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vendredi 30 décembre 2011

Post-doctorats (PhD ) : vers l’esclavage ?



Post-doctorats (PhD ) : vers l’esclavage ?

Les invisibles de la recherche

Marco Zito est un physicien des particules, travaillant au CEA, et responsable d’un programme de recherche sur les neutrinos. Dans sa chronique du Mond - supplément sciences - du 24 décembre, il pourrait nous parler de l’expérience très médiatisée semblant montrer une vitesse de déplacement supérieure à la lumière ; mais c’est un autre sujet qu’il a choisi : le sort des jeunes chercheurs après leur doctorat.
Merci à lui, il fait preuve d’un courage et d’un souci bien peu mandarinal que beaucoup à de ses collègues pourraient lui envier.
Ces post-doc, qu’il appelle les invisibles de la de la recherche, ont dans les trente ans, un niveau d’étude au moins bac plus huit, souvent des charges de familles - ou aimeraient en avoir-. Ils vont de postes en postes, souvent  précaires, en attendant d’obtenir un poste stable, en général dans un grand organisme de recherche, qui, peut-être n’arrivera pas. Lorsque le séjour à l’étranger se prolonge, leur expérience s’accroît mais leur situation ne s’arrange pas : loin des commissions, loin des postes…
 « Pendant la durée de leur contrat, écrit M. Zito, ils sont soumis à une énorme pression, au point que leur devise est publish or perish. Ils doivent assurer des tâches techniques, remplaçant parfois des techniciens, avancer vite et bien dans leurs travaux, obtenir des résultats, prendre des responsabilités. Cela pousse parfois à une compétition très forte.Certains quittent la recherche, d’autres au contraire enchaînent les contrats en passant d’ »un laboratoire et d’un pays à l’autre ».

La science est devenue dépendante du travail bon marché

M. Zito cite aussi un responsable scientifique du NIH ( National Institute of Health) américain : «  la science est devenue dépendante du travail bon marché. Les chercheurs seniors aiment avoir des personnes qui vont se décarcasser pour eux, quatorze heures par jour, sept jours par semaine. Les post docs sont essentiels pour le système scientifique, ils sont au courant de toutes les nouvelles technologies, ils connaissent les « classiques scientifiques », ils peuvent écrire les articles et enseigner. Qui n’en voudrait pas ? C’est bien utile aux chercheurs seniors d’avoir tous ces esclaves qui travaillent pour eux. »

M. Zito rappellent aussi que ces jeunes post doc sont soumis à l’arbitraire du directeur du laboratoire  - sa recommandation sera souvent nécessaire pour obtenir un nouveau contrat ou un poste stable. Aux Etats-Unis, sa signature sera indispensable au renouvellement du visa. En 2006, dans la revue science, une jeune femme a témoigné comment son boss l’avait menacé de renvoi si elle décidait d’avoir un enfant : « c’était comme de l’esclavage ».

Cette situation des jeunes chercheurs s’est dégradée au fil des ans. Il a d’abord fallu avoir une thèse pour être recruté, puis un post-doc, puis plusieurs, puis accepter des postes ou financements temporaires. Elle s’est extraordinairement dégradée encore récemment lorsque l’ANR (Agence nationale de la Recherche ? Association des négriers ?) et les Institutions Européennes se sont entiché du modèle américain reposant sur l’exploitation des post doc, en en prenant les inconvénients sans les avantages  et les conditions (la vie sur l es campus américains, les rémunérations.. .et l’exploitation des étudiants du monde entier- au fait, combien de jeunes américains dans les laboratoires de recherche des Universités US ?

Une urgence absolue ; remédier à la situation scandaleuse des jeunes chercheurs

Cette situation scandaleuse – quasi esclavagiste  - faite aux jeunes chercheurs met en péril la recherche et l’économie européenne. Comment s’étonner que les élèves des Ecoles d’Ingénieurs, que les meilleurs étudiants ne soient plus attirés par la recherche ?  Comment accepter des situations temporaires, précaires, exigeantes,  mal payées, un quasi-esclavage au service de mandarins – et ceci jusqu’à 30-35 ans ?
La muraille de Chine a pu se construire sur le travail des esclaves, ce ne sera plus possible pour l’Europe de la recherche. Il y a d’ailleurs une indécence totale à proclamer cet objectif et à laisser s’installer et perdurer l’exploitation des jeunes chercheurs.
Pendant ce temps, l’Inde et la Chine font revenir massivement leurs post-doc en leur offrant des postes permanents, des laboratoires bien équipés, des rémunérations conséquentes. On parie sur l’avenir ?
Dans le domaine de la recherche, l’urgence absolue consiste en l’amélioration de la carrière et de la situation des jeunes chercheurs – sans quoi il n’y aura bientôt plus de recherche. Il faut en particulier que le recrutement dans les organismes de recherche ait lieu pendant ou juste après la thèse – éventuellement sous condition d’effectuer un Phd souvent formateur, mais dans des conditions acceptables en terme d’indépendance et de sécurité.





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