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vendredi 3 mars 2017

Les génériques : des économies au détriment des patients ?

Infections mortelles sous Docétaxel générique. Sauver les génériques au détriment des patients ?

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) informe, dans un courrier adressé aux professionnels de santé, mercredi 15 février, de la survenue de 6 cas d’entérocolites sur terrain neutropénique, dont 5 ayant conduit au décès, chez des patientes traitées par docétaxel. Tous ces cas concernaient des femmes, âgées de 46 à 73 ans, atteintes d’un cancer du sein.

Au mois d’août 2016, des médecins de l’IGR (Institut Gustave Roussy) contactent l’Agence du médicament. Ils lui signifient que quatre femmes ont fait des chocs septiques après administration du générique du Docétaxel et que, parmi elles, trois sont décédées. Elles avaient entre 45 et 69 ans et,  fait observer un cancérologue, elles étaient «ni âgées ni fragiles», et le pronostic était plutôt favorable Deux autres sont mortes à Rennes. Enfin, si une autre patiente de 59 ans est morte à l’Institut Curie en juin 2016, puis une autre encore en février 2017. A chaque fois, le tableau d’infection grave est le même, totalement inhabituel, sans précédent. et le même médicament est impliqué : non pas le médicament orignal, le Docétaxel de Sanofi, mais le Docétaxel du génériqueur indien Accord.

On notera que les centres anticancéreux impliqués ont immédiatement remplacé le Docetaxel par le Paclitaxel. On notera aussi la longueur de la réaction de l'ANSM, et surtout que même, après le dernier décès, l’ANSM n’a formulé aucune recommandation : « Aucune recommandation n’est formulée à date en l’absence d’éléments complémentaires d’investigation… La suspension du générique d'Accord n'est « pas à l'ordre du jour !!! »,. Il faudra combien de morts ? Mais peut-être l’ANSM a-t-elle pris pour argent comptant la réaction du pharmacien (ir ?)responsable de Accord : « «Tous les médicaments ont des effets indésirables. Il n’y a rien de particulier. Il n’y a aucun problème. Le nombre de décès éventuellement rapporté au global en France est tout à fait dans les normes ». Et l’on ne sait toujours pas si des cas similaires ont été observés à l’étranger.

Et surtout, j’espère que la réaction très amortie de l’ANSM ne s’explique pas principalement par le souci de défendre coûte que coûte, et quelles que soient les conséquences pour les patients, la politique de substitution par les génériques. Car le recours, rendu obligatoire par les organismes payeurs au générique mortel d’Accord du Docétaxel résulte de cette politique et de la recherche forcenée d’économies. Sauver les génériques au détriment des patients ?

Pourquoi sommes-nous tombés si bas ?

Dans un blog récent (Médicaments_ Epidémies de pénuries), j’ai aussi rappelé les ruptures de stocks dans le domaine du médicament, de plus en plus nombreuses et parfois dramatiques ( par exemple, le Caelix, dérivé de la doxorubicine, indispensable pour les patients à risque cardiaque). En 2012, 80% des médecins traitant des cancers ont dû faire face à des pénuries de médicaments indispensables ; ces ruptures ont aussi touché des médicaments importants et très répandus, ainsi le Levothyrox pour les dérèglements de la thyroïde,- l’’agence du médicament a du autoriser en urgence un équivalent italien, mais, ce type de traitement est très sensible à de faibles variations de doses
C’est une situation dangereuse et anormale qui s’installe dans l’indifférence générale. Naguère (Il n’y a guère !)cette situation aurait paru incroyable, inacceptable ;l’industrie pharmaceutique se faisait gloire d’assurer sans défaut la distribution de ses médicaments, en partenariat avec les pharmaciens, et les agences de régulation y veillaient aussi soigneusement.
Mais le médicament, en dépit des services qu’il rend (combien d’opérations d’ulcères stomacaux ?)a toujours été le sacrifié prioritaire des politiques de santé. Il a fallu substituer systématiquement les génériques aux produits princeps (et non un générique n’est pas toujours équivalent au produit princeps !), puis des génériques moins chers que les autres génériques. Alors Les fabrications se font dans des pays en plus en plus exotiques et dans conditions pratiquement de moins en moins contrôlées, à flux tendus. D’où les problèmes de rupture d’approvisionnement et de qualité.

Des patients en meurent ! A quand une vraie politique du médicament !


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