Viv(r)e la recherche se propose de rassembler des témoignages, réflexions et propositions sur la recherche, le développement, l'innovation et la culture



Rechercher dans ce blog

mercredi 24 novembre 2021

Les Pays-Bas vers un programme nucléaire ? Le rapport de KPMG

En Septembre 2020, le Parlement néerlandais présentait un rapport sur « le  Rôle possible du nucléaire dans le futur mix énergétique néerlandais ». Principales conclusions :

« Le nucléaire est une énergie sûre, pilotable et à faible empreinte carbone, capable de fournir un flux continu et sécurisé d’électricité pour les générations à venir. Pendant plusieurs décennies, l’énergie nucléaire a été l’une des sources d’électricité les moins chères et  c’est bien toujours le cas pour les unités aujourd’hui  en fonctionnement. Comme le montrent de nombreuses études internationales, la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires en exploitation est  de toutes les alternative disponible celle qui  réduit les émissions de CO2 au coût le plus bas. »

«  Le cas  Chinois (EPR de Taishan) nous montrent que les problèmes de construction du nouveau nucléaire peuvent être résolus, ce qui permet réduire considérablement, voire de supprimer  les dépassements de temps et de coûts…Si un pays comme les Pays-Bas choisit une usine d’un nouveau prototype auprès d’un fournisseur expérimenté, on peut maintenant s’attendre à ce que les risques de retards majeurs dans la construction et de dépassements de coûts soient limités. »

Ce rapport n’a pas été laissé sur un coin de table. Depuis les Pays-Bas se sont lancés dans la mère de toutes les batailles pour le financement du nucléaire, en réclamant l’inclusion du nucléaire dans la taxonomie européenne.

https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/10/taxonomie-les-pays-bas-poussent.html

Buts et principaux résultats de l’étude KPMG : un choix gouvernemental clair et stable, une technologie éprouvée (la GEN III)

KPMG, Nuclear Energy  market consultation, july 2021

Dans ce contexte, un rapport a été demandé au cabinet de conseil KPMG pour répondre aux question suivantes : Dans quelles conditions les acteurs nationaux et internationaux du marché sont-ils prêts à investir dans des centrales nucléaires aux Pays-Bas? - Quel soutien public est nécessaire pour cela? - Quelles régions sont intéressées par  la construction d’une centrale nucléaire? ― Comment les Pays- Bas peuvent-ils effectuer leur retour dans le  nucléaire de manière économique aussi optimale que possible.

KPGM a interrogé 41 acteurs du marché national et international, y compris des entrepreneurs, des fournisseurs de technologies de base, des opérateurs, des spécialistes du démantèlement et des financiers. Des entretiens ont également été menés avec 14 régions néerlandaises.

L’énergie nucléaire joue actuellement un rôle mineur dans l’approvisionnement en électricité des Pays-Bas, la centrale de Borssele - qui a commencé à fonctionner en 1973 - fournissant environ 3% de la production totale. L’exploitant actuel, EPZ, a appelé à une prolongation de son exploitation au-delà de 2033 et/ou à la construction de deux nouveaux grands réacteurs sur le site afin d’aider les Pays-Bas à atteindre leurs objectifs énergétiques et climatiques.

Pour KPMG, Les acteurs du marché - tels que les entrepreneurs, les opérateurs et les fournisseurs - investiraient dans la construction de nouvelles capacités de production nucléaire aux Pays-Bas à condition que le gouvernement contribue au coût et qu’il y ait un soutien public. L’étude a révélé que les acteurs du marché accordent une importance considérable à l’existence d’une politique gouvernementale stable en ce qui concerne l’énergie nucléaire et en ont une  condition préalable à la construction de toute nouvelle construction nucléaire. L’importance du financement, les risques substantiels et les délais de construction ont pour conséquence que la participation du gouvernement semble inévitable

La consultation a révélé que la plupart des entreprises potentiellement impliquées ont souligné l’importance de choisir une technologie de réacteur éprouvée qui réponde aux exigences de sûreté applicables. Les petits réacteurs modulaires (SMR) sont considérés comme une option intéressante, mais ils ne sont pas encore disponibles dans le commerce. Un SMR basé sur une conception de réacteur de génération III + devrait prendre environ 10 ans pour être autorisé et construit, et  une conception éprouvée ne sera disponible qu’en 2027-2035 au plus tôt. Ce sera encore plus long pour des design plus novateurs.

Les acteurs du marché ont déclaré que les réacteurs de génération IV (surgénérateurs comme le programme Astrid) présentent des avantages potentiels en termes de sûreté et / ou de production de déchets, mais ne devraient pas être commercialisés avant 2040, ce qui les mettra sur le marché trop tard pour atteindre l’objectif climatique de 2050.

Les acteurs du marché ont donc largement indiqué que les Pays-Bas devraient opter pour un réacteur de génération III+ maintenant et en temps voulu pour un réacteur de génération IV une fois que la technologie aurait été prouvée

Focus sur quelques  points de rapport

1a) Consensus sur une technologie éprouvée, la GENIII et des SMR dans le futur

Les investisseurs potentiels  soulignent  l’importance du choix d’une technologie éprouvée qui répond aux exigences de sûreté applicables, et il existe un large consensus selon lequel les Pays-Bas devraient opter pour un réacteur de génération III, et, bénéficiant de l’expérience des projets en cours, ils s’épargnerait les problèmes des prototypes, dépassements de coûts et retards…

Une génération II modernisée et standardisée peut  paraître une option économiquement attrayante, car moins chère et déjà éprouvée. Cependant, les investisseurs la considère comme irréaliste en termes de soutien social, car ne répondant pas aux exigences de sécurité supplémentaires requises après Fukushima.

Les réacteurs de génération IV (Surgénérateurs, Astrid) présentent un intérêt certain avec des avantages potentiels en termes  de sécurité et/ou de déchets, mais ne devraient pas entrer sur le marché avant 2040, de sorte qu’ils arriveront trop tard pour les objectifs climatiques de 2050.

Les SMR (Small Modular Reactors, entre 10 et 300 MW) sont considérés par les investisseurs potentiels comme une option intéressante. En raison de leur plus petite taille, de leur conception modulaire et de leur construction partiellement en usine, ils pourraient être construit plus rapidement, et de manière plus économique. Cependant, il existe encore trop d’incertitudes : ils en sont encore au stade du prototype avec tous les problèmes potentiels, le business model est considéré comme révolutionnaire (c’est pas un compliment !) et les délais pour respecter les objectifs climatiques de 2050 sont trop courts. Les décideurs craignent également un soutien public limité pour la constructions de plusieurs réacteurs répartis dans tout le pays.

 Le rapport recommande aux Pays-Bas d’attendre  la maturité et la preuve de concept des SMR, puis de choisir un développeur performant capable de construire des SMR  sur plusieurs sites ou de garantir vous-même la production en série.

1b) SMR : les projets en compétition

Coût de production des SMR :

1c) Vers un EPR ? Choisir des GENIII déjà construits ou en construction

Il existe donc  un large consensus parmi les investisseurs potentiels pour un réacteur de génération III+ de conception éprouvée. Afin d’éviter les problèmes liés aux prototypes et de profiter de l’expérience accumulée sur des projets en cours,  les Pays-Bas devraient  de choisir parmi les conceptions de génération III+ dont un (certain nombre de) réacteurs ont déjà été construits ou sont en construction : EDF (Olkiluoto, Flamanville, Hinkley Point C), Westinghouse (Vogtle), KEPCO (Barakah) et Rosatom (Ostrovets, Akkuyu, Hahnikivi, Paks II).

Les investisseurs potentiels indiquent que toutes les conceptions ci-dessus leur paraissent robustes. Rosatom a été mis hors champ d’application à la demande du ministère des Affaires économiques, tout comme les technologies des réacteurs chinois. Un choix final ne pourra être fait qu’en 2021-2023 lorsqu’un ou plusieurs réacteurs de toutes conceptions seront réalisés. ―

2) Coût et et financement du nouveau nucléaire

Au fur et à mesure que les conceptions de ces réacteurs de génération III+ mûrissent et que les connaissances et l’expertise se développent en Europe, les coûts devraient significativement diminuer. On estime qu’ il est possible d’économiser jusqu’à ~ 28-40% par MW  par rapport à un réacteur FOAK  (prototype)dans la construction d’une centrale nucléaire à deux réacteurs basée sur une conception éprouvée : effet prototype : -20/-30% (effets d’apprentissage sur la conception et la construction ; effet  productivité lors de construction en série 2% dans un deuxième réacteur, 8-13% dans un cinquième réacteur, sur même site, gain supplémentaire de  6-8%. S ces chiffres proviennent de situations réelles observées en France et dans les Emirats Zrabaes Unis. La NEA, quant à elle, considère  que les économies réalisées grâce à la construction en série peuvent atteindre ~ 33-45% par MW par rapport à un prototype.


2a) Les conditions de financement un cadre stable : Une politique stable et cohérente en matière d’énergie nucléaire est une condition préalable importante pour les financiers privés.

Le développement d’une nouvelle centrale nucléaire est un projet à long terme. Compte tenu des exemples récents de changements de politique, une politique stable et un soutien politique sont essentiels pour les financiers privés

La perception du risque des financiers privés est alimentée par plusieurs exemples récents de changements de politique en Europe, tels que la décision de l’Allemagne, à la suite de Fukushima, de fermer toutes les centrales nucléaires allemandes d’ici 2022. (En conséquence, six centrales nucléaires doivent fermer prématurément. Cette affaire a eu de longues conséquences (juridiques), avec un règlement de 2,4 milliards d’euros en mars 2021 ; la loi interdisant le charbon dans la production d’électricité qui a conduit à la fermeture des centrales au charbon néerlandaises, y compris certaines centrales mises en service en 2015 et 2016, d’ici 2030;  Le changement de politique de l’Espagne pour les tarifs sur l’énergie durable

Le seul soutien politique seul ne suffira pas, il faudra un  signal fort par une participation publique au projet. Par ailleurs, les financiers privés exigeront très probablement des garanties de résiliation anticipée du projet et  des  compensations financières en cas de cessation anticipée (c’est-à-dire avant l’achèvement de la construction ou trop tôt après le début de l’activité)

2b) Les modes de financement : plutôt le RAB  que le  Mankala ou le Cfd

Sur la base des projets existants et des initiatives en cours, diverses structures de financement peuvent être observées sur le marché

Dans les années soixante-dix, le modèle Mankala a été développé en Finlande, dans lequel les clients industriels locaux de l’énergie investissent dans la centrale nucléaire, souvent en combinaison avec le financement du fournisseur. Bien qu’il s’agit essentiellement d’un modèle à financement privé, dans la pratique, les autorités locales sont souvent impliquées.

Les contrats de différence (« CfD ») et  les contrat d’achat d’électricité (« PPA ») sont des modèles qui permettent d’assurer  la sécurité des revenus, mais  ne réglementent pas explicitement la répartition des autres risques. En conséquence, des garanties supplémentaires seront souvent demandées à cet effet (au gouvernement).

Le  Royaume-Uni semble se tourner modèle de base d’actifs réglementés (« modèle RAB ») qui peut être appliqué à l’énergie nucléaire, comme c’est déjà le cas pour des projets d’infrastructure à grande échelle. Le modèle RAB fournit un rendement garanti sur la valeur de l’actif réglementé, répartit les risques entre les financiers et le gouvernement et assure un flux de revenus pendant la construction.)

Les diverses stratégies de financement

De façon plus précise :

Un CfD offre une sécurité de revenus jusqu’à un certain prix d’exercice. Un CfD fonctionne sur la base d’un prix d’exercice par MWh que l’exploitant de la centrale nucléaire recevra à l’avenir pour l’énergie produite. Si le prix du marché est inférieur à ce niveau, la contrepartie (c’est-à-dire le gouvernement) compense cette différence en faveur de l’opérateur et si le prix du marché est supérieur au prix d’exercice, c’est en faveur de la contrepartie (c’est-à-dire le gouvernement). Le prix d’exercice dépend également des risques que prennent à leur charge les financiers privés  Un CfD n’offre qu’une sécurité de revenus et ne couvre pas les risques tels que le déclassement, le risque de permis et certains risques de cygne noir pendant la construction. A l’avenir, Les financiers privés demandent des garanties supplémentaires.

Un accord tel que celui de Hinkley Point C, où EDF gère l’intégralité du risque de construction et reçoit un prix d’exercice qui tient compte de ce risque d’investissement, n’est pas considéré comme réaliste par les acteurs du marché pour les projets futurs.

Un PPA est un accord volume/prix à long terme entre un fournisseur d’énergie et un client. Grâce à un achat d’énergie prédéterminé à un prix fixe, un PPA offre une sécurité (partielle) des revenus. Des accords fixes et préalables sont conclus sur l’achat et (éventuellement) le prix entre un fournisseur d’énergie et un client d’énergie pour une période de 10 à 15 ans. Comme un CfD, un PPA n’offre qu’une sécurité de revenus. La principale différence entre un CFD et un PPA est qu’un PPA comprend également une obligation de volume, en plus des accords de prix. Ce modèle a été appliqué en Turquie (Akkuyu). Aux Pays-Bas, un accord similaire est  considéré comme impossible, puisqu’il n’existe pas de  production publique

RAB (Regulated Asset Based) : Afin de répondre aux besoins des financiers privés en matière de rendements au début du projet, de nombreux acteurs du marché proposent un modèle RAB. Les principaux avantages du modèle RAB pour un investisseur : des revenus sont assurés dès la phase de construction ; un degré élevé de certitude quant au rendement en fournissant une redevance fixe à un niveau de coût raisonnable qui comprend l’amortissement des investissements, les coûts d’exploitation et les coûts de déclassement ;  la possibilité d’introduire un « plafond de financement », un maximum du montant d’investissement à apporter par les financiers au-delà duquel les augmentations de coûts supplémentaires sont supportées par le gouvernement.

C’est ce modèle qui est privilégié par les investisseurs potentiels, aux Pays-Bas comme au RU. Cependant, il n’a jamais été appliqué aux centrales nucléaires auparavant, mais à des projets d’infrastructures de long terme, mais avec un niveau de risque faible.

2c) Financement et taxonomie : l’inclusion du nucléaire dans une taxonomie verte

Les investisseurs potentiels soulignent qu’une taxonomie verte européenne incluant le nucléaire  constituerait un signal fort de stabilité politique et aurait pour conséquence  un profil de risque plus faible, et  un impact positif sur les rendements demandés

Cependant, la Commission Européenne  semble très réticente et procrastine. A la suite de la motion Eckert (cf. https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/10/taxonomie-les-pays-bas-poussent.html), le gouvernement néerlandais agit en concertation avec d’autres pays européens dont la France pour obtenir l’inclusion du nucléaire dans la taxonomie. Si cette action n’aboutissait pas, ou trop lentement et de manière insatisfaisante, le gouvernement néerlandais pourrait envisager d’introduire lui-même une taxonomie verte, comme le Royaume-Uni a décidé de le faire en novembre 2020. On ne sait pas quelle valeur les financiers privés internationaux attacheront à une taxonomie locale.

2d) Licences et autorités de régulation

Les acteurs du marché préconisent principalement la transparence, l’harmonisation et la prévisibilité dans le processus d’octroi de licences néerlandais.

Pour une centrale nucléaire basée sur une conception éprouvée, les prévisions de délais pour l’obtention d’un permis, basées sur les trajectoires étrangère,  vont de 3 à 5 ans. Pour un réacteur de génération IV, ou un SMR, les acteurs du marché  s’attendent à un processus plus long, en l’absence d‘un cadre établi. Ils sont prudemment optimistes quant au fait que l’adhésion à d’autres autorités de délivrance de licences entraînera des économies de coûts. L’ANVS indique qu’il est aussi ouvert que possible à l’harmonisation internationale, mais qu’il ne peut exclure que des changements interviennent en cours de construction.

Dans un passé récent, les dépassements de coûts et de temps dus au processus d’octroi de permis ont été courants….

 3) Les localisations possibles

Sur la base des entretiens et des conditions préalables pertinentes, deux  Provinces ont affirmé leur intérêt pour accueillir des centrales nucléaires.

 La première est la Zelande, autour de Borssele où se situe le seul réacteur nucléaire des Pays-Bas, un REP de 485MW. Cet emplacement bénéficie d’un soutien local, semble être le plus prometteur du point de vue du refroidissement et bénéficie de bonnes  connexions au réseau. Il y aurait à Borssele de la place pour deux  grandes centrales nucléaires (1 200-1 500 MW) en raison de l’expansion déjà prévue du réseau de 380 kV (ligne pointillée rouge). L’électrification possible de l’industrie locale pourrait  renforcer l’intérêt de l’implantation. Selon l’enquête, la province a une expériences positive avec la centrale nucléaire actuelle et est en faveur de l’utilisation de l’énergie nucléaire dans le bouquet énergétique. Il existe un large soutien politique en faveur de la réalisation d’une nouvelle centrale nucléaire et un large soutien social. Les habitants sont habitués à vivre près d’une centrale nucléaire et aucun problème important n’est rencontré avec elle. Beaucoup de connaissances et d’expertise locales en matière d’énergie nucléaire sont déjà présentes, et il y a un désir de maintenir cette expertise et la chaîne de valeur existante.

L’autre province clairement intéressée est le Brabant Septentrional La province indique qu’elle s’attend à ce que l’énergie nucléaire joue un rôle dans le bouquet énergétique après 2030, pour atteindre la cible de décarbonation en 2050. La capacité de transport est adaptée, mais la Province est assez densément peuplée. Elle est assez dynamique dans le domaine de la recherche nucléaire, et se déclaré intéressée par des SMR ou des GenIV surgénérateurs (en particulier filière thorium)

Trois autres provinces ont déclaré n’avoir avoir aucune oppostion et considèrent que la décision est de la responsabilité  nationale :  Overijssel, Utrecht,  Zuid-Holland

jeudi 18 novembre 2021

Shidao Bay et ses réacteurs : on va en en entendre parler !

Bienvenue au HTR-PM

Le 14 novembre 2021 la Chine a annoncé à Shidaobay (Shidaowan) la divergence d’un  second SMR de Generation IV. Le premier avait divergé en septembre. Il s’agit des premiers prototypes de SMR commerciaux de GEN IV.

Rappelons que la GENIV permet la fermeture du cycle du combustible nucléaire, c’est-à-dire le recyclage et la réutilisation du combustible usé.

Le HTR-PM (200MWe) est un petit réacteur nucléaire modulaire dérivé du HTR10 en cours de développement en Chine. Il s'agit donc d’un réacteur à lits de boulets (le combustible est constitué de billes de graphite qui contiennent comme combustible de petits grains de céramique d’uranium enrichi à 8.5%). Le caloporteur est l‘hélium, chauffé à 750°C.

Il est destiné principalement à remplacer les centrales à charbon et au fuel pour le chauffage des agglomérations et fera de la cogénération vapeur.  La cuve du réacteur mesure environ 25 m de haut et pèse 700 tonnes. Les Chinois lui prévoient un potentiel gigantesque à l‘exportation.

Dans les plans figurent également un réacteur plus puissant, le HTR-PM600,  prévu avec une capacité de 600 MWe en regroupant six réacteurs HTR-PM.

Pour modérer la réaction en chaîne, les réacteurs à lit de boulet utilisent du graphite pyrolitique à la place de l'eau  (obtenu par pyrolyse d’hydrocarbures, un des meilleurs modérateurs et conducteur thermique). Comme caloporteur, il utilise un gaz semi-inerte tel que l'hélium, l'azote ou le dioxyde de carbone lequel porté à très haute température (1000°C) actionne directement une turbine. Comparé au réacteur à eau pressurisée, cette technologie ne nécessite pas le système complexe contrôlant la vapeur d'eau. De plus, l'efficacité du transfert d'énergie (ratio de la puissance électrique sur la puissance thermique) est plus importante. A cause de son inertie thermique, le cœur du réacteur ne peut jamais atteindre une température à laquelle il pourrait fondre : le réacteur est sûr par conception de par sa faible puissance volumique (6,5 W/cm3) et par la grande quantité de modérateur autour du combustible.

La critique la plus courante provient du caractère inflammable du graphite, ce qui induit un risque de fuite du combustible nucléaire dans les fumées d'un incendie. Ceci se produit par l’accumulation de défauts cristallins dans le graphite sous l’effet du flux neutronique (effet Wigner).  Pour l’éviter, le réacteur peut être opéré au-dessus de la température de recuit.

Comme le combustible est contenu dans du graphite, le volume des déchets nucléaires est plus important.

 Par ailleurs, on a pas fini d’entendre parler de Shidao bay, où la Chine développe sa propre version de l’AP1000, le CAP 1400 aussi appelé Guo He ( en gros, l’équivalent d’un EPR)

Ben voilà. Rappelons que la France, à la fin des années 2000 avait accumulé, sur une cinquantaine d’années, une expérience importante dans la conception et l’exploitation de réacteurs de GENIV, sans équivalent parmi les pays occidentaux, sur une filière différente, les réacteurs à neutrons rapides. Aujourd’hui, deux réacteurs de ce type sont en exploitation en Russie , à la centrale de Beloyarsk, les BN-600 et BN-800. Merci aux politiciens français et à leurs compromissions avec les soi-disant écolos qui ont conduit à l’abandon de SuperPhenix et d’Astrid.

Pour plus de détail, https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/08/reponse-thierry-breton-non-le-nucleaire.html ; https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/08/reponse-thierry-breton-non-le-nucleaire_10.html

Ben voilà. Rappelons que la France, à la fin des années 2000 avait accumulé, sur une cinquantaine d’années, une expérience importante dans la conception et l’exploitation de réacteurs de GENIV, sans équivalent parmi les pays occidentaux, sur une filière différente, les réacteurs à neutrons rapides. Aujourd’hui, deux réacteurs de ce type sont en exploitation en Russie , à la centrale de Beloyarsk, les BN-600 et BN-800. Merci aux politiciens français et à leurs compromissions avec les soi-disant écolos qui ont conduit à l’abandon de SuperPhenix et d’Astrid.

https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/08/les-parlementaires-de-lopecst-denoncent.html



dimanche 7 novembre 2021

RTE, scenarios « Futurs énergétiques 2050 : quelques compléments

Suite des billets sur ce blog, quelques note supplémentaires laissées de côté ou insuffisamment traités dans les deux  blogs précédents

https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/11/les-futurs-energetiques-2050-de-rte.htmlhttps://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/11/rte-scenarios-futurs-energetiques-2050.html

 1) Capture et stockage du carbone« Puisque les énergies fossiles ne sont plus une option, que la solution du captage et stockage du carbone (CCS) n’est pas privilégiée pour des raisons de maturité technologique, d’acceptabilité et de disponibilité technique » (Chap1 p.8)

 Remarque :ben ça, on peut en discuter. En terme d’utilité, cette technique a fait l’objet de commentaires plutôt positifs dans le dernier rapport du GIEC (Climate Change 2021) :

« Toutes les voies analysées limitant le réchauffement à 1,5 °C d’ici 2100 sans dépassement ou avec dépassement limité comprennent l’utilisation du CCS dans une certaine mesure pour compenser les émissions anthropiques de CO2… Des options de CCS abordables et acceptables sur le plan environnemental et social à l’échelle nécessaire bien avant 2050 sont un élément important des trajectoires cohérentes à 1,5 °C »

Cf . https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/08/le-carbone-capture-and-storage-une.html.

Quant à l’acceptabilité et la disponibilité techniques, elles ne posent pas de difficultés fondamentales ou techniques majeures (beaucoup moins que l’hydrogène ou les scénarios 100%ENR) et la recherche développement progresse à grand pas.  J’entends bien que RTE entend se passer totalement de gaz pour la production électrique, ça aussi c’est un sacré pari quand on voit la place dans ses scénarios du biogaz ou de l’hydrogène. De toute façon, le CCS sera développé.

2) Sobriété :insuffisant

« l’activation simultanée des leviers du scénario sobriété n’apparaît pas de nature à infléchir la tendance prévisionnelle d’augmentation de la consommation d’électricité dans un cadre de neutralité carbone. » (C3p.51)

3) Scenario 100%ENR (M0) :en fait, non !

« Il ne peut exister aucune ambiguïté sur le caractère très ambitieux de tels rythmes, qui dépassent les meilleures performances européennes en la matière, et qui semblent aujourd’hui difficilement atteignables au vu des rythmes constatés et projetés et des difficultés d’acceptabilité des nouveaux projets. La faisabilité technique de M0 est en outre conditionnée aux différentes conditions listées dans le rapport publié conjointement par RTE et l’Agence internationale de l’énergie en janvier 2021. »

Non seulement, il est beaucoup plus cher, mais en plus, on en reste aux conclusions du rapport RTE/IAE de janvier 2021. Soit une quasi impossibilité :

Ce rapport listait 4 conditions essentielles :

(1) l’arrivée à maturité de solutions technologiques permettant de maintenir la stabilité du système électrique sans production conventionnelle : 2)  le déploiement à grande échelle des flexibilités : flexibilité de la demande, les capacités d’effacement, le pilotage « intelligent » de la consommation…(3)  la maîtrise des enjeux de développement des réserves techniques (« Bien que le dimensionnement des réserves opérationnelles et la responsabilité d’équilibre soient des enjeux bien identifiés dans le débat actuel sur l’architecture de marché, ce point n'a pas suscité une forte attention dans le cadre des travaux prospectifs sur les scénarios de long terme. Ainsi, l’effet de l'éolien et du photovoltaïque sur les réserves opérationnelles n'est généralement pas pris en compte dans les publications académiques sur le déploiement à grande échelle des EnR . (4) une mise à niveau des réseaux électriques nationaux.

Cf. https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/02/rapport-iearte-conditions-et-prerequis.html

Les trois premières n’ont à ce jour aucune solution industrielle en vue, et la quatrième (le déploiement des réseaux) se heurte à un refus d’ acceptabilité sociale très forte (cf l’expérience allemande de l’energiewende : sur 3600 km de réseau supplémentaire prévus pour  2015, seuls 17% étaient réalisés en 2019 ; or l’Energiewende complète exigerait 11.000 km ! En réponse, la loi a été modifiée pour limiter les recours des riverains…)

4) Besoins de flexibilité :en explosion ! Gaz vert, vraiment ?

 

À l’horizon 2050, les besoins totaux de nouvelles flexibilités sont importants dans tous les scénarios et se situent entre 28 GW et 68 GW.( allez, une vingtaine d’EPR ?)

 

Le besoin de modulation intra-journalier augmente très fortement jusqu’à +600% à l’horizon 2060 dans les scénarios avec beaucoup de production solaire, sous l’effet principal du cycle jour/nuit de la production solaire…

 

Le besoin de modulation intra-hebdomadaire augmente très fortement, jusqu’à +300% dans les scénarios avec un fort développement de l’éolien, du fait de la variabilité d’un jour sur l’autre de la production éolienne

 

En second lieu, les scénarios nécessitent une flexibilité accrue de la demande…il peut être nécessaire de construire de nouvelles unités thermiques (cycle combiné, turbine à combustion) devant nécessairement utiliser des combustibles décarbonés..




 

Et c’est là qu’arrive…

 

5) Le problème du biogaz et de l’hydrogène

 

« La SNBC prévoit ainsi de l’ordre de 150 TWh de biométhane accessible en France à long terme (à comparer aux 480 TWh de consommation actuelle de gaznaturel), tandis que d’autres études suggèrent même que le gisement pourrait être plus limité… . Une alternative consistant à transporter le gaz par camions (biométhane « porté ») est également possible mais présente plusieurs inconvénients (nuisances, consommation énergétique du transport, etc.).l’hypothèse  de référence consiste à considérer (i) un volume de biogaz utilisable pour la production d’électricité inférieur au niveau prévu par la SNBC et (ii) une utilisation dans des installations de cogénération non flexibles .

 

Le couplage sectoriel avec l’hydrogène s’impose comme l’un des moyens les plus pertinents pour assurer le bouclage des scénarios en limitant l’utilisation de biométhane, mais nécessite que les infrastructures de production et de stockage associées à l’hydrogène soient bien dimensionnées…

 

Cependant, la boucle power-to-hydrogen-to-power est caractérisée par un rendement de l’ordre de 40% au maximum, nettement plus faible que celui du stockage par batterie ou des STEP (mais meilleur que celui d’autres alternatives de stockage de masse via le méthane, l’éthanol ou l’ammoniac). Elle nécessite par ailleurs de maîtriser l’ensemble de la chaîne logistique (électrolyse, transport, stockage, production d’électricité dans des centrales dédiées) à une échelle industrielle et de bien dimensionner les infrastructures de stockage. »

Encore une fois, le comité de prospective de la CRE se montrait beaucoup moins optimiste sur l’hydrogène, compte-tenu des difficultés et des dangers de sa fabrication (compression), stockage et distribution

 

Cf. sur ce blog

https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/07/comite-de-prospective-de-la-cre-le.html, https://vivrelarecherche.blogspot.com/2020/09/les-enjeux-de-lhydrogene-le-rapport-de.htm

De fait, dans le chapitre 9, RTE douche un peu l’enthousiasme sur l’hydrogène :

Un effet de mode ? : La place de l’hydrogène dans les scénarios de neutralité carbone est l’un des grands enjeux actuels de la prospective énergétique. Ce renversement est d’autant plus spectaculaire que l’hydrogène tenait jusqu’alors une place marginale dans les stratégies énergétiques et climatiques mondiales.

Des stratégies divergentes : « la stratégie française consiste à produire l’hydrogène sur le territoire national selon le principe de souveraineté énergétique posé par la SNBC, d’autres pays comme l’Allemagne comptent spécifiquement sur des imports d’hydrogène, depuis des pays européens ou extra-européens, pour atteindre la neutralité carbone (NB en fait surtout africains avec une vision quelque peu néocoloniale et qui pose de sacrés problèmes logistiques) »

Un avenir en fait très incertain : « Des acteurs comme Agora Energiewende ou l’IDDRI suggèrent de concentrer dans un premier temps le développement de l’hydrogène sur des usages privilégiés dans l’industrie et indiquent par ailleurs que la construction d’un réseau d’hydrogène transeuropéen n’est pas la priorité. D’après ces acteurs, ce type d’infrastructures présente un risque de coûts échoués important, en l’absence de vision claire et consensuelle sur les projections de demande d’hydrogène…

Cette option admet néanmoins des prérequis importants et est soumise à des incertitudes technologiques (la mise au point des turbines à hydrogène est encore en cours d’expérimentation) et surtout industrielles : disponibilité de stockages d’hydrogène (stockage salins notamment) et développement d’un réseau d’hydrogène. »

Et bien sûr, la nécessité du recours à l’hydrogène pour équilibrer le réseau est très très dépendante des scenario

Et pour finir, sur les coûts : « Le prix de revient du gaz vert est déterminé dans les «Futurs énergétiques 2050» de manière endogène : il dépend du prix de l’électricité utilisée pour produire de l’hydrogène, et donc du mix électrique français…. Les coûts de production d’électricité à partir de thermique décarboné émergent dans tous les cas à un niveau élevé et très largement supérieur au coût complet des énergies renouvelables et du nucléaire. Ils atteignent un coût variable de production thermique pouvant être compris entre 120 €/MWhe dans le meilleur des cas (cycle combiné fonctionnant avec un gaz à 70 €/MWhgaz) à 400 €/MWhe dans le pire (turbine à combustion utilisant du méthane de synthèse à 160 €/MWhgaz).

 

Or prévient RTE :  « l’atteinte de l’objectif de décarbonation du système électrique est en partie conditionnée à la faculté de décarboner totalement le gaz utilisé dans les centrales thermiques, notamment dans les scénarios sans nouveau nucléaire »

 

6) Les ENR marines : déjà très chères et beaucoup d’incertitudes

 

« Des besoins d’investissements en forte hausse pour assurer le raccordement des parcs éoliens en mer Les scénarios M nécessitent une accélération extrêmement forte du rythme de raccordement (entre 2 GW/an et 3 GW/an sur la période 2035-2050 contre moins d’un GW par an au rythme actuel). Cette accélération se traduit directement dans les dépenses d’investissement pour le raccordement : celles-ci atteignent ainsi de l’ordre de 2 Md€/an dans les scénarios M sur la période 2035-2050. D’une façon générale, les coûts de raccordement des énergies marines sont soumis à de fortes incertitudes, supérieures à celles rencontrées pour des types de réseaux plus conventionnels. »

Le développement de l’éolien en mer en France ne pourra pas suivre le même chemin que celui des pays riverains de la mer du Nord. En effet, les caractéristiques de profondeur au large de certaines côtes françaises conduisent à privilégier l’éolien flottant notamment sur les façades maritimes bretonnes et méditerranéennes (caractérisées par des profondeurs chutant rapidement au large des côtes). À ce stade, la technologie des postes flottants n’est pas maîtrisée sur le plan industriel. Dans les «Futurs énergétiques 2050», tous les parcs envisagés à 2050, y compris les parcs flottants en Méditerranée ou en Bretagne, sont donc raccordés avec des postes électriques en mer qui seraient posés sur des fondations ancrées au fond marin par des pieux («Jacket»).

Les débats publics menés sur les différentes façades depuis 2019 pour les prochains appels d’offres mettent ainsi en évidence des demandes récurrentes d’éloigner les parcs des côtes, à des distances de plusieurs dizaines de kilomètres, afin de limiter les impacts sur l’environnement, la concurrence d’usages pour la pêche ou encore le tourisme et pour tenir compte des enjeux paysagers. Cet éloignement permet également de bénéficier de vents plus forts et stables »

 

6) Evaluation du coût du nucléaire : des options maximisées

 

Prolongation du nucléaire historique : Le Bilan prévisionnel 2017 avait déjà établi que la prolongation de la durée de vie des réacteurs était une option compétitive. Cette conclusion est largement confortée par les nouvelles évaluations réalisées dans le cadre des «Futurs énergétiques 2050.

Rapportées au nombre de visites décennales projetées (ou plus précisément à la puissance totale des réacteurs concernés par des visites décennales), les références de coûts conduisent dans tous les cas à un ordre de grandeur similaire d’investissements d’environ 600 à 650 k€/MW pour prolonger l’exploitation des réacteurs de dix ans (NB :soit 50 milliards pour l’ensemble du Grand Carénage-22 réacteurs).

«  Même en intégrant de manière rigoureuse la totalité des investissements nécessaires à la poursuite de l’exploitation du nucléaire existant au-delà de 40 ans et au changement des gros composants des centrales, les coûts de production à engager.se situeraient autour de 30 à 40 €/MWh en coût de prolongation (hors remboursement et rémunération de l’investissement initial), soit un niveau plus faible que celui de nouvelles installations renouvelables à cet horizon (40-80 €/MWh). Ceci fait de la poursuite de l’exploitation des réacteurs existants l’option économique la plus compétitive à moyen terme, et ce dans toutes les configurations étudiées »

                                                    

Les EPR : 4700 €/kW pour des EPR2 de série. : « Pour l’EPR de Flamanville, les dernières estimations communiquées par EDF prévoient un coût total de construction de l’ordre de 12,4 Md€2015 (environ 13 Md€2020), soit 7900 €2020/kW. Début 2021, EDF a par ailleurs revu le coût du projet Hinkley Point C en Grande Bretagne à 25-26 Md€2020, soit 7800 à 8100 €2020/kW

S’agissant du nucléaire historique, pour les paliers P4 et N4, des gains de 25 à 30% avaient été constatés entre les têtes de série industrielles et les réacteurs construits ultérieurement

Ces projections conduisent à retenir, dans la trajectoire de référence (coût médian intégrant déjà des provisions pour risque), des coûts de construction de l’ordre de 5500 €/kW pour les premiers (soit environ 9 Md€ par tranche EPR en comparaison des 12,4 Md€2015 correspondant à la dernière estimation pour l’EPR de Flamanville), avec une perspective de baisse à 4700 €/kW pour des EPR2 de série.

 

 Le démantèlement : Les charges pour démantèlement sont  des coûts prévisionnels intégrés dans les provisions à constituer à la construction des réacteurs

La loi française prévoit que ces coûts soient provisionnés par l’opérateur pour la gestion des charges futures20 : ils sont donc bien pris en compte dans l’estimation des coûts complets annualisés au titre de l’amortissement des coûts passes : les coûts liés au démantèlement pour les futurs réacteurs s’établit à environ 290 M€ de provisions à constituer à la mise en service de chaque réacteur de type EPR2, soit environ 180 €/kW de CAPEX initiaux. Dans l’analyse de RTE, ce montant est ajouté au coût des investissements à amortir à la mise en service des réacteurs

 

Les déchets : « l’hypothèse retenue pour les «Futurs énergétiques 2050» se fonde sur une évaluation volontairement conservatrice intégrant un principe de prudence, de sorte à ce que la comparaison entre les scénarios M et N ne puisse souffrir d’un risque de sous-estimation des charges futures liées au stockage des déchets nucléaires »

 

« À l’horizon 2030, des mesures sont nécessaires pour éviter la saturation des piscines existantes, qui limiterait la faculté à entreposer les combustibles usés et pourrait contraindre le fonctionnement de certaines centrales du parc nucléaire. À brève échéance, la densification des piscines de La Hague permettra d’en augmenter la capacité d’entreposage de 30%. Malgré cela, une piscine additionnelle sera nécessaire, pour un montant évalué entre un et deux milliards d’euros. Cet investissement est intégré à l’évaluation économique des scenarios (Chap11p.462) »

 

Cigéo : « les coûts considérés sont de 31 Md€2020  au périmètre de l’inventaire de référence » ;  à ceci s’ajoute «  une majoration supplémentaire de 10 Md€ pour prendre en compte la possibilité d’accueillir environ 20000 tonnes de déchets supplémentaires »

 

 

7°) Les points de vigilance sur la décarbonation

 

- l’atteinte de l’objectif de décarbonation du système électrique est en partie conditionnée à la faculté de décarboner totalement le gaz utilisé dans les centrales thermiques, notamment dans les scénarios sans nouveau nucléaire

 

- En cas de non-atteinte des objectifs de développement des énergies renouvelables ou du nucléaire,il existe  un risque de compensation par des centrales au gaz fossile

 

- un scénario de «substitution» plutôt que «d’addition» entre énergies bas-carbone conduit à faire augmenter les émissionss.  Seule une logique «additive» entre les énergies bas-carbone permet au système électrique de pourvoir à court/moyen terme à des besoins en augmentation

 

Traduction :  remplacer du nucléaire par de l’éolien est une très, très mauvaise idée  qui conduirait immanquablement à l’échec de la décarbonation. Ca s’explique très bien ainsi :


8) Dépendance et matériaux stratégiques: de nombreuses criticités, surtout pour les ENR

 

C’est un chapitre très développé dans le rapport final, et un vrai sujet d’inquiétude déjà traité notamment par l’Ademe

Sur ce blog :

https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/06/le-photovoltaique-choix-technologiques.html

https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/01/les-reseaux-electriques-choix.html

 

De nombreuses ressources nécessaires à la transition du système énergétique (cuivre, lithium, cobalt, Aluminium, Silicium…) présentent des enjeux de criticité réels, qui peuvent être de multiples natures et spécifiques à chaque ressource : volume des réserves connues, monopole, conflit d’usage et importance économique, substituabilité, impacts environnementaux liés à leur extraction…

 

Lithium : très critique : « Les réserves mondiales de lithium connues à l’heure actuelle apparaissent limitées en regard de la croissance de la consommation. Le scénario de référence décrit dans les «Futurs énergétiques 2050» prévoit une demande cumulée en lithium d’environ 1 million de tonnes sur les trente prochaines années pour électrifier 95% du parc de véhicules légers en France et décarboner les transports. Cette demande représente de l’ordre de 5% des réserves mondiales connues de lithium, pour les seuls besoins associés aux véhicules électriques français. lLutilisation du lithium dans les batteries apparaît aujourd’hui difficilement substituable dans la mesure où la technologie lithium-ion est largement dominante. L’approvisionnement en lithium pose des questions de dépendance géostratégique visà-vis de la Chine. Celle-ci constitue un acteur majeur intégré dans le secteur du lithium avec deux importantes compagnies, Tianqi Lithium et Ganfeng Lithium Co. »

 

Conclusion de RTE : « un des principaux leviers pour réduire la demande en métaux critiques des batteries consiste à accompagner la décarbonation des transports et le développement du véhicule électrique d’une approche de sobriété (traduction : des voitures plus petites, moins lourdes, limitation des transports individuel)

 

Cuivre : très très critique :  un métal critique, consommé dans le secteur électrique et de nombreux autres secteurs, et qui présente un risque de tensions sur l’approvisionnement à moyen terme

 

Le cuivre est aujourd’hui utilisé dans la plupart des secteurs économiques et notamment dans le secteur du bâtiment que ce soit pour l’électricité, les télécommunications ou la plomberie, ou encore dans les infrastructures de production et de transport d’électricité. Il est également utilisé dans l’automobile, les biens de consommation, la réfrigération et la climatisation, etc. Le cuivre constitue en conséquence une ressource désormais très stratégique.

 

Plusieurs organismes mentionnent un point de vigilance concernant l’approvisionnement en cuivre. L’Agence internationale de l’énergie projette par exemple un pic d’extraction autour de 2024 compte tenu des mines existantes, de celles en construction et du besoin de cuivre pour la transition énergétique. L’IFPen estime dans une autre étude que la consommation mondiale de cuivre cumulée d’ici 2050 pourrait dépasser le niveau de ressources connues en 2019. Même en prenant en compte les capacités de recyclage du cuivre (aujourd’hui environ un tiers de la demande mondiale est satisfaite à partir de cuivre recyclé), la consommation de cuivre primaire d’ici 2050 s’élèverait à plus de 80% des ressources connues en 2019 soit un niveau susceptible de compliquer fortement l’approvisionnement en cuivre. Le niveau de réserves rapporté au volume de consommation du cuivre est stable depuis plusieurs années et estimé à 30-40 ans. Bien que les budgets d’exploration sur les dernières années soient en hausse, le rythme de découverte de nouveaux gisements s’étiole, en particulier depuis 2014. Le manque de découverte de nouveaux gisements susceptibles de prendre le relais des grands gisements en fin de vie conduirait à de sérieux problèmes d’approvisionnement dans un futur proche, notamment dans un contexte d’accroissement de la demande. Des fluctuations récentes du prix du cuivre illustrent dès à présent les tensions croissantes sur l’approvisionnement de cette ressource. Dans ce contexte, le recyclage constitue un levier essential…

 

Aluminium : un classement comme matière critique par la Commission européenne mais des enjeux a priori moins contraignants que pour le cuivre

 

En 2020, la Commission européenne a ajouté la bauxite, matière première de l’aluminium à la liste des matières premières critiques (en même temps que le lithium, le titane et le strontium), du fait de plusieurs évènements significatifs qui ont mis en avant la fragilité de la chaîne d’approvisionnement de l’aluminium.

 

Remarque : le rapport fait ici allusion à la »crise des oligarques russes de 2018 » (des sanctions américaines  contre Rusal  ont révélé la dépendance très forte de l’Europe vis-à-vis de Rusal qui livre 85% des producteurs européens ) Ben oui, mais on a laissé disparaitre dans l’indifférence et au nom de la sacro-sainte concurrence l’industrie européenne et française (c’était quand même un point fort de la France) l’industrie de l »aluminium. Rappelons aussi que Dunkerque est devenue la plus importante fonderie d’aluminium de l’Union européenne, en produisant à elle seule en 2018, 13,5% de l’aluminium de l’Union (284 000 tonnes). Elle ne fonctionnerait pas sans l’électricité très bon marché et très décarbonée des six réacteurs de 900 MWe de Gravelines)



Rappelons que le  nucléaire est respectivement 20, 2 000 et 1 00 fois plus économe en cuivre que l’éolien terrestre, l’éolien maritime et le solaire PV, rapporté à l’énergie produite sur le cycle de vie de l’installation (source IRENA-2019 et JRC-2020).

Et c’est d’ailleurs vrai de tous les matériaux..




Silicium : très critique aussi

 

Dans les deux derniers mois, le prix du silicium métallique a bondi de +300% d’après l’agence Bloomberg. Cette évolution s’explique notamment par un ralentissement de la production chinoise de silicium, du fait d’un rationnement…

Le prix des panneaux photovoltaïques polycristallins pourrait en conséquence également augmenter de manière significative. Cette situation illustre ainsi la forte dépendance de l’approvisionnement en silicium à la Chine, qui domine le marché de production de silice de haute pureté et de production de silicium métallique. Toutefois la France et la Norvège sont aussi des producteurs significatifs, mais les industriels concernés connaissent aujourd’hui des difficultés économiques (notamment Ferropem en France) et prévoient des fermetures de site à moyen terme. Sans soutien ni stratégie européenne visant à préserver une part de marché européenne (alors que les réserves et l’outil industriel existe déjà), la Chine pourrait devenir le seul producteur de silicium métallique et de panneaux photovoltaïques dans le monde, fragilisant grandement la sécurité d’approvisionnement de la ressource.

 

Terres rares : La relative bonne nouvelle : l’approvisionnement en terres rares, s’il soulève des questions spécifiques en matière de dépendance à certains pays, ne constitue pas un enjeu de premier ordre pour l’évolution du système électrique. (Ouo, enfin, peut-être de coût et de pollution quand même ; c’est quand mêmepas un hasard si la Chine est en quasi-position de monopole…

 

Et la vraie bonne nouvelle : l’uranium ! : Les réserves d’uranium naturel et la chaîne de production en uranium enrichi ne semblent pas soulever de risques d’approvisionnement d’ici 2050 En 2019, les réserves mondiales d’uranium identifiées comme exploitables étaient de l’ordre de 6800 kilotonnes, représentant plus d’un siècle de consommation au rythme actuel.

 

La consommation d’uranium devrait en outre ralentir de manière plus ou moins importante, sous l’effet de la réduction de la capacité nucléaire et de l’amélioration du rendement permise par les réacteurs de 3e génération de type EPR. Dans le scénario le plus haut en matière de capacité nucléaire (N03), la consommation cumulée d’uranium naturel atteint près de 260 kt sur la période 2020-2060 (6,5 kilotonnes par an), sous l’hypothèse d’une poursuite de la stratégie de mono-recyclage actuel (des stratégies différentes pourraient légèrement modifier ce chiffre à la hausse ou à la baisse). Plutôt que sur la question de la disponibilité des réserves, l’approvisionnement en uranium naturel suscite de vifs débats autour de la question de l’indépendance énergétique

D’autres acteurs indiquent à l’inverse que la France dispose de gisements d’uranium naturel sur son territoire (même si non exploités à l’heure actuelle), de stocks constitués pour plusieurs années de fonctionnement et d’une filière de production, d’enrichissement et de traitement de l’uranium tirée par des acteurs industriels nationaux de premier plan.

 

Remarque : et avec les réacteurs de GENIV (surgénérateurs),  plusieurs milliers d’années de réserve. Et la possibilité d’utiliser le thorium, encore plus abondant…


9) Les coûts des batteries : d’importantes baisses attendues grâce à la massification de leur fabrication...mais

 

La demande accrue de certains matériaux critiques nécessaires à la fabrication des batteries, notamment pour accompagner le développement du véhicule électrique dans le monde, pourrait renchérir le coût des batteries. De manière générale, les tensions géopolitiques qui se sont fait jour au cours des dernières années accréditent l’intérêt de traiter sérieusement la possibilité d’une augmentation du coût de certains matériaux critiques dans les scénarios de neutralité carbone. Le sujet de la tension sur

l’approvisionnement de ces matériaux est discuté ci-dessus.


10) L’Europe : trop de renouvelables, pas assez de pilotable :le sécurité d’alimentation n’est pas garantie

 

« Tous les scénarios d’atteinte de la neutralité carbone publiés en Europe reposent sur une forte baisse de la consommation énergétique finale, tous vecteurs confondus. Cette baisse est supérieure à 20% pour tous les scénarios européens et nationaux identifiés…

 

Tous les scénarios reposent également sur une forte électrification des usages. L’électricité représente actuellement de l’ordre de 25% de la consommation finale d’énergie en Europe, avec des niveaux sensiblement différents entre les pays. Dans la plupart des scénarios européens ou de certains États, cette part se situe à l’horizon 2050 entre 40% et 60% et certains scénarios envisagent des taux pouvant aller jusqu’à 75%.


On retrouve la très grande incertitude et des stratégies très variables sur l’hydrogène : « l’évolution de la consommation d’hydrogène est très contrastée selon les scénarios européens et nationaux, traduisant les fortes incertitudes actuelles sur la part des usages finaux qui ne pourront pas être électrifiés. Certains scénarios limitent le développement de la consommation d’hydrogène au secteur de l’industrie, tandis que d’autres envisagent un rôle important dans la mobilité, y compris légère, mais aussi dans le secteur des bâtiments, pour le chauffage »


« Les énergies renouvelables variables représenteront au moins 70% de la production d’électricité européenne en 2050 Dans tous les scénarios d’atteinte de la neutralité carbone à l’échelle européenne, la place des énergies renouvelables, notamment l’éolien et le photovoltaïque, évolue fortement pour représenter au moins 70% de la production totale d’électricité en Europe, au détriment notamment de la production thermique fossile et, dans une moindre mesure, de la production nucléaire. »

 

La production nucléaire en Europe est amenée à se réduire de façon sensible Fin 2019, le parc de réacteurs nucléaires en Europe (EU27, Royaume-Uni et Suisse) comptait 130 unités en service pour une puissance totale installée de l’ordre de 122 GW, produisant près de 800 TWh (785 TWh en 2019), soit de l’ordre de 25% de la production d’électricité en Europe…. Plusieurs États européens ont en effet décidé de sortir du nucléaire dans les prochaines années : l’Allemagne en 2022, la Belgique en 2025 et l’Espagne en 2035. D’autres États (Royaume-Uni, Pologne, République tchèque, Slovaquie, etc.) ont annoncé vouloir construire de nouveaux réacteurs pour compenser la fermeture à venir de leurs centrales nucléaires qui arriveront en fin de vie dans les prochaines décennies ou pour permettre la fermeture de centrales au charbon. Enfin, certains pays comme la France ou les Pays-Bas n’ont pas encore pris de décision concernant l’éventuelle construction de nouveaux réacteurs. Cependant, dans tous les scénarios européens, la capacité nucléaire installée en 2050 est plus faible (ou au plus du même niveau) que la capacité actuelle »

 

Remarque : Et ce n’est pas du tout une bonne nouvelle, ni pour les coûts, ni pour la sécurité d’alimentation, ni la meilleure garantie de réussir la décarbonation

 

« Les pays caractérisés par une forte densité de population (ex. Belgique et Allemagne et possiblement les Pays-bas et Italie), qui limite le gisement ENR disponible par habitant, envisagent de s’appuyer sur les imports d’électricité (potentiellement en complément d’imports de gaz «vert») pour boucler leur système électrique. Dans la plupart des scénarios énergétiques sur l’Allemagne, la Belgique, l’Italie et les Pays-Bas, ces pays sont structurellement importateurs d’électricité…. Ces différences de mix de production entre les pays du nord et du sud de l’Europe auront des conséquences importantes sur les échanges d’électricité en Europe, avec des variations de flux jour/ nuit plus marquées, et sur les flux sur le réseau de transport français qui se situe à l’interface entre ces pays.

 

Remarque : si chacun compte sur son voisin pour importer, on est mal. Et c’est effectivement ce qui se passe. On est mal. Sans compter l’acceptabilité des extension de réseau indispensable ( cf energgiewende)

Conclusion : « Il s’agit notamment d’accélérer le rythme de développement des énergies renouvelables. Elles constituent un défi aussi au périmètre européen dans un contexte d’accroissement des capacités d’interconnexion entre les pays, la superposition des stratégies définies au niveau national ne garantit pas la construction d’un système où la sécurité d’approvisionnement est assurée et où les coûts sont optimisés »

 

Remarque : on retrouve l’inquiétude exprimée par la note de France Stratégie : Quelle sécurité d’approvisionnement électrique en Europe à horizon 2030 ? : » dès 2030 et vraisemblablement à une date plus rapprochée, si les tendances actuelles se maintiennent, les seuls moyens pilotables ne seront pas en mesure de satisfaire toutes les demandes de pointe moyennes »… « Une forte part d’ENRi dans le mix électrique augmente la probabilité de déstabilisation du réseau et en complexifie le pilotage » « ’essor des énergies renouvelables intermittentes doit se faire au rythme du développement de moyens d’équilibrage du système électrique »…

 

Ce  qui n’est pas le cas dans les scenario européens actuels. Donc, e très prochainement, ça ne passera pas !

 

Cf. sur ce blog : https://vivrelarecherche.blogspot.com/2021/02/note-de-france-strategie-quelle.html

 

Evolution de quelques pays européens :