w.fondapol.org/etud/relocaliser-en-decarbonant-grace-a-lenergie-nucleaire/
Remarquable article de Valérie Faudon de la SFEN ( janvier 2021) :
Extraits
Le nucléaire est en France un outil de souveraineté permettant de résister aux chocs énergétiques, un facteur de compétitivité-coût favorisant l’attractivité internationale du pays pour les industriels et un vecteur de compétences, terreau d’une possible réindustrialisation au cœur des territoires. Finalement, la filière nucléaire française est un opérateur clé de la décarbonation en France et présente des atouts certains, non seulement parce que l’empreinte carbone des produits et services est amenée à devenir un nouveau facteur de compétitivité mais aussi parce qu’elle permet à notre pays de se placer dans la course au carburant vert (l’hydrogène) et de se positionner dans les secteurs de demain gros consommateurs d’électricité, tels celui des data centers.
Avec son électricité
décarbonée nucléaire et renouvelable, la France dispose d’un avantage
compétitif exceptionnel pour produire de l’hydrogène bas carbone moins cher sur
son propre sol
Le nucléaire, en tant qu’énergie bas carbone et en tant que troisième secteur industriel français, est source d’avantages comparatifs clés sur lesquels le pays peut s’appuyer dans ses stratégies de relocalisation et de réindustrialisation.
1)Le nucléaire a permis de répondre au premier choc pétrolier
2)La France doit
se préparer à de nouveaux chocs énergétiques
3) Le socle
nucléaire français doit être sécurisé sur le long terme
Dans les années qui
viennent, la sécurité d’approvisionnement française pourra être assurée par la
rénovation et la prolongation des réacteurs nucléaires existants pour cinquante
ou soixante ans d’exploitation… Au-delà, à l’horizon 2040, la France peut
être confrontée à un important « effet-falaise » lié au calendrier historique
extrêmement rapide de construction des réacteurs dans les années 1980.
Face aux enjeux et dans le contexte d’incertitude actuel, il est nécessaire d’anticiper le renouvellement du parc nucléaire en préparant la mise en service de nouveaux moyens de production nucléaires dès le début de la décennie 2030. Ne pas prendre la décision de renouveler le parc nucléaire en temps et en heure peut exposer notre pays à des risques très importants. Ainsi, en Belgique, début octobre 2020, le nouveau gouvernement a confirmé, dans un accord de coalition avec le parti écologiste, la fermeture de ses centrales nucléaires pour 2025, alors qu’elles représentent plus de la moitié de l’électricité du pays. Le gestionnaire du réseau a souligné le risque que le pays ne puisse alors s’approvisionner chez ses voisins, comme la France ou l’Allemagne, qui n’auront pas nécessairement la capacité excédentaire disponible au moment elle en aura besoin. Alors que les seuls moyens de remplacement susceptibles d’être construits rapidement ne pourront être que des centrales à gaz, très émettrices de CO2, on voit que la fermeture du parc nucléaire représenterait une régression à la fois en matière de sécurité d’approvisionnement et en matière climatique.
4)Un facteur de compétitivité
La production et la distribution d’électricité sont, d’une manière générale, l’une des infrastructures clés d’une économie. C’est un facteur différenciant pour attirer les investisseurs étrangers : une étude de 2017, réalisée dans 81 pays, a ainsi montré que la disponibilité de l’électricité était le premier facteur en termes d’impact pour attirer les investisseurs, devant la liberté économique.
Les principaux clients : il s’agit des plus gros sites industriels français regroupant la quasi- totalité des électro-intensifs des secteurs historiques (sidérurgie, métaux non ferreux, chimie lourde, papier, automobile ou encore transport ferroviaire)
5)La France est internationalement reconnue pour la qualité de son électricité
Aujourd’hui, grâce à son parc nucléaire, son parc hydroélectrique et son réseau de transport d’électricité, la France bénéficie d’une excellente réputation internationale. Selon le Choiseul Energy Index : « En termes de qualité, de disponibilité et d’accès à l’électricité, la France arrive en tête du classement, ex æquo avec la Corée du Sud. Cela s’explique notamment en raison d’un parc nucléaire important. » Par qualité de la fourniture d’électricité, on entend en général deux facteurs : la continuité de l’alimentation électrique et la qualité de l’onde de tension (absence de perturbations sur la tension et la fréquence)
6) Les prix de
l’électricité industrielle en France sont parmi les plus bas
Malgré des progrès
très importants en termes d’efficacité énergétique, les industriels restent de
grands consommateurs d’électricité. Pour certains, la question du prix de
l’électricité comme facteur de production est même un point clé de leur
compétitivité, donc de leur décision d’investir, ou de rester en France.
Aujourd’hui, la France fait partie des pays d’Europe où le prix de
l’électricité industrielle est le plus bas, avec les pays scandinaves, la
Finlande, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Slovénie.
Ces industries se sont développées en s’appuyant sur le parc hydroélectrique et nucléaire, qui garantissait une électricité avec des prix à la fois prédictibles et bon marché…Ainsi, le site Aluminium Dunkerque, implanté historiquement par le groupe Pechiney dans les Hauts-de-France, sur le site même de la centrale nucléaire de Gravelines, n’a jamais fait l’objet d’une délocalisation, et il est aujourd’hui le plus grand producteur européen d’aluminium primaire
7) Un vecteur de compétences : Avec le nucléaire, la France dispose d’une filière de haute technologie encore complète
La filière nucléaire est la troisième filière
industrielle française, derrière l’aéronautique et l’automobile, avec plus de
3.000 entreprises, dont 63,8% de PME et 12,5% d’entreprises de taille
intermédiaire (ETI) ; elle représente 6,7% de l’emploi industriel en France
avec plus de 220.000 emplois (directs et indirects) : Les activités du
secteur nucléaire ont un effet d’entraînement important sur le reste de
l’économie : une étude récente estime que, d’ici à 2050, en Europe, chaque euro
issu des taxes payées par l’industrie nucléaire générera 2,50 euros de recettes
publiques
8) Un opérateur clé de la décarbonation
Grâce au nucléaire et
aux énergies renouvelables, la France dispose d’un mix décarboné à plus de 90%,
soit une des électricités les moins carbonées du monde. Les émissions moyennes
de CO2 en France sont inférieures à 50 g/kWh, bien en dessous de celles des
pays voisins (environ 400 g/kWh pour l’Allemagne et 260 g/kWh pour l’Italie,
par exemple) 54. Alors que la neutralité carbone devient un impératif pour les
entreprises, la France dispose, avec son électricité décarbonée, d’un nouveau
facteur d’attractivité essentiel.
Une étude de Deloitte
pour l’Uniden sur plusieurs secteurs
(acier, aluminium, ciment, papier, PVC, sucre et verre plat) montre que le
décrochage français de 1995 à 2015 dans ces industries s’est traduit non
seulement par une perte de 13.000 emplois, mais aussi par une augmentation de
50% de l’empreinte carbone associées à ces productions substituées. L’Uniden
parle d’un effet « double peine » et met en valeur que la localisation
industrielle est à la fois une donnée économique et environnementale : ces deux
dimensions ne sont plus autonomes. La même étude présente un scénario de
reconquête industrielle dans ces secteurs, avec la création de 9.600 emplois et
une baisse des émissions de 5 millions de tonnes de CO2 équivalent, avec une
contribution positive de toutes les filières.
9)Un atout pour le développement de l’industrie 4.0
La transformation numérique de l’industrie est reconnue comme l’un des leviers pour changer le modèle industriel et économique de nombreux secteurs. Dans l’industrie 4.0, les nouvelles technologies de l’information (robotique, impression 3D, big data…) permettront, selon Olivier Scalabre, directeur associé au bureau de Paris du Boston Consulting Group, le développement de « petites usines dites intelligentes, automatisées, capables d’une grande flexibilité dans la production et situées au plus près des clients ou consommateurs
10) Un avantage dans la course au nouveau carburant vert : l’hydrogène bas carbone
Aujourd’hui, de
nombreuses institutions estiment que l’hydrogène bas carbone pourrait jouer un
rôle important pour atteindre les objectifs de neutralité carbone. À court
terme, il s’agira de décarboner l’hydrogène utilisé actuellement dans
l’industrie, produit à base d’énergies fossiles très émettrices de CO2.
Surtout, il pourra
être un vecteur de décarbonation pour d’autres usages existants, difficiles à
décarboner par l’électricité, comme le transport lourd (de manière très
complémentaire aux solutions électriques). À terme, certains voient le vecteur
hydrogène contribuer à des solutions de stockage intersaisonnier dans des mix
électriques comportant une part importante d’énergies renouvelables variable
Le fonctionnement en période d’excédent (prix bas de l’électricité) conduit à des facteurs de charge faibles pour les électrolyseurs et nécessite de déployer rapidement une très grande capacité d’électrolyseurs, au point de poser une question de faisabilité. Ce fonctionnement constitue donc un enjeu important pour l’aval de la chaîne qui doit trouver les solutions afin d’assurer la continuité de son approvisionnement en dehors des périodes de production (le stockage, par exemple).
La solution avec électricité en base permet d’atteindre des facteurs de charge significatifs pour les électrolyseurs (entre 3.000 et 6.000 heures/an). Elle permet ainsi de répartir les électrolyseurs près des lieux de consommation industrielle, Du fait de la disponibilité de l’électricité sur tout le territoire. Il est de cette façon possible d’économiser sur la chaîne logistique associée à l’hydrogène vaporeformé. Enfin, elle offre des possibilités de services systèmes (effacement) lors des périodes de tension.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Commentaires
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.