Infections mortelles sous Docétaxel générique.
Sauver les génériques au détriment des patients ?
L’Agence nationale de sécurité du médicament et des
produits de santé (ANSM) informe, dans un courrier adressé aux professionnels
de santé, mercredi 15 février, de la survenue de 6 cas d’entérocolites sur
terrain neutropénique, dont 5 ayant conduit au décès, chez des patientes
traitées par docétaxel. Tous ces cas concernaient des femmes, âgées de 46 à 73
ans, atteintes d’un cancer du sein.
Au mois d’août 2016, des médecins de l’IGR (Institut
Gustave Roussy) contactent l’Agence du médicament. Ils lui signifient que
quatre femmes ont fait des chocs septiques après administration du générique du
Docétaxel et que, parmi elles, trois sont décédées. Elles avaient entre 45 et
69 ans et, fait observer un
cancérologue, elles étaient «ni âgées ni fragiles», et le pronostic était
plutôt favorable Deux autres sont mortes à Rennes. Enfin, si une autre patiente
de 59 ans est morte à l’Institut Curie en juin 2016, puis une autre encore en
février 2017. A chaque fois, le tableau d’infection grave est le même, totalement
inhabituel, sans précédent. et le même médicament est impliqué : non pas
le médicament orignal, le Docétaxel de Sanofi, mais le Docétaxel du génériqueur
indien Accord.
On notera que les centres anticancéreux impliqués ont
immédiatement remplacé le Docetaxel par le Paclitaxel. On notera aussi la longueur
de la réaction de l'ANSM, et surtout que même, après le dernier décès, l’ANSM
n’a formulé aucune recommandation : « Aucune recommandation n’est
formulée à date en l’absence d’éléments complémentaires d’investigation… La
suspension du générique d'Accord n'est « pas à l'ordre du jour !!! »,. Il
faudra combien de morts ? Mais peut-être l’ANSM a-t-elle pris pour argent
comptant la réaction du pharmacien (ir ?)responsable de Accord :
« «Tous les médicaments ont des effets indésirables. Il n’y a rien de
particulier. Il n’y a aucun problème. Le nombre de décès éventuellement
rapporté au global en France est tout à fait dans les normes ». Et l’on ne
sait toujours pas si des cas similaires ont été observés à l’étranger.
Et surtout, j’espère que la réaction très amortie de
l’ANSM ne s’explique pas principalement par le souci de défendre coûte que
coûte, et quelles que soient les conséquences pour les patients, la politique
de substitution par les génériques. Car le recours, rendu obligatoire par les
organismes payeurs au générique mortel d’Accord du Docétaxel résulte de cette
politique et de la recherche forcenée d’économies. Sauver les génériques au
détriment des patients ?
Pourquoi sommes-nous tombés si bas ?
Dans un blog récent (Médicaments_ Epidémies de pénuries),
j’ai aussi rappelé les ruptures de stocks dans le domaine du médicament, de
plus en plus nombreuses et parfois dramatiques ( par exemple, le Caelix, dérivé
de la doxorubicine, indispensable pour les patients à risque cardiaque). En
2012, 80% des médecins traitant des cancers ont dû faire face à des pénuries de
médicaments indispensables ; ces ruptures ont aussi touché des médicaments
importants et très répandus, ainsi le Levothyrox pour les dérèglements de la
thyroïde,- l’’agence du médicament a du autoriser en urgence un équivalent
italien, mais, ce type de traitement est très sensible à de faibles variations
de doses
C’est une situation dangereuse et anormale qui s’installe
dans l’indifférence générale. Naguère (Il n’y a guère !)cette situation
aurait paru incroyable, inacceptable ;l’industrie pharmaceutique se
faisait gloire d’assurer sans défaut la distribution de ses médicaments, en
partenariat avec les pharmaciens, et les agences de régulation y veillaient
aussi soigneusement.
Mais le médicament, en dépit des services qu’il rend
(combien d’opérations d’ulcères stomacaux ?)a toujours été le sacrifié
prioritaire des politiques de santé. Il a fallu substituer systématiquement les
génériques aux produits princeps (et non un générique n’est pas toujours équivalent
au produit princeps !), puis des génériques moins chers que les autres
génériques. Alors Les fabrications se font dans des pays en plus en plus
exotiques et dans conditions pratiquement de moins en moins contrôlées, à flux
tendus. D’où les problèmes de rupture d’approvisionnement et de qualité.
Des patients en meurent ! A quand une vraie
politique du médicament !
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