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dimanche 16 mars 2014

Carmat ; et après ?


L'homme qui avait accepté de recevoir le premier cœur artificiel, conçu par la société française Carmat, est décédé le dimanche 2 mars, après avoir survécu  plus de 75 jours. Il s’appelait Claude Dany était âgé de 76 ans et souffrait d’ insuffisance cardiaque terminale ; il savait que sa durée de vie était estimée à un mois et avait en toute confiance choisi de donner ce qu’il lui restait de vie à la science et au progrès, dans un esprit qu’il qualifiait lui-même de pionnier Sa famille a tenu à ce que son anonymat soit levé, et c’est un choix éminemment respectable.

Sa mort est bien entendu une déception et un drame, mais l’implantation s’est bien déroulée et le coeur a bien fonctionné pendant 3 mois. Selon les dernières informations du Pr Carpentier (JDD 16 mars), il se serait produit un arrêt brutal du cœur dû à un court-circuit ;  Carmat doit exactement comprendre l’origine du  problème qui ne s’était apparemment jamais produit dans les études animales, avant de reprendre son programme de greffes, qui sera retardé. C’est néanmoins une aventure exaltante qui commence et qui doit continuer, et surtout un espoir, le seul pour l’avenir, pour les dizaines de milliers de patients rien qu’en France et aux USA, en insuffisance terminale, et qui ne peuvent obtenir de greffons, déjà trop rares et qui le seront encore plus à l’avenir (aux USA, il n’ y a que 2500 cœurs disponibles par ans); la seule technique qui permettra de vivre sans les traitements immunosuppresseurs difficiles à supporter et générateurs de maladies, et aussi qui permettra de ne plus attendre son salut de la mort d’un autre.

 La transplantation cardiaque, des débuts difficiles

 La première transplantation cardiaque humaine a eu lieu le 3 décembre 1967 : l’opération, menée en Afrique du Sud par Christiaan Barnard dura  neuf heures et demie et le patient,  LouisWashkansky,  âgé de 55 ans, survécut  18 jours avant de succomber à une pneumonie massive bilatérale. La première transplantation humaine  aux USA fut menée par Norman Shunway, en 1968 à  Stanford. Son patient, âgé de 54 ans, Mike Kasperak, survécut 14 jours ; Norman Shunway était le véritable pionnier des transplantations cardiaques chez l’animal, mais la législation américaine d’alors, définissant la mort comme arrêt des fonctions cardiaques, interdisait le prélèvement de cœurs à greffer chez l’homme. Le second patient de Barnard, Philip Blaiberg, 58 ans, survivra neuf mois, deux autres transplantés vivront 12 et 23 mois. Après un enthousiasme initial, les opérations cardiaques s’arrêtèrent quasiment, en raison du taux de mortalité lié au rejet des greffons : en 1971, 146 des 170 premiers  transplantés étaient décédés : l’opération, saluée comme miraculeuse, tournait au désastre, et les chirurgiens l’abandonnaient. Elle ne fut quasiment plus pratiquée pendant dix ans.

Un miracle, mais l’un de ces miracles qui ne favorisent que les esprits bien préparés comme le disait Pasteur, se produisit alors : la découverte en 1972 dans le sol norvégien, par des chimistes de Sandoz (lesquels étaient encouragés à prélever des échantillons lors de leurs vacances) d’un microorganisme produisant un immunosuppresseur puissant, la cyclosporine. Les rejets de greffes pourront alors être évités, et la  transplantation cardiaque se redéveloppera avec le succès qu’on lui connait de nos jours. (il faudra tout de même attendre 1983 pour que la cyclosporine soit mise sur le marché, après une  première utilisation à titre expérimental en 1979 pour des greffes de reins, du pancréas ou de foie)

 Il faudra sans doute, et c’est un espoir raisonnable, beaucoup moins de temps et de tentatives au cœur artificiel de Carmat pour connaître le succès ; et répondre aux espoirs des centaines de milliers de patients qui ne peuvent  obtenir de greffons, qui ne dépendront plus de la mort d’un autre pour leur survie et ne subiront plus  les inconvénients des traitements immunosuppresseurs.
 
 

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