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jeudi 8 septembre 2022

Avis du CNTE (Conseil National de la Transition Ecologique) sur le projet de loi Borne d’ accélération des renouvelables)- version provisoire

 CNTE (Conseil National de la Transition Ecologique) : Projet de délibération 2022-04 : Projet d’avis portant sur le projet de loi relatif à l’accélération des énergies renouvelables

Un conseil très divisé et cela se voit 

En propos liminaire, Le CNTE regrette les délais beaucoup trop courts de transmission du projet de loi, de l’étude d’impact et de l’exposé des motifs lors de la phase de consultation.  Il reconnaît l’urgence à accélérer le déploiement des énergies renouvelables, pour répondre aux crises énergétiques, au dérèglement climatique et à la souveraineté énergétique, déplore  l’absence  de mesures d’économies d’énergie et de sobriété,

mais dans le même temps souligne :

« l’insuffisance de l’exposé des motifs, ne permettant pas de rendre un avis fondé sur un diagnostic et des connaissances partagés, ni d’appréhender l’objectif de déploiement des énergies renouvelables dans sa globalité »

Commentaire : Ce qui est un peu contradictoire avec la pétition de principe précédente !

Concilier le développement des ENR avec les risques de porter atteint à l’environnement et à la biodiversité !

Le CNTE :

- Attire l’attention sur l’importance de prendre en compte, pour la suite du débat sur le projet de loi, les positions exprimées par le Comité national de la biodiversité et le Conseil national de la protection de la nature,

Commentaire : Bon alors là c’est simple «  L’adéquation des objectifs éoliens offshore avec l’objectif de zéro perte nette de biodiversité inscrit aux articles L. 110- 1 et L. 163-1 du code de l’environnement paraît difficile voire impossible à atteindre au regard de la connaissance actuelle des incidences et surtout des moyens techniques d’expertise et de pilotage permettant d’y remédier efficacement, ainsi que l’objectif de préservation du paysage marin.

https://vivrelarecherche.blogspot.com/search?q=CNPN :

- Souhaite la consultation du Conseil national de la mer et des littoraux, du Conseil national de l’eau et de la Commission nationale du débat public ;

- Souligne l’insuffisance de l’étude d’impact du projet de loi, notamment sur les impacts environnementaux et sur l’impact des précédentes mesures de simplification déjà prises

- Insiste sur l’enjeu impératif de concilier le développement de nouveaux projets d’énergies renouvelables avec les enjeux de la crise climatique, de préservation de l’environnement, notamment ceux de la biodiversité, de l’eau, du littoral, de la mer, de la montagne et de leurs écosystèmes, au regard des risques de leur porter atteinte et d’augmenter l’artificialisation, créant de surcroît de potentiels conflits d’usage des espaces, dans un souci de souveraineté ;

Commentaire : En ce qui concerne l’éolien off shore et la pêche, pour ne pas parler du nautisme et du tourisme, les conflists existent déjà. Aucun projet n’a reçu l’accord des pêcheurs, Et ils ont raison de se méfier

Ainsi Job Shott, président d’EMK (syndicat des pêcheurs néerlandais) : « Avec ce qui est construit ou décidé en Mer du Nord, 25% des zones traditionnelles de pêches sont déjà occupées…Il faut comprendre que nous sommes chassés de la mer.

La Commission pêche du Parlement Européen a souligné que les parcs éoliens ne devraient être construit qu’en l’absence d’incidences négatives sur la pêche, qu’il y avait un véritable risque sur « l’approvisionnement responsable et durable en denrées alimentaires et la sécurité alimentaire », et appelé l’Union à légiférer davantage « si les États membres n’intègrent pas équitablement les pêcheries dans leur planification de l’espace maritime ».


Et pour les surfaces occupées, la physique (densité d’énergie) est impitoyable !



-Insiste, de la même manière, sur le fait que le développement de ces projets doit intégrer les enjeux sociaux sous-jacents notamment ceux de l’emploi ;

- Rappelle la responsabilité de la France et ses engagements internationaux dans le domaine de la biodiversité

- Insiste sur la nécessaire articulation des mesures du projet de loi avec la Programmation pluriannuelle de l’énergie et le débat à venir dans le cadre de la stratégie française sur l’énergie et le climat, ainsi qu’avec les travaux européens relatifs au plan REPowerEU de la Commission européenne

Commentaire : En effet, avant de se lancer dans la construction de 50 parcs géants éoliens off shore, il serait bon de savoir quelle sera la future PPE. Supposons qu’elle vise la prolongation des centrales nucléaires à 70 voire 80 ans comme pour des centrales homologues aux USA. et acte la construction de 12 à 24 EPR2… ce n’est plus pareil.

- Certains membres dénoncent le fait que l’article 3 risque d’aboutir à une régression du droit de l’environnement, et demandent sa suppression ;

Commentaire : l’article 3 dit joliment « : Relever tous les seuils de soumission à évaluation environnementale ou pour réaliser un examen au cas par cas pour les porter à un niveau découlant du parangonnage européen.

Traduction : comme les évaluations environnementales prennent du temps, on essaiera de s’en passer dans la plupart des cas. Sauf que c’est contradictoire avec la jurisprudence du Conseil d’Etat :

«  Il résulte des termes de la directive, tels qu’interprétés par la Cour de justice de l’Union européenne, que l’instauration, par les dispositions nationales, d’un seuil en-deçà duquel une catégorie de projets est exemptée d’évaluation environnementale n’est compatible avec les objectifs de cette directive que si les projets en cause, compte tenu, d’une part, de leurs caractéristiques, en particulier leur nature et leurs dimensions, d’autre part, de leur localisation, notamment la sensibilité environnementale des zones géographiques qu’ils sont susceptibles d’affecter, et, enfin, de leurs impacts potentiels ne sont pas susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine. » (CE, 15/04/2021, 425424)

Difficile par exemple de prétendre que les gigantesques parcs éoliens off shore prévus  ne sont pas susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement

- Rappelle que la participation du public aux débats légitime une transition énergétique choisie, et les projets en découlant, et constitue un facteur essentiel d’acceptabilité des projets ;

- Soutient que l’accélération et la parallélisation de procédures de consultation sans gardes fous pourraient affaiblir l’avis de l’Autorité environnementale portant sur les impacts environnementaux, et limiter ainsi le porté à connaissance du public, et s'interroge en ce sens sur la possibilité de lancer l’enquête publique en l’absence de l’avis de l’Autorité environnementale

Remarque : Très clairement le CNTE est donc contre l’une des dispositions phares du projet qui supprimerait l’obligation d’un débat publics pour chaque projet de parc pour le remplacer par un seul et unique grand débat public pour toute une façade maritime, le public s’exprimant sur de grandes zones «à vocation “éolien en mer”!

- Estime que l’égalité d’accès des citoyens requiert le maintien d’une présence physique lors de la participation du public, pour éviter la dématérialisation totale

Remarque : le CNTE aurait pu faire remarquer que l’ensemble de ces dispositions parait contraire à la Convention d'Aarhus. La Convention d'Aarhus, signée le 25 juin 1998 par trente-neuf États dont la France porte  sur  l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement.

Elle recommande notamment d’améliorer l'information environnementale fournie par les autorités publiques, de favoriser la participation du public à la prise de décisions ayant des incidences sur l’environnement; et d’étendre les conditions d’accès à la justice en matière de législation environnementale et d’accès à l’information.

Bref, tout ce qu’envoie balader la loi Borne d’accélération des ENR

Sur la RIIPM : Raisons impératives d'intérêt public majeur : la protection de la biodiversité est au même niveau une raison impérative d’intérêt public

- Certains membres s’opposent au mécanisme de reconnaissance automatique de la RIIPM (au I de l’article 6 de projet de loi) et la limitation du contrôle par le juge (au II de l’article 6 de projet de loi) ;

Commentaire : c’est clair, et ce serait encore une des, voire la disposition majeure qui sauterait !

- Attache une importance essentielle au strict respect de la séquence ERC (avec la priorité donnée à l’évitement) et des conditions encadrant la dérogation relative aux espèces protégées et sera vigilant à la mise en oeuvre des mesures de compensations, sans remettre en cause le potentiel de production alimentaire ;

Commentaire : En général déjà, les études sur la biodiversité ont lieu après le choix des premières zones, et, pour certaines, leur résultat est attendu après la construction de la zone éolienne ! Or, comme le constate le CNPN,dans ces conditions, l’Eviter de la séquence éviter, réduire compenser devient absolument impossible !

- Attire l’attention sur la nécessité d’encadrer les conditions dans lesquelles la déclaration d’utilité publique peut reconnaître, pour l’opération concernée, le caractère d’opération répondant à une raison impérative d’intérêt public majeur ; rappelle que la protection de la biodiversité est au même niveau une raison impérative d’intérêt public et que l’une ne saurait l’emporter sur l’autre ;

Concernant plus spécifiquement l’éolien off shore, le CNTE

- soutient que la mutualisation des débats publics à travers le document stratégique de façade ne doit pas nuire à la concertation projet par projet ;

- attache une importance essentielle à intégrer l’ensemble des enjeux sectoriels dans la planification spatiale maritime, et non pas les seules énergies marines renouvelables, aucune activité ne devant être écartée. Cette planification doit prendre en compte les impacts cumulés. A cet égard, le CNTE rappelle les directives européennes respectives à l’évaluation Plan programme et à l’évaluation Projet;

-  Appelle à préserver l’exercice des différentes pratiques de production halieutique et de pêche durables qui concourent, notamment, à la souveraineté alimentaire ainsi qu’à éviter et réduire les impacts directs générés sur les ressources et l’environnement marin ;

-Attire l’attention sur la nécessaire préservation des zones littorales lors des installations de production d’énergie et de leurs postes de raccordement ;

Concernant le titre IV relatif aux mesures de financement des énergies renouvelables et de partage de la valeur, le CNTE

- Appelle à ce que le service public concourt à garantir la sécurité de l’approvisionnement et l’accès de tous à l’énergie ;

Commentaire : ça me semble mettre en cause l’une des dispositions phares prévoit d’octroyer un tarif réduit de l'électricité aux voisins de centrales solaires ou de parcs éoliens. Dommage que le mot « péréquation tarifaire » ne soit pas prononcé !

En résumé, le CNTE insiste « sur l’enjeu impératif de concilier le développement de nouveaux projets avec les enjeux […] de préservation de l’environnement, notamment ceux de la biodiversité ». « Certains membres » du CNTE s’opposent au mécanisme de reconnaissance automatique de raison impérative d’intérêt public majeur, qui permet de déroger à la protection d’espèces ou d’habitats pour autoriser un projet renouvelable. Et « dénoncent » le risque que le projet aboutisse « à une régression du droit de l’environnement ».

Disons-le clairement, malgré la pétition de principe en faveur des ENR qui ouvre l’avis, il ne resterait plus grand chose du projet de loi d’accélération des ENR !

Et c’est très bien ! 



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