Le Prix Nobel 2016 de
Chimie a été attribué au Français Jean-Pierre
Sauvage, au Britannique Fraser Stoddart et au Néerlandais Ben Ferringa. Cette
édition du Nobel a été qualifiée de fondamentale, car il est vrai qu’elle
récompense des travaux entrepris depuis longtemps, dont les éventuelles
applications pratiques sont encore assez lointaines. Mais s’il existait un Nobel d’esthétique ou d’architecture, nul
doute que les récipiendaires l’auraient également obtenu tant l’architecture
complexe des molécules qu’ils synthétisent est fascinante.
Jean-Pierre Sauvage, de l’Université de Strasbourg, ouvre la marche en 1983. Il fait une découverte fortuite, celle d’une molécule en forme de chaîne, constituée de cycles moléculaires comme autant de maillons entrelacés. La première molécule de la famille des «caténanes» venait d’être identifiée.
Un caténane est une architecture moléculaire formée d'au moins deux macrocycles imbriqués l'un dans l'autre, formant une sorte de chaine (en latin catena). Ces deux cycles imbriqués ne peuvent pas être séparés sans casser au moins une liaison covalente d'un des deux cycles. Voici un des premiers exemple de caténane – merci wikipedia !)
Et pour le fun, un tour de force réalisé par James Fraser Stoddart,
l’olympiadane, qui reproduit la structure des anneaux olypiques.
En 1994, Jacques Sauvage parvient à mettre au point une caténane dans
laquelle un anneau est fixe, tandis que l’autre se déplace autour de manière
contrôlée, en présence d’énergie. Il a ainsi conçu le tout premier embryon de
machine moléculaire, un concept
qu’améliorera beaucoup Ben Ferringa.
Dans le bestiaire nouveau apprivoisé par les
trois chimistes figurent aussi des rotaxanes,
molécules constituées
d'un macrocycle lié mécaniquement à un
fragment moléculaire linéaire qui le traverse de part en part.
Dans un rotaxane, le
macrocycle peut tourner autour de l'axe de l'haltère comme un volant
ou il peut glisser sur son axe d'un site à un autre. Le contrôle de la position
du macrocycle sur l’axe peut permettre au permet au rotaxane de fonctionner comme un interrupteur
moléculaire, chaque position possible du macrocycle correspondant à un état différent de l'interrupteur. Et le
mieux est qu’avec beaucoup de travail et d’ingéniosité, on peut construire des
rotaxanes où les déplacement du macrocycles peuvent être contrôlées à volonté
en agissant sur des paramètres chimiques ( polarité du solvant, acidité,
potentiel oxydant) ou physique (action de la lumière). Il a da(illers été
découvert que quelques molécules naturelles fonctionnent suivant ce principe
(l'ATP synthase, peptides à nœud de cystine, cyclotides, peptides-lasso).
La synthèse
de ces molécules représente un véritable défi chimique, un tour de force
époustouflant.
L’approche
historique, basée sur la chimie classique des polymères, a consisté en
différentes stratégies de cyclisation, en espérant que tout se passe bien et
que statistiquement, une partie des molécules synthétisées auront les
caractéristiques voulues. Les réactions doivent être pratiquées avec de très
faibles concentrations, les rendements sont minuscules. Bref, cette méthode est
remplacée par des synthèses utilisant la chimie supramoléculaire, une
spécialité de Strasbourg et du prix Nobel
Jean-Marie Lehn. Les molécules sont préorganisées de façon à réagir le
plus possible dans le sens voulu grâce à l’emploi de patrons moléculaires, qui, par des liaisons
faibles ( liaisons hydrogène, métaux de transition) prédisposent les molécules
subtstrats favorablement. Dans ces conditions, avec beaucoup de travail, de connaissance,
peut-être de chance, il est possible d’arriver à des rendements élevés sur de
grandes quantités. par des interact La
deuxième approche utilise une préorganisation supramoléculaire Rotaxanes et
caténanes sont prêts à faire irruption dans notre monde, menant possiblement à
une électronique moléculaires aux capacités étonnantes.
En
attendant, fin 2016 devrait avoir lieu à Toulouse un évènement qui montre comment ont progressé
les découvertes de Sauvage, Stoddart et Ferringa.
Il s’agit de la NanoCar Race, la première course internationale de
molécules-voitures. Positionnées sur la ligne de départ, face à un circuit
construit atome par atome sur une surface d'or, les nano-cars, qui ne font que
quelques nanomètres de longueur, seront prêtes à démarrer, activées par de
brèves impulsions électriques. Comme lors d'une course de Formule 1, chaque
équipe devra parcourir le plus vite possible le circuit, depuis les deux atomes
représentant le départ jusqu'aux deux atomes d'arrivée.
Bon, la course
ne sera pas visible à l'œil nu mais pourra être suivie grâce à un ensemble de microscopes « à effet tunnel »
unique au monde, situé à Toulouse. Devraient être présentes des équipes de
Toulouse, du Texas et d’Autriche, de Dresde, de l’Ohio, de Tsukuba. Voilà à
quoi devrait ressembler la voiture française :
Reste une question : le long travail de chimie fondamentale qui a
permis à Jean-Pierre Sauvage de développer sa chimie des moteurs moléculaires
serait-il encore possible dans les temps présent, avec l’importance de la
recherche finalisée et la très harassante ANR ( Agence Nationale de la
Recherche) et les multiples évaluations croisées françaises et européennes,
plus prores à couler des projets vraiment innovants qu’à les encourager ? Il
serait intéressant de connaitre ses commentaires sur l’état actuel de la
recherche en France
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