Les trente-cinq heures, la meilleure mesure pour l’emploi et les
salariés
Pourquoi les trente-cinq heures
sont-elles vouées aux gémonies ? France Stratégie a fait évaluer le CICE
en 2013-2014 par deux centres de recherche (Liepp de sciences-po et Tepp du
CNRS) et Marianne (7 octobre 2016) a eu la très bonne idée d’en comparer l’effet
sur l’emploi avec les trente-cinq heures de Lionel Jospin (1997) et la
défiscalisation des heures supplémentaires
de Nicolas Sarkozy (2007).
Il est clair qu’en matière d’emplois
créés ou préservés les trente-cinq heures sont de loin la mesure la plus
bénéfique : 220.000 fin 2000, 350.000 en 2005 ; et ceci, pour un coût
modeste : le coût de 12.5 milliards d’euros n’est plus après déduction des
recettes supplémentaires (cotisations supplémentaires, indemnités chômage en
moins) que de 3.5 milliards d’euros. Le CICE est loin d’avoir créé autant d’emplois
(75.000) et pour un coût beaucoup plus élevé ; nous sommes loin des
200.000 envisagés par M. Sapin. Quant aux heures supplémentaires défiscalisées,
elles ont détruit des emplois -30.000. Le surplus de pouvoir d’achat qu’elles
ont pu apporter a coûté très cher ! Le CICE avait pour but premier de
renforcer les marges des entreprises qui pourraient ainsi investir et créer des
emplois. Entre 2012 et 2015, les marges des entreprises ont effectivement progressé
de 1.5 points, ce qui ne s’était jamais produit auparavant. Pour cette première
partie de la politique de l’offre, c’est un plein succès à un coût toit de même
élevé 18 milliards de subventions Mais la suite - la création d’emplois- ne
vient pas et de fait, lorsqu’on essaie de voir à quoi ont pu bien servir ces milliards
du CIPE, la réponse est très inquiétante. Contrairement à ce qui était espéré,
ils ne sont pas passés dans les investissements des entreprises, qui ont stagné !
Pas dans les hausses de salaires, personne ne les a vues ! Contrairement à
ce que certains critiques de gauche dénoncent presque mécaniquement, pas non
plus dans les dividendes ! Pas dans les stocks non plus, qui ont été un
peu reconstitués, il n’y en a pas pour dix-huit milliards ! Aucun effet significatif
sur le chiffre d’affaire, le profit, le taux de marge, la rentabilité, la productivité !
Nada ! Alors, la réponse proposée par Philippe Askenazy (de l’Ecole d’Economie
de Paris, et l’un des économistes les plus intéressants à suivre en matière d’évaluation
des politiques économiques) est extrêmement inquiétante et signifierait un
échec total de cette politique de l’offre : les milliards du CIPE seraient
passé dans des baisses de prix permettant aux entreprises à très court terme de
gagner des parts de marché, mais en renforçant une spirale déflationniste
inquiétante et mortifère pour l’économie !
Le politique et la science économique
Au-delà de ce dossier d’évaluation
et de comparaison des trente-cinq heures,
rappelons-le la seule mesure qui ait été efficace économiquement et répondant à
un besoin social, la seule mesure réellement progressiste en faveur des salariés qui ait été prise
depuis longtemps, apparaît un phénomène inquiétant dans les relations entre
politiques et économistes. Il semble que les politiques soient de plus en plus
nombreux à croire les prétentions de certains économistes à la scientificité de
leur discipline et se raccrochent en désarroi complet à leurs théories et solutions
auxquelles ils en arrivent à accorder la
même confiance qu’à la loi de la gravitation universelle ou les principes de la
thermodynamique. Or, nous sommes loin de
la caractéristique d’une science selon Auguste Comte, « savoir pour prévoir,
afin de pourvoir » comme on peut le constater régulièrement. De fait, la politique économique et ses effets
dépendent étroitement d’un contexte encore bien plus complexe qu’un milieu
biologique et elle ne sera jamais qu’une science secondaire, une science
appliquée dont l’application justement laisse forcément place à un certain
empirisme, à une incertitude fondamentale irréductible, car aucun contexte
ne se répète exactement. C’est en cela que réside et résidera toujours la responsabilité propre, le risque,
la servitude du politique, l’appréciation du contexte. Il est néanmoins assez
facile de comprendre que les trente-cinq heures ont été un succès en raison d’un
contexte de reprise plus favorable à l’emploi et aux salariés, que persister
dans la défiscalisation coûteuse des heures supplémentaires dans un contexte de
réduction d’activité ne pouvait être que catastrophique pour l’emploi et que si
le CICE a pour effet d’alimenter une spirale déflationniste, alors il est aussi
catastrophique.
Dans ces conditions, on ne peut
avoir qu’infiniment de mal à comprendre pourquoi cette surenchère à droite
contre les trente-cinq heures, le pire étant encore ce Grand cerveau malade d’Alain
Juppé, qui nous conduira, droit dans ses bottes , à un blocage total pire que
1995
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Commentaires
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.