité les plus décarbonnées, juste derrière les pays tels la Norvège qui bénéficie d’un potentiel hydroélectrique unique ; c’est une pépite, un savoir faire unique dans la gestion du cycle du combustible nucléaire, et particulièrement en ce qui concerne le point qui va devenir de plus en plus critique du retraitement !

Car l’énergie nucléaire au niveau mondial va considérablement s’accroître (dernière nouvelle de 2019 : l’Arabie Saoudite prévoit la construction de 16 centrales nucléaires  ! Ou sinon, nous serons incapables de faire face au défi climatique !

Or, donc, méga contrat nucléaire à 20 milliards d’euros avec la Chine, il devait y avoir. Macron l’avait déjà annoncé lors de son premier voyage en Chine, sûr et certain, la signature du contrat pour l'usine de retraitement des combustibles usés aurait lieu au premier trimestre être signé au premier trimestre 2018. Bruno Le Maire aussi s’était enflammé : « Nous avons l'assurance du contrat et cela sauvera la filière ». Ce contrat potentiel porte sur la construction d’une usine en Chine assurant à la fois le traitement des combustibles usés et la production de Mox, un fuel pouvant être réutilisé dans les réacteurs nucléaires. Cette usine, d'une capacité de traitement de 800 tonnes de combustibles usés, reprendrait les technologies utilisées par Orano à la Hague (Manche) et sur son site de Melox (Gard). Orano n'assurera pas la construction proprement dite du site, mais apportera notamment ses capacités d'ingénierie pour concevoir l'usine et les procédés.

Eh bien, contrat il n’y a pas eu pour l’instant, et en tous cas pas lors de la visite très attenduede Xi Jinping de mars 2019. Il y a eu un contrat triomphalement présenté avec Airbus, mais en réalité pas très importants au vu des besoins en avion des Chinois.

Et c’est bien dommage, car 1) la Chine va devenir un acteur majeur du nucléaire, avec un programme extrêmement ambitieux. 2) Ce développement obligatoire du nucléaire si nous voulons pouvoir éviter la catastrophe climatique, il devra s’accompagner du développement de l’industrie de traitement du combustible, dans laquelle la France est encore pionnière.

La Chine, prochain champion nucléaire

Le nucléaire chinois, c’est l’histoire d’un extraordinaire succès franco-chinois, d’une très longue  et très exemplaire collaboration franco-chinoise dans le nucléaire. La France a accompagné depuis ses débuts le programme nucléaire civil chinois. Le général de Gaulle avait décidé d’initier des relations diplomatiques avec ce pays en 1964, les contacts dans le domaine nucléaire remontent à août 1973, date de la première visite en Chine du président Pompidou. Ils se concrétisent le 22 novembre 1982 par la signature de « l’accord de coopération entre le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et le ministère chinois de l’Industrie nucléaire (MIN) dans le domaine de l’utilisation pacifique de l’énergie atomique (cf pour cette histoire) https://vivrelarecherche.blogspot.com/2018/01/le-nucleaire-franco-chinois-histoire.html. Elle a conduit à ce que la Chine… a été la première à mettre en service le nouveau réacteur français EPR en 2018… et en achèvera bientôt un autre, ainsi que 4 EPR en Angleterre.
Hervé Machenaud, dans le nucléaire de demain sera chinois (www.connaissancedesenergies.org) rappelle l’ampleur du programme nucléaire chinois. Citation :
Avec 43 réacteurs en exploitation et une puissance installée de 45 GW, le nucléaire ne représentait fin 2018 qu’un peu plus de 2% des 1 900 GW de capacité installée et 4,5% de la production d’électricité en Chine. En 2018, 9 nouveaux réacteurs nucléaires, dont les 4 AP 1000 et les 2 EPR, représentant au total 11,7 GW ont été mis en service en Chine. Huit autres réacteurs, encore en construction, doivent démarrer en 2020 et 2021. Aucun autre projet n’ayant été approuvé, il n’y aura par la suite plus de mise en service avant 2024 ou 2025. Selon les prévisions du China Electric Council, la puissance installée du parc nucléaire chinois devrait atteindre 200 GW à l’horizon 2030. Cela conduirait à construire 100 à 140 GW de nouvelles capacités entre 2020 et 2030, soit une douzaine de réacteurs par an. Une récente analyse du China’s Energy Research Institute (CERI) conclut par ailleurs que, pour atteindre les objectifs de la COP21, la Chine devra disposer de 554 GW de capacités nucléaires à l’horizon 2050 (ce qui implique la mise en service d’une quinzaine d’unités supplémentaires par an entre 2030 et 2050)…
La Chine prépare aussi l’avenir : un réacteur à haute température (HTR) de 211 MW devrait être mis en service cette année et, dans la logique du retraitement décidé par la Chine, un réacteur à neutrons rapides (RNR) de 600 MW est en construction depuis décembre 2017. Des petits réacteurs modulaires (SMR) sont également en développement.
Les premiers pas de la Chine à l’international
Contrairement à la pratique internationale, ce sont les électriciens-exploitants chinois (CNNC, CGN et SPIC) qui portent les projets internationaux. CNNC est notamment constructeur au Pakistan des quatre réacteurs de 340 MW mis en service entre 2000 et 2017 à Chasma et des deux réacteurs de 1 000 MW en construction à Karachi. Un accord de 2017 prévoit la construction d’une nouvelle unité de 1 000 MW à Chasma. En Argentine, un accord qui pourrait se concrétiser assez rapidement, prévoit la construction d’un réacteur de 700 MW de technologie à eau lourde (Candu), puis d’un réacteur Hualong de 1 000 MW. CNNC est également candidat en Arabie saoudite qui annonce un important programme nucléaire. De son côté, le groupe CGN est aux côtés d’EDF dans le programme de 6 réacteurs nucléaires au Royaume-Uni : deux EPR sont en cours de construction à Hinkley Point, deux autres sont prévus à Sizewell suivis par deux Hualong à Bradwell (ces projets font l’objet d’un accord écrit mais pas de contrat d’exécution, des négociations doivent encore avoir lieu avec le gouvernement britannique, ce qui présente aujourd’hui des d’incertitudes) qui devraient être les premiers réacteurs de technologie chinoise construits dans un pays de l’OCDE.
Si l’on ne peut prévoir exactement à quel rythme, la Chine va réaliser le plus grand programme nucléaire de l’histoire. Au cours des deux décennies à venir, c’est 70% à 80% des nouveaux réacteurs dans le monde qui seront construits par la Chine (la quasi-totalité du reste par la Russie).
Le volume de ce programme conduira naturellement à une optimisation progressive de la conception et à une baisse des coûts de construction favorisant le déploiement du nucléaire chinois dans le monde. C’est ce qu’a connu la France des années 1980. Portée par cette dynamique industrielle, la Chine pourrait bien devenir la référence en matière de cycle du combustible et de réacteurs de nouvelle génération.

La Chine, le monde a besoin de nucléaire, le nucléaire a besoin de retraitement des déchets, et pour l’instant Orano a une capacité et une expérience uniques en ce domaine ; pour l’instant, car compte-tenu de la montée en puissance faramineuse du nucléaire chinois, parions que s’ils le décident, ils pourront dans quelques années se passer de nous.  Alors, ce contrat chinois d’Orano à 20 milliards, c’est une opportunité unique pour valoriser l’expérience française du nucléaire civil et renforcer une industrie indispensable  pour répondre au défi climatique  - une industrie que la bêtise rétrograde et anti-scientifique de certains écologistes (pas tous) et la lâcheté de certains politiques ont failli tuer ; c’est une chance historique à saisir pour continuer une histoire franco- chinoise du nucléaire, commencée et voulue par De Gaulle ;

Ce contrat chinois d’Orano, il faut le faire ! S il ne se fait pas, c’est que l’on aura subrepticement décidé de tuer le nucléaire en France ; ou cédé à des pressions américaines qui poursuivent aussi ce but, en même temps que leur intérêt propre. Ce sera de toute façon, un mauvais coup contre la France et un mauvais coup pour la lutte contre le défi climatique.

Il faut le faire maintenant !

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mardi 23 avril 2019

Raisons de détester l’Eurokom-28 : la conception de la démocratie comme marché, ou la démocratie à l’encan.


Europe et Eurokom

Dans un de mes précédents blogs, je m’enflammais sur les propos de Macron à Epinal sur « l’Europe qui nous a donné la Paix ». Face aux politiciens truqueurs qui sciemment mélangent l’Europe, réalité géographique, historique, culturelle et la Communauté européenne et ses institutions (notamment la Commission européenne), vouées uniquement à construire un grand marché selon le dogme d’une véritable secte libérale, je propose donc de différencier l’Europe réelle des peuples et des nations et l’Eurokom, les institutions de la Communauté Européenne.

N.B. : l’essentiel de ce blog est une transcription des dernières leçons du cours de 2017 d’Alain Supiot au Collège de France ( Figures juridiques de la démocratie). Elle peut être par moment infidèle, il ne partagerait pas peut-être pas l’utilisation que j’en propose pour combattre les institutions actuelles de l’Union Européenne. Si vous vous intéressez à ces sujets, écoutez, lisez Alain Supiot, il est incontournable et passionnant !

Une évolution inquiétante du droit européen ! la mise à l’encan des services publics.

Le droit européen a écarté toutes ces distinctions que le droit national peut établir entre sphère publique ou sphère privée, à but lucratif ou désintéressé : toute entité exerçant une activité économique, en dehors du statut juridique de cette entité ou de son mode de financement (arrêt Höfner) en fait, toute activité qui peut être assurée par une entité privée, quand bien même elle serait en droit national qualifié de service public ou d’activité à but non lucratif  est une entreprise.

Tel a été spécialement le cas des organismes publics chargés du placement des demandeurs d’emplois. (Arrêt Höfner :  à cet égard, il convient de souligner dans le cadre du droit de la concurrence que la notion d’entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment de son statut juridique ou de son mode de financement ; l’activité de placement est une activité économique. Il y a lieu  de préciser qu’un office public, qui est chargé en vertu de la législation d’un état membre d’un servce public d’intérêt général  reste soumis au droit de la concurrence conformément à l’article 10 paragraphe 2 du traité de la Communauté, tant qu’il n’est pas démontré que son application est incompatible avec l’exercice de sa mission…

La sphère économique ainsi définie s’étend sous les mêmes conditions aux organismes à but  non lucratifs. Peu importe que le législateur national ait confié à un tel organisme, par exemple, la gestion des retraites complémentaires  pour assurer une certain solidarité entre les salariés, il suffit que ce régime soit facultatif et fonctionne par capitalisation pour que ce régime soit qualifié d’entreprise et soumis à la concurrence des sociétés d’assurance. C’est ce qu’a confirmé la Cour dans son arrêt Fédération Française des sociétés d’assurance de 1995 : Il y a lieu de répondre à la juridiction nationale : un organisme à but non lucratif chargé de la gestion d’un régime complémentaire d’assurance retraite… est une entreprise au sens du Traité.

Cette distinction de l’économique et du social, tellement ancrée dans nos mentalités que nous lui accordons une valeur quasi-scientifique est de nature idéologique. Il n’est pas en effet de lien de droit qui n‘ait à la fois une dimension économique et une dimension sociale. Si vous avez invité un ami à déjeuner à midi, c’est une relation sociale, mais à la fin, il faut bien payer le diner. La relation de travail est indissolublement  et à la fois une relation économique et une relation sociale dont le salarié est à la fois l’objet et le sujet.

Cette distinction de l’économique et du social n’est pas une donnée de la science, mais une construction dogmatique qui conduit à considérer les droits sociaux comme autant de dérogations aux droit communs de l’économie c’est-à-dire aux quatre libertés des traités européens, d’établissement, de circulation des capitaux , de circulation des marchandises, de circulation des travailleurs.
Dérogatoires à ces catégories, les droits sociaux doivent être interprétés restrictivement, comme on peut le voir dans la jurisprudences européenne qui traite ces droits sociaux dérivés  comme des maxima et non comme des minima susceptibles d’amélioration en droit national. C’est notamment m’orientation qui a été prise par la Cour européenne de Justice depuis les arrêts Vicking et Laval. (NB considérant comme illégale l’action de syndicats réclamant une égalité de traitement pour les travailleurs détachés ou s’opposant à un passage sous pavillon de complaisance (cf. https://vivrelarecherche.blogspot.com/2018/11/raisons-de-detester-leurokom-16-la.html)

Il en résulte l’exclusion de la démocratie du champ de l’économie ainsi juridiquement définie. Dès lors qu’une activité est qualifié d’économique, elle relève des libertés garanties par les traités, acquérant ainsi vis-à-vis des institutions élues dans les Etats membres une intangibilité encore plus grande que les dispositions constitutionnelles .. La dynamique juridique européenne a cette capacité de démanteler les mécanismes de sécurité sociale assurés par les Etats sans avoir la capacité de construire des mécanismes de solidarités à l’échelon européen.

La concentration du pouvoir économique menace nos démocraties

Il y a quand même au quelques économistes à rendre une musique dissonante, qui se sont inquiétés de la concentration sans précédent du pouvoir économique à laquelle les politique ultralibérales conduisaient et des menaces contre la démocratie qui en résultaient. Parmi eux, le Français Maurice Allais, (1911-2010, prix Nobel d’économie 1988) (cf La mondialisation et la destruction des emplois et de la croissance l’évidence empirique : Le fait est que dans le monde entier, seuls quelques petits groupe set particulièrement les dirigeants des multinationales bénéficient des bienfaits de la mondialisation. Ces groupes disposent d’énormes moyens financiers, et, par personnes interposées, ils dominent tous les media, presse, radio et télévision. C’est ainsi que pour une très large part est réalisée l’endoctrinement de l’opinion, c’est ainsi qu’on faut croire que la mondialisation est inévitable, nécessaire et heureuse pour tous. Allais n’a eu de cesse dénoncer le caractère anti-démocratique du libre échangisme aveugle et le caractère dangereux des inégalités qu’il engendrait nécessairement.   Effectivement les inégalités ne cessent de croître et même l’OCDE et le Fonds Monétaire International mettent maintenant  en garde contre les dangers de cette inexorable augmentation des inégalités. (cf https://vivrelarecherche.blogspot.com/2019/04/raisons-de-detester-leurokom-27.html)

La libre circulation des capitaux a rendu possible une énorme évasion fiscale qui sape les bases financières des Etats et les condamnent donc à réduire les dépenses publiques. ; en 2009, on estimait que près de 10% des fonds d’action cotées étaient détenus dans des paradis fiscaux. Maurice Allais plaidait pour la constitution de grands ensembles économiques régionaux réunissant des pays de développement comparable et capables de réguler les flux de marchandises et de capitaux… autorisés à se protéger de manière raisonnable contre les écarts des coûts de production… l’essentiel du chômage que nous subissons tient précisément à cette libéralisation inconsidérée du commerce à l’échelle globale sans se préoccuper des niveaux de vie… Ce qui se produit est donc autre chose qu’une bulle.
La capture de la démocratie par l’idéologie économqiue

Capture de la régulation, capture de l’action publique par les intérêts privés

La notion de capture de la régulation est due aux économistes, au premier plan desquels cet autre récipiendaire du Prix de la Banque de Suède, George Stigler, notion a été aussi étudiée en France par deux économistes, Jean-Jacques Laffont et Jean Tirole. Elle pose qu’une agence de régulation chargée de faire prévaloir le bien public dans un secteur d’activité détermine tombe sous la dépendance de groupes d’intérêts qui dominent ce secteur. Une telle capture est rendue possible par la dissymétrie de puissance économique et d’intérêt à agir…

L’indépendance présumée de ces instances de régulation les fait échapper de facto au contrôle démocratique. Pour prendre un cas massif, l’indépendance, qui est garantie par les Traités de la Commission Européenne vis-à-vis des Etats est censé lui permettre d‘être le représentant vigilant d’un intérêt général europée. ; mais elle a pour revers sa dépendance aux lobbies, qui gangrènent son fonctionnement tout en assurant de confortables reconversions à certains de ces membres.

La porte tambour fonctionne dans les deux sens ;  son fonctionnement a été récemment illustré par les cas symétriques de la nomination à la tête de la Banque Européenne de M. Draghi, ancien directeur du secteur Europe de Goldmann Sachs  et de l’embauche par Goldman Sachs en 2016 de l’ancien Président de la Commission, M. Barroso. Ces relations incestueuses sont mises à jour par des ONG comme Transparency International ou l’Observatoire Européen des Entreprises.

Vous trouverez par exemple sur son site la description détaillée du cas récent de Mme Neely Kroes, qui est l’ancienne vice présidente de la Commission Européenne, dont les Bahamas Leaks ont révélé en septembre 2016 qu’elle avait conservé durant son mandat la direction d’une compagnie off-shore immatriculée aux Bahamas. Ancienne commissaire hollandaise à la concurrence entre 2004 et 2010, puis Commissaire aux nouvelles technologies entre 2010 et 2016, Mme Kroes avait dans ses attributions violemment critiqué la condamnation de la société Uber pop par un tribunal belge, qui en avait interdit les activités. Elle déclara sous l’égide de sa fonction qu’il s’agissait d’une décision folle, qui n’avait pas d’autre but que de protéger le cartel des taxis ; bien plus, elle a appelé, dans ses fonctions de Commissaires, publiquement à une campagne de protestation contre le minstre blege en charge des transports. – ce qui dénote quand même une certaine ignorance de la séparation des pouvoirs, puisqu’en principe, dans une démocratie, le juge n’est pas sous les ordres des ministres…
Quelques mois après avoir quitté ses fonctions à la Commission Mme Kroes  s’est mise au service de la société Uber et elle siège désormais dans le Comité de politique publique de cette société. Parmi les sept autres membres de ce Comité, figurent aussi l’un ancien secrétaire américain aux transports, un ex président de l’ autorité de la concurrence australienne… La société Uber a fait savoir que ces personnalités avaient été choisies en raison de leur expérience en politique gouvernementales…

Malaise dans la démocratie européenne !

La capture de la démocratie par le marché, ou la démocratie comme marché des idées.

Si l’analyse de la capture de la régulation peut rappeler la doctrine marxiste sur l’impossible neutralité du droit réel, elle s’en distingue radicalement par les remèdes proposées : étendre au champ de la démocratie des recettes tirées des théories économiques, la théorie de l’agence et la théories des jeux ( Laffont et Tirole  sur la capture normative) :

Ainsi, il y aurait un  marché de la décision réglementaire…

C’est donc par référence au marché et aux lois dites scientifiques de son fonctionnement qu’il conviendrait de concevoir le bon fonctionnement de la démocratie…La théorie de la capture normative n’est que l’un des effets de ce changement  de base dogmatique inhérent à l’instauration du marché total et de la gouvernance par les nombres. Le marché prend la place de la norme fondamentale dans l’ordre juridique et le calcul des intérêts se substitue à l’hétéronomie de la loi. La capture normative a une portée normative beaucoup plus large que la régulation d’un domaine donné Elle s’étend à la démocratie en tant que telle, c’est ce que montre l’évolution de la jurisprudence américaine relative à la liberté d‘expression et au financement de la vie politique.

Jusqu’au New deal inclusivement, la concentration des pouvoirs économiques avait été conçue comme un péril mortel pour la démocratie.  Jusqu’en 1971, la jurisprudence de la Cour Suprême a constamment  soutenu deux types de limites :  des plafonds contributifs, des plafonds de dépense.

En 1974, avec l’arrêt Buckley v. Valeo, pour la première fois la Cour Suprême est revenue sur la limitation des plafonds, la considérant comme contraire au premier d’amendement : la liberté d’expression est en quelque sorte assimilée à la liberté de dépenser son argent sans limite. C’est une installation en douceur du marché comme base dogmatique de la liberté d’expression. « Restreindre la somme d’argent qu’une personne ou un groupe peut dépenser pour la communication politique pendant une campagne réduit nécessairement la quantité d’expression en restreignant le nombre des sujets débattus, la profondeur de leur exploration et la taille de l’audience atteinte. » !
« la loi  (annulée par l’arrêt Buckley) a notamment pour objet d’égaliser la capacité relative de tous les électeurs d’influencer les résultats du vote en fixant un plafond aux dépenses de communications politiques des individus ou des groupes. Les limitations de dépenses prévues par la loi représentent une restriction substantielle et pas seulement théorique de de la quantité et de la diversité de l’expression politique. L’idée que le gouvernement puisse restreindre l’expression de certains éléments de notre société afin de donner un poids relatif plus grand aux arguments des autres est tout à fait étrangère au premier amendement qui a été conçu pour assurer la dissémination la plus large possible des informations provenant de sources inverses et antagonistes.  Tout entrave à ces dépenses enfreint donc le premier amendement.

Ainsi, une équivalence est posée entre liberté d’argent et liberté d’expression (exemple presque caricatural de la gouvernance par les nombres). Cette alchimie a été rendue possible par le paradigme auquel Laffont, Tirole et les autres théoriciens de la capture parlementaire attribuent  une valeur  scientifique, qui consiste à subsumer la démocratie sous le concept de marché, qu’il s’agisse de marché des idées, de marché électoral, ou de marché des normes. La législation est vendue par le législateur et achetée par les bénéficiaires de la législation….

Après la fin de la limitation des dépenses, la fin de la limitation des contributions : En 1978, l’arrêt First National Bank contre Belloti a pour la première fois étendu aux entreprises la liberté d’expression garantie aux citoyens par le premier amendement, rendant caduque la limitation des contributions. « Si les orateurs en cause  n’étaient des entreprises, nul n’aurait prétendu que l’Etat pouvait faire taire ce qu’ils entendaient exprimer. Cette expression est de celle qui sont indispensables aux processus de décision dans une démocratie  et ceci n’est pas moins vrai lorsqu’elles procèdent d’une entreprise plutôt que d’un individu. « 

Après la parenthèse libérale au sens américain de la présidence Rehnquist, la Cour Suprême retrouve sa direction ultra libérale : l’ Arrêt citizen united vient dynamiter les timides remparts échafaudés sous la présidence du juge Rehnquist en renversant complètement son arrêt Austin : «  l’ arrêt Austin perturbe le libre marché des idées protégé par le ¨premier amendement. Il autorise le gouvernement à bannir l’expression politique de millions d’associations de citoyens. La censure à laquelle nous avons aujourd’hui affaire à a un large champ d’application. Le gouvernement a muselé les voix qui représentent le mieux l’intérêt économique national. (NB ceux des entreprises) Le gouvernement cherche à user de ses pleins pouvoirs, y compris de drpit pénal pour décider où une personne peut s’informer ou à quelles sources douteuses elle ne doit pas accéder ; il recourt à la censure pour contrôler la pensée. Ceci est illégal. « .

Nous sommes là parvenus à un retournement complet des origines de la démocratie américaine… Le  levier de ce renversement a été l’assimilation de la démocratie à un marché des idées. Depuis ses origines antiques, la démocratie a été pensée comme une construction institutionnelle fragile qui sépare et articule trois dimensions de la vie de la cité ayant leur lieu et leur règle propre. Ces trois dimensions sont l’assemblée politique, sphère de la délibération de l’intérêt public ; le marché,  sphère de t la négociation des intérêts privés, et le sacré, la religio au sens premier, sphères d’une  référence dogmatique, source de sens et garante du crédit de la parole, qu’elle soit commerciale ou politique ; Ainsi conçue, la démocratie exige l’institution d’un demos, d’un peuple citoyen dont les membres réunissent trois conditions (les vertus civiques) : une formation et une éducation qui les rendent capables de distinguer les intérêts publics  de leurs intérêts privés ; une indépendance économique par le travail en sorte que les citoyens ne soient pas séparés par de trop grandes inégalités de fortune, ni ne s’asservissement les uns aux autres ; une éthique de la vérité, le courage de dire ce que l’on pense et de se confronter aux autres dans des assemblées de parole dont le but est dé décider ce qui doit être.

Dès lors que la sphère du marché absorbe celle du politique ( c’est ce que l’on appelle le marché électoral), celle du sacré ( c’est le marché des religions), la figure du citoyen s’estompe au profit de cell du consommateur. Et l’éthique de la citoyenneté, qui est faite d’éducation, d’indépendance, dans et par le travail, ainsi que de respect de la vérité perd toute espèce de sens. Le statut particulier qui était celui de la parole politique dans toutes les expériences démocratiques, c’est-à-dire d’une parole censée exprimer une représentation du bien public et non la défense des intérêts privés n’a alors plus de raison d’être. Toutes les paroles se valent a priori sur le marché des idées, et réduire la quantité d’argent qu’on peut y investir serait réduire la liberté d’expression.

Le sens de la démocratie dès lors se retourne, elle ne désigne plus l’assujettissement de la sphère économique aux principes de liberté et d’égalité des citoyens, mais, au contraire l’assujettissement de la sphère politique aux lois de l’économie

Cette pente de la démocratie comme marché et ses conséquences, c’est celle sur laquelle nous nous trouvons, c’est celle qui a triomphé sans vergogne aux USA, c’est celle qui s’impose à la Commission Européenne, c’est celle qui tente maintenant de s’imposer en France avec l’ultra libéralisme des macronistes.

C’est elle qu’il faut combattre, à tous les niveaux où nous pouvons agir, européen ou national ; et c’est pourquoi il faut sortir de cet Eurokom !

CF : Qu'est-ce qu'un régime de travail réellement humain ?Alain Supiot et Pierre Musso, Hermann, 2018



dimanche 21 avril 2019

Raisons de détester l’Eurokom-27 : l’explosion des inégalités !


Europe et Eurokom

Dans un de mes précédents blogs, je m’enflammais sur les propos de Macron à Epinal sur « l’Europe qui nous a donné la Paix ». Face aux politiciens truqueurs qui sciemment mélangent l’Europe, réalité géographique, historique, culturelle et la Communauté européenne et ses institutions (notamment la Commission européenne), vouées uniquement à construire un grand marché selon le dogme d’une véritable secte libérale, je propose donc de différencier l’Europe réelle des peuples et des nations et l’Eurokom, les institutions de la Communauté Européenne

Inégalités : les 500 Français les plus riches ont capté 20 milliards de plus en 2017 qu'en 1980

C’est l’une des  remarques et conclusions marquantes du rapport 2019 du Laboratoire sur les inégalités mondiales, dont Marianne en particulier a parlé le 02/04/2019 avec une interview de l’un des auteurs, Lucas Chancel.

Principales remarques et conclusions :

L’Europe depuis 1980 : des inégalités en explosion, une croissance captée par les plus riches.

L’Europe est l’un des continents qui a le mieux résisté à la montée des inégalités de revenu observée dans le monde depuis le début des années 1980. Néanmoins, la croissance européenne a elle aussi été inégalitaire : entre ´1980 et 2017, les 1% d’Européens les plus riches ont vu leur revenu moyen croître deux fois plus vite que celui des 50% les moins aisés.

Cette montée des inégalités, visible dans la quasi-totalité des pays européens, s’est déployée dans un contexte de concurrence fiscale accrue entre Etats européens qui a miné la progressivité de l’impôt. Les inégalités de revenu en Europe résultent de l’intersection de deux facteurs : les inégalités de revenu moyen entre pays européens, et les écarts de revenus entre individus au sein d’un même pays. Globalement, ce sont les inégalités de revenus dans chaque pays qui jouent le plus grand rôle.

Entre 1980 et 2017, la quasi- totalité des pays européens ont échoué a atteindre l’objectif de développement durable 10.1 adopte par les Nations Unies en 2015 et donc par tous les pays de l’UE, qui requiert que les 40% d’individus les moins aises voient leurs revenus augmenter plus vite que la moyenne nationale.

L’accroissement des écarts de revenus a été particulièrement fort en Europe de l’Est, où les privatisations associées  à la transition du socialisme au capitalisme ont bénéficié à une élite restreinte. Cette région était la moins inégalitaire d’Europe en 1980. Elle a aujourd’hui rejoint les niveaux d’inégalité de l’Europe de l’Ouest et du Sud.
Dans la quasi-totalité, des pays européens, on observe une hausse de la part du revenu captée par les 10% du haut depuis 1980. Dans de nombreux pays, en particulier au Sud et à l’Est de l’Europe, la pauvreté relative s’est étendue à un nombre croissant de citoyens. Dans des cas extrêmes comme en Grèce, en Italie ou dans certains pays d’ex-Yougoslavie, la montée des inégalités a été concomitante d’une croissance faible. La hausse des revenus des plus riches est alors allée de pair avec une baisse du revenu moyen des 50% du bas en termes réels

Pour les 80% du bas de la distribution des revenus européens, le taux de croissance a été d’environ 40% sur trente-sept ans. Au sommet de la distribution, parmi les 0.001% d’Européens les plus riches, la croissance a avoisiné les 200% – soit un taux cinq fois plus elevé qu’en bas. Les 1% les plus riches ont vu leurs revenus croître deux fois plus rapidement que la moyenne et ont capte une part de la croissance similaire à celle captée par les 50% du bas.

Pour les 1% les plus riches français, ce demi-million d’individus a capté 17% de la richesse créée entre 1980 et 2017 - un chiffre comparable à ce qu'il s'est passé en Allemagne. Si l'on zoome encore davantage, on voit que les 0,001%, du haut, ce sont 2,2% de la croissance totale depuis 1980 qui ont été captés par un tout petit groupe, de l'ordre de 500 personnes en 2017. Même si l'on résiste mieux aux inégalités qu'aux Etats-Unis, on peut dire que la dynamique de croissance est aussi inégalitaire en France, avec des inégalités tirées par de forts taux de croissance au sommet de la pyramide.

Commentaire : depuis qu’on sait que l’essentiel de la campagne électorale de Macron, si discret sur ses finances, provient d’un millier de très fortes donations, on a tout compris ! Macron, c’est le Président des Cinq cents ! Des cinq cents plus riches vers qui est dirigé l’essentiel de la politique !


L’Europe de la divergence, pas celle de la convergence !

Pour ce qui est de la convergence macroéconomique, qui est au cœur des politiques d’intégration économique promues par l’Union Européenne, les trajectoires de croissance des pays européens depuis 1980 affichent des résultats en demi-teinte. En 2017, en Bulgarie et en Roumanie, le revenu national moyen par adulte demeure inférieur à 20.000 eurs par an, alors qu’il dépasse largement  40.000 eurs. dans les pays du Nord de l’Europe et atteint les 60.000 au Luxembourg.
Alors que les pays pauvres d’Europe de l’Est ont vu leurs revenus nationaux croître plus vite qu’à l’Ouest depuis le début des années 2000, cette tendance n’est pour l’instant parvenue qu’à compenser les récessions associées à la transition des pays communistes au capitalisme au début des années 1990. En parallèle, on observe un décrochage des pays d’Europe du Sud — Espagne, Portugal, Grèce et Italie -par rapport au revenu moyen en Europe depuis la crise. Dans le même temps, les pays scandinaves, déjà aisés au début des années 1980, ont vu leurs revenus par adulte croître significativement plus vite que la moyenne continentale.

Commentaire : Echec assez complet de l’Eurokom sur ce plan ; et ça explique bien des choses, tant en ce qui concerne l’évolution politique des pays de l’ex Est que le phénomène des travailleurs détachés…

Une Europe des transferts. . . des pays pauvres vers les pays riches ?

Il  apparaît que les transferts nets de revenus entre pays de l’UE sont plus favorables aux pays riches qu’aux pays pauvres et ce même lorsque l’on prend en compte les contributions nettes des recettes des différents Etats au budget de l’UE. Les transferts nets de revenus entre pays de l’UE demeurent plus favorables aux pays riches qu’aux pays pauvres En effet, les flux de revenus nets entrant dans les pays de l’Est grâce au budget Européen (notamment au titre des politiques de cohésion) sont de l’ordre de 1% à  2% du PIB, alors que les flux sortants nets de ces pays (essentiellement vers les pays riches de l’UE pour rémunérer les détenteurs de capitaux investis dans ´ d’autres pays européens) sont de l’ordre de 2% à 5% du ` PIB chaque année. Si les investissements provenant de l’Ouest ont eu un impact positif sur la productivité des pays de l’Est, une partie des gains de productivité a été captée sous forme de profits par les investisseurs étrangers.

Une Europe qui ne protège pas…de la pauvreté.

Le taux de pauvreté en Europe n’a pas baissé depuis la crise. Alors que les citoyens les plus aisés ont vu leurs revenus croître plus vite que le reste de la population européenne, la pauvreté a légèrement augmenté entre 1980 et le milieu des années 2000, puis est restée stable depuis la crise. Entre la fin des années 1980 et le début des années 1990, la part de la population adulte vivant avec moins de 60% du revenu médian européen  est passée de 20% à 25%, du fait de l’effet combiné de récessions et d’une hausse des inégalités dans les pays de l’Est. Après une décennie de stagnation, le taux de pauvreté a de nouveau baissé au début des années 2000, dans un contexte de plus grande intégration européenne et de croissance plus inclusive. La crise a mis fin à cette courte période de réduction de la pauvreté en Europe : depuis 2008, entre 21% et 22% des citoyens européens sont en situation de pauvreté.

Ainsi, le taux de pauvreté en Europe, de 21%, est aujourd’hui le même qu’au milieu des années 2000.

Commentaire : Echec aussi sur ce plan de la lutte contre la pauvreté, conséquence inéluctable de la conversion de l’Europe sous tutelle allemande à l’ultra libéralisme…

Le modèle social européen, c’est exactement le contraire de la politique ultralibérale de la Commission !

Si les inégalités en Europe sont significativement plus faibles qu’aux Etats-Unis, c’est largement parce que les politiques sociales et fiscales des Etats permettent une répartition plus égalitaire des revenus avant impôts, notamment grâce à des systèmes éducatifs et de sante plus égalitaires qu’outre-Atlantique. A l’avenir, si l’Union Européenne souhaite contenir la hausse des inégalités sur le continent, elle devra créer les conditions d’un financement pérenne et équitable des services publics, notamment via une fiscalité plus progressive sur les individus et les entreprises à l’échelle européenne.

Commentaire : ben oui, mais c’est exactement le contraire de ce que fait l’Eurokom ; détruire les services publics. Et quant à la concurrence par la fiscalité pa le bas, dont meurent nos Nations et nos Etats, rien d’efficace pour ‘instant n’a été fait. Les Gilets Jaunes ont un bel avenir, pas seulement français !

Il faut sortir de cet Eurokom là




samedi 20 avril 2019

Rapport sur l’industrie française et l’affaire Alstom –rapport Bourquin


La réalité de la désindustrialisation

L’industrie manufacturière représentait 10,2 % du produit intérieur brut (PIB) français en 2016. En englobant également les industries extractives, l’énergie, l’eau, la gestion des déchets et la dépollution pour parvenir à la catégorie globale de l’industrie telle que l’entend l’Insee1, l’industrie française représentait 12,6 % de la valeur ajoutée française en 2016. Ces deux chiffres sont en net recul par rapport à ceux de l’an 2000, puisque l’industrie manufacturière représentait cette année-là 14,1 % du PIB français et l’industrie dans son ensemble 16,5 % de la valeur ajoutée nationale. L’évolution est encore plus nette si l’on prend davantage de recul, puisque l’industrie représentait encore 24 % du PIB français en 1980.

Le phénomène de désindustrialisation s’est aggravé ces quinze dernières années puisque, selon la direction générale des entreprises, l’indice de la production manufacturière française a diminué de -14 % entre 2000 et 2016, période durant laquelle elle a été fortement affectée par la crise économique et financière de 2008-2009, puis par celle de la zone euro à partir de 2010. Ce phénomène de « désindustrialisation » est commun aux autres grands pays européens, à l’exception de l’Allemagne, dont l’industrie représente en 2016 22,6 % du PIB, soit un chiffre seulement légèrement inférieur à celui de l’an 2000 (23,2 % du PIB). La part de l’industrie dans le produit intérieur brut est passée de 19,6 % à 17,3 % pour la moyenne de l’Union européenne, de 17,8 % à 16,3 % pour l’Espagne, de 19,1 % à 16,7 % pour l’Italie et de 17,7 % à 11,8 % pour le Royaume-Uni.
La baisse de la part de l’industrie dans le PIB s’est systématiquement accompagnée d’une chute très significative de l’emploi industriel au cours des dernières décennies

L’emploi industriel a diminué de 25 % depuis l’an 2000, Là encore, ce phénomène est commun à tous les pays développés : l’emploi salarié manufacturier direct s’est contracté dans l’ensemble de l’Union européenne (-16 % depuis 2000) et a légèrement reculé en Allemagne (-4 %). Sur une plus longue période, l’économiste Lilas Demmou, dans son étude « La désindustrialisation en France », estimait en 2010 que l’industrie avait perdu 36 % de ses effectifs entre 1980 et 2007, soit 1,9 million d’emplois, ce qui correspond à 71 000 destructions d’emplois par an, dont 17 000 en raison de l’externalisation vers le secteur des services et 21 000 en raison de gains de productivité. L’emploi salarié direct résiste toutefois dans certains secteurs forts de l’industrie manufacturière française comme les matériels de transport autres que l’automobile (+ 12 %) et l’industrie pharmaceutique (-1 %).

Leçon de la désindustrialisation à la française : l’importance de la compétitivité hors prix

La compétitivité hors prix de l’industrie française s’est dégradée depuis 2008 sous l’effet de la compression des marges et du faible dynamisme de l’investissement dans les années 2000. Résultat : son faible niveau ne la protège pas assez de la concurrence internationale et accroît sa sensibilité à l’évolution des facteurs de compétitivité prix, que sont notamment le coût du travail, celui des consommations intermédiaires ou le taux de change de l’euro pour les exportations hors zone euro. À l’inverse, l’appréciation de l’euro dans les années 2000 n’a pas empêché l’industrie allemande d’augmenter ses marges (+1,7 point par an en moyenne entre 2002 et 2007), ce qui montre bien qu’une forte compétitivité hors-prix permet, dans une large mesure, de compenser une compétitivité-prix peu favorable.
L’histoire s’est répétée des centaines de fois : des salariés acceptent des baisses de salaires ou des augmentations de temps de travail contre la promesse de maintiens d’emplois…et deux ou trois ans après se retrouvent au chômage. L’avenir de l’industrie française n’est pas dans la course au prix le plus bas, perdue d’avance, mais bien dans la compétitivité hors prix, c’est-à-dire l’innovation et le progrès ; et ceux qui rêvaient d’entreprises sans usines lui ont fait beaucoup de mal.
Une autre évolution notable est que la frontière entre industrie et services s’est considérablement brouillée, voire estompée pour arriver à une conception « servicielle » de l’industrie : le consommateur, lorsqu’il se procure un bien manufacturé, achète en même temps les services qui lui sont liés. L’industrie, loin de s’opposer aux services  est aussi une des bases les plus sûres de leur développement

Mesures, propositions, critiques :

1) Vive le CIR (crédit impôt recherche) !

Dans les pays industrialisés comme la France, qui ont depuis longtemps terminé leur phase de croissance de rattrapage, le progrès technique est indispensable à l’augmentation de la croissance potentielle de l’économie. En France, le crédit d’impôt recherche (CIR) est désormais de très loin le principal dispositif de soutien à l’investissement des acteurs privés dans la R&D. Il constitue un atout considérable pour maintenir et attirer sur le territoire français les centres de recherche, en particulier ceux des grands groupes mondialisés qui peuvent facilement les déplacer sur d’autres territoires. Il constitue une forme importante de soutien public à la recherche privée de 5,8 Md€. et représente environ 19 % des dépenses intérieures de R&D des entreprises (DIRDE). Ces  efforts se traduisent dans les chiffres puisque, selon la direction générale des entreprises (DGE), le nombre de projets d’investissements étrangers dans des centres de R&D en France a augmenté de 14 % entre 2011 et 2015.

Lors de son audition par la mission, Louis Schweitzer, ancien Commissaire général à l’investissement, Président d’honneur de Renault et Président d’Initiative France a beaucoup insisté sur les vertus du CIR. Selon lui, « on a beaucoup critiqué le crédit impôt recherche (CIR) qui a, pour moi, un effet très positif, soit pour susciter l’innovation des PME, soit pour inciter les grandes entreprises à localiser leurs centres de recherche en France. Grâce à lui, il est moins coûteux de localiser un centre d’innovation en France que dans aucun autre pays de l’OCDE - j’exclus la Chine et l’Inde, où la propriété industrielle n’existe pas.

Vive le CIR donc ; et la mission parlementaire juge « indispensable d’éviter de le remettre systématiquement en question, sans quoi son efficacité diminue », et de le « sanctuariser », pour reprendre le terme utilisé par Philippe Varin, Président de France Industrie, Vice-Président du Conseil de l’industrie.
Pourtant, aussitôt après, elle reprend une proposition appelant à conditionner son bénéfice à un maintien d’activité sur le territoire national pendant au moins cinq ans afin de mettre un terme à des comportements de pure optimisation fiscale menés par certains groupes, notamment étrangers !
Mauvaise idée, en contradiction avec le 1er point : 1), c’est surtout, et sans commune mesure, le CICE qui peut faire l’objet d’optimisation fiscale ; 2) C’est ignorer la grande masse des start-up se fondant sur un projet de recherche assez en amont, avec des risques importants, et qui ont justement plus besoin du CIR. ; 3) Même si un projet s’arrête,  avant cinq ans, il peut donner naissance à un autre, et le capital intellectuel en emploi et formation de chercheurs est acquis.
Il faut s a n c t u a r i s e r !

2) Encourager les logiques coopératives et mieux inscrire les politiques industrielles dans les territoires, lutter contre « le caractère non coopératif du tissu productif français ».

De façon générale, le nombre d’entreprises exportatrices dans notre pays est faible par rapport à ce qui s’observe dans des pays comparables. On compte aujourd’hui environ 125 000 exportateurs de biens en France. C’est mieux qu’au début des années 2010, où ce nombre avait atteint un point bas à 116 000 entreprises, mais c’est très en deçà des 131 000 du début des années 2000, quand la France avait encore un commerce extérieur excédentaire. Selon les chiffres de Business France, seulement 8 000 ETI et PME sont très fortement présentes à l’international et 12 000 y développent une activité régulière et soutenue, soit un total de 20 000 entreprises, alors qu’on dénombre dans le même temps 50 000 PME faiblement exportatrices, 55 000 PME exportatrices irrégulières et 250 000 PME non exportatrices. Nous sommes loin de ce qu’ont réussi les Allemands, créer un tissu dense de PME exportatrices : 5 % des entreprises exportatrices françaises réalisent 90 % des exportations contre 80 % en Allemagne – en France, seules les très grandes entreprises exportent.

Le « caractère non coopératif du tissu productif français » pèse sur l’efficacité du dispositif d’accompagnement à l’export, indépendamment des qualités intrinsèques de ce dernier. Il est sans doute nécessaire de travailler simultanément sur deux tableaux pour franchir un palier significatif dans la projection à l’international des PME et des ETI françaises : d’un côté, améliorer le fonctionnement d’un dispositif d’appui à l’export qui souffre encore de graves insuffisances ; de l’autre, pallier un défaut de coopération qui caractérise les entreprises françaises en général

Pour cela, la Commission propose de prendre appui sur les dynamiques collectives des acteurs en conservant un maillage fin du territoire en favorisant la mise en « réseau » des pôles de compétitivité, qui doivent être incités à mutualiser leurs compétences thématiques (Proposition n° 27). et à mettre un terme au désengagement financier de l’État en faveur des pôles de compétitivité tout en favorisant davantage, dans le cadre d’une logique pluriannuelle, le financement de projets présentant une dimension de « service industriel » et visant la mise sur le marché des produits issus de l’innovation (Proposition n° 28).  La Commission propose aussi de rapprocher le personnel de Business France et de Bpifrance, moyen simple d’offrir un guichet unique pour ces entreprises à fort potentiel, guichet unique qui fonctionne d’autant mieux que Business France et Bpifrance ne sont pas concurrentes l’une de l’autre, ni sur le plan de la légitimité ni sur le plan commercial.

Enfin, renforcer les comités stratégiques de filières et dynamiser leur action. L’objectif des comités stratégiques de filière est la construction d’une stratégie « collaborative » avec l’ensemble des acteurs d’un secteur. Jusqu’en 2018, il existait quatorze comités stratégiques de filières, dans les domaines suivants : aéronautique, alimentaire, automobile, biens de consommation, bois, chimie et matériaux, éco-industries, ferroviaire, industries extractives et de première transformation, industries et technologies de santé, mode et luxe, naval, nucléaire, et numérique. Composés de représentants des acteurs de la filière (entreprises ou fédérations industrielles, représentants syndicaux, différentes administrations concernées et experts), ces comités se sont engagés, par des contrats de filière, en faveur de projets communs et de partenariats destinés à répondre aux enjeux rencontrés dans leur secteur.

D’après Louis Gallois, ces outils visent à remédier à deux carences de l’industrie française : le faible nombre d’entreprises de taille intermédiaire et la faible solidarité entre entreprises, qui pèsent sur la compétitivité industrielle de la France et constituent des freins à l’innovation collaborative.

Il faut que les entreprises françaises apprennent davantage à chasser en meutes.

3) Sécuriser l’entreprise à long terme.

Louis Schweitzer a estimé que l’une des clés à cette situation était de mieux dissocier les droits de vote du capital social, soulignant notamment les vertus du droit suédois, où certaines actions représentent parfois plusieurs dizaines de droits de vote, ou du droit fédéral américain, qui instaure plusieurs « classes » d’actions. Il a indiqué qu’« en France, on a développé le droit de vote double pour les actionnaires de long terme. C’est déjà quelque chose, mais cela reste beaucoup moins puissant que ce qui existe ailleurs, d’autant que les mécanismes de gouvernance entrepreneuriale renforcent le rôle des actionnaires quels qu’ils soient. »

Oui, sauf que ainsi qu’a dû le constater la Commission, si le système suédois de droits de vote multiples a effectivement été jadis un instrument puissant, permettant par exemple de détenir 1 000 droits de vote au moyen d’une seule action, il l’est moins aujourd’hui : selon le service économique de l’ambassade de France en Suède, afin de ne pas encourir une censure européenne (Merci la Commission !), le droit suédois des sociétés a aujourd’hui fortement réduit le rapport entre droits de vote et capital, au maximum à 10.

La Commission souligne que le droit français offre déjà une palette importante de mécanismes – notamment les actions de préférences et les pactes extrastatutaires entre associés – qui peuvent être mis en place – et qui ne sont pas assez utilisés.  Certains de ces mécanismes peuvent être améliorés ; ainsi, la Commission propose de  prévoir la possibilité pour le porteur d’actions de préférence de racheter ces dernières ( i.e. que leur rachat puisse intervenir à l’initiative de l’émetteur ou du détenteur de ces actions).
Toujours dans ce cadre de la stabilisation des entreprises, une mesure cent fois évoquée, que l’on sait très efficace, et pourtant encore jamais mise en œuvre :

Favoriser la présence d’administrateurs salariés, sur le modèle allemand.

L’actionnariat salarié, particulièrement réduit en France, peut constituer un élément clé de stabilisation et d’ancrage des entreprises en France. En effet, dans les sociétés dans lesquelles l’actionnariat salarié est important, les prises de contrôle par voie d’offre publique d’achat (OPA), notamment « hostiles », sont réputées plus difficiles, à la fois pour des raisons culturelles et d’emploi.  Par ailleurs q l’essor de cet actionnariat permettrait également de favoriser la présence d’administrateurs salariés au sein des organes sociaux. Le modèle allemand est à cet égard une source d’inspiration puissante. Il fait apparaître combien des conseils d’administration, des directoires ou des conseils de surveillance qui font une place importante aux représentants salariés peuvent se révéler des remparts efficaces pour maintenir les centres de décision et de production des entreprises sur le territoire national
Allez , il faut le faire ! Un patron français, rétif au départ comme la plupart de ses collègues, mais qui a mis en place des administrateurs salariés a constaté : « Je suis heureux de les avoir. Dans le board, à part moi, ils sont les seuls à savoir ce que fait notre entreprise »

Protéger l’industrie Française des comportements étrangers prédateurs

Rappelons, c’est cette commission parlementaire qui a commencé à tirer le fil de l’incroyable piraterie organisée qu’a été la prise de contrôle d’Alstom par General Electric, une piraterie organisée par le gouvernement américain usant et abusant de l’extraterritorialité de son droit , et dont on sait aujourd’hui qu’elle s’est même accompagnée d’une prise d’otage d’un cadre d’Alstom (Frédéric Pierucci, président de la filiale chaudière d'Alstom ) dans des conditions particulièrement indignes et révoltantes.

Propositions de la Commission :
- Élargir la liste des activités soumises au contrôle des investissements directs étrangers aux domaines en lien avec la révolution technologique, notamment le stockage et la sécurité des données, l’intelligence artificielle, les semi-conducteurs, ainsi qu’au domaine spatial, et assurer sa révision périodique, au vu de l’évolution des technologies et des secteurs économiques (Proposition n° 35). Établir une cartographie précise des entreprises qui présentent en France un caractère stratégique, y compris les PME et les ETI, en s’appuyant notamment sur la connaissance du tissu industriel local par les services déconcentrés de l’État (Proposition n° 36).

- Ne pas hésiter à imposer des mesures de gouvernance dans les entreprises particulièrement stratégiques faisant l’objet d’un investissement étranger, notamment l’exclusion de l’investisseur étranger de son droit de vote sur certaines décisions ou la mise en place d’un « superviseur » indépendant au sein de l’entreprise (Proposition n° 37). Ben oui, c’était l’objet d’un décret proposé par M. Montebourg et qualifié par Macron de « décret vénézuélien)

-Utiliser la commande publique pour conforter l’industrie française : Tirer profit des règles des marchés publics, dans le respect du droit de l’Union européenne, afin qu’ils bénéficient pleinement aux entreprises industrielles implantées en France, et tout particulièrement aux PME (Proposition n° 40).

- Développer une stratégie européenne forte en faveur de l’industrie : Inviter la Commission européenne à une plus grande prise en considération, dans l’application de la réglementation relative aux aides d’État et au contrôle des concentrations, d’un contexte mondialisé où les entreprises doivent avoir une taille critique pour rivaliser avec les géants industriels implantés hors de l’Union européenne (Proposition n° 2).

Remarque : ben oui, mais c’est justement l’inverse qui s’est produit avec le refus de la Commission européenne d’entériner le rapprochement Siemens Alstom dans le ferroviaire aun nom du primatnde la concurrence.

- Soutenir une initiative européenne forte et rapide afin de favoriser l’utilisation, au niveau du commerce international, de la monnaie européenne, et d’envisager l’adoption de textes européens dont la portée serait explicitement extraterritoriale (Proposition n° 39).

Remarque : ben oui, mais justement l’euro est un échec sanglant : sa part dans les réserves centrales des autres pays, dans les échanges internationaux a même décru depuis son apparition. Jamais, à aucun moment, il n’a menacé la suprématie du dollar, ni même permis de nous en affranchir ! (cf. https://vivrelarecherche.blogspot.com/2018/05/raisons-de-detester-leurokom-5-11-14.html)

- Assurer la protection juridique des entreprises françaises est également fondamental. Il faut  envisager l’adoption de textes européens dont la portée serait explicitement extraterritoriale, afin d’être en mesure, le cas échéant, d’appliquer des mesures de sanctions ou de coercition à des entreprises américaines.

Là c’est la leçon d’Alstom, mais sussi des amendes gigantesques infligées à la BNP, à Alcatel etc. Pierre Lellouche et Karine Berger ont parfaitement mis en lumière en 2016 les dangers liés à l’application extraterritoriale de certains droits nationaux, à commencer par le droit américain. Cette approche permet ainsi à l’exécutif américain de poursuivre, presque partout dans le monde, des entreprises étrangères pour des faits qu’elles n’ont pas nécessairement commis sur le territoire des États-Unis mais qui contreviennent à certaines prescriptions du droit fédéral. Sur ce fondement, le Department of Justice américain se reconnaît le droit de poursuivre les personnes, et en particulier les entreprises, qui : - présentes sur les marchés financiers réglementés américains à un titre ou un autre, se livrent à des activités constitutives de corruption ou de malversations comptables ou financières - effectuent des opérations avec des établissements bancaires qui sont des correspondants de banques américaines, procèdent à des opérations susceptibles d’être qualifiées de blanchiment d’argent d’origine criminelle ; méconnaissent des règles d’embargo ou de sanctions décrétées à l’encontre d’un pays. C’est à ce titre que Bnp Paribas a été poursuivi et condamné en 2015 dans le cadre des embargos décrétés par les États-Unis contre l’Iran, la Lybie, le Soudan et Cuba. Des embargos illégaux, purement américains, sans approbation internationale.

Comme le dit pudiquement la Commission parlementaire, ce sont des outils juridiques qui permettent de créer d’intéressantes synergies entre l’objectif de lutte contre la criminalité internationale et la défense des intérêts économiques nationaux…

Et pour l’instant, ce sont des instruments exclusifs de l’impérialisme américain, de nos chers alliés américains …pas des Chinois, l’obsession de certains.

Depuis, rien de cela n’a été mise en place. Et le premier débat sur les Européennes a complètement ignoré cette extra-territorialité du droit américain, bras oh combien efficace de leur impérialisme économique. A pleurer.
On peut penser que l'avenir de l'Europe se joue sur sa capacité à répondre à ce genre de défi. Et son abse,ce d'avenir à son absence de réponse ....

Conclusion : Au terme de ses travaux, la mission tient à affirmer solennellement que la France doit croire en son industrie et que l’avenir de son industrie se situe sur le territoire français.

Si l’on ne peut que constater la forte désindustrialisation de la France – que l’on raisonne en termes de valeur ajoutée ou d’emplois – la mission est convaincue que celle-ci n’a rien d’irrémédiable. La rupture technologique liée à l’irruption de la digitalisation et de la numérisation dans les processus de production et dans les produits eux-mêmes, associée à la mondialisation des marchés, créent en effet une occasion sans précédent pour l’industrie française de revenir au rang qu’elle a perdu au cours des trente dernières années.

Acceptons’-en, l’augure. Et constatons que la vieille politique ne  travaillait pas si mal et qu’il serait assez bon que ceux qui prétendent les remplacer mettent en œuvre leurs préconisations.