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samedi 29 octobre 2016

Crédit Impôt Recherche : le rapport de l’ANRT

Il y a un mois, le Conseil Economique et Social publiait un rapport inquiétant sur l’état de la recherche en France Avec un taux de 2,26 % du PIB en 2014 consacré à la Recherche développement, la France se situe en deçà de l’objectif de 3 % de la Stratégie de Lisbonne de 2002 ; ce taux  situe la France loin du groupe des pays européens « leaders » dont l’effort de recherche avoisine ou dépasse l’objectif des 3 % du PIB. Il est de plus connu depuis longtemps que la faiblesse française réside principalement dans le financement privé de la recherche, nettement insuffisant. Or l’ANRT (Association Nationale Recherche Technologie), qui compte 300 membres, dont près de la moitié proviennent du secteur public,  publie un rapport cette fois encourageant sur le Crédit d’Impôt Recherche

Enfin une niche fiscale efficace

Il apparait que le CIR (crédit impôt recherche) est l'une des plus grosses niches fiscales dont peuvent bénéficier les entreprises françaises (5 milliards), mais elle est efficace. Selon l'Association nationale recherche et technologie (ANRT), « la France devient grâce au crédit d'impôt recherche [CIR] l'un des premiers pôles mondiaux de recherche industrielle ».
Ainsi la France est le pays du monde où la part de l'emploi de recherche en entreprise a le plus augmenté dans la population active entre 2008 et 2013. L'Hexagone comptait 3,1 chercheurs en entreprise pour 1.000 actifs en 2000, autant qu'en Grande-Bretagne. En 2014, on recensait 5,7 chercheurs en entreprise pour 1.000 actifs en France, contre 3,1 outre-Manche et 4,7 en Allemagne, selon les calculs de l'ANRT, basés sur les chiffres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Grâce au dispositif « jeunes docteurs » du CIR, 1 300 docteurs sont embauchés chaque année dans les entreprises.
L’ANRT s'est aussi intéressée au coût d'un chercheur dans différents pays en utilisant les données de 16 entreprises - dont Nokia, Renault, EDF, Airbus, Thales... - présentes en France et dans le monde entier, employant en tout 81.000 personnes dans la R&D sur la planète. Ces 16 entreprises font partie des principaux bénéficiaires du CIR dans l'Hexagone. Et, si l'on fixe le coût d'un ingénieur en R&D à 100 en France en 2016 sans tenir compte du CIR et des autres avantages fiscaux, alors le coût baisse d'un quart, à 75, une fois pris en compte les dispositifs d'aide à la R&D, dont le CIR. Selon ce calcul, le coût d'un chercheur aux Etats-Unis est de 133, de 98 en Grande-Bretagne et de 91 en Allemagne. Outre-Atlantique, « le coût d'un chercheur s'envole, mais cela s'explique par le fait que, face à la pénurie d'ingénieurs en R&D, les Etats-Unis sont contraints d'augmenter la rémunération des chercheurs.
Cependant, le coût du chercheur n'est que le troisième facteur de localisation de la recherche, selon l'ANRT, après l'accès aux marchés et l'accès aux compétences visées. Là encore, la France n’est pas si mal placée, grâce à la qualité et à la complémentarité de ses formations scientifiques, (grandes écoles, organismes de recherche, universités).

La France s’est dotée d’un puissant outil fiscal de renforcement de la recherche sur son territoire

En résumé, le CIR atteint ses objectifs : il incite les entreprises à dérisquer leurs développements technologiques en France. La France s’est dotée d’un puissant outil fiscal de renforcement de la recherche sur son territoire.
Cette étude de l’ANRT devrait déminer les critiques récurrentes récurrents sur le Crédit d’Impôt Recherche. Il avait été déjà montré que l’effet levier, c’est-à-dire la quantité d’euros investis par les entreprises lorsqu’elles reçoivent 1 euro de l’Etat, ne fait pas consensus mais est proche de 1. L’effet levier, c’est-à-dire la quantité d’euros investis par les entreprises lorsqu’elles reçoivent 1 euro de l’Etat, ne fait pas consensus mais il est proche de 1. « Certes, l’effet levier n’est pas gigantesque, entre 0,8 et 1,1, mais même inférieur à 1, l’effet est intéressant car l’entreprise a quand même consenti un investissement en R&D dont on connaît l’effet global positif pour la société », rappelle Stéphane Lhuillery, professeur à ICN Business School, auteur d’une des études d’évaluation. De plus, ce que l’étude de l’ARNT ne montre pas, et qu’elle ne peut pas montrer, c’est l’effet « anti-crise » de cet instrument : en son absence, le désinvestissement en R&D aurait été important note le ministère de la recherche. De fait, pour les chercheurs en entreprise, il est clair qu’en l’absence du CIR, la crise de ces dernières années se serait traduite par un effondrement dramatique de la recherche en France et l’éradication complète d’un grand nombre de centres de recherches.

Science en Marche  et d’autres mènent un mauvais combat lorsqu’ils opposent la recherche publique à la recherche privée. En revanche, ils auraient bien raison de mener un combat plus virulent pour l’attractivité des carrières de recherche, dans le privé comme dans le public, un facteurs très négatif pointé dans le apport du Conseil Social. Et si l‘on parle incitations fiscales, il parait assez évident que le CICR est l’un des rares dispositifs qui ait fait la preuve de son utilité, bien supérieure au CICE de cette présidence ou la détaxation des heures supplémentaires de la précédente.





dimanche 16 octobre 2016

Vive les trente-cinq heures

Les trente-cinq heures, la meilleure mesure pour l’emploi et les salariés

Pourquoi les trente-cinq heures sont-elles vouées aux gémonies ? France Stratégie a fait évaluer le CICE en 2013-2014 par deux centres de recherche (Liepp de sciences-po et Tepp du CNRS)  et Marianne (7 octobre 2016) a eu la très bonne idée d’en comparer l’effet sur l’emploi avec les trente-cinq heures de Lionel Jospin (1997) et la défiscalisation des heures supplémentaires  de Nicolas Sarkozy (2007).
Il est clair qu’en matière d’emplois créés ou préservés les trente-cinq heures sont de loin la mesure la plus bénéfique : 220.000 fin 2000, 350.000 en 2005 ; et ceci, pour un coût modeste : le coût de 12.5 milliards d’euros n’est plus après déduction des recettes supplémentaires (cotisations supplémentaires, indemnités chômage en moins) que de 3.5 milliards d’euros. Le CICE est loin d’avoir créé autant d’emplois (75.000) et pour un coût beaucoup plus élevé ; nous sommes loin des 200.000 envisagés par M. Sapin. Quant aux heures supplémentaires défiscalisées, elles ont détruit des emplois -30.000. Le surplus de pouvoir d’achat qu’elles ont pu apporter a coûté très cher ! Le CICE avait pour but premier de renforcer les marges des entreprises qui pourraient ainsi investir et créer des emplois. Entre 2012 et 2015, les marges des entreprises ont effectivement progressé de 1.5 points, ce qui ne s’était jamais produit auparavant. Pour cette première partie de la politique de l’offre, c’est un plein succès à un coût toit de même élevé 18 milliards de subventions Mais la suite - la création d’emplois- ne vient pas et de fait, lorsqu’on essaie de voir à quoi ont pu bien servir ces milliards du CIPE, la réponse est très inquiétante. Contrairement à ce qui était espéré, ils ne sont pas passés dans les investissements des entreprises, qui ont stagné ! Pas dans les hausses de salaires, personne ne les a vues ! Contrairement à ce que certains critiques de gauche dénoncent presque mécaniquement, pas non plus dans les dividendes ! Pas dans les stocks non plus, qui ont été un peu reconstitués, il n’y en a pas pour dix-huit milliards ! Aucun effet significatif sur le chiffre d’affaire, le profit, le taux de marge, la rentabilité, la productivité ! Nada ! Alors, la réponse proposée par Philippe Askenazy (de l’Ecole d’Economie de Paris, et l’un des économistes les plus intéressants à suivre en matière d’évaluation des politiques économiques) est extrêmement inquiétante et signifierait un échec total de cette politique de l’offre : les milliards du CIPE seraient passé dans des baisses de prix permettant aux entreprises à très court terme de gagner des parts de marché, mais en renforçant une spirale déflationniste inquiétante et mortifère pour l’économie !

Le politique et la science économique

Au-delà de ce dossier d’évaluation et de comparaison des  trente-cinq heures, rappelons-le la seule mesure qui ait été efficace économiquement et répondant à un besoin social, la seule mesure réellement progressiste  en faveur des salariés qui ait été prise depuis longtemps, apparaît un phénomène inquiétant dans les relations entre politiques et économistes. Il semble que les politiques soient de plus en plus nombreux à croire les prétentions de certains économistes à la scientificité de leur discipline et se raccrochent en désarroi complet à leurs théories et solutions auxquelles ils en arrivent à accorder  la même confiance qu’à la loi de la gravitation universelle ou les principes de la thermodynamique. Or, nous sommes loin  de la caractéristique d’une science selon Auguste Comte, « savoir pour prévoir, afin de pourvoir » comme on peut le constater régulièrement.  De fait, la politique économique et ses effets dépendent étroitement d’un contexte encore bien plus complexe qu’un milieu biologique et elle ne sera jamais qu’une science secondaire, une science appliquée dont l’application justement laisse forcément place à un certain empirisme, à une incertitude  fondamentale irréductible, car aucun contexte ne se répète exactement. C’est en cela que réside et résidera  toujours la responsabilité propre, le risque, la servitude du politique, l’appréciation du contexte. Il est néanmoins assez facile de comprendre que les trente-cinq heures ont été un succès en raison d’un contexte de reprise plus favorable à l’emploi et aux salariés, que persister dans la défiscalisation coûteuse des heures supplémentaires dans un contexte de réduction d’activité ne pouvait être que catastrophique pour l’emploi et que si le CICE a pour effet d’alimenter une spirale déflationniste, alors il est aussi catastrophique.

Dans ces conditions, on ne peut avoir qu’infiniment de mal à comprendre pourquoi cette surenchère à droite contre les trente-cinq heures, le pire étant encore ce Grand cerveau malade d’Alain Juppé, qui nous conduira, droit dans ses bottes , à un blocage total pire que 1995  





mercredi 12 octobre 2016

Prix Nobel de Chimie 2016 : des artistes de la Chimie !


Le Prix Nobel 2016 de Chimie a été attribué au Français Jean-Pierre Sauvage, au Britannique Fraser Stoddart et au Néerlandais Ben Ferringa. Cette édition du Nobel a été qualifiée de fondamentale, car il est vrai qu’elle récompense des travaux entrepris depuis longtemps, dont les éventuelles applications pratiques sont encore assez lointaines. Mais s’il existait un  Nobel d’esthétique ou d’architecture, nul doute que les récipiendaires l’auraient également obtenu tant l’architecture complexe des molécules qu’ils synthétisent est fascinante.

Jean-Pierre Sauvage, de l’Université de Strasbourg,  ouvre la marche en 1983. Il fait une découverte fortuite, celle d’une molécule en forme de chaîne, constituée de cycles moléculaires comme autant de maillons entrelacés. La première molécule de la famille des «caténanes» venait d’être identifiée.

Un caténane est une architecture moléculaire formée d'au moins deux macrocycles imbriqués l'un dans l'autre, formant une sorte de chaine (en latin catena). Ces deux cycles imbriqués ne peuvent pas être séparés sans casser au moins une liaison covalente d'un des deux cycles. Voici un des premiers exemple de caténane – merci wikipedia !)


Et pour le fun, un tour de force réalisé par James Fraser Stoddart, l’olympiadane, qui reproduit la structure des anneaux olypiques.

En 1994, Jacques Sauvage parvient à mettre au point une caténane dans laquelle un anneau est fixe, tandis que l’autre se déplace autour de manière contrôlée, en présence d’énergie. Il a ainsi conçu le tout premier embryon de machine moléculaire, un concept  qu’améliorera beaucoup Ben Ferringa.
Dans le bestiaire nouveau apprivoisé par les trois chimistes figurent aussi des rotaxanes, molécules constituées d'un macrocycle lié mécaniquement à un fragment moléculaire linéaire qui le traverse de part en part.
Dans un rotaxane, le macrocycle peut tourner autour de l'axe de l'haltère comme un volant ou il peut glisser sur son axe d'un site à un autre. Le contrôle de la position du macrocycle sur l’axe peut permettre au  permet au rotaxane de fonctionner comme un interrupteur moléculaire, chaque position possible du macrocycle correspondant  à un état différent de l'interrupteur. Et le mieux est qu’avec beaucoup de travail et d’ingéniosité, on peut construire des rotaxanes où les déplacement du macrocycles peuvent être contrôlées à volonté en agissant sur des paramètres chimiques ( polarité du solvant, acidité, potentiel oxydant) ou physique (action de la lumière). Il a da(illers été découvert que quelques molécules naturelles fonctionnent suivant ce principe (l'ATP synthase, peptides à nœud de cystine, cyclotides, peptides-lasso).
La synthèse de ces molécules représente un véritable défi chimique, un tour de force époustouflant.
L’approche historique, basée sur la chimie classique des polymères, a consisté en différentes stratégies de cyclisation, en espérant que tout se passe bien et que statistiquement, une partie des molécules synthétisées auront les caractéristiques voulues. Les réactions doivent être pratiquées avec de très faibles concentrations, les rendements sont minuscules. Bref, cette méthode est remplacée par des synthèses utilisant la chimie supramoléculaire, une spécialité de Strasbourg et du prix Nobel  Jean-Marie Lehn. Les molécules sont préorganisées de façon à réagir le plus possible dans le sens voulu grâce à l’emploi de  patrons moléculaires, qui, par des liaisons faibles ( liaisons hydrogène, métaux de transition) prédisposent les molécules subtstrats favorablement. Dans ces conditions, avec beaucoup de travail, de connaissance, peut-être de chance, il est possible d’arriver à des rendements élevés sur de grandes quantités.  par des interact La deuxième approche utilise une préorganisation supramoléculaire Rotaxanes et caténanes sont prêts à faire irruption dans notre monde, menant possiblement à une électronique moléculaires aux capacités étonnantes.
En attendant, fin 2016 devrait avoir lieu à Toulouse  un évènement qui montre comment ont progressé les découvertes de Sauvage, Stoddart et Ferringa. Il s’agit de la NanoCar Race, la première course internationale de molécules-voitures. Positionnées sur la ligne de départ, face à un circuit construit atome par atome sur une surface d'or, les nano-cars, qui ne font que quelques nanomètres de longueur, seront prêtes à démarrer, activées par de brèves impulsions électriques. Comme lors d'une course de Formule 1, chaque équipe devra parcourir le plus vite possible le circuit, depuis les deux atomes représentant le départ jusqu'aux deux atomes d'arrivée.
Bon, la course ne sera pas visible à l'œil nu mais pourra être suivie grâce à  un ensemble de microscopes « à effet tunnel » unique au monde, situé à Toulouse. Devraient être présentes des équipes de Toulouse, du Texas et d’Autriche, de Dresde, de l’Ohio, de Tsukuba. Voilà à quoi devrait ressembler la voiture française :
Reste une question : le long travail de chimie fondamentale qui a permis à Jean-Pierre Sauvage de développer sa chimie des moteurs moléculaires serait-il encore possible dans les temps présent, avec l’importance de la recherche finalisée et la très harassante ANR ( Agence Nationale de la Recherche) et les multiples évaluations croisées françaises et européennes, plus prores à couler des projets vraiment innovants qu’à les encourager ? Il serait intéressant de connaitre ses commentaires sur l’état actuel de la recherche en France

lundi 10 octobre 2016

Laïcité : le Québec m’inquiète !

Harcèlement islamiste au Québec 

Le 26 septembre 2016, s’ouvre, à Montréal, le procès de Djemila Benhabib, poursuivie par un établissement scolaire privé, subventionné à hauteur de 425 000 $ par le ministère de l’éducation, portant le nom d’Écoles musulmanes de Montréal (EMMS) pour des déclarations soi-disant « diffamatoires » et « anti-islamiques » : » J’ai dénoncé le fait qu’on fait réciter à des petits enfants des verstes coraniques appelant à l’extermination des mécréants. Je me suis également opposée contre le port du voile imposé à des fillettes de moins de neuf ans. L’2cole qui me poursuit est l’établissement islamique le plus important du Québec.  L’établissement « Écoles musulmanes de Montréal (EMMS) », créé par un immigrant pakistanais  accueillent aussi les sessions du Conseil de la Charia qui fait pression sur les institutions pour que le droit islamique soit pris en compte. D’origine algérienne, ayant du fuir l’intégrisme dans son pays d’origine, Djemila Benhabid est bien placée pour reconnaître le type d’enseignement donnée dans le laboratoire de l’intégrisme islamiste  qu’était l’Algérie des années 90, et qu’elle voit resurgie dans sn nouveau pays d’ accueil, où elle avait trouvé refuge.
Elle est victime d’une stratégie bien au point de harcèlement judiciaire, poursuivie de manière systématique et avec de grands moyens dans de nombreux pays. Au Canada, révèle Marianne du 24 septembre 2016. Au Canada également, un journaliste romain immigré, Mihai Cristea photographie sur un marché une femme en niqab, aux côtés d’un compagnon en tenue estivale, rapporte les propos de prédicateurs conseillant aux maris des « tapes correctrices » et déconseillant aux femmes de serrer a main des hommes, ce qui serait comme « forniquer ». Condamné pour atteint à l’identité d’une femme pourtant intégralement voilée… il a choisi de rentrer en Roumanie. « On veut nous affaiblir, nous ruiner, nous effacer, nous empêcher d’écrire, de parler, de participer au débat public, de diffuser nos idées «  explique Djamila Benhabid. Marianne rappelle comment des islamistes ont obtenu l’annulation du mariage d’un écrivain « apostat », puis poursuive procès après procès des actrices qui refusaient la mise au pas islamistes pour finir par des attentats contre des écrivains.

Trudeau, le complice

La situation au Canada et au Québec devient vraiment inquiétant tant l’offensive islamiste trouve des idiots utiles comme complice, dont le moindre n’est pas le premier ministre Justin Trudeau. Il n’a pas hésité à affirmer que « le port du niqab est acceptable en tous temps et en tous lieux » ; il accepte régulièrement les invitations de moszquées et d’organisations islamiste extrémistes, dont l’Islamic Society of North America qui militent pour la polygamie et l’imposition de la charia- même le Congrès musulman canadien s’en est inquiété ; lors d’une de ses dernières visites  une mosquée, il a accepté que les femmes qui l’accompagnaient enfilent un voile et entrent par une porte distincte. S’opposant à la charte de neutralité proposée par la Parti Québécois, il l’a mise en parallèle avec rien moins que la « ségrégation raciale aux USA » ! En 2014, Mme Fatima Houda-Pepin,  alors la seule députée de confession musulmane, a démissionné du Parti Libéral dont Trudeau est le chef, parce qu’elle était partisan de l'interdiction des signes religieux ostentatoires pour les juges, les policiers et les gardiens de prison, de l'Assemblée nationale, et qu’il s’y opposait.

Vive le Québec libre !

Le Parti Québecois apparait ferme dans sa volonté de défendre une laïcité menacée  en promouvant une charte de la laïcité assez modérée reposant sur les principes suivants :

-          Énoncer un devoir de réserve et de neutralité pour le personnel de l'État,
-          Prohiber le port des signes religieux ostentatoires par le personnel de l'État,
-          Rendre obligatoire le visage à découvert lorsqu'on donne ou reçoit un service de l'État,
-          Établir une politique de mise en œuvre pour les organismes de l'État.

Il existe d’ailleurs un clivage assez prononcé entre francophones et anglophones  sur le sujet puisque 59 % des francophones sont favorables à la Charte de la laïcité proposée par le Parti Québecois contre à peu près 50% ou un peu moins des anglophones. Non sans raison, le Parti Québecois voit dans l’attitude de Trudeau,le fils après le Père,  la poursuite du vieux projet libéral de considérer au Québec les francophones comme une communauté comme une autre.

Alors, plus que jamais, Vive le Québec libre, et surtout le Québec libre de l’islamisme !


Et merci à la revue Argument (6 janvier 2016) d’avoir accueilli sur son site ma contribution Les origines positivistes de la laïcité « à la française » : Dieu n’est plus d’ordre public


vendredi 7 octobre 2016

Tous les médicaments ne sont pas du Solvadi-Sarepta

J’ai déjà eu l’occasion dans plusieurs  blogs de dire combien je trouvais injustifiées les attaques contre Gilead et son médicament contre l’hépatite C, le solvadi (sofosbuvir), et contre son prix, justifié quant au service médical rendu, et même d’un point de vue économique ; d’autant que de nombreuses firmes pharmaceutiques ont eu en main des molécules assez analogues et n’en ont rien fait car Gilead a inventé un double système de prodrogue très sophistiqué qui permet  d’assurer une concentration maximale du produit à son site d’action et constitue une véritable innovation qui permettra sans doute d’autres avancées.
Les contempteurs de l’industrie du médicament devraient réserver leur attention et leur hostilité à d’autres cas où effectivement certaines sociétés pharmaceutiques se comportent en véritables ruffians, manipulant des patients désespérés pour obtenir des avantages et des profits indus. C’est le cas notamment pour la firme Sarepta et son anticorps eterplisen

Sarepta : la stratégie du margoulin

La myopathie de Duchenne, est une terrible maladie génétique, résultant de l’altération de la dystrophine, une protéine responsable de la force musculaire. L'incidence est estimée  à 1 sur 4000 - les garçons sont quasi exclusivement  atteints.  Les malades sont généralement en fauteuil roulant à partir de l'âge de 12 ans et  l'espérance de vie  est d’environ 25 ans, la principale cause de mortalité étant l’affaiblissement du muscle cardiaque.
Il n’existe aucun traitement et exploitant  la détresse des patients, la  firme Sarepta vient d’obtenir de la FDA l’autorisation de mise sur le marché de l’eterplisen, malgré l’opposition d’une grande partie des experts  de la FDA. Cet accord a été obtenu dans le cadre d’une procédure accélérée réservée aux maladies orphelines, ici détournée de son objectif. 
A l’appui de sa demande, Sarepta a présenté à la FDA un dossier d’étude clinique de huit ( !) jeunes garçons ; les niveaux de dystrophine des patients traités par l’eteplirsen étaient en moyenne  de 0,93 % celui de normal après 3 ans et demi, à peu près le même que dans les patients DMD non traités avec le médicament. Autrement dit, le pseudo médicament est inactif. Et non seulement, il est inactif, mais sa toxicité n’a pas été suffisamment évaluée.
En plus Sarepta a menti et l’un des directeurs de la FDA a eu ce commentaire inhabituellement sévère:  « Je manquerais à mon devoir si je ne faisais pas remarquer que le promoteur de l’étude a fait preuve d’une grave irresponsabilité en jouant un rôle dans la publication et la promotion des données sélectionnées lors de l’élaboration de ce produit. Non un article trompeur a été publié en ce qui concerne les résultats de l’étude 201/202147 – qui n’a jamais été rétracté — mais Sarepta a également publié un communiqué de presse en se fondant sur l’article trompeur et ses conclusions. »
« Accorder l’approbation accélérée ici sur la base des données présentées pourrait empirer la situation des patients souffrant de maladies pour lesquelles il n’existe pas de traitement — tant en décourageant les autres firmes pharmaceutiques de mettre au point des traitements efficaces pour la myopathie de Duchenne qu’en encourageant les autres compétiteurs à ’obtenir une autorisation pour qes affections graves avant qu’ils aient investi le temps et la recherche nécessaire pour établir si un produit a une action clinique bénéfique. Si nous devions approuver l’eteplirsen sans preuves substantielles nous pouurions rapidement nous retrouver en position d’avoir à approuver une myriade de traitements inefficaces pour les groupes de patients désespérés. »
Manipulant des patients désespérés et un bataillon d’avocats très chers et très puissants – au point qu’un responsable de la FDA a estimé que si Sarepta avait dépensé les mêmes moyens et la même énergie à étudier son produit, ils auraient déjà en main des résultats permettant de se prononcer valablement sur son intérêt-, Sarepta est cependant parvenu à obtenir un agrément de la FDA. L’argument du responsable qui a accordé l’autorisatuon contre l’avis de la plupart de ses collègues était curieux : il ne s’agissait pas de savoir si l’eteplirsen était efficace ( c’est un « placebo scientifiquement élaboré » selon l’avis de ceux qui ont étudié le dossier), mais de prendre en compte le fait que Sarepta devait être recapitalisé pour pouvoir continuer. Ceci au moins fut un franc succès, sur fonds de possibles conflits d’intérêts : l’après-midi même de l’annonce, l’action de Sarepta augmenta de 86%.



Et Sarepta annonce son intention de proposer son pseudo médicament sur le marché européen, où il faut donc s’attendre aux mêmes manœuvres de margoulins.
Espérons que les agences européennes auront le courage et la légitimité scientifique pour s’opposer à ce type de manœuvres qui risquent autrement de devenir de plus en plus communes. Ce n’est pas gagné, et c’est un combat qui devra être mené devant l’opinion publique.


mercredi 5 octobre 2016

Juppé, Grand Cerveau Malade


Ce n’est pas le but de ce blog que de traiter de sujets directement politiques, mais j’avoue que je ne peux voir sans une réelle inquiétude Alain Juppé apparaitre comme le choix favori des français…y compris maintenant d’un certain nombre d’électeurs de gauche sans doute très désorientés. Alors, quelques rappels.

Le programme d’Alain Juppé (interview journal du dimanche, 2 octobre et  Cinq ans pour l'emploi)

- réforme du contrat de travail : « réhabiliter le CDI et le rendre plus attractif pour l'entreprise», notamment en y incluant «des motifs prédéterminés de rupture » - autrement dit, le CDI sans garantie ; plus même question de prudhommes !
- généralisation de la pratique du référendum d'entreprise», qui pourrait être organisé «avec l'accord du chef d'entreprise et d'au moins un syndicat représentatif». Son résultat aurait «force obligatoire» si les négociations avec les représentants du personnel n'aboutissaient pas
libéralisation du travail du dimanche, Alain Juppé est favorable à une «libéralisation» sur la base du volontariat des salariés et d'une majoration de leur rémunération. Selon lui, les blocages survenus par exemple aux Galeries Lafayette et au Printemps relèvent «d'une vision paléolithique de notre société »
passage au trente-neuf heures… éventuellement payées trente-cinq : « laisser la liberté de négociation dans l'entreprise. Mais la loi disposera : si dans deux ans la négociation n'a pas abouti, le temps de travail hebdomadaire passera à 39 heures »
- limitation des mandats syndicaux : les élus syndicaux devront  consacrer au moins 50 % de leur activité à leur métier dans l'entreprise et  ne pourront nt pas faire plus de deux mandats consécutifs. C’est tellement mieux pour négocier dans les entreprises d’avoir des délégués peu expérimentés !
- réduire la dépense publique de 100 milliards en cinq ans, le nombre de fonctionnaires de 250.000 (où ça ?) et ramener l'impôt sur les sociétés à la moyenne européenne (en comptant l’Irlande ?)

Et il y a aura pire que le 49-3
« J'élaborerai une loi d'habilitation autorisant le gouvernement à légiférer par ordonnances »,

Et ce ne sont pas des promesses en l’air :
« j'ai une certaine crédibilité : dans ma vie, j'ai fait ce que j'ai dit. »

Le passé d’Alain Juppé : Alain Juppé track record !

Pour ceux qui n’ont pas oublié les grèves de 1995, les embouteillages monstres, les marches interminables sous la neige, les poubelles non ramassées et l’armée se substituant aux très partiellement aux transports en commun et même aux éboueurs (mainteant, avec tout ce qu’ils ont à faire, ce serait même impossible !)
- une bonne connaissance du système judiciaire : En 1999, Alain Juppé est mis en examen pour « abus de confiance, recel d'abus de biens sociaux, et prise illégale d'intérêt » pour des faits commis en tant que secrétaire général du Rassemblement pour la République et maire adjoint de Paris aux finances, de 1983 à 1995. Il est considéré comme un élément clé d'un système de financement occulte d'emplois au sein du RPR financés par la mairie de Paris et des entreprises désireuses de passer des contrats publics. Le 30 janvier 2004, il est condamné par le tribunal correctionnel de Nanterre à 18 mois de prison avec sursis et à une peine de dix ans d'inéligibilité. Le 1er décembre 2004, la Cour d’appel réduit la condamnation à 14 mois de prison avec sursis et un an d'inéligibilité. «  Il est regrettable qu'au moment où le législateur prenait conscience de la nécessité de mettre fin à des pratiques délictueuses qui existaient à l'occasion du financement des partis politiques, M. Juppé n'ait pas appliqué à son propre parti les règles qu’il avait votées au parlement. Il est également regrettable que M. Juppé, dont les qualités intellectuelles sont unanimement reconnues, n’ait pas cru devoir assumer devant la justice l'ensemble de ses responsabilités pénales et ait maintenu la négation de faits avérés »
- une connaissance approfondie des problèmes immobiliers : En juin 1995, Le Canard enchaîné publie un document interne de la ville de Paris, signé en janvier 1993 par Alain Juppé, qui donne l'ordre à ses services de diminuer le loyer de son fils Laurent, logé dans un appartement relevant des propriétés de la ville, rue Jacob. Par ailleurs, Alain Juppé est locataire, à un prix défiant toute concurrence, d’un appartement de 189 m² dans la même rue, où sont réalisés des travaux pour plusieurs millions de francs aux frais des contribuables. Il attend deux semaines avant de se justifier et refuse de s'excuser, affirmant rester « droit dans ses bottes »
- Un sens sûr de l’économie : En 1996, le Premier ministre souhaite vendre au groupe Daewoo l’entreprise publique Thomson Multimédia, officiellement « très endettée », contre un franc symbolique après sa recapitalisation par l’État, à hauteur de 11 milliards de francs. Il faut noter que Thomson Multimédias détient à cette époque les brevets et licences de la totalité des supports numériques sur disque (CD, CD-Rom, LaserDisc, DVD, disques magnéto-optiques, disquettes…) qui génèrent des royalties dans le monde entier avec l’émergence de la télévision numérique.
- Le sens du dialogue social : Les grèves de 1995 en France contre le plan Juppé de 1995 furent à leur époque les plus importantes depuis celles de Mai 68. Lors des six grandes manifestations qui ont touché toutes les grandes villes du pays, 2 millions de personnes (selon les organisations syndicales) sont descendues dans la rue.  Du 24 novembre au 15 décembre, des grèves d'ampleur ont eu lieu dans la fonction publique et le secteur privé contre le « plan Juppé » sur les retraites et la Sécurité sociale. Le mouvement social de l'automne 1995, souvent réduit à la grève des transports publics, très visible et fortement médiatisée, a concerné également les grandes administrations (La Poste, France Télécom, EDF-GDF, Éducation nationale, secteur de la santé, administration des finances, etc.). Le 12 décembre marque le point culminant du mouvement, avec deux millions de manifestants. Le 15 décembre, le gouvernement retire sa réforme sur les retraites, la fonction publique et les régimes spéciaux (SNCF, RATP, EDF). France.
Selon la DARES, le service des études et des statistiques du ministère du travail, le nombre des jours de grève a été de 5 millions, dont environ 4 millions de jours de grève dans la fonction publique et 1 million dans les secteurs privé et semi-public.


Alors, Alain Juppé, stop ou bis ?

lundi 3 octobre 2016

Politique de Santé un défi français et européen- les dentistes


Des dentistes diplômés sans avoir jamais soigné de patients-scandales en série

Il y a des étudiants qui ont des idées intéressantes de thèse. C’est la cas par exemple de Marco Mazevet qui, pour sa thèse d’exercice de dentiste a eu l’idée de s’intéresser à la formation des dentistes. M. Mazevet (bravo !) est l’ancien président de l’association européenne des étudiants en chirurgie dentaire (65000 membres), et il avait été alerté par de nombreux amis étudiants qui lui signalaient que la libre circulation des travailleurs et la reconnaissance automatique des diplômes avaient eu pour effet l’explosion dans des pays peu regardants de formations payantes très chères et  de mauvaise qualité qui ne garantissent même pas une formation clinique minimale aux dentistes. La Commission Européenne l’a pris de haut, a nié le fait puis a demandé des preuves. Qu’à cela ne tienne, M. Mazevet a consacré au sujet sa thèse d’exercice et le moindre qu’on pusse dire est que le résultat dépasse tous les inquiétudes.

Au total, quelque 1 000 réponses ont été enregistrées, représentant dix-neuf pays. Une liste de trente-quatre actes cliniques – détartrage, prise d’empreintes, clichés radiographiques, prothèse provisoire, extraction d’une dent… – a été soumise aux étudiants. Il en ressort que 10 % des diplômés en odontologie formés en Europe n’ont reçu aucune formation de pratique clinique sur des patients. Autrement dit, avant d’exercer, ils n’ont effectué aucun soin. Un étudiant sur trois n’a jamais posé de couronne, près d’un sur deux n’a jamais réalisé de traitement endodontique (à l’intérieur de la dent) et près d’un sur trois n’a jamais prescrit de traitement médicamenteux. Enfin, deux tiers des actes ont été réalisés moins de cinq fois par 50 % des étudiants, et seulement un quart a été réalisé plus de dix fois par 60% des étudiants. L’Ordre national des chirurgiens dentistes jusqu’ici bien muet a réagi par une consternation un peu tardive : « Comment concevoir que de jeunes diplômés puissent s’installer sur notre territoire sans avoir jamais vu un patient… en l’état, la libre circulation représente une menace pour la qualité des soins et la sécurité des patients. »

En effet ! Mais l’ordre des chirurgiens dentistes peut difficilement s’exonérer de toutes responsabilités tant, à l’exemple de l’Ordre des médecins, il a mené une politique de numerus clausus malthusienne, censé protéger les intérêts des praticiens installés, mais qui se retourne contre eux lorsqu’ils veulent vendre leur cabinets, et qui constitue surtout un véritable scandale, une conspiration contre l’intérêt des patients.

Au delà de la formation des dentistes, rappelons le scandale Dentexia, une pseudo-chaine de dentisterie low-cost et vraie escroquerie aux conséquences dramatiques. Au moins 2.000 patients en ont été victimes et ont payé pour des soins qui n'ont jamais été réalisés. Dentexia a fait faillite, et l’Igas, qui aurait dû tout de même s’inquiéter avant, tant l’escroquerie était évidente ( mais ça arrangeait bien les caisses d’assurance maladie, ces soins à très bas coût !). En réalité,  cela finira par coûter très cher, mais l’aspect sanitaire est réellement scandaleux. Marianne, Lundi 02 Mai 2016, à propos de Dentexia : « A 54 ans, Gilles n'a plus une seule dent. Les 18 racines qui lui restaient et lui permettaient, péniblement, de faire tenir un bridge, ont été arrachées en janvier. Toutes d'un coup. Puis le cabinet dentaire où il avait commencé les soins, à Chalon-sur-Saône, a mis la clé sous la porte, laissant Gilles sans dents ».

Ajoutons au paquet l’affaire du « dentiste de l’horreur », le néerlandais Mark van Nierop, coupable d’avoir mutilé une centaine de patients à Château-Chinon entre 2008 et 2012. Le pire est qu’il avait été accueilli en sauveur dans une zone qui est un désert médical notoire, les habitants étant  obligés depuis plusieurs années de faire près de 20 km pour avoir accès à des soins dentaires.  Récit d’une patiente : « "Il m'a fait sept ou huit piqûres, arraché huit dents d'un coup et posé l'appareil à vif. Je pissais le sang. Pendant trois jours !". A cela s’ajoutait les escroqueries : sous prétexte de mettre à jour sa carte Vitale, l‘escroc en a profité pour réclamer 1 400 euros de soins à sa mutuelle.

Et les médecins ? “On ne peut rien faire, ce sont des étudiants européens”
Il n’y pas que pour les dentistes que la libre circulation et la reconnaissance mutuelle des diplômes pose problèmes.  Ainsi, cette année, huit internes en médecine générale affectés dans des hôpitaux d’Ile-de-France ont été exclus de leur service pour cause d’incompétence et ont été priés de suivre un stage de remise à niveau de six mois, comme l’a révélé Le Quotidien du médecin, mi-janvier. C’est une première.

Six d’entre eux, trois Français ayant fait leurs études en Roumanie et trois Roumains ayant commencé leur cursus dans leur pays, avaient choisi de faire leur premier stage de six mois à l’hôpital de Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne). « Ils sont arrivés en novembre, trois étaient affectés en pneumologie, trois autres en gastro-entérologie, raconte Didier Hoeltgen, directeur de l’hôpital.

Ces huit étudiants ne seraient que la partie émergée de l’iceberg. Le coordonnateur du diplômé d’étude spécialisée (DES) de médecine générale a du mal à masquer sa colère : « A la rentrée 2014, nous avions déjà décelé ce type de problème. Nous avions été reçus au ministère de la santé et au ministère de l’enseignement supérieur, mais ils nous ont dit : “On ne peut rien faire, ce sont des étudiants européens” ! »

« C’est la première fois qu’un hôpital prend une telle décision mais c’est un phénomène que l’on dénonce depuis des années et qui risque de s’aggraver », réagit de son côté Jean-Pierre Vinel, ex-président de la Conférence des doyens, fraîchement élu président de l’université Toulouse-III-Paul-Sabatier. En effet, la particularité du système français est d’être plutôt accueillant avec les étudiants étrangers et les Français qui font leurs études de médecine à l’étranger. Certains pays exigent, au contraire, une épreuve de langue comme l’Allemagne ou imposent un concours pour intégrer l’internat, à l’instar de la Roumanie par exemple.

Au ministère de la santé, on rappelle les dispositions européennes : tout étudiant d’un pays membre de l’Union européenne engagé dans des études médicales qui a validé son deuxième cycle peut s’inscrire en troisième cycle dans un autre pays membre de l’Union. En août 2011, un décret avait interdit l’accès aux ECN aux étudiants n’ayant pas réussi à intégrer les études de médecine après la première année commune aux études de santé (Paces). Une manière de fermer la porte, de fait, à tous les étudiants qui poursuivaient leur cursus à l’étranger. Mais le Conseil d’Etat avait annulé ce décret.

L’ECN (Epreuves classantes nationales)) a ceci de spécifique qu’il ne s’agit pas d’un concours mais d’un examen où chaque étudiant est classé… même s’il a rendu copie blanche. « Il sera bon dernier mais sera interne et aura une place dans un hôpital », s’indigne Philippe Jaury. En 2014, 250 candidats de l’Union européenne ayant suivi leur cursus hors de France ont passé les ECN. En 2015, ils étaient 350, dont 50 % de Roumains.
Une des solutions serait alors d’instaurer une note éliminatoire aux ECN. Elle a les faveurs des doyens de faculté de médecine, mais les syndicats d’étudiants y sont farouchement opposés. Et puis quelle note choisir ? Une autre serait de remettre un examen de fin d’études du 2e cycle avec un oral que tous les étudiants seraient tenus de valider avant de pouvoir passer l’ECN. Enfin, la réforme du 3e cycle, qui doit entrer en vigueur à la rentrée 2017, devrait aussi prévoir une année socle en début d’internat permettant de s’assurer que chaque étudiant a les compétences pour poursuivre dans sa spécialisation.
Quoi qu’il en soit, pour les professions de santé, la sévérité assez injustifiée du numerus clausus français, la reconnaissance mutuelle des diplômes et la libre circulation créent des problèmes graves d’accès aux soins, de qualité des soins et même de sécurité des patients. Cette situation devient intenable, et l’Europe ferait bien de s’en préoccuper  avant que la tentation de tout envoyer dans les poubelles de l’histoire ne finisse par saisir la majorité de nos concitoyens. Il serait assez inconvenant que ces préoccupations de santé publique soient absentes des échéances électorales à venir.