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vendredi 25 mars 2022

La biomasse agricole : quelles ressources pour quel potentiel énergétique ? Etude de France Stratégie

 Note de synthèse :https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-ns_-_biomasse_agricole_-_quelles_ressources_pour_quel_potentiel_-_29-07-21.pdf

Etude complète : https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-dt_-_biomasse_agricole_-_quelles_ressources_pour_quel_potentiel_energetique_-_29-07-21.pdf

But de l’étude : Fondé sur l’analyse des travaux et données statistiques actuellement disponibles, ce travail doit permettre d’évaluer la compatibilité de ces gisements avec les orientations de développement de la biomasse-énergie prévues par la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC). Enfin, pour mieux évaluer le potentiel d’utilisation de la biomasse sur le long terme, un essai de projection est réalisé à l’aide de scénarios de mobilisation à l’horizon 2050.

L’essentiel : les prédictions de la SNBC et de la PPE sont gravement dans les choux !

La biomasse agricole actuellement mobilisée pour des usages énergétiques, tels que la combustion, la méthanisation ou l’usage de biocarburants, représente près de 40 térawattheures (TWh). En tenant compte des disponibilités additionnelles des gisements existants, comme les effluents d’élevage, les résidus de cultures ou les surplus d’herbes, le potentiel énergétique maximal identifié de la biomasse agricole pourrait, en théorie, atteindre 120 TWh. Or, la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) estime un potentiel de production de biomasse agricole proche de 250 TWh. Cet objectif ne pourrait donc pas être atteint en considérant uniquement ces disponibilités supplémentaires.

Pour accroître davantage la biomasse énergétique, il serait nécessaire d’augmenter significativement les prélèvements en résidus de cultures, et de recourir massivement à certaines cultures dédiées. Cependant, le potentiel de ces deux derniers leviers reste très incertain, du fait de leur faisabilité — impliquant, entre autres, une redistribution majeure des terres agricoles — et des impacts associés, tels que les changements d’aff­ectation des sols, qui s’ajoutent à la forte variabilité de la disponibilité de certains résidus ainsi qu’aux besoins prioritaires (alimentation, agronomie, matériaux).

La SAU (superficie agricole utilisée) consacrée à la production de biomasse non alimentaire est estimée actuellement à environ 1,7 Mha (soit 6 % de la SAU totale). Pour couvrir les besoins en biomasse projetés à long terme, il sera nécessaire de recourir massivement aux résidus de cultures, aux surplus d’herbes et aux cultures intermédiaires ne nécessitant pas de nouvelles surfaces spécifiques et récoltables sur un minimum de 15 Mha (plus de 50 % de la SAU estimée en 2050).


Nos constats montrent que la mobilisation de la biomasse agricole dans le but d’atteindre la neutralité carbone est possible, mais qu’elle ne l’est pas aux niveaux fixés par la SNBC

NB : Le constat avait été fait il y a plus de 2 ans par le Collectif National Vigilance Méthanisation : « Une PPE à 10 %, la moyenne basse de l’ADEME, c’est l’équivalent de la surface totale de 6 départements français moyens, qui servirait seulement à remplir le ventre des méthaniseurs »

https://vivrelarecherche.blogspot.com/2020/04/ravages-dans-nos-campagnes-apres-les.html

Autre contraintes et contradictions certaines avec d’autres objectifs

L’exploitation industrielle de la biomasse est sur certains points en contradiction avec l’agroécologie

Certains déterminants externes peuvent avoir des e­ffets sur la disponibilité de biomasse sur le long terme, comme le changement climatique, la baisse du cheptel ou le développement de l’agroécologie, moins productive pour une culture donnée que l’agriculture conventionnelle et impliquant un retour de matière organique dans les sols plus important. Un changement de pratiques agricoles sur le long terme pourrait donc potentiellement influer sur le niveau de disponibilité de certaines ressources et l’équivalent énergétique estimé.

Par ailleurs, cette disponibilité potentielle ne serait totalement effective qu’en anticipant de possibles avancées techniques et un développement accru des filières de valorisation, la majorité des potentiels étant estimée atteinte d’ici à 2040. L’exemple le plus représentatif de cet aspect temporel réside dans la mobilisation effective des effluents d’élevage, gisement difficilement maîtrisable, ne pouvant être atteinte que sur le long terme (à l’horizon 2050)

Plus précisément :

Cultures pérennes et alimentation : Un déploiement à plus grande échelle des cultures pérennes à des fins énergétiques peut cependant soulever des interrogations sur la concurrence avec l’usage alimentaire des sols agricoles. De plus, es monocultures dédiées à la production de biomasse énergie affectent également la biodiversité

Cultures annuelles et compétition des usages : Les résidus de cultures annuelles sont une ressource pouvant potentiellement faire l’objet de plusieurs usages (retours au sol par broyage et enfouissement, alimentation animale, paillage, construction, combustion, méthanisation ou encore biocarburants)….la ressource durablement disponible risque d’être limitée et inférieure aux disponibilités estimées

Effluents d’élevage et problèmes des digestats : les effluents d’élevage, cultures intermédiaires et autres couverts végétaux présentent l’avantage de disposer de gisements potentiellement disponibles sur l’ensemble du territoire. Les impacts d’un retour des ressources prélevées, direct ou indirect sous forme de digestat sur la qualité biologique du sol et les pollutions di­ffuses à long terme restent encore à estimer. Une attention particulière s’impose quant à la présence éventuelle de métaux lourds (chrome, mercure, zinc, cadmium, etc.) à des niveaux critiques dans certains types de digestats. Ces contaminants sont à risque pour la santé humaine, animale ou végétale (pollution diffuse dans les sols et l’eau)

Effet d’un développement des pratiques agroécologiques :  Dans un système agricole (scenario B) où les pratiques agroécologiques ont été développées à plus grande échelle (allongement des rotations, développement des légumineuses, cultures associées, couverts, limitation du travail au sol, développement de l’agroforesterie, etc.) et où l’agriculture biologique représente au moins 60 % de la surface agricole totale cultivée, le recul de l’agriculture conventionnelle se caractérise principalement par une baisse des rendements, en considérant une baisse moyenne de 20 % entre agriculture biologique et conventionnelle.




Le problème des puits de carbone : Selon la SNBC, d’ici à 2050, les puits de carbone naturels devront être multipliés par 2 pour atteindre environ 65 Mt CO2eq.

Les technologies et procédés industriels de captage, de stockage et de réutilisation du carbone représenteraient une absorption de 15 Mt CO2eq en 2050. Le puits total, estimé à 80 Mt CO2eq, repose donc en grande partie sur le stockage naturel du carbone, dans les forêts (35 Mt CO2eq), les produits du bois (20 Mt CO2eq) et les autres terres (10 Mt CO2eq).

Si on exclut la forêt guyanaise, les écosystèmes agricoles et forestiers représentant environ 75 % du territoire français stockeraient actuellement 4 à 5 Gt de carbone (soit 15 à 18 Gt de CO2), dont près d’un tiers dans la biomasse (principalement par le biais des arbres) et plus de deux tiers dans les sols au sens strict. Ce chiffre peut atteindre 25 Gt de CO2 avec les quelque 8 millions d’hectares de la forêt guyanaise.

Ce stockage peut être accru et préservé à condition de s’appuyer sur plusieurs pratiques agricoles (développement de couvertures végétales, agroforesterie, prairies temporaires, plantation de haies, réutilisation du compost et des déchets organiques, etc.),

NB : on aura droit au glyphosate pour les couvertures végétales ? Parce que sinon…

 La méthanisation industrielle gagne par KO contre la méthanisation à la ferme: les projets de méthanisation mis en place par de petites exploitations agricoles d’élevages tendent ainsi à présenter une rentabilité limitée, voire nulle ; le tout dans un contexte de hausse croissante de la place des acteurs non agricoles dans la filière, du fait des contraintes techniques propres aux distributeurs de gaz et tendant à favoriser de grands projets, ce qui limite la capacité des agriculteurs à tirer un revenu satisfaisant de cette activité et aller à l’encontre des intérêts des installations agricoles plus modestes.

D’un point de vue social, l’acceptation de nouvelles voies et unités de valorisation représente aussi un aspect à ne pas négliger. La vision de territoires maillés de méthaniseurs peut se heurter à de nombreuses oppositions liées aux nuisances olfactives et aux impacts environnementaux.

Et surtout reste le problème de la forêt , pas si renouvelable que ça : la durée nécessaire pour obtenir un bilan carbone positif en cas d’augmentation des prélèvements, couramment appelée « dette carbone », peut varier entre dix et cent ans. 

Autres données :






Et on rappellera les épisodes précédents sur les méthaniseurs: Des installations dangereuses et non surveillées par l’administration ; des nuisances importantes en terme d’odeurs, de pollution, de rondes infernales de camion ; le problème des digestats et de la pollution des sols et des eaux ; la diminution de la biodiversité ; les fuites de méthanes qui peuvent rendre complètement illusoires le bénéfice climatique, voir l’inverser …

https://vivrelarecherche.blogspot.com/2020/04/apres-les-margoulins-de-leolien-les_19.html

https://vivrelarecherche.blogspot.com/2020/04/ravages-dans-nos-campagnes-apres-les.html

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