Quelques
explications sur l’ELF (Element Limitation Factor) et conséquences : les scénarios qui reposent sur des sources d'énergie
intermittentes en association avec batteries se heurtent à de sévères
risques de pénurie en matière premières.
Dans le blog sur les chiffres clés du nucléaire, j’ai
mentionné le nucléaire comme champion de
l’Element Limitation Factor et de la durabilité
C’était à vrai dire une conséquence de la très forte (
imbattable ?) forte densité énergétique des
combustibles nucléaires 1 g d'uranium 235 dégage autant d'énergie que 2,4
tonnes de charbon et 1,6 tonnes de pétroles !!!, de la disponibilité des
ressources, et surtout de la possibilité de recycler le combustible dans des
réacteurs de 4ème génération (Superphenix, Astrid…. et qui
fonctionnent déjà en Russie à Beloyarsk )
Et du fait que le nucléaire est aussi champion de l’économie en matériaux : une
étude du Department of Energy donne 800
t/TWh de béton et 160 t/TWh d’acier pour le nucléaire, et 8000 t/TWh de béton
et 1800 t/TWh d’acier pour l’éolien, soit un facteur 10 pour le béton et 11
pour l’acier, à l’avantage, très marqué, du nucléaire.
En fait, l’ELF (Element Limitation Factor
-limitation des éléments) est un critère de faisabilité /durabilité qui a
été présenté lors de la COP25
Schématiquement, l’idée est assez
simple : une technologie ne peut pas être considérée comme capable de
satisfaire les besoins si elle nécessite plus que la totalité des ressources
mondiales d'un matériau donné.
Et il est en fait très intéressant de
l’utiliser pour une analyse des Energies Renouvelables ( beaucoup plus que pour
le nucléaire qui passe le critère Haut la Main !)
C’est ce qu’a proposé M. Gerard Grundblatt
dans un tweet très intéressant que je reproduis ci-après
« L’éolien et PV sont-elles des énergies
réellement renouvelables ?
Les promoteurs et défenseurs de l’éolien et
du PV clament sur tous les tons le caractère RENOUVELABLE de ces énergies.
Ils oublient que celles-ci consomment des quantités astronomiques de matières premières
dont les sources peuvent devenir limites (en particulier métaux & terres
rares) pour la construction des équipements qui vont eux capter ces énergies
renouvelables intermittentes
Par exemple, une technologie ne peut pas être
considérée comme capable de satisfaire les besoins si elle nécessite plus que
la totalité des ressources mondiales d'un matériau donné. Pour mesurer ces
quantités un coefficient ELF Element Limitation Factor (limitation des
éléments) a été présenté lors de la COP25 http://gisoc.srweb.biz/gisoc/Docs/PosterCorrected.pdf
Le facteur ELF est défini comme le rapport
entre la consommation & les ressources. Si ce rapport est >1 la
technologie ne peut pas couvrir à elle seule 100 % des besoins énergétiques,
c'est-à-dire que ce facteur donne une limite supérieure pour chacune des
sources
Grâce à l'ELF, les lacunes de nombreux scénarios sont immédiatement visibles, en
particulier les scénarios qui reposent sur des sources d'énergie intermittentes
en association avec batteries »
Bon, donc sont soutenables ce qui n’est pas
trop loin de 1 le nucléaire, surtout avec surgénérateurs. Le stockage massif
dans des batteries se heurte à des limitations en lithium ; la production
d’hydrogène est victime de son pauvre rendement, l’hydraulique est limité par
le manque de sites, etc. l’énergie solaire se heurte à un problème sérieux
d’approvisionnement en métaux divers. En fait, comme l’écrit M. Gerard
Grundblatt , tous les scenarios fétiches des 100%ENR couplés à un stockage de
masse se heurtent à l’impitoyable pénurie de métaux et terres rares.
Impossibilité physique !
L’argent, l’indium, ainsi que le
praseodymium, le dysprosium, le terbium et le néodymium ont été
identifiés comme faisant face à des pénuries critiques potentielles à moins que
la production mondiale ne puisse augmenter de nombreuses fois par rapport à
leurs niveaux actuels. D’ici 2050, le besoin annuel d’indium pour
la seule production de panneaux (basé sur les modèles IPCC SR15 de croissance
de la capacité solaire photovoltaïque) dépassera la production mondiale
annuelle actuelle de douze fois !
Une telle pression de la demande introduit
une incertitude économique à long terme dans l’énergie solaire et éolienne, ce
qui pourrait rendre l’investissement non viable – et même une incertitude
physique fondamentale !
L’éolien, le solaire et les batteries menacés par une pénurie de matières
premières »
C’est ainsi que l’excellent Transitions et
Energies a pu titrer : « L’éolien, le solaire et les batteries
menacés par une pénurie de matières premières »
«Les énergies dites «propres», à savoir les éoliennes,
les panneaux photovoltaïques et les batteries des véhicules électriques, sont
totalement dépendantes de nombreuses matières premières et plus
particulièrement de métaux rares. Sans un approvisionnement continu, important
et fiable, il n’est pas question de voir se multiplier dans les prochaines
années les productions d’électricité par des renouvelables et les véhicules
électriques sur les routes. Toutes les
stratégies de transition énergétique faisant appel au solaire, à l’éolien et au
transport électrique par batteries sont aujourd’hui menacées. Quant aux
alternatives moins consommatrices de matières premières et plus locales, comme
l’hydrogène ou la géothermie, par exemple, elles ne figurent même pas en France
dans les plans à long terme des pouvoirs publics. »
L’avertissement
de l’AIE ! « Surveiller surveiller la sécurité de l’approvisionnement en minéraux nécessaires à
la transition écologique »
Quasiment simultanément, l’AIE (Agence Internationale de
l’Energie) prévenait : « La crise du Covid-19 a mis en évidence la nécessité de surveiller la
sécurité de l’approvisionnement en minéraux nécessaires à la transition
écologique »
Pour donner un ordre d’idées de cette dépendance aux
matières premières minérales et métalliques,
la construction d’une voiture électrique à batteries en nécessite 5 fois plus
qu’un véhicule à moteur thermique. De la même façon, construire un ensemble
d’éoliennes demande huit fois plus de matières premières qu’une centrale au gaz
offrant la même puissance théorique de production d’électricité. Et encore, les
éoliennes sont par définition intermittentes.
La
fabrication des batteries lithium-ion des véhicules électriques et des mêmes
batteries utilisées pour stocker l’électricité dans certains
réseaux est devenue aujourd’hui l’activité industrielle qui consomme le plus de
lithium et de cobalt dans le monde, respectivement
35% et 25% de la production. De la même façon, la consommation dans le
monde de cuivre et de nickel n’a cessé d’augmenter au cours des dernières
années.
Déjà, avant la pandémie de coronavirus, les tensions ne
cessaient de grandir sur les marchés de ses matières premières stratégiques.
Elles se sont aggravées depuis. D’abord, du fait du confinement généralisé qui
a désorganisé dans de nombreux pays la production et le transport des matières
premières. Elle s’est traduite aussi par une chute brutale des investissements
de capacité, pourtant indispensables pour faire face à une demande en constante
augmentation. Il faut ajouter à cela des tensions politiques grandissantes
entre la Chine, principal fabricant dans le monde de panneaux photovoltaïques,
de batteries lithium-ion, d’éoliennes et principal producteur et raffineur de
terres rares, et les pays occidentaux.
Il y a des risques géopolitiques associés à la production de nombreuses
matières premières essentielles à la transition énergétique.
L’agence Internationale de l’Energie appelle à considérer ce défi en termes
géostratégiques, à l’égal du pétrole et du gaz et souligne les risques que fait peser sur la transition écologique
le goulet d’étranglement que représente l’approvisionnement de matières
premières stratégiques.
«L’’idée de géopolitique énergétique est
typiquement associée au pétrole et au gaz. Par contraste, le solaire, l’éolien
et les autres technologies propres sont souvent considérées comme immunisées
contre de tels risques. Mais il y a des
risques géopolitiques associés à la production de nombreuses matières premières
essentielles à la transition énergétique »
Pour donner juste quelques exemples, le lithium, le
cobalt et le nickel sont indispensables et essentiels à la fabrication des
batteries lithium-ion. Le cuivre est absolument nécessaire pour développer les
réseaux électriques et y intégrer les productions solaires et éoliennes. Des
terres rares comme le néodyme sont utilisées pour fabriquer des aimants
puissants sans lesquels les moteurs électriques des éoliennes et des véhicules
ne fonctionnent pas. Même l’optimisation de technologies liées aux énergies
fossiles nécessite ses matières premières. Les centrales à charbon les moins
polluantes utilisent du nickel pour augmenter la température de combustion et
rejeter moins de CO2.
Et ces ressources ne sont plus réparties équitablement et
font déjà l’objet de stratégies de puissances, notamment de la part de la
Chine. Et lorsqu’elles ne dépendant pas de la Chine, d’autres facteurs aussi
inquiétants apparaissent. En fait, la
production de nombre de ses matières premières et métaux est plus concentrée
géographiquement que celle du pétrole et du gaz. Pour le lithium, le cobalt
et les terres rares, les trois premiers pays producteurs contrôlent plus des
trois quarts de leurs marchés respectifs. Dans certains cas, un seul pays
assure la moitié de la production mondiale.
La concentration est tout aussi grande dans les
opérations de raffinement. La Chine assure 50 à 70% du raffinement du lithium
et du cobalt. Elle contrôle également 85 à 90% du processus industriel de
traitement des terres rares et de leur raffinage et transformation en métaux et
en aimants.
Les conditions même d’extraction de ses matières
premières posent des problèmes humains et environnementaux. Ainsi, 20% de la
production de cobalt de la République Démocratique du Congo (RDC) dépend de
mineurs «artisanaux» qui extraient le métal dans des conditions proches de
l’esclavage. Le raffinage des terres rares est un processus qui nécessite de
nombreux produits chimiques très polluants et qui produit de grandes quantités
de déchets tout aussi polluants.
La récession économique mondiale née de la pandémie de
coronavirus ne devrait pas ralentir longtemps la demande de ses matières
premières. Surtout si les plans de relance économique un peu partout dans le
monde mettent l’accent sur la transition énergétique par les renouvelables et
les véhicules électriques à batteries. Or, de nombreuses mines fonctionnent
déjà à la limite de leurs capacités et des pénuries pourraient rapidement se
produire prévient l’AIE. Non seulement cela aura un impact sur la capacité à
fabriquer des éoliennes, des panneaux solaires et des batteries pour voitures
électriques, mais cela créera un problème très sérieux d’indépendance nationale.
L’AIE
appelle donc à la prudence et à l’anticipation, au moins à la prise en compte des
risques géostratégiques liés au développement des ENR.
Car si le soleil et le vent sont partout (ou à peu près),
ce n’est pas le cas des matières premières liées aux ENR… Et les ENR sont très
gourmants en métaux stratégiques.
Le
cas de la France : l’avertissement des deux Académies ( Sciences et
Technologies)
En ce qui concerne plus spécifiquement la France,
L’Académie des sciences et l’Académie des Technologies ont travaillé en commun
et publiés un rapport intitulé : « Stratégie d’utilisation des
ressources du sous-sol pour la transition énergétique française Les métaux
rares » (2018).
L’objectif de ce rapport est de conseiller les pouvoirs
publics sur les besoins de la France, sur ses choix possibles, et suggérer des
stratégies au cas par cas. « Chaque
État doit donc se pencher sur la sécurité de l’approvisionnement en matériaux
(matériaux minéraux, métaux de base et métaux plus rares), pour la transition
énergétique mais aussi pour satisfaire l’ensemble des secteurs industriels
utilisant des technologies de pointe. »
Domaine de l’étude : « Les besoins en matériaux
sont évalués pour la production d’électricité renouvelable (éolien à terre et
en mer, solaire photovoltaïque et thermodynamique, électrolyse et pile à combustible)
; la production d’hydrogène par électrolyse ainsi que son utilisation dans des
piles à combustible ; le stockage d’énergie mobile pour les transports ; le
stockage stationnaire d’électricité pour compenser l’intermittence de certaines
ENR électriques ; le stockage long terme
d’autres vecteurs d’énergie (méthane, hydrogène, chaleur, air comprimé), et du
CO2 dans le sous-sol. »
Faits saillants :
Une bonne nouvelle. Grâce à la Nouvelle
Calédonie, pas de problème de Nickel pour la France- encore faut-il que la
Nouvelle Calédonie reste française !
Le programme de véhicules électriques français examiné (2
millions de véhicules par an à partir de 2040)fait appel à des quantités de
lithium et de cobalt très élevées, qui excèdent, en fait et à technologie
inchangée, les productions mondiales d’aujourd’hui, et ce pour satisfaire le
seul besoin français !
Pour
le lithium et le cobalt, la demande française dans le cadre du scénario retenu
dépasse la production mondiale actuelle. L’analyse économique montre que le flux
financier annuel global pour les seuls véhicules électriques à batteries est du
même ordre de grandeur que celui des importations actuelles de pétrole pour
assurer l’approvisionnement en carburant.
Autrement
dit, la voiture électrique nous place dans la même dépendance, et pour le même
coût, des producteurs de lithium et Cobalt que la voiture thermique vis-à-vis
des producteurs de pétrole. Nous échangeons une dépendance contre une
autre !
Si les moteurs électriques utilisent des aimants
permanents, la consommation de certaines terres rares (le dysprosium et le
néodyme), de samarium, de cobalt et de l’alliage aluminium-cobalt-nickel
devient significative et peut peser sur les choix technologiques en fonction
des capacités réelles d’approvisionnement.
Nos choix technlogiques seront contraints
Pour
la France, la valeur des matériaux nécessaires à la transition énergétique
serait de 164 milliards d’euros
Le
cas spécial du Cuivre, métal lié par excellence à la demandé électrique :
À ces montants s’ajoute le cuivre nécessaire aux câblages et aux moteurs des
véhicules électriques, soit 3,2 millions de tonnes ou 19,5 milliards d’euros.
Au total, et sous les hypothèses précédentes, le montant en matériaux estimés
au cours actuel s’élève à 164 milliards d’euros. Par destination, ce montant se
répartit de la façon suivante (en milliards d’euros cumulés d’ici 2050) :
Ces tensions sur le cuivre ont fait l’objet d’une publication : Copper at the
crossroads: Assessment of the interactions between low- carbon energy
transition and supply limitations, Resources Conservation and Recycling. 163.
10.1016/j.resconrec.2020.105072.
“La pénétration des
technologies à faible émission de carbone dans les secteurs des transports et
de l’énergie (véhicules électriques et technologies de production d’énergie à
faible émission de carbone) devrait augmenter considérablement la demande de
cuivre d’ici 2050. Pour étudier comment les tensions sur les ressources en
cuivre peuvent être réduites dans le contexte de la transition énergétique,
nous examinons deux facteurs de politique publique : la mobilité durable et les
pratiques de recyclage. Les résultats montrent que, dans le scénario le plus
rigoureux, la demande cumulative de
cuivre primaire entre 2010 et 2050 s’est avérée être de 89,4 % des ressources
en cuivre connues en 2010. Ils soulignent également l’importance de la
Chine et du Chili dans l’évolution future du marché du cuivre.
Voici l’évolution de la consommation de cuivre ; qui peut croire que c’est durable !
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