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mercredi 7 octobre 2015

Mort de François Dagognet : François Dagognet et le Positivisme


Un hommage d’abord, et un petit correctif à la notice nécrologique du Monde. Citation :  « Elève de Georges Canguilhem, marqué également par la pensée de Gaston Bachelard, François Dagognet a consacré à chacun d’eux un ouvrage. Sa double formation philosophique et scientifique l’a conduit logiquement à des travaux d’épistémologie de la médecine (La Raison et les remèdes, PUF, 1964, rééd. 1984) et de la biologie (Le Catalogue de la Vie, PUF, 1984)… Au premier regard, la diversité des thèmes abordés par François Dagognet semble devoir donner le tournis. Au fil d’une bonne cinquantaine de volumes – publiés principalement aux Presses universitaires de France, à la Librairie philosophique J. Vrin, chez Odile Jacob et aux Empêcheurs de penser en rond – il est question des techniques, de sciences, d’industrie, d’éthique, d’esthétique, de droit, de politique, d’économie et bien sûr de métaphysique...

Oui, mais pourquoi ne pas parler aussi de l’influence d’Auguste Comte, que Dagognet a souvent commenté. Avec Michel Serres et Allal Sinaceur, il a réédité et commenté les 45 premières leçons du Cours de philosophie Positive. Dans Suivre son chemin, il affirmait que le philosophe ne doit pas être  un spécialiste, mais qu'il est ou doit être, selon les remarques d'Auguste Comte, « le spécialiste des seules idées générales. Il lui faut aussi, tâche impossible, parcourir la physique, la métaphysique, la morale, la politique, l'esthétique, la psychologie ». Il a aussi dirigé Heurs et malheurs du positivisme comtien, et participé à un Auguste Comte aux PUF. Médecin, François Dagognet a beaucoup publié sur sa discipline initiale de formation et un article consacré à sa philosophie médicale s’intitule : François Dagognet: un nouveau positivisme pour la médecine. De formation scientifique, ayant une connaissance générale des méthodes et résultats des diverses sciences, et ayant étudié en profondeur une science particulière, François Dagognet répondait parfaitement  à ce que préconisait Comte pour les philosophes : un cas pas si fréquent.

Se référant à un entretien avec François Dagognet,  Le Monde rappelle encore cette citation : « Le monde des objets, qui est immense, est finalement plus révélateur de l’esprit que l’esprit lui-même. Pour savoir ce que nous sommes, ce n’est pas forcément en nous qu’il faut regarder. Les philosophes, au cours de l’histoire, sont demeurés trop exclusivement tournés vers la subjectivité, sans comprendre que c’est au contraire dans les choses que l’esprit se donne le mieux à voir. Il faut donc opérer une véritable révolution, en s’apercevant que c’est du côté des objets que se trouve l’esprit, bien plus que du côté du sujet. »

Là encore, cette attitude envers la psychologie est assez caractéristique du Positivisme. Comte dénie à la psychologie le statut de science en pointant une impossibilité épistémologique: « Vous voulez observer votre cerveau, mais avec quoi l’observerez-vous » ? Ou, dans une autre version : « On ne peut pas à la fois être au salon et dans la rue. ». Pour Comte, si l’on peut connaître l’esprit humain, c’est par ses réalisations qui sont les sciences, les arts, l’histoire ; bref, toutes ses créations, y compris les objets chers à François Dagognet, qui se disait « matériologue » par  opposition aux matérialistes, et qui a  pu aussi trouver chez Comte, au moins esquissée,  l’idée d’un matérialisme qui serait aussi un spiritualisme.
 
 

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