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samedi 22 août 2020

Non à l’implantation des 60 éoliennes géantes flottantes au large de Groix et Belle-Ile (2) ! Un débat critiqué par son organisateur !


NB. J’ai déjà traité de ce problème dans 2 billets de ce blog


Je rappelle qu’un débat est actuellement ouvert sous l’égide de la CNDP. Pour participer :


Curieux débat tout de même. J’ai souhaité mentionner ici les commentaires, assez loyaux pour le coup de M. Laurent Pavard, président de la commission particulière de débat public Bretagne sud que l’on peut trouver sur le site


On ne dispose donc pour le débat ni d’un projet étudié ni d’études d’impact !

Verbatim :

Quelles sont les principales différences entre le débat public de Courseulles en Manche et celui sur l’éolien flottant en Bretagne sud que vous présidez ?

Laurent Pavard – Le débat est placé sous l’égide de la loi « ESSOC » : le débat public se déroule désormais avant l’attribution du projet. Le maître de l’ouvrage n’est donc pas un opérateur industriel mais l’État et RTE, et l’on ne dispose donc pour le débat ni d’un projet étudié ni d’études d’impact comme c’était le cas pour Courseulles.

Le dossier du projet AO5 se résume à une enveloppe de puissance pour les deux tranches (250 MW et 250 à 500 MW) et une « macrozone » de 1330 km2 à l’intérieur de laquelle le ministère attend la localisation d’une zone de 600 km2 pour l’implantation des deux tranches projetées.

De ce fait les choix du public sont beaucoup plus ouverts, mais les éléments portés à sa connaissance sont en revanche beaucoup plus généraux et fragmentaires, en particulier s’agissant de l’état initial des milieux. !!!

Et c’est à peu près tout ce qu’on a, donc on a un débat où on a assez peu d’éléments concrets à donner au public !

Dans un tout autre ordre d’idées je constate que, depuis l’ouverture du débat en ligne, l’opportunité de l’énergie éolienne est beaucoup plus débattue qu’à Courseulles…Le débat se focalise sur des thématiques générales qui répondent à une besoin d’information du public : place de l’éolien dans la stratégie bas carbone, l’économie de l’électricité éolienne, en mer, mécanismes de subventions.. »

Commentaire : ben oui  faute d’un véritable projet étudié, d’une localisation précise, d’études d’impacts, on ne peut qu’effectivement débattre sur l’absurdité climatique, écologique, économique de l’éolien off shore

M.  Laurent Pavard constate qu’il manque «  une localisation plus précise dans la macrozone des 600km2 » et mentionne  « des études d’impacts qui sont assez fragmentaires, quelques données sur les activités de pêche, quelque chose qui est assez peu consistant »

Commentaire : comment en effat débattre là –dessus ? Surtout que les enjeux particuliers de ce parc-ci sont d’importance.

De graves problèmes sur lesquels on ne peut se prononcer !

Continuation du commentaire de M. Laurent Pavard :

« Les usages de la mer : on va mettre sur l’océan une soixantaine d’éoliennes à terme, on pourra pas y faire forcément les mêmes choses qu’avant et avec les mêmes degrés de liberté…sujet à travailler avec les parties prenantes…

Commentaire : en effet, ça serait utile et même indispensable, et même démocratique !

« Les questions d’environnements, on va mettre en mer des chose qui y étaient pas…Est-ce que ça aura des conséquences dans le domaine de l’environnement ? Est-ce que ça aura un effet cumulatif avec les autres parcs éoliens plus au sud ? »

Commentaire : ben oui, quand est-ce qu’on peut en débattre !

« La question du raccordement à terre qui va nécessiter des travaux effectués par RTE et une station d’interconnection, au total une dizaine d’hectares d’ installations électriques à terre. Il faudra qu’on examine avec les environnementalistes, avec  la profession agricole comment ça peut se passer de façon à orienter les travaux de RTE vers la zone la moins dommageable…

Commentaire : ben oui, il faudra

On voit de l’aveu même de M. Laurent Pavard qu’en dehors de l’économie et l’écologie générale de l’éolien off shore, ce projet particulier, d’une ampleur inégalée pose de très sérieux problèmes…sur lesquels il est impossible de débattre, faute d’un projet précis, faute d’information, faute d’études d’impact…

Que faire dans ces conditions ? Sinon réclamer à cor et  à cri , et peut-être autrement que le débat dure le temps qu’il faut pour que les gens concernés puissent se prononcer sur un projets précis dont ils connatront suffisamment la nature, la localisation et les impacts potentiels.

Sinon, c’est une farce, et je ne suis pas sûr qu’elle soit appréciée.

Et aux éléments présentés par M. Pavard, j’ajouterais l’atteinte portée à l’un des plus beaux plan d’eau, d’un des plus beaux paysages marins de Bretagne apr 60 éoliennes flottantes de 200 m.de haut

Les aiguilles de Port Coton de Manet ne valent-ils pas la Montagne Sainte Victoire de Cézanne ? Et les Grands sables de Groix ?
 Car si les éoliennes seront offshore de la côte continentale, à combien seront-elles de celle des îles ?


Un week-end à "Belle-île-en-mer"belle-île Archives - Blog Samboat
Groix, île nature

vendredi 21 août 2020

Canicule, Covid, ENR et nucléaires, qqs nouvelles d’aout 2020 1)- Le contre exemple californien


Les canicules ne sont pas favorables aux ENR

On le sait, les périodes de canicules ne sont pas favorables aux ENR. D’abord, la consommation d'électricité augmente sensiblement en période de températures caniculaires, à cause notamment des climatiseurs et ventilateurs, et ces épisodes sont sans doute destinés à devenir de plus en plus fréquents, causant des pointes de consommation estivales.

Ensuite, si, comme souvent la canicule est liée à la présence d’un anticyclone, il y a absence de vent et les éoliennes ne tournent pas. Et quand on dit ne tournent pas, c’est nib de nib, typiquement moins de 5% de la puissance du parc pendant plusieurs jours. Et cela sur l’ensemble de l’Europe, les anticyclones ne connaissant pas les frontières.

Et c’est parfois pire. Ainsi, le 22 juillet 2019, les huit mille éoliennes françaises ne fournissaient quasiment plus d’électricité ; alors que la barre des 34°C a été localement dépassée sur une partie sud du pays, les éoliennes destinées à produire de l’électricité au réseau n’ont fourni que 607 MW soit 1% du total (Fédération Environnement Durable -FED). Dans un communiqué, la FED précise :

« Ces chiffres montrent l’inutilité de ces machines pharaoniques et l’erreur de vouloir poursuivre leur implantation alors qu’elles sont incapables de produire de l’électricité lorsque les consommateurs en ont besoin….La production intermittente des éoliennes dépend uniquement du bon vouloir du vent et non pas de leur gigantisme ou de leur nombre. Elles ne peuvent faire face ni aux vagues de froid, ni aux vagues de chaleur, c’est-à-dire au moment critique ou l’électricité d’un pays devient vitale. Un blackout est considéré comme une catastrophe potentielle nationale mettant en danger la sécurité des citoyens. »

Les panneaux solaires ne sont pas du tout flambards : ils ont trop chaud ; c'est un paradoxe, les panneaux solaires aiment le soleil, mais pas la chaleur ! Leur température idéale de fonctionnement est de 25 degrés. Au-delà, ils perdent jusqu'à 25 % de leur production.
Et ça a des conséquences.

Canicule 2020  en Californie : coupures de courant.



Donc, en pleine crise Covid et pic de chaleur, la Californie a  coupé le courant à plus de trois millions de Californiens.- des coupures tournantes qui  se sont étalées sur 4 jours. Que s’est il passé ?

« Vendredi 14 août, la Californie a ordonné des coupures de courant, alors qu’une vague de chaleur a mis à rude épreuve son système électrique. Alors que la Californie vivait une journée de canicule avec des températures atteignant 44°C (110 °F), en rentrant du travail vers 17 heures, les Californiens ont tous branché leur climatisation augmentant soudainement la demande d’électricité. En même temps alors que le soleil commençait à se coucher, la capacité solaire a perdu près de 1GW de puissance. Parallèlement, comme c’est souvent le cas en pleine canicule, il n’y avait pas un souffle de vent ce qui a privé les californiens de leur électricité éolienne. Moralité l’opérateur a d’abord demandé aux usagers de réduire leur consommation puis a dû couper l’électricité à près de 500 000 foyers durant une partie de la nuit. En pleine pandémie du COVID 19 qui sévit toujours en Californie, on ne connait pas les conséquences notamment sanitaires de ce blackout »

Ceci s’est passé dans un climat d’impréparation qui a suscité l’indignation des Californiens. Moins d'une heure avant les coupures tournantes le gestionnaire de réseau avait affirmé qu'elles ne seraient pas nécessaires, et s’était contenté d’un courrier appelant à couper les  climatisations et autres gros appareils électriques, à fermer les rideaux, etc.  Puis, l’agence qui gère le réseau électrique de l’État a  affirmé que des coupures de courant seraient finalement nécessaires pour équilibrer l’offre et la demande. Le  gouverneur s’est indigné que les régulateurs n’étaient pas préparés à cette situation….Bilans : coupures tournantes sur 4 jours !

La crise de 2020 n’est pas sans précédent et est le résultat d’une longue évolution

C’est que depuis des années, la Californie est en état total de déni quant à son système électrique. et la crise de 2020, particulièrement malheureuse par temps de Covid et de canicule, n’est que la conséquence d’une évolution catastrophique depuis la politique de libéralisation du pseudo »marché de l’électricité » des années 90.  Cet Etat qui se clame la 5ème puissance économique mondiale se rapproche dans son système électrique du tiers monde…Et aussi  de l’endroit où nous amène la politique énergétique (et en fait anticlimatique) de la Commission européenne.

La crise de 2020 : un mix électrique toxique : trop d’énergies intermittentes, pas assez de pilotables !

Intermittence de l’éolien et du solaire – lequel, contrairement à ce que l’on pense n’est pas forcément adapté aux contrées très ensoleillées

« Faute de vent dans l’Etat samedi, l’énergie produite par les éoliennes a chuté dramatiquement. Une seconde centrale à gaz n’a pas été suffisante pour compenser et obtenir la production nécessaire. L’État est confronté à un problème fondamental: la Californie est fortement tributaire de l’énergie solaire et d’autres sources d’énergie renouvelables, et le soir, l’énergie solaire disparaît, alors même que plus  de clients allument leur climatisation. »

Fier de sa transition énergétique, la Californie produit aujourd’hui un tiers de son électricité à partir d’énergies renouvelables intermittentes. On aurait tendance à dire un tiers heureusement. On a peine à imaginer ce qui se serait passé si l’état le plus peuplé des US produisait la moitié voire la totalité de son énergie à partie des ENR intermittentes. De nombreux experts et observateurs alertent depuis des années sur le risque de dépasser le seuil de 30% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique sans prévoir en back-up des unités pilotables capables de prendre le relais. »

 « Les énergies renouvelables, solaire et éolien pour l’essentiel sont intermittentes. En France, le soleil ne brille en moyenne que 1000 heures par an (soit 12% du temps) et le vent ne souffle que 2000 heures par an (soit un peu plus de 20% du temps). En moyenne, un mix 100% solaire ce serait accepter de l’électricité un jour sur dix et un mix 100% éolien ce serait en accepter un jour sur cinq. Par contre les énergies pilotables (charbon, gaz, nucléaire) sont capable, à la maintenance près, de fournir de l’électricité 100% du temps. Mais, en dehors de cette notion d’intermittence, l’éolien et surtout le solaire dépendent des aléas climatiques. Ainsi, si l’efficacité d’une cellule solaire s’accroit avec l’ensoleillement (durée et intensité), elle décroit avec l’accroissement de température. Ainsi, des cellules photovoltaïques placées en plein désert ne pourront être efficaces qu’à condition d’être réfrigérées. Mais, l’antipathie de la nature vis-à-vis du solaire ne s’arrête pas aux canicules. Là où il a de l’espace et du soleil (le désert) il y a aussi malheureusement…du sable. Les grands projets solaires émiratis et chiliens se sont ainsi cassé le nez face aux tempêtes de sable qui rendent les panneaux solaires inopérant en les couvrant de sable. Les nettoyer est un casse-tête : les balayer à sec griffe les panneaux, les nettoyer à l’eau de mer les couvre d’une croute de sel. Quant à l’eau douce tout le monde conviendra qu’elle n’est que très peu disponible…dans le désert. Aussi les émiratis ont mis la pédale douce sur leurs projets solaires pharaoniques et se sont tournés vers le…nucléaire. »


Trop de solaire et d’éolien, pas assez de pilotable : entre 2010 et 2018, 14500 MW de solaire et éolien non pilotable installée. 5400 MW de production pilotable fermée.
Et c’est pour 1.000 mégawatts manquants que le black-out a eu lieu pendant quelques heures !

Ben comment dire, c’est la recette pour une catastrophe !


Un mix électrique pathologique.



La production nette des centrales électriques californiennes s'élevait en 2018 à 197 227 GWh, en recul de 4,3 %, soit 4,7 % de la production totale des États-Unis : 4 177 810 GWh ; s'y ajoute la production estimée des petites installations photovoltaïques : 13 046 GWh, portant la production totale nette à 210 273 GWh.

Le secteur de l'électricité en Californie se caractérise par une proportion importante d'énergies décarbonées : 53,9 % en 2018 (8,7 % de nucléaire et 45,2 % d'énergies renouvelables : hydraulique 12,4 %, géothermie 5,7 %, biomasse 2,7 %, éolien 6,5 %, solaire photovoltaïque 17,8 %, solaire thermodynamique 1,2 %), mais les combustibles fossiles ont encore une part élevée : 44,7 % (presque uniquement gaz naturel),

Plusieurs caractéristiques importantes.

- Le parlement californien a établi en 2002 le California Renewables Portfolio Standard (RPS), un programme qui impose aux « utilities » et autres fournisseurs d'électricité de porter la part des énergies renouvelables à 33 % de leurs fournitures totales en 2020.

Commentaire : En ben, ils y sont presque ( ça dépend comment on compte) et on voit déjà le résultat (solaire plus éolien 24,3% plus hydraulique  =36.7%- mais l’hydraulique est pilotable, sf. que –voir ci après)

- La Californie se classe au 1er rang parmi les États des États-Unis pour la production d'électricité à partir de biomasse, de géothermie et d'énergie solaire

- La Californie (5ème puissance mondiale) n’est pas autosuffisante, et de loin : : La production ne couvre que 72 % de la demande, le reste étant importé des États voisins et du Mexique.

- Toutes les renouvelables ne sont pas égales et la Californie a perdu de l’héyraulique pilotable au détriment de l’éolien et du soliare (fatals)- et cette perte peut être parfois brutale. La production des centrales hydroélectriques conventionnelles en Californie s'est élevée en 2018 à 25 898 GWh, en baisse de 38,9 % par rapport à 2017 du fait d'une sécheresse sévère ; La part des énergies renouvelables (EnR) n'a pas progressé de 1990 à 2018, la forte progression de l'éolien et du solaire ayant été presque compensée par l'effondrement de l'hydroélectricité due à une succession d'années de sécheresse.

Avec l’aggravation des sécheresses, l’hydraulique devient aussi difficile à piloter, et c’est un facteur de fragilité supplémentaire





-  La production des centrales nucléaires en Californie s'élevait en 2018 à 18 214 GWh en recul de 44 % par rapport à 1990 du fait de la fermeture de la centrale de San Onofre en 2013. La chute de la production nucléaire du fait de la fermeture de la centrale de San Onofre en 2014 a été compensée par une forte progression du gaz naturel. (non, SVP : fossile !)

Commentaire : Ben tiens, ils font comme les Allemands et c’est pas bon pour le climat…

Les précédent de 2018 et  2019 : 85 morts dans le Camp Fire, coupures électriques pour éviter les incendies

Les coupures électriques massives ne sont pas une nouveauté en Californie, elles tendent  à se répéter : 2020, après 2019 et 2018 après 2001

En 2018, la Californie a connu l’un de ses pires et plus violents incendies avec le « Camp Fire », le 8 novembre 2018, qui  a détruit la localité de Paradise et fait 85 morts, le bilan le plus lourd que l’Etat ait connu. Les experts l’avaient attribué à un défaut d’entretien des lignes électriques (un départ de feu sous l’une de ses lignes à haute tension)
Le mercredi 9 octobre 2019, 500 000 résidents de l’Etat qui a rang de cinquième économie du monde, se sont donc vus privés de courant, à titre préventif, principalement dans le nord de l’Etat, de Sacramento aux contreforts de la Sierra. 250 000 habitants de la baie de San Francisco devaient subir le même sort dans la nuit, les météorologues ayant annoncé des vents violents et décrété une « alerte rouge ». Vingt-neuf des 58 comtés californiens étaient affectés par la décision de PG&E de ne plus prendre le risque de servir ses clients pour éviter les risques d’incendies
Bilan : l’historique PG&E s'est mise en faillite en janvier, faisant face à des milliards de dollars de dettes potentielles en raison de sa responsabilité dans le «Camp Fire»,

Les coupures tournantes de 2001, brillant résultats de la politique de libéralisation du « marché » de l’électricité

En 1996, l’Etat de Californie, sous l’influence de l’idéologie libérale démantèle ses deux monopoles publics (Pacific Gas and Electric et Southern California Edison qui détenaient 80 % du marché) Ce fut un festival ! On sépara le réseau et l’on créa de deux marchés de gros, ce qui permettait plus d’occasion de spéculation.

Contrairement à leurs engagements mais conformément à leur intérêt bien compris, les producteurs privés  n’ont entrepris la construction d'aucune des centrales qu'ils avaient pourtant dans leurs cartons et qu’ils s’étaient engagé à construire. Leur seule vraie crainte, la menace suprême pour eux, c’était la surproduction, et ils n’avaient aucun intérêt à investir et à augmenter une production… dont la rareté assurait leur profit – elle était la garantie pour eux de pouvoir imposer des tarifs élevés et maximiser leurs bénéfices sans investissements.  Mais dans le même temps, dans cette Californie avec ses industries dynamiques et ses ménages très consommateurs , la demande n'a cessé de croître. Affaires en or pour les centrales, catastrophes pour les particuliers et les industriels avec augmentations de prix et pannes.

Conclusion : envol exponentiel des prix de gros. Bon quais-exponentiel : les prix de gros de l'électricité, qui étaient à 30 $/MWh en avril 2000 , passèrent à 100 $/MWh, puis atteignirent en novembre 250 à 450 $/MWh, soit plus de 100% d’augmentation en 2001!  Mais dans le même temps, les autorités politiques craignaient l’effet des hausses massives du prix de détail sur les petits consommateurs (lesquels commençaient à se manifester bruyamment) et bloqua ceux-ci. Donc au début 2001, des coupures tournantes durent être organiséespuis les deux principales compagnies ex-publiques (PG&E, Pacific Gas and Electric Company et SCE, Southern California Edisonfirent faillite, ainsi que quelques centaines de leurs fournisseurs dans leur chuteL’Etat fut contraint de les reprendre, ce qu’avait parfaitement anticipé cyniquement, le PDG d'Enron, Jeff Skilling,: «Quand les compagnies seront trop endettées, nous limiteront l'énergie livrée à la Californie et l'Etat sera contraint d'aider ces sociétés.»

Ah oui, car dans ce festival, il y a eu Enron, la plus gigantesque escroquerie de ces années ; Enron, qui gérait le Path 26, la seule connexion entre Californie du nord et Californie du Sud, Enron et ses congestions fantômes. Voilà ce qu’ils ont fait, expliqué à une Commission d’Enquête Sénatorial par un employé : « les courtiers d'Enron ont engorgé cette ligne artificiellement pour qu'ensuite, quand les gens auraient besoin de cette ligne, Enron fasse monter ses prix ». Ainsi, le 14 et 15 juin 2000, en pleine vague de chaleur, les courtiers d'Enron ont engorgé le «Path 26»,. Ils ont créé un goulot d'étranglement qui a bloqué la transmission de l'électricité vers «Path 15» en direction du nord de l'Etat. «On a surchargé la ligne qui nous appartenait chaque fois qu'il y avait une vague de chaleur, reconnaît maintenant un courtier. Résultats : des black-outs à San Francisco, Los Angeles et dans la Silicon Valley au cours des étés 2000 et 2001, jusqu’à ce que les autorités locales acceptent de payer à Enron le prix qu’ils exigeaient.

Et bien d’autres manœuvres encore, par exemple le «blanchiment de mégawatts». Comme les prix étaient plafonnés en Californie, Enron achetait du courant dans cet Etat, le transférait dans les Etats voisins et le revendait au prix fort en Californie. Un exemple d'escroquerie imité ensuite par d'autres compagnies. Et imy eut aussi le rackett :  La peur des black-out  a aussi forcé les entreprises à signer des contrats à long terme avec Enron pour plus d'un milliard de dollars. (cf. Quand Enron éteignait la Californie. Libération, Annette Lévy-Willard, 21 mai 2002)


On voit d’où vient la situation californienne actuelle et ses coupures à répétition. : libéralisation complètement ratée et scandaleuse sur bien des aspects,  un système électrique à l’abandon, incapable de fournir à la Californie l’électricité dont elle a besoin, des installations dégradées provoquant des incendies meurtriers, une centrale nucléaire fermée ( intéressant de savoir s la dernière, Diablo Canyon qui est bien présente et a  produit avec une belle stabilité sera elle aussi arrêtée comme prévu) ; une politique idéologique de promotion des ENR ,en particulier du solaire ( qui en fait ne décarbone rien car le nucléaire a été remplacé par du gaz qui reste la part la plus importante du mix californien (44%), mais qui, ne correspondant pas aux besoins (climatisation le soir, qd les californiens rentrent chez eux), entraine black-out sut black out


mardi 18 août 2020

Les Energies Renouvelables sont-elles réellement renouvelables, durables, écologiques, résilientes ? L’ELF (Element Limitation Factor)


Quelques explications sur l’ELF (Element Limitation Factor) et conséquences : les scénarios qui reposent sur des sources d'énergie intermittentes en association avec batteries se heurtent à de sévères risques de pénurie en matière premières.

Dans le blog sur les chiffres clés du nucléaire, j’ai mentionné le nucléaire comme champion de l’Element Limitation Factor et de la durabilité

C’était à vrai dire une conséquence de la très forte ( imbattable ?) forte densité énergétique des combustibles nucléaires 1 g d'uranium 235 dégage autant d'énergie que 2,4 tonnes de charbon et 1,6 tonnes de pétroles !!!, de la disponibilité des ressources, et surtout de la possibilité de recycler le combustible dans des réacteurs de 4ème génération (Superphenix, Astrid…. et qui fonctionnent déjà en Russie à Beloyarsk )
Et du fait que le nucléaire est aussi  champion de l’économie en matériaux : une étude du Department of Energy  donne 800 t/TWh de béton et 160 t/TWh d’acier pour le nucléaire, et 8000 t/TWh de béton et 1800 t/TWh d’acier pour l’éolien, soit un facteur 10 pour le béton et 11 pour l’acier, à l’avantage, très marqué, du nucléaire.



En fait, l’ELF (Element Limitation Factor -limitation des éléments) est un critère de faisabilité /durabilité qui  a été présenté lors de la COP25


Schématiquement, l’idée est assez simple : une technologie ne peut pas être considérée comme capable de satisfaire les besoins si elle nécessite plus que la totalité des ressources mondiales d'un matériau donné.
Et il est en fait très intéressant de l’utiliser pour une analyse des Energies Renouvelables ( beaucoup plus que pour le nucléaire qui passe le critère Haut la Main !)

C’est ce qu’a proposé M. Gerard Grundblatt dans un tweet très intéressant que je reproduis ci-après

« L’éolien et PV sont-elles des énergies réellement renouvelables ?
Les promoteurs et défenseurs de l’éolien et du PV clament sur tous les tons le caractère RENOUVELABLE de ces énergies.

Ils oublient que celles-ci consomment des quantités astronomiques de matières premières dont les sources peuvent devenir limites (en particulier métaux & terres rares) pour la construction des équipements qui vont eux capter ces énergies renouvelables intermittentes

Par exemple, une technologie ne peut pas être considérée comme capable de satisfaire les besoins si elle nécessite plus que la totalité des ressources mondiales d'un matériau donné. Pour mesurer ces quantités un coefficient ELF Element Limitation Factor (limitation des éléments) a été présenté lors de la COP25 http://gisoc.srweb.biz/gisoc/Docs/PosterCorrected.pdf

Le facteur ELF est défini comme le rapport entre la consommation & les ressources. Si ce rapport est >1 la technologie ne peut pas couvrir à elle seule 100 % des besoins énergétiques, c'est-à-dire que ce facteur donne une limite supérieure pour chacune des sources

Grâce à l'ELF, les lacunes de nombreux scénarios sont immédiatement visibles, en particulier les scénarios qui reposent sur des sources d'énergie intermittentes en association avec batteries »



Bon, donc sont soutenables ce qui n’est pas trop loin de 1 le nucléaire, surtout avec surgénérateurs. Le stockage massif dans des batteries se heurte à des limitations en lithium ; la production d’hydrogène est victime de son pauvre rendement, l’hydraulique est limité par le manque de sites, etc. l’énergie solaire se heurte à un problème sérieux d’approvisionnement en métaux divers. En fait, comme l’écrit M. Gerard Grundblatt , tous les scenarios fétiches des 100%ENR couplés à un stockage de masse se heurtent à l’impitoyable pénurie de métaux et terres rares. Impossibilité physique !

L’argent, l’indium, ainsi que le praseodymium, le dysprosium, le terbium et le néodymium ont été identifiés comme faisant face à des pénuries critiques potentielles à moins que la production mondiale ne puisse augmenter de nombreuses fois par rapport à leurs niveaux actuels. D’ici 2050, le besoin annuel d’indium pour la seule production de panneaux (basé sur les modèles IPCC SR15 de croissance de la capacité solaire photovoltaïque) dépassera la production mondiale annuelle actuelle  de douze fois !

Une telle pression de la demande introduit une incertitude économique à long terme dans l’énergie solaire et éolienne, ce qui pourrait rendre l’investissement non viable – et même une incertitude physique fondamentale !

L’éolien, le solaire et les batteries menacés par une pénurie de matières premières »

C’est ainsi que l’excellent Transitions et Energies a pu titrer : « L’éolien, le solaire et les batteries menacés par une pénurie de matières premières »


«Les énergies dites «propres», à savoir les éoliennes, les panneaux photovoltaïques et les batteries des véhicules électriques, sont totalement dépendantes de nombreuses matières premières et plus particulièrement de métaux rares. Sans un approvisionnement continu, important et fiable, il n’est pas question de voir se multiplier dans les prochaines années les productions d’électricité par des renouvelables et les véhicules électriques sur les routes. Toutes les stratégies de transition énergétique faisant appel au solaire, à l’éolien et au transport électrique par batteries sont aujourd’hui menacées. Quant aux alternatives moins consommatrices de matières premières et plus locales, comme l’hydrogène ou la géothermie, par exemple, elles ne figurent même pas en France dans les plans à long terme des pouvoirs publics. »

L’avertissement de l’AIE ! « Surveiller surveiller la sécurité de l’approvisionnement en minéraux nécessaires à la transition écologique »

Quasiment simultanément, l’AIE (Agence Internationale de l’Energie) prévenait : « La crise du Covid-19 a mis en évidence la nécessité de surveiller la sécurité de l’approvisionnement en minéraux nécessaires à la transition écologique »


Pour donner un ordre d’idées de cette dépendance aux matières premières minérales et métalliques, la construction d’une voiture électrique à batteries en nécessite 5 fois plus qu’un véhicule à moteur thermique. De la même façon, construire un ensemble d’éoliennes demande huit fois plus de matières premières qu’une centrale au gaz offrant la même puissance théorique de production d’électricité. Et encore, les éoliennes sont par définition intermittentes.

La fabrication des batteries lithium-ion des véhicules électriques et des mêmes batteries utilisées pour stocker l’électricité dans certains réseaux est devenue aujourd’hui l’activité industrielle qui consomme le plus de lithium et de cobalt dans le monde, respectivement 35% et 25% de la production. De la même façon, la consommation dans le monde de cuivre et de nickel n’a cessé d’augmenter au cours des dernières années.


Déjà, avant la pandémie de coronavirus, les tensions ne cessaient de grandir sur les marchés de ses matières premières stratégiques. Elles se sont aggravées depuis. D’abord, du fait du confinement généralisé qui a désorganisé dans de nombreux pays la production et le transport des matières premières. Elle s’est traduite aussi par une chute brutale des investissements de capacité, pourtant indispensables pour faire face à une demande en constante augmentation. Il faut ajouter à cela des tensions politiques grandissantes entre la Chine, principal fabricant dans le monde de panneaux photovoltaïques, de batteries lithium-ion, d’éoliennes et principal producteur et raffineur de terres rares, et les pays occidentaux.

Il y a des risques géopolitiques associés à la production de nombreuses matières premières essentielles à la transition énergétique.

L’agence Internationale de l’Energie appelle à considérer ce défi en termes géostratégiques, à l’égal du pétrole et du gaz et souligne les risques que fait peser sur la transition écologique le goulet d’étranglement que représente l’approvisionnement de matières premières stratégiques.  

«L’’idée de géopolitique énergétique est typiquement associée au pétrole et au gaz. Par contraste, le solaire, l’éolien et les autres technologies propres sont souvent considérées comme immunisées contre de tels risques. Mais il y a des risques géopolitiques associés à la production de nombreuses matières premières essentielles à la transition énergétique »

Pour donner juste quelques exemples, le lithium, le cobalt et le nickel sont indispensables et essentiels à la fabrication des batteries lithium-ion. Le cuivre est absolument nécessaire pour développer les réseaux électriques et y intégrer les productions solaires et éoliennes. Des terres rares comme le néodyme sont utilisées pour fabriquer des aimants puissants sans lesquels les moteurs électriques des éoliennes et des véhicules ne fonctionnent pas. Même l’optimisation de technologies liées aux énergies fossiles nécessite ses matières premières. Les centrales à charbon les moins polluantes utilisent du nickel pour augmenter la température de combustion et rejeter moins de CO2.

Et ces ressources ne sont plus réparties équitablement et font déjà l’objet de stratégies de puissances, notamment de la part de la Chine. Et lorsqu’elles ne dépendant pas de la Chine, d’autres facteurs aussi inquiétants apparaissent. En fait, la production de nombre de ses matières premières et métaux est plus concentrée géographiquement que celle du pétrole et du gaz. Pour le lithium, le cobalt et les terres rares, les trois premiers pays producteurs contrôlent plus des trois quarts de leurs marchés respectifs. Dans certains cas, un seul pays assure la moitié de la production mondiale.

La concentration est tout aussi grande dans les opérations de raffinement. La Chine assure 50 à 70% du raffinement du lithium et du cobalt. Elle contrôle également 85 à 90% du processus industriel de traitement des terres rares et de leur raffinage et transformation en métaux et en aimants.

Les conditions même d’extraction de ses matières premières posent des problèmes humains et environnementaux. Ainsi, 20% de la production de cobalt de la République Démocratique du Congo (RDC) dépend de mineurs «artisanaux» qui extraient le métal dans des conditions proches de l’esclavage. Le raffinage des terres rares est un processus qui nécessite de nombreux produits chimiques très polluants et qui produit de grandes quantités de déchets tout aussi polluants.

La récession économique mondiale née de la pandémie de coronavirus ne devrait pas ralentir longtemps la demande de ses matières premières. Surtout si les plans de relance économique un peu partout dans le monde mettent l’accent sur la transition énergétique par les renouvelables et les véhicules électriques à batteries. Or, de nombreuses mines fonctionnent déjà à la limite de leurs capacités et des pénuries pourraient rapidement se produire prévient l’AIE. Non seulement cela aura un impact sur la capacité à fabriquer des éoliennes, des panneaux solaires et des batteries pour voitures électriques, mais cela créera un problème très sérieux d’indépendance nationale.

L’AIE appelle donc à la prudence et à l’anticipation, au moins à la prise en compte des risques géostratégiques liés au développement des ENR.


Car si le soleil et le vent sont partout (ou à peu près), ce n’est pas le cas des matières premières liées aux ENR… Et les ENR sont très gourmants en métaux stratégiques.

Le cas de la France : l’avertissement des deux Académies ( Sciences et Technologies)

En ce qui concerne plus spécifiquement la France, L’Académie des sciences et l’Académie des Technologies ont travaillé en commun et publiés un rapport intitulé : «  Stratégie d’utilisation des ressources du sous-sol pour la transition énergétique française Les métaux rares » (2018).

L’objectif de ce rapport est de conseiller les pouvoirs publics sur les besoins de la France, sur ses choix possibles, et suggérer des stratégies au cas par cas. « Chaque État doit donc se pencher sur la sécurité de l’approvisionnement en matériaux (matériaux minéraux, métaux de base et métaux plus rares), pour la transition énergétique mais aussi pour satisfaire l’ensemble des secteurs industriels utilisant des technologies de pointe. »

Domaine de l’étude : « Les besoins en matériaux sont évalués pour la production d’électricité renouvelable (éolien à terre et en mer, solaire photovoltaïque et thermodynamique, électrolyse et pile à combustible) ; la production d’hydrogène par électrolyse ainsi que son utilisation dans des piles à combustible ; le stockage d’énergie mobile pour les transports ; le stockage stationnaire d’électricité pour compenser l’intermittence de certaines ENR électriques ;  le stockage long terme d’autres vecteurs d’énergie (méthane, hydrogène, chaleur, air comprimé), et du CO2 dans le sous-sol. »

Faits saillants :

Une bonne nouvelle. Grâce à la Nouvelle Calédonie, pas de problème de Nickel pour la France- encore faut-il que la Nouvelle Calédonie reste française !

Le programme de véhicules électriques français examiné (2 millions de véhicules par an à partir de 2040)fait appel à des quantités de lithium et de cobalt très élevées, qui excèdent, en fait et à technologie inchangée, les productions mondiales d’aujourd’hui, et ce pour satisfaire le seul besoin français !

Pour le lithium et le cobalt, la demande française dans le cadre du scénario retenu dépasse la production mondiale actuelle. L’analyse économique montre que le flux financier annuel global pour les seuls véhicules électriques à batteries est du même ordre de grandeur que celui des importations actuelles de pétrole pour assurer l’approvisionnement en carburant.

Autrement dit, la voiture électrique nous place dans la même dépendance, et pour le même coût, des producteurs de lithium et Cobalt que la voiture thermique vis-à-vis des producteurs de pétrole. Nous échangeons une dépendance contre une autre !

Si les moteurs électriques utilisent des aimants permanents, la consommation de certaines terres rares (le dysprosium et le néodyme), de samarium, de cobalt et de l’alliage aluminium-cobalt-nickel devient significative et peut peser sur les choix technologiques en fonction des capacités réelles d’approvisionnement. Nos choix technlogiques seront contraints

Pour la France, la valeur des matériaux nécessaires à la transition énergétique serait de 164 milliards d’euros

Le cas spécial du Cuivre, métal lié par excellence à la demandé électrique : À ces montants s’ajoute le cuivre nécessaire aux câblages et aux moteurs des véhicules électriques, soit 3,2 millions de tonnes ou 19,5 milliards d’euros. Au total, et sous les hypothèses précédentes, le montant en matériaux estimés au cours actuel s’élève à 164 milliards d’euros. Par destination, ce montant se répartit de la façon suivante (en milliards d’euros cumulés d’ici 2050) :

Ces tensions sur le cuivre ont fait l’objet d’une publication : Copper at the crossroads: Assessment of the interactions between low- carbon energy transition and supply limitations, Resources Conservation and Recycling. 163. 10.1016/j.resconrec.2020.105072.

“La pénétration des technologies à faible émission de carbone dans les secteurs des transports et de l’énergie (véhicules électriques et technologies de production d’énergie à faible émission de carbone) devrait augmenter considérablement la demande de cuivre d’ici 2050. Pour étudier comment les tensions sur les ressources en cuivre peuvent être réduites dans le contexte de la transition énergétique, nous examinons deux facteurs de politique publique : la mobilité durable et les pratiques de recyclage. Les résultats montrent que, dans le scénario le plus rigoureux, la demande cumulative de cuivre primaire entre 2010 et 2050 s’est avérée être de 89,4 % des ressources en cuivre connues en 2010. Ils soulignent également l’importance de la Chine et du Chili dans l’évolution future du marché du cuivre.

Voici l’évolution de la consommation de cuivre ; qui peut croire que c’est durable !