Un impôt spoliateur , contre la nécessaire politique du logement
Dans un précédent blog (Donald
Trump et Piketty complices, ou l’écrasement des classes moyennes engendre des
monstres politiques), j’évoquai à quel point les analyses de M. Piketty mais
les solutions qu’il propose désastreuse. Revenons plus particulièrement sur
cette idée baroque d’un impôt frappant les propriétaires immobiliers sur les loyers fictifs qu’ils pourraient toucher
de leur maison ou appartement ; mesure d’ailleurs également préconisée par
le Conseil d’analyse économique (CAE), organisme rattaché à Matignon… Même si
le gouvernement, en particulier le ministre des finances, M. Sapin ont
rapidement et fermement évacué l’idée, le danger n’est pas mince, à force de
les évoquer fréquemment, de voir ces projets se réaliser.
Remarquons que les propriétaires
sont déjà imposés sur leurs biens par la taxe d’habitation (laquelle tant à
augmenter beaucoup et arbitrairement) ; s’ils décident de vendre leur logement,
ils seront imposés sur les plus-values. Pour partie, ce nouvel impôt serait bien
une forme d’expropriation, car il fera baisser brutalement et significativement
le prix des biens immobiliers ; il supprime toute incitation à la
propriété, sanctionnant les Français qui font le choix d’investir dans ce qui
constitue d’abord leur épargne de précaution favorite, les classes moyennes (62
% des Français se déclarent propriétaires, parmi lesquels 36 % n’ont plus de
prêt à rembourser et 26 % sont en cours d’accession à la propriété). Elle est
confiscatoire, car enfin la propriété
est fille du travail, et a donc déjà fait l’objet d’un prélèvement ; fille
de son propre travail ou du travail des aïeux.
Et où s'arrêter dans le raisonnement ? Par
exemple, pourquoi ne pas taxer demain l'avantage lié à la possession d'une
voiture, à la mesure de ce qu'il faut débourser pour en louer une ?
Et surtout, la France manque de
logements, comme en témoigne le nombre ahurissant des mal logés ou des pas
logés du tout ; comme en témoigne aussi le poids du logement en France dans
les dépenses contraintes en France, dépense sans cesse croissante (passée de
14% à 26% en France de 1998 à 2005 et qui n’a cessé de s’accroître depuis) et
dépense qui frappe encore plus les familles les moins aisées (48% de dépenses
contraintes pour les 10% les moins riches contre 27% pour les 10% les plus
riches). C’est dire que la priorité c’est de construite, construire, construire
ou rénover… Et pour construire, il faut encourager la propriété immobilière. Le
moins qu’on puisse dire, c’est qu’avec la loi Allur qui bloque et limite les
loyers va en sens inverse de ce qu’il faudrait, et que l’impôt sur les loyers
fictifs de M. Piketty et d’autres
aggraverait encore considérablement la situation.
Vive la propriété immobilière- la vision positiviste
On aperçoit dans une certaine
gauche, qui semble perdre pied, une multiplication d’attaques récurrentes et de
plus en plus radicales contre la propriété et l’héritage. On en connait le
terme, soit le retour improbable des pires totalitarismes communistes, soit
plus probablement ceci : l’écrasement
des classes moyennes engendre des monstres politiques. Rappelons tout de
même que la Déclaration des droits de
l'homme et du citoyen de 1789 considère la propriété comme un droit naturel et inaliénable de l'Homme. Il n’ y a eu vraiment que les formes communistes
les plus extrémistes pour remettre ainsi radicalement en cause ces deux piliers
(propriété et héritage) de la société ; et, pour mémoire, la plupart des
socialistes et même les libertaires comme Proudhon ont fini par affirmer « la
propriété c’est la liberté », la vraie protection du citoyen.
Si une gauche en déshérence recherche
une inspiration intellectuelle, peut-être devrait-elle se tourner du côté du
positivisme. Pour Auguste Comte, la propriété individuelle est un droit
nécessaire, sans lequel il n’est pas de progrès possible, mais aussi un droit
collectif car nécessairement garanti par la société. Le droit de propriété est
donc certainement un droit d’user, mais pas d’abuser, contrairement aux
conceptions libérales. Citations :
« Le positivisme voit dans
la propriété une indispensable fonction sociale, destinée à former et à
administrer les capitaux par lesquels chaque génération prépare les travaux de
la suivante. Sagement conçue, cette appréciation normale ennoblit sa possession,
sans restreindre sa juste liberté, et même en la faisant mieux respecter. (Système de Politique Positive, t.1, p.
156)
« On peut même faire aux communistes un reproche plus grave, sur
l’insuffisance directe de leur instinct social. Car, cette sociabilité dont ils
sont si fiers, se borne à sentir seulement la solidarité actuelle, sans aller
jusqu’à la continuité historique, qui constitue pourtant le principal caractère
de l’humanité… Ils apprécieront alors l’importance de l’hérédité, comme mode
naturel selon lequel chaque génération transmet à la suivante les travaux déjà
accomplis et les moyens de les perfectionner ». (Système de Politique Positive,
t.1, Société Positiviste, Paris, 1929, p. 160).
« Aucune propriété ne pouvant
être créée, ni même transmise par son seul possesseur, sans une indispensable
coopération publique, à la fois spéciale et générale, son exercice ne doit
jamais être purement individuel. Toujours et partout, la communauté y est plus
ou moins intervenue, pour le subordonner aux besoins sociaux. » (Système de Politique Positive, t.1,
Société Positiviste, Paris, 1929, p. 155).
Ainsi entre communisme et
libéralisme se définit un socialisme réformiste appuyé sur une doctrine
certaine, précise, organisatrice, relative (qui renonce aux absolus théologiques
ou métaphysiques)
Cf. Le socialisme
d'Auguste Comte : aimer, penser, agir au XXIe siècle, Eric Sartori, L'harmattan
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