Viv(r)e la recherche se propose de rassembler des témoignages, réflexions et propositions sur la recherche, le développement, l'innovation et la culture



Rechercher dans ce blog

lundi 12 octobre 2015

Filibanserin : Chercheurs et Margoulins


L’Agence américaine des médicaments (FDA), a donné son accord mardi 18 août à la commercialisation du Flibanserin, le premier « Viagra féminin », du groupe Sprout Pharmaceuticals, destiné aux femmes non ménopausées souffrant d’un manque de désir sexuel.
C’est une molécule qui a eu une vie pour le moins agitée. La FDA l’avait déjà rejeté une fois en 2010 lorsqu’il avait été présenté par  le laboratoire allemand Boehringer. Après ce refus, Boehringer Ingelheim, l’avait vendu à la firme américaine Sprout.   Sprout a présenté une nouvelle demande en 2013, accueillie par un nouveau refus. L’agence avait noté que la faible différence d’efficacité avec le placebo ne justifiait pas les risques encourus.
Trois essais cliniques ont été menés aux Etats-Unis et au Canada sur 2.400 femmes non ménopausées et âgées de 36 ans en moyenne, qui souffraient de ce syndrome de faible désir sexuel. Seulement 10 % d’entre elles ont fait part d’une amélioration significative de leur satisfaction dans leurs relations sexuelles. Le produit "n’a apparemment pas amélioré les performances sexuelles", précise la FDA. Le Flibanserin peut provoquer de la somnolence, une importante chute de tension artérielle et même des syncopes. Ces effets secondaires augmentent avec la prise d’alcool ou de certains médicaments. Le Filibanserin ou Addyi avait été originellement développé comme antidépresseur ; c’est une molécule qui agit sur les voies de la sérotonine, dans le système nerveux central- donc un mécanisme qui n’a rien à voir avec celui du Viagra ou ses analogues.
La décision de la FDA a été acquise par un vote de dix huit contre six, après un lobbying intense et encore jamais vu des laboratoires Sprout. Un groupe féministe, Even the Score, largement subventionné par Sprout, a accusé la FDA de sexisme pour avoir rejeté par deux fois l’approbation du Flibanserin, rappelant que le Viagra est commercialisé depuis 1998 pour soigner les dysfonctionnements sexuels masculins et que 24 molécules avaient été approuvées dans cette indicationpour les hommes contre zéro pour les femmes – ce qui est grossièrement faux ,  ce chiffre de 24 comprenant les formes génériques du Viagra et des médicament à base de testostérone, non approuvés par la FDA. En plus de ses campagnes dans la presse, Sprout a financé, organisé, préparé le témoignage de dizaines de patients devant la FDA ainsi que des manifestations devant l’agnce pendant la procédure d’examen. Le Dr Caleb Alexander, co-directeur  du  Johns Hopkins Center for Drug Safety a parlé “d’une  campagne de plaidoyer sans précédent par son ampleur et la composition et la façon dont ont été  enrôlé  décideurs et les groupes de défense ». Le prestigieux journal Nature (27 aout 2015) a accusé la FDA de faire preuve de « vulnérabilité » pour avoir ainsi cédé à une campagne d’intimidation et changé sa décision, sans que rien de nouveau n’ait été apporté par Sprout concernant le manque d’efficacité et les effets secondaires. Un autre groupe féministe, la New View Campaign, menée par la psychologue et thérapeute Leonore Tiefer, accusé les groupes pharmaceutiques de « médicaliser le sexe » pour gagner de l’argent
Et de fait, Sprout a l’intention de gagner beaucoup d’argent, justifiant les craintes des membres de la FDA qui craignaient une large utilisation y compris hors  prescriptions, compte-tenu du savoir faire évident de Sprout en terme de manipulation de l’opinion. Le groupe a en effet commencé d’annoncer  qu’Addyi pouvait traiter « la forme la plus commune de dysfonction sexuelle féminine, qui affecte environ une femme sur dix aux US »…
Pendant que des margoulins conçoivent le développement de médicament comme une action de propagande sur l’opinion publique,  jettent le discrédit sur l’industrie pharmaceutique, mettent les patients en danger et subvertissent le fonctionnement des agences de régulation,  la recherche pharmaceutique ne cesse de diminuer, comme l’illustre encore la fermeture du centre de recherche de Glaxo (GSK)en France,  aux Ulis.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Commentaires

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.