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lundi 2 septembre 2013

Brevets sur le Vivant ; l’Europe n’existe pas !

Industrie de la santé : une découverte n’est pas une invention
 
  A la fin des années 1990, la société de biotechnologie Myriad Genetics, a obtenu aux Etats-Unis plusieurs brevets sur les gènes BRCA1 et 2, gènes dont les mutations sont associées à un risque élevé de cancers du sein et de l'ovaire. Depuis, Myriad Genetics a exercé aux Etats-Unis un monopole sur le marché des tests de prédisposition aux cancers du sein et de l'ovaire, monopole qu'elle a tenté d'imposer en Europe. En 2004, la fronde de généticiens européens, lancée dès 2001 par l'Institut Curie, a conduit l'Office européen des brevets (OEB) à révoquer ou réduire les brevets en Europe de Myriad Genetics. La décision de l’OEB était assez acrobatique, basée sur une description jugée insuffisante, et non sur le fond : la question centrale de la non-brevetabilité des gènes, sur laquelle l’Office et la Commission européenne n’ont pas de position, voire sont plutôt favorables.
 En 2013, après un long combat de 4 ans mené par des associations de médecins et de patients qui est allé jusqu’à la Cour Suprême des USA, celle-ci a tranché sur le fond. Un brevet est une invention, par conséquent sont non valables tous les brevets qui revendiquent tout ou partie d'un génome isolé de son environnement, qu'il soit humain ou non, qu'il soit ou non le siège de variations, mutations délétères ou polymorphismes, apparus spontanément. C'est une très bonne nouvelle pour les patients et les médecins qui auront un accès plus facile à des tests génétiques qui ne pourront plus faire l’objet de monopoles (les brevets initiaux de Myriad interdisaient tout autre test de détection basé sur la découverte, qui ne constitue pas une invention, du rôle dans le cancer des gênes BRCA1 et 2, même si celui-ci était différent, voire supérieur au test Myriad)
En revanche, la Cour Suprême américaine a rappelé sa position sur la brevetabilité de la bactérie Chakrabarty, obtenue en laboratoire par croisement entre deux bactéries. Ce nouveau micro-organisme capable de digérer les pollutions pétrolières est brevetable, car absent de la nature et né de l'ingéniosité de l'homme.
De même, elle a validé la brevetabilité des ADN complémentaires (ADNc), molécules d'ADN synthétiques copiées in vitro à partir des ARN messagers transcrits des gènes, et qui permettent la synthèse de protéines utilisées comme médicament, accordant ainsi une sécurité juridique à l’invention et au développement de ces protéines médicaments (hormone de croissance, insuline, interférons, anticorps contre le cancer…) C’est aussi une bonne nouvelle pour le développement de ces thérapeutiques sophistiquées et coûteuses. La présence d’une sécurité juridique et de règles saines de propriété intellectuelle constitue une nécessité première pour favoriser la recherche et l’innovation. C’était une des premières brique indispensable pour l’Europe de la recherche proclamée par le traité de Lisbonne, un domaine dans lequel les institutions européennes auraient pu et dû avancer rapidement. Ca ne coûte rien ou pas grand chose, ça rapporte beaucoup. Or, rien n’a été fait .
 
Agriculture : brevets contre COV
 
Et cela ne concerne pas seulement la santé, mais aussi l’agriculture, avec des implications économiques énormes. Ainsi Monsanto vient d’obtenir un brevet européen sur un brocoli dont la tête allongée facilite la récolte ; et il y a aussi la tomate ridée, qui contenant moins d’eau, se prête mieux à la fabrication de tomates séchées, des melons plus résistants à certains parasites etc.
En France, le Haut Conseil des Biotechnologies a condamné la possibilité de breveter des gênes ou caractères natifs et rappelé que pour les nouvelles variétés de végétaux existe depuis longtemps en France un système qui fonctionne fort bien, le certificat d’obtention végétal, et qui est reconnu par plus de 70 Etats. On arrive à des décisions absurdes, comme celle obligeant un semencier français (Gautier semences) à payer une redevance pour des laitues qu’il commercialise depuis longtemps, parce qu’elles contiennent un gène de résistance aux pucerons, existant dans la nature, qu’une société néerlandaise vient de faire breveter !
 En accordant sans réflexion, sans doctrine, sans évaluation, sans reconnaissance du droit existant, des brevets sur des végétaux, les Offices Européens et la Commission européenne jouent contre l’Europe. En ces domaines, soit l’Europe n’existe pas, soit quand elle se manifeste, c’est pour se tirer une balle dans le pied.
 

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