Un des meilleurs moyens de rendre un individu ou une
organisation complètement fou ou folle est de multiplier les injonctions
contradictoires. C’est ce qui se passe avec EDF, sommé de fermer Fessenheim
mais sans que ça coûte rien, sommé de diminuer la part du nucléaire mais de devenir
un leader des nouveaux réacteurs EPR, sommé de jouer le jeu de la concurrence
tout en subventionnant ses concurrents, sommé de prendre un risque considérable,
mais peut-être justifié, avec le projet Hinkley Point d’EPR anglais, mais sans
pouvoir le financer librement, sommé de privatiser ses barrages hydrauliques
tout en les gardant dans le service public etc., etc.
Pillage
du service public
Bon témoignage de
cette pression qui monte, le communiqué de presse aseez énerve de Fprce
Ouvrière énergie de ce début novembre :
« Prenez une ministre de l’écologie qui veut
soumettre les centrales électriques au charbon à une taxe CO2, favorisant ainsi
les importations allemandes d’électricité, beaucoup plus émettrices de dioxyde
de carbone compte tenu de la part importante de production pour partie au
lignite, qui elles ne sont pas taxées,
Incorporez de la
langue de bois ministérielle en vous inquiétant de l’approvisionnement hivernal
d’Electricité suite à la fermeture temporaire de plusieurs centrales nucléaires
et à celle dogmatique de Fessenheim,
Ajoutez en même
temps la loi NOME de 2010, qui oblige d’EDF à vendre un quart de sa production
nucléaire à ses concurrents ; son système spéculatif, l’ARENH, qui permet aux
concurrents d’EDF d’acheter le MWh à 42€ et de le revendre à 80€ sans que cela
soit lié à leurs besoins ou contraintes d’approvisionnement,
Mélangez avec une
bonne poignée de sourde oreille, en refusant de rencontrer FO pour discuter des
dangers économiques, sociaux et sociétaux dus aux restructurations des groupes
EDF et ENGIE, ainsi qu’à la fragilisation du service public républicain du
secteur de l’énergie.
Grâce à cette
recette subtile, Ségolène vient de réaliser le pillage du service public de
qualité connu et reconnu par les usagers de l’électricité. »
La
loi Nome
Rappelons
l’absurdité que constitue la loi Nome, qui a déjà fait l’objet d’un commentaire
sur ce blog. La loi NOME (nouvelle organisation du marché de l’électricité)
résulte d’une directive européenne de 2009. Par la volonté idéologique de créer
un marché concurrentiel artificiel dans des conditions impossibles (un bien non
stockable, avec une forte intensité de capital fixe), l’investissement réalisé
par le contribuable français dans le parc nucléaire est indûment confisqué par
Direct Energie et autres Poweo, le prix payé par le consommateur est indûment
relevé, et, plus grave encore, les capacités d’investissement en recherche et
en production d’EDF sont gravement obérées et ne lui permettront plus de
préparer le nucléaire de l’avenir. En effet, EDF est contraint par la loi NOME
à vendre à ses concurrents l’électricité
à prix bradé et bien en-dessous du coût de production ( 42 euros le MWh – pas
gênés, les concurrents en question réclamaient 32 euros), et se voit donc
contraint d’augmenter ses propres tarifs pour le public – et ceci d’autant plus
que ses concurrents remporteront des parts de marché , ô magie de la
concurrence !). Quant à l’Allemagne, autre grand pays visé par l’absurde directive
européenne… elle s’est simplement assise dessus en jouant de sa constitution
fédérale et du fait que son marché de l’électricité comptait déjà plusieurs
acteurs…un seul par état !
C’était
d’ailleurs l’avis d’Emmanuel Macron lors de son audition en 2014 devant la Commission des
affaires économiques de l’Assemblé Nationale : « la dérégulation du
marché date notamment de la loi NOME de 2010. On a fait des erreurs
collectivement ces dernières années,
on a pris des décisions pour mettre un plafond avec l’ARENH et on a empêché EDF
de profiter des prix de marché élevés, mais il n’y a pas de prix plancher et donc
EDF n’est pas protégée des effets des prix qui baissent. ». On ne sache
pas qu’il ait fait grand-chose.
Et
EDF, cet ex-fleuron technologique et scientifique de la France, ce service public
efficace et peu cher, qui, en particulier, grâce à l’effort nucléaire, a assuré
aux Français une électricité abondante et bon marché s’enfonce de plus en plus
dans la crise. Une crise due à l’idéologie perverse de la commission de Bruxelles et à la pusillanimité
des politiques français.
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