RTE l’avoue : la PPE est un chiffon de papier
Au détour du Schéma décennal de développement du réseau Edition 2019, RTE
nous annonce une drôle de chose, une surprise. RTE prévoit une très forte augmentation de la production électrique à
2035 (640 TWh) contre 548,6 TWh en 2018, ce qui est tout à fait à l'opposé des
prévisions de consommations faites par
RTE au moment de la PPE ... qui voyait une réduction dans 3 de ses 4
scenarios et un stabilité dans le 4ème (sans parler de l'ADEME et de son scénario 100% renouvelable issu des
délires assez effarants de Negawatt)
Donc on rentre dans le sérieux, et soyons clair, RTE ne croit plus à une
baisse forte de la consommation énergétique, et comme l’électricité, à
condition qu’elle soit produite par du nucléaire et de l’hydraulique ( et un
peu, pourquoi pas d’éolien et de solaire non pilotables) est extrêmement
décarbonée, si l’on veut que la France remplisse ses engagements climatiques,
la conséquence logique est une augmentation forte de la demande électrique…
Et ajouterais-je, un rôle important pour le nouveau nucléaire… Pour une
discussion plus approfondie, cf. les excellent Sauvons le Climat .
Donc,
pour RTE la PPE est ce qu’elle est un chiffon de papier idiot et ses objectifs de sobriété énergétique…une triste
farce.
La sobriété énergétique, on l’a
déjà…mais contrainte ; c’est la précarité énergétique !
Très
intéressant rapport de l’observatoire européen de la précarité énergétique
(EPOV), Addressing Energy Poverty in the
European Union: State of Play and Action.(2019)
Sur
la base de 4 indicateurs distincts, ce rapport fait le constat que :
44,5
millions d’européens n’arrivent pas à chauffer convenablement leur logement,
41,5
millions ont des arriérés sur leur facture d’énergie,
16,3%
des ménages européens ont un taux d’effort énergétique anormalement élevé,
c’est-à-dire 2 fois supérieur à la médiane nationale (2010)
19,2%
des ménages ont déclaré avoir eu trop chaud chez eux durant l’été 2012.
Le
rapport évoque par ailleurs un indicateur qui n’est pas exploité en France : la
précarité énergétique « cachée », c’est-à-dire les ménages dont les dépenses
d’énergie, en valeur absolue, sont inférieures à la moitié de la médiane
nationale (dépenses anormalement faibles)
Donc vous allez parler de sobriété
énergétique à des gens qui ne peuvent consommer autant d’énergie que ce dont
ils auraient besoin ?
En
ce qui concerne la France, il ne faudrait pas déjà oublier l’épisode violent et
inédit des Gilets Jaunes, provoqué par une taxe carbone visant à imposer une sobriété
énergétique à des gens qui ne peuvent la supporter ? Et, non, MM de
Negawatt et écolos bigots, ce n’est pas mauvaise volonté de beaufs accrochés à
leurs 4/4. Les ménages modestes ont moins de capacités pour investir dans des équipements
moins consommateurs, Les ménages modestes sont soumis à davantage de choix
contraints : absence de réseaux de transport en commun, mode de chauffage pour
les locataires, choix d’une localisation en milieu péri-urbain pour accroître
sa surface faute d’une offre équivalente dans un centre-ville etc.
Les Gilets Jaunes ont été la
première révolte de la sobriété énergétique… Bon courage pour la suite.
Ah
oui, mais il y a la rénovation thermique des logements qui va tout régler. Ben
justement, on peut en douter sérieusement…
La rénovation thermique, ça ne
fonctionne pas ! 1) Des scenarios exagérément optimistes .
Il
faut reconnaitre à negaWatt l’effort d’avoir tenté le chiffrage d’un scénario
agressif de réduction énergétique. Dans ce scénario, l’essentiel viendrait de la
sobriété énergétique qui consiste à privilégier les usages les plus utiles, à «
restreindre les plus extravagants et supprimer les plus nuisibles » ; de beaux
débats en perspective pour juger ce qui est utile ou nuisible… Il faudrait
accéder à moins de biens et de services, c’est-à-dire vivre de manière moins
riche.
La
consommation résidentielle et tertiaire diminuerait de 49 % grâce à une
stabilisation du nombre d’habitants par foyer (moins de célibataires ?), un
développement de l’habitat en petit collectif (faudra-t-il interdire de
construire des maisons individuelles ?),
un ralentissement de la croissance des constructions (le nombre de logements
construits chaque année serait divisé par 3, leur surface baisserait de 25%),
l’optimisation des systèmes de chauffage et l’isolation des logements.
Moi
qui pensait justement que la France manquait chroniquement de logements et
qu’il existait une forte demande sociale pour en construire de nouveaux et
faire baisser le prix de l’immobilier !
Mais
penchons-nous sur l’isolation et la rénovation thermique des logements.
Il
faudrait, selon négaWatt, rénover chaque année jusqu’à 780 000 logements pour les amener à une consommation moyenne de 40 kWh/m² par an pour les
besoins du chauffage. En 2012, l’État français avait fixé l’objectif de
rénover 500 000 logements chaque
année, un objectif qualifié dans le journal Le Monde du 4 juin 2014 de « définitivement hors d’atteinte ».
La
loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte adoptée en
2015 prévoyait également, sans préciser d’objectif de consommation, 500 000
rénovations par an, objectif non atteint puisqu’on en rénove moins de 300 000
chaque année.
Le
plan Hulot annoncé au printemps 2018 en prévoit lui aussi 500 000, un objectif
bien inférieur aux 780 000 de négaWatt.
Donc
en chiffre, et malgré toutes les offres et les campagnes, on y est pas. Rénover
thermiquement pour arriver à quelle consommation ? En fait, le but affiché
par negWatt de 40 kWh/m² pour le
chauffage est tout simplement inatteignable.
La réglementation thermique 2012 en vigueur
exige qu’un logement neuf (Bâtiment Basse Consommation) consomme moins de 50
kWh/m² par an, donc plus que 40, mais on sait que la consommation réelle est
souvent supérieure ; les logements
collectifs neufs ont d’ailleurs droit à des dérogations. La consommation
moyenne des logements français est actuellement proche de 200 kWh par m², très
loin de 40…
Rénover
un logement ne signifie pas que sa consommation atteigne un niveau suffisamment
bas : on peut gagner beaucoup sur des logements mal isolés, passer par exemple
de 300 à 150 kWh/m² par an, mais il est très difficile dans l’ancien de
descendre en dessous de 50…
Conclusion
de Bertrand
Cassoret, auteur du livre « Transition énergétique, ces vérités qui dérangent
! » dans un important article du Monde de l’Energie
« Ces
considérations m’amènent à penser que l’objectif de négaWatt est extrêmement
optimiste. Un point crucial, puisque le
chauffage est la première cause de dépense d’énergie des bâtiments, et que
ceux-ci représentent le premier secteur de dépense énergétique français,
devant les transports et l’industrie. Je pense que la consommation d’énergie pour le chauffage atteindra une moyenne de 40
kWh/m² par an quand l’énergie manquera et que les habitants auront froid. »
Le
problème, c’est que ce ne sont pas seulement les chiffres et le scenario de
negaWatt, mais qu’l a été largement repris dans les scenario de la PPE…
Le vrai coût de la rénovation
thermique et de l’isolation : « La rénovation thermique de votre
logement réduira à peine votre facture »
Pour faire bonne
mesure, ajoutons-y un travail universitaire de Gaël Blaise et Matthieu
Glachant, chercheurs à MINES ParisTech – PSL paru dans la Revue de l’Energie
Pour un résumé, voir
Extraits :
« La
rénovation thermique de votre logement réduira à peine votre facture… Une étude
montre que la facture énergétique des ménages est bien moins sensible à la
rénovation que prévu, ce qui interroge l'action publique en la matière. »
« La
rénovation énergétique est l'un des piliers de l'action publique en faveur de
la transition énergétique. Dernière illustration en date, le plan
gouvernemental de rénovation énergétique des bâtiments, qui prévoit la
rénovation de 500.000 logements par an pendant cinq ans. Ou le discours de
politique générale de juin 2019 du Premier ministre qui annonçait une réforme
des aides à la rénovation.
Cette
priorité se manifeste par une multiplication d'instruments: éco-prêt à taux
zéro, crédit d'impôt pour la transition énergétique, certificats d'économies
d'énergie, diagnostic de performance énergétique, et les acronymes
correspondants: éco-PTZ, CITE, CEE, DPE... Mais
la rénovation énergétique des logements réduit-elle vraiment la consommation
d'énergie comme elle le prétend ?..
Nous
venons de publier une étude économétrique reposant sur l'observation des
travaux réellement effectués par des ménages et leurs factures énergétiques
avant et après travaux. Les données proviennent de l'enquête Maîtrise de
l'énergie réalisée par TNS-SOFRES pour l'Ademe…
Le
modèle économétrique…consiste pour l'essentiel à comparer la variation de la
consommation d'énergie d'un ménage réalisant des travaux avec celle des ménages
n'effectuant pas de travaux ou des travaux d'un montant différent. Pour
identifier un effet «toutes choses égales par ailleurs», nous effectuons cette
comparaison pour une même année et entre des ménages vivant dans la même région
(et donc soumis aux mêmes conditions météorologiques, macroéconomiques et
réglementaires), ayant un revenu similaire et une taille de foyer identique,
contrôlant ainsi l'effet de facteurs susceptibles d'affecter la consommation
énergétique.
Notre
estimation aboutit au résultat suivant: 1.000
euros de travaux ne diminuerait en moyenne la facture énergétique que de 8,4
euros par an. Pour un investissement moyen de l'enquête, cela correspond à une
diminution de 2,7% de la facture. La rénovation énergétique est alors loin
d'être rentable si l'on s'en tient aux seules économies d'énergie puisque le
temps de retour correspondant, c'est-à-dire le nombre d'années nécessaires pour
récupérer le coût de l'investissement initial, est de 120 ans.
Ce
résultat apparaît en décalage avec le consensus actuel des expert·es. Notre
estimation est par exemple beaucoup plus faible que celles incluses dans les
fiches des opérations standardisées utilisées pour calculer les économies
d'énergie générant les Certificats d'économie d'énergie (CEE).
À
titre d'illustration, la fiche CEE décrivant la pose d'une fenêtre ou d'une
porte-fenêtre avec vitrage isolant –une opération notoirement moins efficace
que d'autres– prédit un impact deux fois plus élevé que notre estimation de
l'impact de l'investissement moyen.
Notre
travail est une analyse a posteriori sur
des données décrivant des comportements réels. Au contraire, le consensus
d'expert·es a été construit en France à partir de modèles de simulation fondés
sur des hypothèses de comportements. De ce point de vue, notre approche est
plus proche d'une étude américaine réalisée en 2018 qui identifie elle aussi des impacts très faibles –des économies
d'énergie environ 2,5 fois inférieures à celles prédites par le modèle utilisé
par les autorités publiques américaines pour piloter de nombreux programmes
de soutien à la rénovation énergétique.
Comment
alors expliquer la modestie de ces impacts? Une première explication tient au
fait que la première motivation exprimée par les ménages réalisant des travaux
de rénovation énergétique n'est pas l'économie d'énergie, mais le confort. Or
améliorer son confort équivaut en pratique à augmenter la température
intérieure du logement. Après rénovation, rien ne dit que cette augmentation ne
vienne annuler l'impact énergétique des travaux. Plus de confort, moins de déperdition d'énergie mais au total plus de
consommation d'énergie. C'est «l'effet rebond».
Par
ailleurs, la qualité n'est pas toujours au rendez-vous dans un marché de la
rénovation où prévaut une asymétrie
d'information entre des ménages peu au fait des subtilités techniques de
l'opération, et des professionnel·les qui savent que la qualité de leur
prestation ne sera observée par les client·es qu'une fois les travaux
terminés et la facture réglée.
En
tout état de cause, la rénovation
énergétique ne constitue pas un gisement d'opérations peu coûteuses de réduction
de la consommation d'énergie, et par conséquent des émissions de gaz à effet de
serre…
Notre
étude invite donc à cibler le soutien public sur les travaux les plus efficaces
(en particulier, l'isolation des combles, des murs, des planchers).
Enfin
et surtout, ce résultat invite à déplacer la focale de l'action publique des
consommateurs d'énergie vers les fournisseurs de solutions de rénovation
énergétique avec un double objectif: réduire les prix et améliorer la qualité
de la rénovation. D'autant que la multiplication
des aides allouées à leur clientèle n'a pu que dégrader leur performance sur
ces deux dimensions. Des dispositifs comme l'opération en cours «isolation des
combles à 1 euro» rendent ainsi presque accessoires le prix et la qualité des
travaux réalisés. »
Commentaires :
1)
Sous la pression d’un certain nombre de militants de l’écologie fondamentale
très médiatiques qui ne rêvent que décroissance, on a fait croire que la
rénovation thermique permettrait une sobriété heureuse à peu de frais et des
économies pour les citoyens.
Or
une rénovation thermique sérieuse ne consiste pas seulement en un changement
des fenêtres et une vague isolation des combles. Son coût et sa rentabilité ont
été largement sous-estimés ; en fait, 8.3 euros d’économies par ans pour
1000 euros d’investissement et 120 ans pour rentabiliser..
2)
Le seuil de de 40 kWh/m² par an est largement utopique et rien n’indique qu’il
puisse être atteint, surtout pas dans le vieux ( moyenne actuelle 200 kWh par
m²) et même pas dans le neuf. A cette valeur, ça va peler !
Quant
à l’objectif de décarbonation, il ne sera pas atteint. Et surtout pas si l’on
continue à favoriser le chauffage au gaz par rapport au chauffage électrique par
le biais du très technique mais puissant facteur de conversion de l’électricité
en énergie primaire (cf. Brice Lalonde, (https://www.equilibredesenergies.org/14-06-2019-ubu-et-les-gaziers-tribune-de-brice-lalonde)
et https://vivrelarecherche.blogspot.com/2019/09/transition-energetique-et-grandes.html).
3)
Lorsqu’on améliore l’efficacité énergétique d’un ménage en état de précarité
énergétique, eh ben, il veut d’abord enfin avoir chaud ! Cela ne signifie
pas qu’il ne faut pas le faire, cela signifie que les économies d’énergies à en
attendre sont plus faibles que celles anticipées.
4)
Nos concitoyens et surtout les plus faibles (précarité énergétique, personnes
âgées, etc.) sont la proie de très nombreux aigrefins de la rénovation, qui
leur font miroiter des économies sr le chauffage qui n’arriveront jamais, au
surplus avec des travaux de qualité médiocre, et le devoir civique de diminuer
les dégagements de CO2 et gaz à effets de serre, ce qui ne se produit pas non
plus.
Et
ceci avec l’appui du gouvernement et par injection massive de fonds publics.
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