Que
s’est il passé ?
Les attentats de Paris de janvier et
novembre 2015, nous imposent, au-delà de la sidération normale, une réflexion sur l’islam. Que s’est-il passé ?
(ce titre faisant allusion bien sûr à l’utile essai de Bernard Lewis, qui
pointait déjà le divorce des civilisations islamiques et de l’esprit de la
modernité, en particulier de la science moderne).
Voici une analyse positiviste possible. Il existe des lois d’évolution des sociétés
(loi des trois états de Comte, etc.), comme il existe des lois physiques,
chimiques, biologiques. Dans les civilisations islamiques, ces lois, au moins
en trois moments critiques, n’ont pas été suivies.
Au septième siècle, le monde arabe est
passé directement du fétichisme (ou animisme, par exemple l’adoration de la Kaaba)
au monothéisme, sans passer par les étapes intermédiaires des polythéismes de
type égyptiens et greco-romains (suprématie sacerdotale, puis militaire). Il en
est résulté un monothéisme importé (des juifs et des chrétiens) dans une
société et des mentalités qui n’ y étaient pas préparés par une évolution
endogène, un monothéisme incomplet, qui n’ a pas mis en place la séparation des
pouvoirs spirituels et temporels, et qui, cela est lié, pratique plus que les
autres religions qui ont évolué différemment, la conversion par la conquête.
Au cours du XXème siècle, la
civilisation arabo-musulmane a tenté de passer de l’état théocratique à l’état
positif, industriel, laïque, le tout encore sous des influences importées, sans
l’indispensable préparation de la phase critique, c’est-à-dire sans avoir assimilé
les idées de liberté de pensée, de souveraineté du peuple et d’égalité pour
dissoudre respectivement l’ordre théocratique, politique et social . Il en est
résulté de très grand désordres et des dictatures ineptes ou insupportables.
Enfin, la civilisation arabo-musulmane
s’est trouvée confrontée aux résultats de la science occidentale, à ses
pouvoirs techniques, sans l’indispensable préparation de la mentalité et de la
méthode scientifique.
Les lois positivistes d’évolution des
sociétés ne peuvent ainsi être ignorées sans causer d’immenses chaos et
régression. Il ne peut y avoir de « democracy building », de « civilisation
building » sans une évolution sociologique propre.
Que
faire ? Malala.
Posant ainsi le problème, le Positivisme
permet d’entrevoir une solution possible. C’est par la formation à la mentalité
scientifique, à la compréhension des méthodes et résultats des principales
sciences qu’une évolution bénéfique
pourra se produire. Plus il y aura de musulmans étudiant les sciences, plus il
y aura d’ingénieurs, de chercheurs musulmans, plus le fanatisme islamisme, plus
la violence théocratique reculeront. L’occident peut (et doit) aider cette
évolution, il ne peut s’y substituer.
Cela paraît naïf ? Alors écoutons
la formidable Malala, cette fillette pakistanaise gravement blessée par les intégristes
musulmans parce qu’elle bravait leur interdiction d’aller à l’école, sans doute
l’un des Prix Nobel de la Paix les plus mérités qui soit, et aussi l’un des
discours es plus émouvants :
« L'éducation est l'une des
bénédictions de la vie - et un de ses nécessités. Cela a été mon expérience
pendant la durée de vie de 17 ans. Dans ma maison dans la vallée de Swat, dans le
nord du Pakistan, je ai toujours aimé l'école et apprendre de nouvelles choses.
Je me souviens quand mes amis et moi-même décorions nos mains avec du henné
pour des occasions spéciales. Au lieu de dessiner des fleurs et autres modèle, nous peignions nos mains avec des formules et
équations mathématiques. »
Et Malala d’appeler les USA à cesser
les attaques de drones dans les régions frontalières du Pakistan et de préciser :
« Je
veux l'éducation pour les fils et les filles de tous les terroristes ».
Alors, d’un point
de vue spirituel et théorique, Michel Onfray a raison d’appeler à cesser les
interventions militaires dans les pays musulmans. On ne construit pas des collèges
et des écoles sous les bombes, au contraire ; mais le pouvoir temporel politique a ses propres
obligations et sujétions pratiques, c’est son honneur et sa servitude, qui
demeureront toujours séparées en partie du domaine spirituel ; en
certaines extrémités, il faut bien détruire celui qui s’est désigné comme votre
ennemi avant qu’il ne vous détruise.
Toute réflexion
ne peut ignorer la douleur des victimes et de leurs proches. Pour un
Positiviste, les victimes rejoignent l’immortalité subjective, ensemble des
êtres convergents passés et à venir, et leur mémoire subsistera. Les journaux
qui ont entrepris de publier leurs portraits font bien. Les terroristes, eux,
ne connaîtront ni enfer, ni paradis ; ayant vécu en ennemi de l’humanité,
ils seront oubliés par l’humanité. Une bonne mesure serait de les nommer le moins
possible, sinon par un nom générique – terroristes islamistes. Au surplus, cela
aurait le mérite de ne pas stigmatiser leurs familles.
« L'islam a
été la seconde grande tentative, après le catholicisme, pour fonder l'unité du
genre humain. L'islam fut une tentative à
la fois religieuse, politique, militaire et économique pour constituer l'unité
du genre humain. Sous ce rapport, son action doit apparaître avec un caractère
moins universel que le catholicisme, parce que l'islam serrait de plus près la
réalité et ne se contentait pas de superposer aux situations affectives un plan
d'amélioration morale pour gagner le ciel. Ainsi, il y a dans l'islam tout un
système d'organisation sociale et morale de la propriété. Au lieu de se borner,
comme le catholicisme, à engager plus ou moins vaguement à un emploi plus ou
moins charitable de la richesse, l'islam constitue partout où il prévaut une
organisation de la propriété qui prescrit des devoirs légaux autant que moraux.
Mais l'établissement d'un pareil système suppose nécessairement la conquête ;
car il ne peut s'établir par la persuasion seule. » Pierre Laffitte,
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Commentaires
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.